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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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The Majestic
USA / 2001
08.05.02
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CURIEUX PARADOXE
"- Hem jesti?
- Non, The Majestic, il y a des lettres qui manquent..."
Le réalisateur et le scénariste affirment s'être inspirés de l'univers de Franck Capra dans la description de la petite ville qui sert de décor principal au film. Mais on est loin de retrouver le mélange de légèreté, de gravité, d'humour (parfois grinçant) et d'onirisme d'un conte comme La Vie est Belle : The Majestic apparaît comme un film d'abord bien long, et surtout éprouvant à force d'enchaîner tous les clichés hélas trop bien connus du cinéma américain. Entre l'hymne au drapeau, la référence à la petite ville unie et " proprette ", l'appel constant aux bons sentiments, aux figures héroïques et à la démagogie, il est difficile de ne pas ronger son frein pendant la projection.
Le film n'est pourtant pas complètement dénué d'intérêt. À travers les thèmes abordés d'abord : le MacCarthysme et la Chasse aux Sorcières, le cinéma et l'amour du cinéma, et enfin la liberté et la responsabilité. La structure du film est à cet égard très dialectique : Peter Appleton va apprendre à devenir libre et responsable ; il est en effet comme éduqué par son passage à travers l'identité d'un autre, Luke Trimble, puisque le petit scénariste prêt à accepter tous les compromis va se rebeller et affirmer son identité. Certes, cette structure dialectique est loin d'être originale et légère : l'insistance démonstrative du scénario est plus que laborieuse. Il faut néanmoins bien reconnaître qu'elle permet au film d'aboutir à une séquence assez réjouissante au cours de laquelle le héros qu'est devenu Peter Appleton envoie balader les dirigeants du studio pour lequel il travaille. Cette séquence répète formellement celle qui ouvrait le film : elle consiste en un long plan fixe en longue focale sur le visage de Peter, cependant qu'on entend -off- les dirigeants du studio égrener très sérieusement des propositions toutes plus niaises les unes que les autres en vue de " parfaire " le scénario de Peter. Mais alors que Peter acceptait tête basse les compromis au début du film, il affirme à la fin son indépendance avec un mépris souverain et franchement amusant.
Ce geste de " résistance " à l'encontre de la niaiserie des studios hollywoodiens est d'autant plus amusant qu'il prend place dans un film qui n'hésite pas par ailleurs à enchaîner des clichés dignes des pires films hollywoodiens.
C'est ce qui fait la curiosité du film, et ce que l'on vient de dire concernant la critique des studios pourrait être répété à propos de la critique de l'Amérique qui est développée : le film, à travers l'épisode de la chasse aux sorcières, critique sèchement le risque de despotisme et de démagogie que frise toute démocratie, et notamment la démocratie américaine. Mais il le fait en reprenant à son compte tous les clichés patriotiques et démagogiques. Au final, le film apparaît comme une sorte d'appel à la résistance et de plaidoyer pour la liberté qui utilise et revendique paradoxalement pour son propre compte l'imagerie populiste. benjamin
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