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Avec Dark Waters, Todd Haynes s'invite dans le film engagé (côté écolo), le thriller légaliste et l'enquête d'un David contre Goliath. Le film est glaçant et dévoile une fois de plus les méfaits d'une industrialisation sans régulation et sans normes. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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San Antonio
France / 2004
21.07.04
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JAMES BANDE
« Mais j’voye pas pourquoi qu’on fallait qu’on s’encombrasse de ta géniteuse et d’ma régulière sur cette mission, enfin… »
Comment restituer l’originalité essentielle des romans de Frédéric Dard, constructions amusées, chapitres après chapitres, d’histoires et de personnages par une langue détournée, écartelée. C’est une question que ne s’est probablement pas posé Frédéric Auburtin, le réalisateur de San-Antonio. S’il avait été question d’opérer une véritable adaptation d’un roman, il n’aurait pas suffit de rendre le pittoresque et la faconde des personnages à travers des dialogues à la Dard. Le pas supplémentaire aurait été d’ajuster la mise en scène entière au principe argotique de la construction littéraire originaire. Un principe d’auteur qui contaminait initialement tous les secteurs de l’œuvre : la thématique, la structure, le style de la narration et les dialogues, en dernière instance. Dans le film, les personnages sont biens là et les dialogues aussi mais l’effort d’adaptation ne va pas plus loin. Les très nombreuses pages de Frédéric Dard (et l’achat des droits qu’elles supposent) sont donc un prétexte à attirer l’attention sur un film à grand spectacle, auxquels Depardieu semble maintenant se consacrer exclusivement. Cette ambition spectaculaire assumée du film est, au bout du compte, une de ses meilleures réussites. Dans le genre, les péripéties visuelles, comme dans cette poursuite de la jeep, sont assez efficaces. Evidemment, le coté systématique de ces séquences peut en lasser certains. Un sentiment de passage obligatoire par la case cascade et carambolage en tous genres peut se manifester, et l’ennui avec. A bien y regarder, le film se déroule selon une logique apparemment bien rodée. Quelques vannes de dialoguiste mènent à un lieu d’investigation qui provoque une course-poursuite, au terme de laquelle surgit une révélation, propice à quelques vannes, etc. Cette structure assez simple tient la route tout au long de cette heure et demi de pitreries.
Malgré l ‘évidence des ficelles narratives, le rythme constant de l’action maintient le spectateur normalement constitué en éveil. Les inconcevables rebondissements sont symptomatiques de ce type de cinéma et lorsque l’invraisemblable se produit, il passe presque inaperçu. L’argot dont abusent les personnages, et particulièrement Bérurier (Depardieu), coutumier du barbarisme extravagant (« Tu connais cette individuse ? ») croisé à l’imparfait du subjonctif, est, bien sûr, l’héritage le plus directe de l’œuvre de Dard. Ce langage originel est, toutefois, singulièrement allégé de ses formules et termes rares, de son jargon recherché. On ne peut pas reprocher au film de vouloir se faire comprendre par le plus grand nombre. Le comique de San-Antonio est principalement issu des joutes verbales organisées complaisamment par les protagonistes. La drôlerie des livres est respectueusement rendue au spectateur de cinéma, tout comme la grivoiserie outrancière qui règne tout au long de la projection. Sans être puritain, l’attitude générale de Bérurier frise parfois l’obscène mais c’est, semble-t-il, la règle dans la plupart des comédies contemporaines, qu’elles soient françaises ou américaines. Malgré l’absence de suspense, cette caricature bancale et graveleuse parvient donc à conserver notre intérêt relatif de juillettiste mou. Sans aucun ingrédient exceptionnel, San-Antonio réussit sa mission de divertissement doucement exotique mais échoue, sans scrupule, dans la représentation de quoi que ce soit. axel
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