David Lynch, Lion d'or et Palme d'or, n'a pas tourné de long métrage depuis 2006. Une longue absence. Heureusement il nous a offert une suite à Twin peaks pour la télé. Et on peut voir ses photos fétéchistes dans l'exposition de Louboutin au Palais de la Porte dorée. Il vient aussi de terminer un court métrage. Elephant Man ressort cette semaine en salles.



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LE DIABLE AU CORPS





Né au début du XXième siècle, près de Paris, Claude Autant-Lara est issu d'une famille d'artistes et aura traversé le siècle. A seize ans, il entre aux Beaux-Arts sur les traces de son architecte de père, Edouard Autant, qui comptait Rodin parmi ses amis. En 1919, il est décorateur de films, sous la direction de Marcel L'Herbier, puis de René Clair. A vingt-deux ans, il signe son premier court métrage Fait divers, qu'interprètent Antonin Artaud et Louise Lara de la Comédie Française, mère du jeune cinéaste.

Premières désillusions
De 1924 à 1929, Autant-Lara va poursuivre un rêve: Construire un feu, qu'il réalise envers et contre tout et tous, comme il construira, ensuite, sa carrière. Pour mettre en images la nouvelle de Jack London, qui retrace la lente agonie d'un chercheur d'or perdu dans le Grand Nord, le cinéaste expérimente un objectif révolutionnaire que son inventeur, le Pr Henri Chrétien, a baptisé "hypergonar". Projeté fin 1930, dans une salle dûment équipée, Construire un feu est retiré de l'affiche à la demande du syndicat des Exploitants sous le prétexte que le système optique utilisé représente pour les autres salles une concurrence déloyale ! En 1953, espérant donner des couleurs à une industrie cinématographique anémiée par la télévision, la 20th Century Fox relancera, sous le label Cinémascope, l'invention du Pr Chrétien... Nul n'est prophète en son pays...
Déçu, criblé de dettes, Autant-Lara s'exile aux Etats-Unis où, de 1930 à 1932, il réalise les versions françaises de films américains (de Buster Keaton, notamment), se bornant, comme il l'a écrit, "à effectuer une stricte décalcomanie des films originaux".
A son retour en France, riche de l'expérience acquise auprès des professionnels de Hollywood, il entreprend son premier long métrage, Ciboulette (1933), adapté avec Jacques Prévert de l'opérette mise en musique par Reynaldo Hahn. Nouvelle déconvenue pour le cinéaste, car le film est mutilé par ses producteurs.
Les décevantes années 30 d'Autant-Lara s'achèveront dans l'ombre d'un homme de théâtre, Maurice Lehmann, avec lequel il cosigne, en qualité de collaborateur technique, trois films dont un seul, Fric-Frac (1939), grâce à l'interprétation d'Arletty, de Fernandel et de Michel Simon, est passé à la postérité. La France ne semble pas l'aimer.

Autant le rouge
Entre 1942 et 1945, Chiffon, Zélie, Douce et Sylvie, quatre "vraies jeunes filles" incarnées par une Odette Joyeux qui leur ressemble, vont permettre à Claude Autant-Lara de s'imposer enfin, après vingt ans de carrière.
Alors qu'il a pris la tête du mouvement de défense du cinéma national contre l'invasion, déjà, des films américains et au moment où, en ces temps de guerre froide, il joint sa signature aux appels en faveur de la Paix. Autant-Lara, en 1947, réalise Le Diable au corps, premier d'une série de pamphlets dirigés contre la guerre, la lâcheté, l'égoïsme, la religion, l'intolérance et le conformimse bourgeois. Cette adaptation du sulfureux roman de Raymond Radiguet fut considérée par certains comme un brûlot antifrançais: l'ambassadeur de France quitta la salle au cours de sa projection, en juin 1947, au Festival de Bruxelles où l'oeuvre reçut le Prix de la critique internationale. Jean Cocteau prit sa défense avec fougue: "On a insulté le film, ce qui prouve que le film est digne du livre (...). On aime les personnages, on aime qu'ils s'aiment, on déteste avec eux la guerre et l'acharnement public contre le bonheur" (in La Revue du cinéma, septembre 1947).
Pendant douze ans (le temps de la IVe République), Autant-Lara réalise plus de dix films, certes inégaux, mais jamais indifférents. Ce sont rarement des brûlots dévastateurs, mais leur impact sur la société française est décuplé par les controverses, voire les interdictions, qui entourent la sortie de L'Auberge rouge, une farce jovialement anticléricale. A force d'vaoir le monde contre soi, on en vient à ne plus aimer grand monde...

Lara le noir.
Ainsi, Autant-Lara fut la cible de tous les censeurs, officiels et officieux, ministres et anciens combattants, bigots et bien-pensants. Mais il fut aussi condamné par les jeunes critiques et futurs cinéastes de la "Nouvelle Vague" pour son appartenance à "une certaine tendance du cinéma français" rédigée par François Truffaut. Ce jugement cruel et lapidaire blessa peut-être Autant-Lara plus encore que l'inaction à laquelle il fut contraint dès le début des années 70. Ses derniers films, ses écrits, ses attitudes politiques - au cours des années 80, il défraye la chronique par des prises de position politiques d'extrême droite - sont désormais empreints d'une amertume profonde qui confond dans le même mépris bourreaux et victimes si crânement désignés, hier, dans leur antagonisme. Et Grandgil-Jean Gabin de La Traversée de Paris (1956) apparaît rétrospectivement comme le porte-parole d'Autant-Lara lorsqu'il profère, à l'adresse de tous les damnés de la terre, son "salauds de pauvres" aux accents céliniens, symbolique, jusqu'à la caricature, du douloureux parcours d'un homme et d'un artiste dont la sincérité, aux cimes de l'idéalisme comme dans les abîmes du désespoir, ne peut être mise en doute. Sans doute son chef d'oeuvre, car son film le plus sincère et le plus populaire.
Après Tu ne tueras point (1961), un film sur les objecteurs de conscience et interdit en France alors engagée dans la guerre d'Algérie, Autant-Lara réalise Le Journal d'une femme en blanc, (1965), et Le Nouveau Journal d'une femme en blanc (1966), consacrés au problème de l'avortement. Deux oeuvres qui déchaînent les polémiques. Car il était bien en prise avec tous les sujets qui dérangent. Remueur.
En 1973, Autant-Lara adapte "Lucien Leuwen" de Stendhal, pour la télévision.
Il écrit en 1984 des Mémoires au titre significatif de son état d'esprit "La rage dans le coeur".
Un dernier scandale précipite sa retraite. Elu en 1988 à l'Académie des Beaux-arts, puis élu député européen l'année suivante sur la liste du parti d'extrême-droite Front national, Claude Autant-Lara, bien qu'ancien président de la Fédération nationale du spectacle CGT (syndicat proche des communistes) de 1947 à 1963, tiendra des propos violemment antisémites, notamment dans une interview à l'automne 1989.
Poursuivi pour injures raciales, relaxé en 1991, le vieux cinéaste, déclaré "persona non grata" à l'Académie des Beaux-Arts, démissionne rapidement du Parlement européen.
Suite à une longue maladie, le cinéaste de l'extrême décède à la fin du siècle, à Antibes, sur la Riviera.
En cas de malheur, qui pouvait-il implorer? Dieu? Reste qu'on ne lui pardonnera jamais cet antisémitisme des vaincus, cette sénilité malvenue, ce dérapage au crépuscule de sa vie. A force de trop combattre, il fut battu.

chris, vincy


 
 
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