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(c) Ecran Noir 99

   En quelques mots une compil' de critiques, jamais très tendres lors de la sortie des films de Kubrick. Et toujours élogieuses 10 ans après.

 Alexander Walker: it's a sex odyssey
Première critique officielle parue sur le site du Evening Standart.
Critique complète This is London
EWS n'est pas un film qui finit avec des réponses toutes faîtes ou même des certitudes rassurantes. Le couple survit, mais ne ressort pas indemme. Comme dans les autres films de Kubrick avant, il laisse libre cours à l'interprétation du spectateur et nous fait réaliser qu'une seule projection ne suffit pas à révéler tous les signes et symboles nécessaires pour suivre ce parcours dans les transgressions de ses protagonistes (...). Même dans ses moments les plus déconcertants, c'est une oeuvre stupéfiante réalisée avec un contrôle magistral, auquel s'ajoute une humanité que de nombreux détracteurs rep^rochait au cinéaste de ne pas avoir. Cela pourrait être le triomphe final de Kubrick : la satisfaction posthume de voir deux performances qu'il a su tirer des des acteurs, qui pour la première fois semblent jouer sans dépendre du filet de sécurité de leur statut de star pour les protéger. Cette production d'adieu est une victoire pour la quête sans fin de son auteur où son objectif surpasse ses connaissances.

 Todd McCarthy: A big ``aye'' for Kubrick's ``Eyes''
Parue le 11 juillet 99 dans le magazine professionnel Variety
Moins acerbe et plus optimiste sur la condition humaine que n'importe quel autre film de Kubrick, EWS est l'adaptation intime et précise de la très belle nouvelle de Schnitzler, Dream Story (1926); une adaptation remarquablement fidèle à sa source tout en ne trahissant aucun des thèmes familiers u cinéaste, comme la paranoïa, la déception, les masques (au sens littéral comme au sens métaphorique du terme) que les gens portent, ainsi que la difficulté qu'ont les êtres humains - intelligents - de transcender les instincts et pulsions auto-destructrices qui conduisent leur espèce. A coté de cette succession de scènes délicieuses, ce film exceptionnel se confond dans un état de rêve sous-entendu, telle un style mélangeant de l'audace et de l'extravagance, qui permet à la "réalité" et à l'imaginaire de fusionner (...).
Esthétiquement, le film est saisissant, imposant et majestueux, mixer à une intimité à couper le souffle. Le style Kubrick, avec des plans steadicam et une utilisation magistrale de la musique coexistent avec bonheur, et en toute beauté, avec une photo qui rappelle parfois Festen de Thomas Vinterberg.
(...) Les fins des Kubrick étaient tantôt absurde, désespérée, apocalyptique, mystique, corrosive, meurtrière ou nihiliste; peut-être que la conclusion de celui-ci - un espoir prudent - suggère au moins que Kubrick croyait en quelques sorte au progrès humain.

 Philippe Garnier: Le dernier Kubrick à première vue
Parue le 12 juillet 99 dans Libération - une critique destructrice où Kubrick aurait tout faux. Morceaux choisis (et méchants).
Casting mal vu. Le fait d'engager un couple célèbre pouvait aussi passer pour un coup fumant: scènes d'intimité conjugale, chimie des corps. Sauf que. Avait-on oublié Horizon lointain, Jours de tonnerre? On sait que, quelles que soient leurs qualités propres séparément, Cruise et Kidman ne jouent pas bien ensemble et font autant d'étincelles que deux gommes à crayon. (...) < Bien sûr, si nous offrir en pâture l'adorable derrière de l'adorable Australienne devait rester le dernier acte de Kubrick, nous lui en serions éternellement reconnaissants. Mais elle qui jouait si bien l'hystérie méchante avec Gus Van Sant joue ici très mal l'ébriété sous toutes ses formes et n'est juste qu'en de rares moments, et jamais touchante. Cruise joue un docteur new-yorkais, mais le joue comme il peut, c'est-à-dire à la Cruise, c'est-à-dire comme un croupier.
Schnitzler mal lu. On ramènera Ophuls sur le tapis, pas seulement pour les valses ni la provenance de l'histoire. Mais Ophuls savait où il allait avec ses mouvements; il ne tournait pas toujours en rond. Il ne faisait pas systématiquement long, comme toutes les scènes ici (le film dure 2h46). Et si Kubrick colle d'étonnamment près au texte d'Arthur Schnitzler, il le lit mal ou choisit de s'en écarter quand ça l'arrange, aux pires endroits possibles.
Edulcoré. Il y avait pourtant des choses chez Schnitzler sacrément plus intéressantes, surtout pour un homme comme Kubrick, qui avait énormément de mal à révéler des secrets. Or les personnages de cette histoire ne font que ça, l'histoire ne fait qu'en dépeindre les conséquences. Et ce qui au temps de Schnitzler était réellement scandaleux (on ne parlait pas de ces choses-là entre époux) devient un peu incompréhensible, voire risible, dans le monde d'aujourd'hui. C'est ce qui rend cet ultime film plus largué que crépusculaire. On a parfois l'impression que c'est l'œuvre d'un homme pour qui la pochette anglaise d'Electric Ladyland de Hendrix a été le summum de l'érotisme et de la perversion.

 Roger Ebert: Studio turns blind eye to Kubrick's film
Parue le 12 juillet 99 dans le Chicago Sun Times
Le film dans son ensemble est une oeuvre forte et majeure, un chapitre final plsu que valable pour la carrière d'un grand cinéaste. Dans la forme, si ce n'est dans le style et le contenu, il ressemble à After Hours (de Martin Scorsese), dans lequel le personnage s'égare dans la nuit, à travers un monde marginal, sexuel.
(...) Le résultat de la censure américaine ne devrait plaire à personne. Cette version "Austin Powers" (où on nous cache la nudité par des artifices) va distraire le public du travail de Kubrick. le public va chercher à repérer les effets digitaux au moment où le réalisateur, dans sa version originale, construit un sens de l' érotisme.
De toute façon il s'agissait d'un film inapproprié pour les jeunes, avec ou sans adultes. Le film, avec cette pseudo-censure, le rend au contraire "faussement" accessible à un plus large public, tout en refusant aux adultes une version originale qui donnait la puissance du cinéma de Kubrick.

 Jack Kroll: Dreaming With 'Eyes Wide Shut'
Parue le 14 juillet 99 dans le Newsweek
Kubrick ne perd pas de temps pour que son public garde les yeux grand ouverts. Dès la première image, nous voyons Kidman, dos à la caméra, faisant glisser sa robe noire, et se dénudée complètement, dans ce qui est certainement la plus belle image "humaine" d'ouverture pour un film.
La beauté féminine est un sujet qui a été traité si crument sans les films, pendant si longtemps, que c'est presque surprenant de voir à quel point Kubrick a pris soin de cette beauté, la traitant comme un art. L'histoire parle de désir, de cet apétit ineffaçable qui menace de désagréger les structures que la société a construit, pour les retenir.
Cruise et Kidman sont confrontés à une passion inexplicable, soudaine, qui les ouvre aux autres et qui place une épé entre eux, dans leur lit. (...) Le film finit avec une dernière phrase, inespérée, le conseil d'Alice à son mari, afin que le processus de réconciliation démarre; un conseil à la fois pratique, éloquent et obsène.

 Autres critiques, on-line.

The Juice
Les acteurs sont à leur top; Cruise est cool et confiant, alors que Nicole (dans ce qui est plus un second rôle) est sexuelle et charmante; rien que le couple fait valoir le détour par une salle de cinéma. La mise en scène est simple, mais puissante et la caméra de Kubrick fait un travail qu'on peut qualifier de fantastique. Il est vraisemblable que ce film apportera differents avis selon les gens: certains l'aimeront, d 'autres pas. Ou en termes plus profanes, les gens qui n'ont pas l'habitude des intentions de Kubrick ne capteront rien, et les fans s'extasiront dessus. Finalement, il s'agit d'une expérience récompensée qui aurait pu être meilleure, mais qui est une fin convenable à une carrrière de légende.

The scrubbing bubble
EWS est le meilleur des films que Kubrick ait jamais fait. C'est un film de maturité qui fait état clairement de ses sentiments à propos de la monogamie et du mariage. Il s'agit d'un film très moral. Dans son coté le plus simple, EWS est l'histoire d'un homme qui traverse la nuit, s'y perd, spirituellement et moralement, et finalement retrouve le chemin de la maison. Kubrick a laissé une oeuvre monumentale. Ce n'est ni un puzzle, ni ambigüe, même si beaucoup le diront. Sa réalisation est sans défaut. La quantité d'infos qu'il nous donne uniquement à travers le visuel est étonnante. Et jamais ennuyeuse ni lente. Et ceux aui le diront doivent être trop habitués à l'école de réalisation de Michael Bay. Comme nous le savons tous, les films de Kubrick ont leurs propres règles et leurs propres rythmes.

The Spanish Lover
Le film est long (2h40). Pour donner mon avis, j'aurais besoin de plus de temps pour que mon cerveau le digère, et certainement d'une seconde vision. Ma première impression est que l'aspect esthétique du film est fabuleux. Kubrick bouge sa caméra comme personne, et tout, de la lumière au montage, marche à merveille. La musique est superbe (...). Les acteurs sont tous excellents, bien que Cruise et Kidman (dans un plus petit rôle que prévu), soient les stars de ce show. EWS est un film intriguant, fascinant, cherchant sa voie dans les profondeurs du désespoir et de la dépravation humaine.