Coeurs transis ou coeurs brisés, en un clic fixez sa cote.
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En général les acteurs rêvent tous d'un rôle de boxeur dans un film magnifiant les drames du ring. Saïd Taghmaoui aura fait le chemin inverse. Il quitte l'école tôt, quasiment analphabète, et se bat comme un champion pour devenir un boxeur prometteur au niveau national.
Il grandit à Aulnay sous Bois, grosse ville de banlieue ouvrière, loin du Maroc de ses parents. Entre les lignes du RER et les usines Citroën, l'avenir est limité, peu radieux, gris.
De quoi founir un matériau inspirant pour le film qui le révèlera, La Haine. Il co-écrit le film avec Kassovitz, réalisateur. Et il incarne l'un des trois rôles, celui du beur. L'arbitre de la séquence finale. Le film monte les marches à cannes, s'enferme dans un phénomène banlieue-tendance, et obtient quelques prix.
Malgré cela, le film donnera la haine à Taghmaoui. Le cinéma français est encore ethnocentriste, bourgeois, un peu raciste ou alors versant dans le cliché victimisant les immigrés. Lui veut des vrais rôles, et à l'instar de Zem, Bouajilah et Naceri, se battra pour obtenir des personnages variés, dans des films plutôt divertissants. Sa vision du cinéma n'est pas intellectuelle. En revanche, il maîtrise très bien ses forces et ses faiblesses. Saïd est un ambitieux.
Après La Haine, les propositions ne lui conviennent pas. Il améliore sa culture (lecture, théâtre) et les langues (pour devenir quadrulingues). La France ne lui suffit pas. Il tourne donc en Italie, en Allemagne, au Maroc et à Hollywood. A travers son métier, il renoue avec ses origines et découvre d'autres horizons. Cette carrière cosmopolite où la frime se mêle à un travail de longue haleine lui permet d'acquérir un statut de second rôle parfois caricatural mais souvent impressionnant par ses choix.
Car étrangement le cinéma américain le sert mieux que le cinéma français.
En soldat iraquien ou en amoureux lâche marocain, dans le délirant Three Kings ou le sentimental Hideous Kinky, Saïd Taghmaoui joue sur plusieurs registres. Ses personnages ne sont pas toujours moralement défendables, mais son itinéraire le singularise de ses compatriotes. Il est un des rares acteurs de la jeune génération à pouvoir se targuer d'avoir du boulot ailleurs qu'en France. Même si Hollywood lui envoie de mauvais scripts, lui offre beaucoup de fric, il n'est pas prêt à se renier. Au Maroc, il tourne Ali Zaoua, Prince de la rue, remarqué dans de nombreux festivals. Ce label qualité le poursuit aussi dans des petites productions indépendantes, intriguantes et intéressantes : Nationale 7 et La Taule. Dans le séduisant Nationale 7, il interprète un rôle de composition : un homo handicapé. Jusque là tout va bien, et il ne cherche pas le premier rôle à tout prix. Sa patience ets sa meilleure arme, d'autant plus qu'il est prolifique.
Il a fait oublier La Haine. Un bon point. Mais son tempérament, son déracinement, cette absence d'attachement à une famille (malgré sa fidélité à Dahan et son amitié envers Kasso) du cinéma ne lui permettent pas de transformer l'essai.
En 2000, il accélère les choses; pas moins de 8 films au cours des deux prochaines années. Après Clooney et Winslet, il accepte des rôles chez Jonathan Demme (en retrouvant Mark Wahlberg), Neil Jordan (avec Nolte et Jolie). Beaux castings pour le gosse du 9-3.
En France, il prend le "lead" sur Gamer et Confessions d'un dragueur, deux tentatives ratées; les concepts trop calqués sur l'image de la jeunesse d'aujourd'hui et ses fantasmes échouent à convaincre. On le retrouve aussi en second-rôle ou participation dans des grosses prod' telles que AbFab ou Le Petit Poucet. De quoi augmenter sa notoriété. Son image aux yeux du grand public reste floue; son nom est encore celui dont "on ne se ouvient jamais comment il s'appelle".
Depuis 7 ans, il a fait ses preuves sur le grand écran. Arcady l'a choisit pour son prochain film. Taghmaoui accède enfin à un film d'envergure, avec un rôle majeur. Ce "brûlé", comme on appelle les expat marocains, a mis le feu à son passé et ne s'est pas encore trop rapproché du soleil, de peur de casser ses ailes. Il n'a ni la popularité d'un Samy Naceri, ni la qualité de jeu de Sami Bouajilah, ni même l'épaisseur de Roshdy Zem. Il a tout simplement du charme, du charisme. Et du caractère. Il creuse sa place, entre la fascination pour les machines made in US et son lien affectif avec les scripts européens. Il est à part, et un jour, le moment viendra, où le public lui dira oui sur son seul nom. Peut-être.
Vincy
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