David Lynch, Lion d'or et Palme d'or, n'a pas tourné de long métrage depuis 2006. Une longue absence. Heureusement il nous a offert une suite à Twin peaks pour la télé. Et on peut voir ses photos fétéchistes dans l'exposition de Louboutin au Palais de la Porte dorée. Il vient aussi de terminer un court métrage. Elephant Man ressort cette semaine en salles.



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SCHIZO POLI





Soderbergh a beau avoir réalisé un des films cultes de ses 20 dernières années, le web n'offrait aucun site voué à ce réalisateur avant la série des Ocean's. Le style ne suffit pas: son manque de popularité l'a souvent marginalisé des cinéastes à la mode. Avec un triplé (Erin Brockovich, Traffic, Ocean's 11) au début du siècle, il change la donne et devient "hype" popur ne pas dire sollicité par les studios comme par les festivals.

Sa carrière a commencé en 1986, Montres en tournant la vidéo-documentaire d'un concert live du groupe Yes. Ce jeune surdoué à 23 ans. Il a été monteur, scénariste, ses deux professions de base, et se retrouve alors nominé aux Grammy Awards.
Ce passionné de cinéma a débuté à 13 ans avec des petits films en super 8. Il apprendra le métier de monteur, et réalisera quelques courts métrages tout en écrivant des scénarii. Débuts à la fois laborieux et précoces. On peut le qualifier d'auteur, dans la grande tradition de la Nouvelle Vague. Il travaille à partir de scripts qu'il écrit, et toute la reconnaissance de son cinéma d'auteur - entre Godard et Melville, pour faire un raccourci cinéphilique: Godard pour la recherche et Melville pour le genre - se fera à travers les européens ou les Indie Spirit Awards, dont il deviendra le chouchou. Et un symbole.

En 89, il écrit, réalise et monte un petit film avec Andie MacDowell et James Spader, au titre intriguant: Sexe Mensonges et Vidéos. Le film révèle les deux acteurs. Sundance en fait son coup de coeur. Wenders découvre MacDowell (avec qui il tournera The End of Violence en 97) et couronne Spader, acteur lynchien, d'un Prix d'interprétation et surtout Soderbergh d'une Palme d'or. Il a 26 ans, c'est son premier film.
Outre l'exercice de style indéniable, l'oeuvre est une quintessence de son cinéma; tous ses thèmes, toutes ses richesses s'y retrouvent. A commencer par son amour pour les acteurs, et le jeu des acteurs. Mélange de naturel (d'impro?) et de dialogues ciselés, il se rapproche presque de réalisateurs comme Blier (époque années 80) ou Truffaut (époque années 70). Il choisit des acteurs qui vont développer l'imaginaire du spectateur, des comédiens qui ont de la trempe. Ils apportent leur caractère. Bref Soderbergh laisse vivre les personnages dans une histoire donnée, avec son style de cadrage, de montage et même de mixage sonore. Tout est étudié. Il y a bien une "touche" Soderbergh, et même un esthétisme. Celui-ci explosera plus tard dans ses productions grand public, imposant, à l'instar d'un Wong Kar-wai, une référence aux pubistes et faiseurs de divertissements.

Après sa Palme d'Or, la pression fut énorme. Il choisit plutôt des projets singuliers. Des films hermétiques ou expérimentaux, explorant ses obsessions et faisant varier les nuances. Pas un ne dépassera les 2 millions de $ de recettes au Box Office américain. Soderbergh alimente les magazines pour cinéphiles, garde son statut culte en France, mais se fait totalement oublier du grand public. Pourtant, il ne manque pas d'ambition. L'autre Steven apprend, écrit et réalise des brouillons, se coupe du système comme par rébellion, tel un ado se révoltant contre ses parents. Par principe. La liberté a ses limites: l'argent. Ses films on beau recevoir des louanges, des nominations, des prix, Soderbergh s'isole et l'ange déchoit.
Il s'est interrogé sur les relations homme-femme, sur la dépendance de l'être humain à l'égard du système, sur la servitude de l'homme par les systèmes de communication. Il est obsédé par la trahison. Thème récurrent dans tous ses films. Ses couleurs chaudes, crues, contrastées révèlent un goût certain pour la passion. Il peut changer sa manière de cadrer, aime la spontanéité, calcule le désordre visuel.

Pourtant, Soderbergh filme avant tout la nuance. Ses personnages ne sont ni blancs ni noirs. Plutôt entre gris clair et gris foncé. Jamais vraiment méchants ou gentils. Ironiques le plus souvent. La flic Jennifer Lopez s'amourache d'un braqueur de banque au grand coeur (George Clooney). Terence Stamp est un tueur-qui-fait-la-gueule prêt à venger sa fille qu'il n' a jamais pu aimer comme il le souhaitait... Les cambrioleurs sont des Robins-des-Bois symathiques. Le soldat américain est amoureux d'une allemande au temps des Nazis. il aime distiller le trouble pour que ces héros soient vulnérables.
Depuis sa renaissance, Soderbergh a repris goût pour le cinéma avec des films de genre: le polar, la comédie, la SF. Out of Sight, l'un des meilleurs films de 98, a donné la part belle à un duo explosif. En maîtrisant l'écriture et le montage, il s'offre une vraie liberté qui se traduit à l'écran par une mathématique du montage et un cadrage ludique et ainsi, le plaisir du spectateur s'en trouve décuplé. Il mêle toujours fantasmes et réalité, fiction à venir et flash backs explicatifs. Il a su créer une façon de raconter une histoire, en composant son film comme un puzzle où le temps, l'espace, les vies sont dissociés, et cohérents.
Avec L'Anglais, il poursuit son itinéraire en faisant référence aux films noirs, aux thrillers des années 7à, avec deux acteurs symboles de cette époque. Rien de manichéen. Le vice est une vertu ou en tout cas il est pardonnable. Soderbergh est subtil : ce sont ses "héros" qui font la narration. Sa caméra ne fait qu'aider à comprendre ce qui se passe dans leur tête. Cela peut devenir un effet de répétition d'une image, entrecoupant des scènes. Ou encore un effet sonore rappelant le souvenir d'un personnage. Un langage cinématographique qui lui est propre.

En 2000, tout s'accélère. Il réunit Julia Roberts et Albert Finney, couple insolite; Instinctif et intelligent. Steven Soderbergh devient alors très "in". Tout en ayant été intègre avec sa vision du 7ème Art. Erin Brockovich donnera un Oscar à Julia et sera un énorme hit dans la veine des films activistes très seventies, qui l'inspirent plus que jamais. Le rétro, plutôt pop sixties ce coup-ci, sera remis au goût du jour avec le mégasuccès d'Ocean's 11, film choral avec un casting d'enfer et un casse de rêve. Il réinvente le cool/glam. Soderbergh a braqué Hollywood et acheté sa liberté. Sur le modèle de Spielberg, il accepte le compromis d'un blockbuster pour un film d'auteur. Certes, ses Ocean's, toujours plus délirant, perdent un peu en intensité : mais on peut aussi y voir sa maturation, ses expérimentations, ses obsessions. Il teste des plans, fait des exercices de style, manie l'humour et le suspens, perturbe le spectateur en contrôlant l'espace et le temps.

On retient davantage ses sorties de piste. D'abord, Traffic, film audacieux et politique, complexe et dramatique sur la drogue. Il lui vaudra son Oscar mérité de meilleur réalisateur. A la fois épique et fluide, choral et individuel, il passe maître dans l'art de faire des puzzles imagés. Plus étonnant, le film marque les esprits et trouve son public. Sans doute son sens du casting y fait beaucoup : il attire les plus belles actrices, les plus grands acteurs, révèlent Del Toro et sublime son pote Clooney et sa fidèle Roberts. Avec elle, il fera Full Frontal exercice vain, cheap et capricieux. Avec lui, il refera Solaris. Le firmament est toujours proche. Mais jamais vraiment atteint.

Les années qui suivent Traffic (2002-2008) demeureront des années plus pauvres, avec un goût d'inabouti. Aucun ne convainc vraiment. Ses productions avec Clooney font davantage parler de l'acteur, qui, d'ailleurs, s'en sort mieux derrière la caméra que son compère. Est-ce là le motif du divorce dans leur société commune?
Pourtant Soderbergh continue de jouer les chercheurs. The Bubble lui permet de faire une offre instantanée entre le web, la télé et le cinéma. Un échec mais une expérience aussi utile que cette diffusion sera un jour inévitable. The Good German est un hommage au classique film noir. Il ne se contente pas de mettre en noir et blanc une histoire d'espionnage et de trahison (forcément) mais de reproduire visuellement les documents d'archive et d'en faire un film tourné "comme à l'époque". Toujours curieux, il apprécie le fait de varier les formes : court métrage, docu, ... sans oublier la production de films ambitieux (I'm not there, Michael Clayton, A Scabber Darkly, The Jacket...).

Avec son plus ambitieux projet à date, Che, en deux épisodes (diffusé à Cannes en un seul "volume" de quatre heures), Soderbergh ne veut plus faire la révolution. Comme le disait Che Guevara : "Il n'y a que les fois pour dire toujours la vérité." Il sait très bien que les fous ne sont plus écoutés...

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Vincy


 
 
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