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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Petites coupures
France / 2003
12.02.03
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LA FOLIE DES HOMMES
"- Qu’est ce que vous voulez me montrer ?
- En plus, c’est sans intérêt."
Le film est court. Hélas l’ennui l’allonge. L’exaspération l’étire. Vite, il faut fuir. Mais nous restons, accrochés à l’espoir : celui du bouleversement, du rebondissement, de la lucidité du cinéaste. Celui du " tout est possible ". Hélas, la seule lumière qui apparaît et qui nous sauve est celle qui illumine la salle, et nous sort de cette torpeur comateuse dans laquelle Pascal Bonitzer nous a insidieusement enfoui.
Il y a plusieurs explications à ce ratage déplorable. D’abord, les personnages sont si mal dans leurs peaux, si agressifs qu’ils en deviennent antipathiques. Ensuite, le scénario déroule bien des actions, des relations, des mises en situation ; dommage qu'elles soient si rapidement amputées : l’auteur nous met sur des voies qui s’avèrent des impasses. La campagne électorale, l’adultère de la femme du maire, la femme qui échappe à son mari, etc... sont des prétextes esquissés qui ne méritent pas d’être retenus puisque nous n’aurons jamais la réponse. Cela occupe une grande partie du film. Mais le carnage ne s'arrête pas en chemin. Souvent tout sonne faux, à force d’être trop écrit et pas assez mis en bouche. Il y a sans doute des messages subliminaux, mais la lecture trop pénible nous empêche de les décoder. Enfin, l’ambition de cinéaste s’est perdue en route. Les plans séquences du début sont bien les seuls moments de cinéma (très bavards, cependant) du film. Pour le reste, Bonitzer filme un dépliant touristique sur les Alpes, ou s’empêtre dans des scènes dénuées d’esthétisme ou d’originalité. Ce formatage quasi télévisuel tue l’éventuelle allégorie qu’il voulait faire passer.
Cruel. Tragique. Comique malgré lui. Pathétique. L’oeuvre est morbide et le plaisir aussi plat que l’envie de vivre de ce communiste quinquagénaire à la libido en folie et à l’esprit dérangé. Il n’est pas le seul. On met du temps à comprendre que Kristin Scott-Thomas incarne une dame folle démente, maso, humiliée, allumée. Son jeu n’est pas en cause. L’écriture emprisonne leur mouvement, leur parole et aucun comédien ne s’en sort bien, tellement nous sentons le manque de conviction, le décalage permanent.
Car ces gens là parlent dans le vide ; ils ne s’écoutent pas. Ils se lancent en solo et personne ne les arrête alors qu'aucune oreille ne semble captive de leur délire verbal : pire, ç’est inutile pour le scénario. Des paroles aux images, Petites coupures fait du remplissage. Peu crédible, le film traite des blessures à l’âme.
Profondément pessimiste, il nous entraîne dans un trou qui s’avère être la fosse commune pour tous ces êtres totalement paumés, relativement maladroits, et vraiment ridicules (ils l’avouent eux-mêmes).
Ce long suicide, entre banalités quotidiennes et chantages mélodramatiques, nous devient insupportable dès le premier quart d’heure. Rien ne séduit. Tout respire la décomposition, la ruine, le gâchis plutôt que l’envie. Comme le dit Catherine Mouchet, toujours lumineuse même dans la noirceur : "Pourquoi cet acharnement à se détruire ? à se gâcher la vie ?". C'est le parfait résumé de cette expérience en salles. vincy
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