Debbie Allen En 84, l'actrice-chorégraphe et chanteuse Debbie Allen tombe sur des livres narrant l'histoire de La Amistad. Fascinée par ce pan inconnu de l'histoire américaine, elle pousse la recherche avec d'autres essais sur l'époque, des articles, des écrits de philosophes et d'historiens... "Je ne comprenais pas la signification du nom jusqu'à ma lecture de la préface. Sur une page, il y a l'histoire entière." Une histoire qui se centralise essentiellement sur un noir, Sintge Pieh, dit Cinque. Elle décide de vouloir raconter ce récit au monde entier, de montrer le courage de ces hommes, l'enjeu de cette cause. Elle acquiert donc les droits de Black Mutiny rédigé par William Owen. Et durant 10 ans, elle tentera de développer le projet devant une Hollywood totalement désintéressée. Elle avait pourtant la foi dans la puissance narrative et dramatique de l'histoire... Pendant ce temps Allen continue sa carrière. Après son rôle-vedette dans Fame, elle a réorienté sa carrière vers la réalisation de séries et films pour la TV. Sans oublier ses prestations en comédie musicale à Broadway. ...et Steven Spielberg C'est en visionnant La Liste de Schindler que Debbie Allen, intuitivement, trouve le bon réalisateur pour Amistad. DreamWorks l'accueille et aussitôt Spielberg veut tout savoir de ce morceau de passé. "Il était insatiable" se souvient Allen, "nous avons eu une conversation fantastique, émotionnelle, durant une heure et demi." Elle l'avait convaincu et pas seulement en transmettant sa passion. Elle avait apporté des croquis dessinés par un artiste de rue qui permettait de visualiser certaines scènes. Pour Spielberg, c'était un projet à la fois ambitieux artistiquement et proche de ce qu'il voulait exprimer à travers sa caméra, et ce depuis Rencontre du Troisième type. Un beau cadeau de naissance pour son nouveau studio. Avec un nom comme Spielberg, l'aventure Amistad pouvait commencer... |
Pré-production... Pour que le projet se finalise dans de bonnes conditions, le premier engagé fut le scénariste, David Franzoni, qui a travaillé avec l'un des co-producteurs du film, la chaîne câblée HBO. Franzoni est chargé notamment de synthétiser une histoire qui mélange les points de vue, de dramatiser les étapes, de scénariser finalement la réalité. Dès le départ, les auteurs souhaitaient prendre en compte, en priorité, le point de vue des Africains. Cinématographiquement, il était évident que cela passerait mieux de le faire à travers un seul personnage, le leader de la révolte, Singbe (Cinque). D'autant plus qu'il n'était pas un esclave mais un véritable Homme libre, illégalement enlevé. L'étape suivante concerna le Casting. De la volonté de Spielberg à travailler avec Morgan Freeman au hasard bienveillant à trouver celui qui incarnerait le rôle principal. Comme pour Sugarland Express, Jaws, E.T., La Couleur pourpre ou L'empire du Soleil, Spielberg n'hésitera pas à enrôler un inconnu. Mieux, il insiste sur deux points: que les africains engagés parlent réellement le mende, dialecte des futurs rebelles et que les comédiens proviennent vraiment d'Afrique de l'Ouest. Spielberg cherche l'authenticité. Cela ne se fera pas facilement. Problèmes... Trouver ces acteurs ne fut pas si facile. Même en cherchant des jeunes comédiens venant des tribus Mende, Kissi et Temne...Spielberg dû même se déplacer au Sierra Leone où on compilait vidéos et talents théâtraux. On étendit le casting à l'Angleterre, allant chercher des comédiens immigrés ou nés d'immigrés. Le composite réunit finalement des acteurs venant du Nigéria, du Ghana, du Sénégal et de Sierra Leone. Il y a des danseurs, des acteurs, des musiciens, et d'autres de professions plus insolites (sciences, sport...). Il fallut les préparer, créer une homogénéité, leur apprendre à retranscrire des émotions. Et leur faire parler le mende. Surtout il fallait refaire l'histoire. Imaginer la souffrance. Reproduire la culture d'alors. Pour cela la production n'a pas lésiné sur les moyens, engageant des professeurs spécialisés: le Dr.Clifton Johnson (créateur du Centre de Recherche Amistad en Louisiane) et le Dr.Arthur Abraham (un des plus érudits de la culture Mende). Deux pygmalions-clés pour le film pour que sa véracité, indispensable, soit la plus juste possible. Il s'agit aussi d'une leçon d'Histoire. Spielberg voulait de la précision. Le film et le thème repose essentiellement sur les difficultés de communication: il y a 3 langues impliquées (le mende, l'anglais et l'espagnol) qui créent des barrières entre les parties. |
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Même les chaînes sont réelles... L'autre difficulté pour les acteurs fut physique. Nuque innamovible, bracelets aux chevilles et aux poignets....L'endurance fut particulièrement pénible.< Spielberg confirme que "ce ne sont pas des fausses chaînes, elles sont vraies. Elles étaient même très lourdes à porter et on comprend aisément à quel point le poids de ces chaines marque une vie entière." La réalité immonde était recréée de toute pièce. Avec des artistes en coulisses pour la reconstituer le plus fidèlement, et le plus esthétiquement, possible. Une équipe en or... Spielberg, qui préparait Saving Private Ryan et qui montait The Lost World: Jurassic Park dans le même temps, souhaitait s'entourer de gens compétents pour ce tournage-sprint. Outre des acteurs quasiment tous Oscarisés ou nominés aux Oscars, on retrouve dans le générique Janusz Kaminski, Oscar de la photographie pour Shindler's List, Rick Carter qui a travaillé sur les décors des 2 Jurassic Park, Ruth Carter, nominée à l'oscar pour son travail de costumière dans Malcom X. Au montage, son fidèle Michael Kahn (Oscars pour Les aventuriers de l'Arche... et Shindler's list) et à la musique le très symphonique et pompeux John Williams (5 fois Oscarisé). Inspiration Artistiquement Spielberg avait comme volonté de dépeindre un réalisme dénué de romantisme. Il a donc pensé avec Kaminski aux peintures de Goya. Il ne fallait aps que l'esthétisme absorbe le message, le détourne. Il était même essentiel de garder une certaine dureté, crudité dans l'image. Comme pour Alien Resurrection, le photographe fera appel au procédé de traitement de l'image appelé ENR, afin d'augmenter les contrastes, de recréer l'oppression, l'humidité, dans l'image. Il fallait que cela ressemble à des tableaux vivants. Il n'y a que pour les séquences espagnoles où l'on retrouve un format carte postale-clichée dans l'image. Mais Spielberg montre justement l'Espagne comme une puissance déclinante, baignant dans ses dorures, capricieuse. Un empire qui s'effondre. L'idée est de coller le visuel au propos. Tournage L'intérieur de la prison, où les prisonniers sont incarcérés deux ans, a été reconstruit à Los Angeles. Mais la majeure partie de la production s'est déroulée à Newport (Rhode Island, au Nord de New York), ville historique qui sert de lieu de tournage pour tous les films se passant au 18-19ème siècle. Aucune autorisation ne permit de filmer dans l'enceinte même de la Cour Suprême. Sinon le Fort d'El Morro à Puerto Rico, datant du 16ème siècle, a servi pour le marché aux esclaves cubain et pour l'usine à esclave de Lomboko en Afrique. Enfin deux bateaux furent utilisés pour constituer l'Amistad: The Pride of Baltimore II et The Californian. Avec un budget très modeste de 35 millions de $ - l'équivalent du Patient Anglais - Spielebrg a prouvé qu'on pouvait à la fois réaliser un film artistiquement exceptionnel et financer une entreprise cinématographique sans excès. L'anti-Titanic (une autre histoire de bateau et de symbole). Coincé entre Jurassic Park 2 (qui sort en mai) et Saving Private Ryan (qui commence en juin), Spielberg tourne en urgence durant l'hiver 97, en moins de 10 semaines. La même urgence et la même liberté qu'il s'était offert pour La Liste de Schindler. Il est même obliger de retourner en mer, détail qu'il s'était promis de ne plsu recommencer après Jaws et Indiana Jones 3. "Ce film ne nous quittera jamais. La production peut s'arrêter, mais le sujet sera toujours en nous." L'amitié... Car il s'agit bien d'une histoire sur l'Homme, la Liberté. Les valeurs ici défendues non rien à voir avec la religion, même si celle-ci est très présente (les 3 parties sont fortement chrétiennes), ni avec les nationalités ou les races. Amistad transgresse toutes ces limites pour ne parler que d'une utopie unique et entière. Ce n'est pas l'histoire d'autres personnes, mais une fondation même de notre société repsectant les droits de l'homme. C,est aussi le regard comfiant d'un Spielberg envers la justice, base de notre démocratie. Ironiquement La Amistad signifie L'Amitié. |
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