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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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L.I.E. Long Island Expressway
USA / 2002
15.01.03
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(RE)PULSIONS
"- Baiser sa soeur, c’est pas politiquement correct."
Le film de Michael Cuesta est une réussite ; il filme un univers, celui des banlieues américaines d’apparence proprette, en donnant à voir tout ce que ces apparences recèlent comme non-dits, ennui, terreur, frustrations et perversions. La critique est assez acerbe, mais plus que la dénonciation, c’est le mystère qui semble intéresser le réalisateur, et il y a comme un étonnement devant tout ce que peut masquer le sage alignement des pavillons et les codes sociaux de bonne conduite. Long Island est filmé comme un lieu étrange, certes ouvert et aéré, mais en même temps étrangement clos. C’est un espace autonome, d’où la possibilité de fuite (l’autoroute) est en même temps une possibilité de mort.
L’existence de Howie, cet adolescent qui vient de perdre sa mère dans un accident de voiture, semble se heurter aux frontières de cet espace : ne pouvant s’échapper au-dehors, il va visiter les interstices troubles de cet univers, au risque de s’y perdre.
La rencontre avec Big John marque le point d’orgue de ces déambulations dangereuses. Ancien vétéran du Viet Nam, d’apparence affable et sympathique, Big John est un homme aimé et respecté ; c’est en même temps le pire des monstres, un pédophile tyrannique qui, devant Howie, s’auto-proclame "meilleur suceur de tout l’Ouest". Toutes les séquences entre l’adolescent et le quinquagénaire suscitent une angoisse très savamment réglée par le réalisateur. Le film prend des allures de numéro d’équilibriste tant il parvient, aussi bien dans le scénario, la réalisation, que la direction d’acteurs, à suggérer conjointement le calme et le danger, la peur et la honte. Les regards, concupiscents ou paternalistes, que Big John adresse à l’adolescent, la légère plongée lorsqu’il rejoint Howie sur la plage, tout cela instaure, avec une remarquable économie de moyens, une atmosphère étouffante, malsaine, où toujours finit par poindre, chez le spectateur, la crainte du danger, la crainte de l’abus. Tout le film est ainsi construit sur le fil du rasoir, sur l’équilibre instable et dangereux qui finit par s’établir entre Howie et Big John. C’est bien ce que semble indiquer la reprise du plan où l’on voit Howie marcher en équilibre sur la rambarde d’un pont d’autoroute. Howie est un adolescent perdu entre la mort maternelle et la distance paternelle ; un enfant qui pleure sa mère et un adolescent troublé par des désirs homosexuels ; un fils de nantis, cultivé et sensible, qui veut traîner avec les petits voyous. Il marche bien sur un fil ténu et dangereux lorsqu’il trouve refuge chez Big John, celui-là même qui apparaît comme l’être le plus dangereux qui soit.
Remarquablement interprété par Brian Cox, ce personnage n’en est pas moins complexe, et la métaphore de l’équilibre précaire pourrait également s’appliquer à son existence : entre ses pulsions sexuelles et l’allure respectable qu’il affiche, Big John semble toujours enjamber un abîme.
benjamin
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