Une histoire de rêve(s)
Eyes Wide Shut est l'adaptation d'un roman d'Arthur Schnitzler, Tarumnovelle (Rhapsody : A Dream Story), publié en 1927. L'autrichien Schnitzler (1862-1931), ami de Freud, était fasciné par l'interprétation des rêves, et utilisait souvent la bourgeoisie et l'aristocratie viennoise dans ses nouvelles. Il a écrit notamment La Ronde, Vienne au Crépuscule,
Une jeunesse viennoise, Mourir...
Kubrick a donc écrit avec son ami Frederic Raphael le scénario qui découlerait de ce roman. Pour rêver, il faut fermer les yeux. Ils ont transposé le décor dans une New York 99, symbole d'un empire flamboyant mais au bord de son déclin. Comme Vienne il y a 100 ans. Nous sommes à Noël. L'Amérique contemporaine a un air de fin de siècle décadente.
EWS (Les Yeux grand fermés) est une histoire d'obsession sexuelle, et de jalousie. De lois et de fantasmes. Et de toutes ces peurs qui emprisonnent l'homme, ses pulsions, sa violence, son instinct. Thèmes kubrickien par excellence.
Tom Cruise et Nicole Kidman incarnent William (Bill) et Alice Harford. L'un
est médecin , l'autre ancienne responsable d'une galerie d'art. Un couple marié, parvenus, riches, heureux. En apparence. Car sous la peau, il y a des veines qui chauffent, des fantasmes qui allument, de l'herbe qui se fume. Névrotique et érotique. Le couple se risque à partager leurs rêves et autres folies sexuelles; pas seulement en en parlant, mais aussi en le faisant.
Tout au long d'un parcours dans les rues new yorkaises, la tentation sera à
la portée de William. Mais pourra-t'il s'affranchir de ses tabous, et
assouvir ses envies?
Le désir mènera au délire. Une jeune fille qui se came dans une salle de bain, un baiser nécrophile sur un cadavre à la morgue, ... Jusqu'au bout du rêve, avec cette orgie masquée. Seuls les visages sont masqués... Le reste est à nu.
Comme cette scène d'ouverture, où une jeune femme blonde, vêtue de noir, laisse glisser sa tenue sur ses hanches, et se dévoile dans toute sa nudité au spectateur. La mystérieuse Nicole Kidman. Fondu au noir. Le spectateur est déjà devenu voyeur.
EWS est une histoire inracontable, puzzle amoureux où se mélangent le
badinage, l'adultère, l'acte sexuel et autres liaisons dangereuses, dignes
des fins de règne, que ce soient en France au XVIIIème siècle ou durant la
dynastie des Habsbourg.
Au final, EWS s'interroge sur la jalousie, la possessivité, le mariage, la
sexualité... Tout ceci n'est qu'un long voyage dans un rêve moite, comme un plaisir peut
être amer.