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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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The Human Stain (La couleur du mensonge)
USA / 2003
29.10.03
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BLANC COMME NEIGE ?
"- C’est tenu par deux lesbiennes ; je trais les vaches et je suis logée."
Il va être difficile de parler de ce film sans en révéler le secret. Disons, donc, qu’Anthony Hopkins, aussi excellent soit-il - et il l’est - n’apparaît pas être le choix le plus judicieux pour incarner cet homme dont l’imposture est avant tout physique, visible. Cela rend le film peu crédible, au final. Et c’est regrettable. Un acteur plus approprié pour le rôle aurait permis de ne pas douter du projet global qui se résume ainsi : "Tu es blanc comme neige et tu penses comme un esclave."
Dans la veine des adaptations cinématographiques de best sellers littéraires controversés, Benton, cinéaste légèrement surévalué et souvent très appliqué, essaie de déstructurer en vain une histoire qui aurait mérité des contours plus précis. Cet effet de style, banal, peu habile mélange de flash backs et de multiples points de vues, nous empêche d’être emballé par cette tragédie où l’émotion est vite expédiée. En déconstruisant son récit, le réalisateur a privilégié les morceaux de vie à la vie d’un homme, se limitant, ainsi, à des moments forts en oubliant son lent déclin. Jamais nous ne percevons l’impact de son mensonge, à quel point il étouffe sa vie. Quand il l’avoue - tout du moins nous devinons qu’il l’avoue - Benton nous coupe le son et fond l’image au noir.
C’est dire à quel point ce mensonge n’a pas de couleur. Jamais on ne sent la haine qui dévore Hopkins. Tout est trop lisse, ce qui est un comble.
Nous nous concentrons alors sur les acteurs, sur des séquences. Certaines touchent, d’autres indiffèrent. Le personnage d’Ed Harris semble être une pièce rapportée de luxe. Gary Sinise a peu de nuances alors que son personnage prend une ampleur réelle au fur et à mesure de l’histoire. Film gigogne, où l’histoire d’un homme sert d’inspiration à l’un des personnages qui en fera un roman ultérieurement adapté en film, que nous voyons. Ici les propos sont qualifiés de cyniques aux USA, les tabous (sexuels et raciaux) sont jugés immoraux dans une société conservatrice. Hélas rien de tout cela ne nous choque et n’atteint son objectif. Le film échoue avec cette vérité individuelle pas assez intéressante pour nous remuer et cette histoire d’amour trop compatissante pour nous bousculer. Finalement, les quelques vérités énoncées au début par le Professeur nous semblent bien plus justes et importantes, de même les quelques confidences entre amants sont mieux amenées qu’elles ne sont exprimées.
Alors ?
Malgré tout ce chaos presque invraisemblable, les acteurs parviennent à rester plausibles. Dans cette persécution permanente (et mal tournée), Hopkins nous offre son savoir-faire impeccable qui rend son personnage attachant, humain. Kidman, désespérée, est immédiatement dans son rôle, ingrat (loin d’être dans la lumière). Avec un sujet aussi fort, on pourrait regretter que Benton ne soit pas plus incisif et inventif. La critique de la société (où l’élite alphabète est sanctionnée au profit de médiocres cupides) était une porte ouverte à un regard acerbe sur l’apogée de l’hypocrisie américaine. Cette désillusion est exhibée lourdement et parfois avec moult pathos. Tout comme la menace est peu subtilement dévoilée. Trop de pistes sont esquissées et rarement exploitées. Il reste entre les deux cet amour de deux êtres qui ont tout perdu. Il retrouve la flamme et elle déterre les cendres. Il aurait juste fallu un peu de Viagra au réalisateur. vincy
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