DU MIEL EN POUDRE

" Les temps sont durs pour les rêveurs "

J'aime les histoires romantiques et poétiques, les dialogues avec des jeux de mots et un amour du langage, les scénarii bien écrits, avec un début, une intrigue qui sautille de bonne idée en bonne idée et une fin qui finit bien, comme le destin d'Amélie Poulain.

J'aime l'univers anachronique et coloré de Jeunet, as de cÏur à défaut de Caro, plus optimiste, toujours aussi peu réaliste, définitivement pas triste, l'ambiance de bistrot et de pavé parigot, les plans inventifs et la caméra qui suit à la trace les pistes de son héroïne à travers des tronches de parisiens, comme dans la ville d'Amélie Poulain.

J'aime les détails dont on discute encore et encore après le film, les étoiles au maximum parce que personne ne peut pas ne pas aimer un tel ouvrage d'art si bien réalisé, les vies qui se croisent avec naturel devant nos yeux, entre " excentrismes " et impressionnisme, comme un tableau qui dépeint le regard d'Amélie Poulain.

J'aime Audrey Tautou, qui est devenue Amélie Poulain, tout naturellement, avec ses yeux noisette qui vous dévorent, sa chevelure brunette, son sourire gentil et généreux, sa frimousse de petite fille qui veut faire le bonheur des autres, malicieuse et rieuse, rêveuse et délicieuse, j'aime tout de Tautou, excellente Amélie jolie.

J'aime aussi Mathieu Kassovitz en doux dingue, l'ours Rufus, la gueularde Claire Maurier, Clotilde Mollet en craqueuse d'os et croqueuse d'hommes, le parano Dominique Pinon, la merveilleuse Isabelle Nanty, le parfait Serge Merlin qui a remplacé Trintignant et interprète le second homme de verre de l'année, la toujours excellent Yolande Moreau, le surprenant Jamel Debbouze, l'aigri Urbain Cancellier, et tous les autres qui peuplent Montmartre et qui apportent un peu d'humanité, remis sur le droit chemin par Amélie Poulain.

J'aime les apartés et digressions, l'humour décalé et la dérision du script que Guillaume Laurent a osé dans son scénario ; j'aime les teintes et les nuances picturales grâce au numérique, qui en font un film unique, à part, jamais vu et donc la photo de Bruno Delbonnel, les décors de Aline Bonetto, bref la direction artistique dans son ensemble ; j'aime aussi la technique, qui nous font évader dans un autre monde, si lointain et si proche, si certain et tout sauf moche, un peu comme un destin fabuleux qu'on raconte aux enfants quand la lumière s'éteint.

Mais quand la lumière se rallume, on aime moins. On aurait aimé prolonger notre plaisir sur la fin. On aurait aimé partager un peu plus le destin d'Amélie Poulain. Déjà j'aime pas les critiques qui n'aimeront pas, les rabat-joie, les pisse-vinaigre, les Collignon et têtes de cons, j'aime pas le Sacré Coeur et l'idée d'attendre 4 ans le prochain Jeunet, qu'il nous invente un autre destin aussi jouissif que celui d'Amélie.

C'est fini.

Vincy

(C) Ecran Noir 1996-2001