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David Lynch, Lion d'or et Palme d'or, n'a pas tourné de long métrage depuis 2006. Une longue absence. Heureusement il nous a offert une suite à Twin peaks pour la télé. Et on peut voir ses photos fétéchistes dans l'exposition de Louboutin au Palais de la Porte dorée. Il vient aussi de terminer un court métrage. Elephant Man ressort cette semaine en salles. |
(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Coeurs transis ou coeurs brisés, en un clic fixez sa cote.
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THE HAPPY ROAD
Plus de 45 ans de carrière. Comme l’écrivait mon amie Charoltte Lipinska sur son blog lors de son décès, juste avant le festival de Cannes 2007 : « Jean-Pierre Cassel, c’était l’élégance d’un œil qui frise et d’un sourire en coin. C’était le charme discret de l’ironie. C’était la classe. » Le dandy danseur du cinéma français n’a pas voulu claquer la porte. A l’image de sa filmographie, riche et imposante, sans aucun doute indigne de son talent mais joliment décente, il est parti sur un dernier petit pas, claquette clinquante aussi subtile que pudique. Et hop. On le croyait fumiste, dilettante, touche-à-tout. Il était bosseur, passionné, éclectique. Il n’arrêta pas de travailler du cinéma à la télévision, du théâtre au music-hall. Rare artiste complet du show-biz français, presque trop anglo-saxon et trop beau pour séduire les auteurs et les producteurs, préférant les tourmentés et les gueules, Cassel n’aura pas démérité dans un paysage culturelle méprisant souvent les « versatiles » doués. A l’ombre de Montand, il souffrira aussi, sans doute, de la comparaison.
Charmeur et irrésistible,patek philippe replica watches Jean-Pierre Cassel jouera d’abord les jeunes premiers et les dragueurs impénitents. On le croit volontiers glandeur. Il n’était déjà pas doué pour les études. Il enter au Cours Simon où il traverse les deux premières années en garçon timide, introverti, « hagard ». Mais il va s’épanouir. Au cœur du Saint-Germain-des Prés des années 50, il s’éclate et drague à tout va. Premier film au titre prémonitoire : La route du bonheur. Quelques années plus tard, il croise Gene Kelly qui lui fera faire ses premiers pas de danse dans La route joyeuse. Il apprend à bouger, classique et moderne, à faire des claquettes. De bonheur ou de joie, sa route est parsemée de belles rencontres. Il fait de la figuration ou des petits rôles dans des films anodins avec des comiques de l’époque (Noël Noël ou de Funès). De Gérard Philipe à Daniel Gélin, la concurrence est rude dans les gueules d’amour. Juste après la sortie du Gene Kelly, il est choisi pour remplacer Jean-Paul Belmondo sur les planches, ce dernier étant appelé sous les drapeaux. Il joue dans Oscar. De quoi le faire repérer par le futur prince de la comédie française dans les années 60 : Philippe de Broca. Le réalisateur lui donne le premier rôle des Jeux de l’amour, persuadé que Cassel peut faire un excellent Cary Grant sur fond de course poursuites et de situations vaudevillesques. Il impose pour al première fois une forme de « prestance ». Un naturel cool (avant l’heure) et une ironie distante, mais jamais cinglante. La pudeur de celui qui a été réservé persiste à transparaître. Elle lui permet d’être toujours dans le bon goût. De Broca installera son image de dandy désinvolte et beau parleur dans Le Farceur, sorte de Dilettante au masculin. Comme Frot, il se métamorphose avec délectation sans changer de maquillage. On n’est pas loin du raffiné Poiret, mais Cassel joue davantage sur le mouvement que sur l’élocution, qu’il a souvent eu difficile. De Broca tournera avec lui plusieurs films, en faisant son acteur fétiche, avec Belmondo. En 1961, il croise son alter-ego féminin, la gracieuse Françoise Dorléac. Dans "A mes amours", il raconte : «Une passion foudroyante, donc destructrice. On s'est sûrement rencontrés trop tôt. » Il tournera de nouveau avec elle dans le succès Arsène Lupin contre Arsène Lupin (d’Edouard Molinaro). Et vendra la Tour Eiffel avec sa sœur, Catherine Deneuve, dans un segment des Plus belles escroqueries du monde. La même année, il sera son Monsieur de Compagnie (toujours pour De Broca).
Ce boulimique de boulot enchaîne les conquêtes. Mais aucun rôle majeur ne vient ponctuer une filmographie superficielle et légère. En 1962, le tournant a lieu, où il alignera Jean Renoir, Abel Gance (en D’Artagnan face à Cyrano), René Clair, Jean-Pierre Melville, Luis Bunuel, Sidney Lumet et Joseph Losey.
Le caporal épinglé lui permet d’aborder un registre plus dramatique. Renoir et Molinaro permettront au comédien de se faire connaître. D’autant qu’au même moment, il rencontre le maître du théâtre, Jean Vilar, pour lequel il joue Molière et Crébillon. Sa notoriété s’élargit internationalement en devenant le fou volant frenchy de Ces merveilleux fous volants, coproduction mondiale et énorme hit de l’époque (30 millions de $ de l’époque). Pilotant une réplique de la bien nommée Demoiselle, il incarne un french lover faisant escale dans les jupons d’une femme (toujours la même actrice, mais jamais le même personnage). Butinant jusque dans le foin, la conquête féminine prend le pas sur la gloire aérienne. En pleine ascension, il intégrera la grande équipe de Paris brûle-t-il, aux cotés de Belmondo (encore et toujours). Beau et talentueux, il incarne parfaitement ce que les anglo-saxons attendent d’un acteur mais aussi d’un français ; paradoxalement ces multiples facettes et sa face trop séduisante ne séduisent pas la nouvelle vague.
En 1969/1970 sa filmographie prend de l’épaisseur. Sur un scénario de Nina Companez, Michel Deville lui fait jouer l’Ours, modeste bonhomme résistant à la sensuelle et a priori ensorceleuse Poupée, alias Brigitte Bardot. Le film sort l’hiver suivant et drague 1,6 millions de français dans les salles. Quelques mois avant Jean-Pierre Melville en avait fait l’une de ses têtes d’affiche de L’Armée des ombres, avec Lino Ventura, Paul Meurisse et Simone Signoret. Il retrouve Chabrol qui aime explorer la noirceur et la détresse de ceux qui paraissent le contraire. Sa fidélité à Chabrol sera équivalente à celle avec De Broca. Le film justement intitulé La rupture va l’imposer dans un contre-emploi en lui donnant un rôle de salaud. Il va vouloir détruire la réputation d’une Stéphane Audran divorçant de Michel Bouquet. Du beau linge pour un linge sale lavé en dehors de la famille. Il ira même jusqu’à se faire pomper le vié en téléphonant avec un sang-froid mieux que maîtrisé. Il retrouve Audran chez Bunuel dans Le charme discret de la bourgeoisie, avec aussi Seyrig, Ogier et Fernando Rey. Beau tableau de chasse où Cassel a aussi pu Brasseur père et fils, Simon, Maillan, Poiret, Serrault, Aimée, Seberg, Presle, Marais, Arletty, Brialy, Vitti, Ferrer, Girardot, Sordi, Lisi, Welles, Trintignant, Schneider...
L’étranger reconnaît davantage ses mérites. Richard Lester en fait son Louis XII dans Les Trois Mousquetaires et sa suite. Sidney Lumet lui donne le rôle du français du Crime de l’Orient Express, aux côtés de Sean Connery, Albert Finney, Ingrid Bergman, Lauren Bacall, Jacqueline Bisset, et on en passe... Il continue de tourner en Angleterre quand il met les pieds sur la scène de Londres pour le célèbre « musical » Chorus Line. «Je me souviens surtout du final sur scène à danser pendant vingt minutes. Pendant deux mois, tous les soirs, on pleurait.» Un vieux rêve qui se concrétise. Cela le singularisera de ses collègues français. Cassel souffrira sans doute de n’être jamais vraiment sur la plus haute marche du podium, finissant même sa carrière en brillant second rôle. Il ne sera ni Montand ni Belmondo, ses contemporains, ni Fred Astaire ni Michel Simon, ses modèles. Il survolera pourtant les décennies avec frénésie, ludisme, passion et perfectionnisme. Un bon élève doué en tout, plein de rêves mais sans ambitions particulières.
Il n’est plus simplement hâbleur ou gouailleur, allumeur ou séducteur. Il donne un ton parfois plus pète-sec, apprend à mordre, ne se laisse plus aller dans la légèreté. C’est dans le drame qu’il étalera son jeu en France dès le milieu des années 70. Quelques nanars juste sauvés par sa présence dans Docteur Françoise Gailland (face à Annie Girardot et Isabelle Huppert). Il commencera aussi sa carrière télévisée, bien avant que les stars ne s’y mettent. Sans doute parce qu’il préfère travailler et qu’il ne méprise aucun support tant qu’il peut jouer. Mais le grand trou noir entre 1976 et 1982, alors que ses congénères – Noiret, Serrault, Belmondo, Montand, ... cartonnent – auraient pu le faire passer à la trappe. C’est donc un anglo-saxon qui va le sauver, une fois de plus. Entre Huppert et Moreau, Joseph Losey lui donne le rôle principal de La Truite. 300 000 entrées, à peine ; pas de quoi le relancer. Il continue des participations anecdotiques (Chouans !), des personnages caricaturaux dans des films sans intérêts. Roi de France, aristo, maître de musique, inspecteur, Colonel ou Commandant, il commence à avoir l’âge de jouer les grands pères. Grâce à son anglais impeccable, les films à costume et téléfilms étrangers, et notamment les productions italiennes, l’alimentent. Un déclin irrémédiable ?
Robert Altman l’engage pour Vincent et Théo en 1990, en Docteur Gachet, celui qui reçu les croutes du génie en échange de consultation. Seule participation marquante en dix ans de cinéma. C’est en fait un petit jeune nommé Mathieu Kassovitz qui va le ressuscité. En lui donnant le rôle du gynécologue dans Métisse (où le fils Vincent Cassel explose pour la première fois au cinéma), le passage de relais intergénérationnel se fait subrepticement. La même année, il commence à chanter et se lance sur les planches, rendant hommage, en solo, à Astaire, Gershwin, Porter et plus tard Ferré, Brel, Bécaud. Crooner sur le tard, il multiplie les cachets au cinéma. Et, bizarrement, y trouve quelques uns de ses meilleurs rôles grâce à une jeune génération de cinéaste plus ouverte à la culture anglo-saxonne.
Mais c’est Claude Chabrol qui lui offre les meilleures places : L’enfer et La Cérémonie (pour lequel il obtient sa seule nomination aux César) lui permettent de se rappeler à l’esprit des cinéastes. Il retrouve Altman mais s’autorise aussi des passages en Afrique du Sud, chez Jacquot, Couvelaire, ou dans des courts métrages.
Les dernières années, depuis Les Rivières pourpres où il finit crucifié par Kassovitz, lui permettent d’explorer tous les tons. Décalé (Narco) ; dramatique (Virgil) ou cynique (Fair Play), il joue souvent les pères au regard pas forcément convenu. Il impose rapidement sa prestance et aime jouer avec délectation les hommes de mauvaise foi ou désagréable. «Arrivé à un âge certain, il y a une urgence différente à bien faire les choses. On goûte davantage chaque moment de la vie.»
Pourtant les quatre derniers films, chacun dans leur genre, qui clôtureront cette vie jouissive et lumineuse, discrète et étoilée, feront de ce protestant atteint d’un cancer un vieil homme pas amer. Dans Astérix aux jeux olympiques il sera le druide Panoramix. Sage. Dans le larmoyant Scaphandre et le Papillon de Julian Schnabel, primé à Cannes juste après son décès, il est le Père Lucien. Déjà la tête dans le Ciel. Dans l’étrange et insolite Congorama, il est le détenteur du secret, l’ancien écrivain admiré désormais handicapé. C’est un autre Belge, Alain Berliner, qui lui offre sa plus belle dernière image, en virtuose des claquettes et chanteur de cabaret, dans J’aurais voulu être un danseur. L’image d’un homme en smoking montant des marches blanches, en sautillant, virevoltant, rythmant ses pas au gré de la musique. A l’ombre de Gene Kelly, pas en mauvais copieur, plutôt en très bon élève. Trois petits pas, les talons qui s’entrechoquent avec finesse, et Monsieur Cassel qui se casse au ciel.
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