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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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The Hulk (Hulk)
USA / 2003
02.07.03
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EN VERT ET CONTRE SOI
"- Tu peux le leur communiquer, on a découvert comment faire exploser les grenouilles…"
C’est désormais un fait avéré, le public ne souhaite plus se contenter de vulgaires héros, il réclame des super héros auxquels la technologie digitale confère des pouvoirs infinis. L’engouement générant pratiquement immanquablement des super recettes, les studios sont donc atteints d’une haute frénésie et se précipitent pour livrer, avec une régularité conditionnée par les bilans de comptes destinés à l’actionnariat, une nouvelle transposition cinématographique des exploits des personnages puisés dans le vivier surpeuplé des comics américains.
Film de studio destiné à remplir les caisses, les règles de fabrication restent strictes et les paramètres opportunistes caressant une audience la plus large possible dictent bien évidemment l’ensemble de la démarche artistique de l’opération. Totalement dévoués à la logique pragmatique du succès, les executives ont pourtant digéré le déjà conséquent historique de l’exploitation du vengeur masqué. La standardisation a ses limites et il ne suffit pas de recruter le premier fabriquant d’images venu, doté d’une bonne maîtrise technique, pour créer la magie, en tout cas assurer au projet une véritable viabilité prestigieuse. Dardevil n’a pas convaincu et ce n’est pas un hasard. Aussi pour The Hulk, le choix d’un auteur tel que Ang Lee et qui repose principalement sur sa capacité à avoir séparé de façon rentable divertissement et débilité avec Tigre & Dragon, n’est qu’une tentative pour dupliquer l’alchimie entretenue par Tim Burton (Batman), Brian Synger (X-Men) et éventuellement Sam Raimi (Spider-man). Les autres ne méritant pas de passer à la postérité pour leurs exactions… Soucieux de se distinguer du lot, Ang Lee aura donc pour objectif d’aborder la tragédie traumatique post adolescente de l’œuvre de Stan Lee (aucun lien de parenté avec Ang !!) avec la possibilité d’y inscrire sa propre griffe. Le contrat de Universal induira simplement qu’il faudra qu’en parallèle le quota de scènes spectaculaires soit rempli pour respecter l’étiquette estivale de machine à sous exhibitionniste. De toute évidence le cinéaste s’est acquitté des deux, mais le résultat de son engagement semble avoir échappé à ses prévisions ainsi qu’à celles de ses producteurs.
Car The Hulk, tout comme son personnage titre changeant suivant ses humeurs et ses gènes est un film totalement schizophrène. Mais ce choix à première vue logique est loin d’aboutir à une qualité au final. Au travers de son très long métrage pour de l’entertainment (pratiquement 2h30), Ang Lee prend tout son temps pour esquisser ses protagonistes au crayonné avant de passer à l’encrage et livrer les scènes d’action promises contre l’achat du ticket. Un peu gonflé, on n’y perd pas au change. Les acteurs sont formidablement dirigés et donnent une vraie épaisseur à un récit complexe qui ne dévoile ses secrets qu’au moment opportun. Vaste quête identitaire post âge ingrat, l’investigation dépasse les repères de filiation parentale pour plonger ses connections au fin fond de l’ADN. Car ce qui forge un homme, un esprit, c’est autant son histoire que ses attributs charnels, dont la science s’emploie actuellement à décoder tous les mystères. La symbolique n’est pas pesante, le réalisateur impose une narration résolument tournée vers la source d’inspiration papier, variant les transitions de plans par des habillages graphiques et scindant l’écran « à la De Palma » pour donner illusion des cases qui s’animent. Le procédé dynamise la dramaturgie sans la désamorcer. Les effets de style parviennent à composer une atmosphère irréelle dont le point culminant reste les scènes oniriques qui constituent les souvenirs épars de Banner.
La fantaisie a ses limites malheureusement, l’exigence de la commande aura imposé à Ang Lee le tour de force de trop : l’abominable créature verte. Trahi par la technologie numérique, les efforts dépensés pour hisser le film au dessus du produit de consommation courante seront en effet réduits en cendres dés l’apparition de Hulk et le début de ses premières crises de nerfs. Le film glisse alors vers d’autres horizons, plus proches du dessin animé dans son outrance, propre aux comics certes, mais dont l’exubérance conduit à une rupture stylistique plus qu’elle ne procure un prolongement à la réalité mise en place initialement. Jamais le colosse d’émeraude ne passera pour autre chose qu’un toon, qui tel Roger Rabbit se serait égaré dans le monde des humains. Faute de goût (ses couleurs criardes qui aident à le repérer lorsqu’il tend à s’éloigner dans le champ) son animation inexpressive qui ne fait passer aucune émotion acceptable provoquera même l’hilarité (il se déplace comme "Benny Hill" au mieux de sa forme) là où les frissons et les larmes étaient espérées. Grotesque, il ne serait pas exagéré de parler à ce niveau d’imperfectibilité de catastrophe artistique, mais surtout d’une profonde erreur de marketing. En effet le jeune public ne sera pas franchement exalté par l’essentiel de la trame feutrée de l’histoire et les adultes resteront consternés devant la surenchère de performances naïves et ridicules lors des pics de haute activité de la fresque.
A moins que pour les cravatés d’Hollywood à l’esprit torturé par des statistiques fallacieuses, ce gros sandwich mal accommodé (jeux d’arcade de console nippone + drame shakespearien) doive prétendre répondre aux attentes de grands enfants, nouvelle race mutante et consumériste de spectateurs, qui biberonnée au zapping accumulateur, ne se formalise pas des compressions de genres en absence totale de toute homogénéité censée exprimer un minimum de bon goût. petsss
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