Sara Forestier
Sara Forestier. Elle trouve que son nom est passe-partout, alors elle emprunte celui de Bahia BenMahmoud pour Le nom des gens. Rencontre avec une actrice nature et généreuse.



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Rohena Gera







 (c) Ecran Noir 96 - 24



Après avoir fêté ses dix ans en 2007, le festival des scénaristes de Bourges revient avec une édition tronquée d'un jour mais plus riche que jamais en événements. Du marathon des scénaristes (48 h pour écrire un scénario de court métrage sur un sujet imposé) à l'université populaire de l'écriture de l'image (ateliers et mini-formations sur toutes les techniques d'écriture), en passant par la place belle faite à l'animation et à la kyrielle de personnalités présentes (Gérard Krawczyk en invité d'honneur, Eric Serra pour une soirée exceptionnelle, Brigitte Rouan, présidente du grand jury…), les festivaliers auront plutôt l'impression que, cette année, la manifestation dure une journée de plus ! C'est que, plus que jamais, le scénario occupe une place primordiale dans nos vies. De quoi raviver l'espoir d'Isabelle Massot, la Déléguée générale, sur l'avenir du festival.
Ecran noir : Quels sont la ligne directrice et les moments forts de cette 11e édition ?





Isabelle Massot : Notre ligne directrice est d’essayer de faire le Festival de l’écriture de l’image dans tous ses états : on avait la fiction, le reportage, la télévision, l’écriture sonore, et cette année on ajoute l’animation. Chaque composant de tous ces genres sera présent au cours du Festival. L’animation sera l’occasion d’ateliers, de films professionnels, de courts métrages, de tables rondes, etc. Le but est de faire se croiser des mondes perméables comme les auteurs de fiction et ceux du documentaire, la télévision et le cinéma. Nous sommes avant tout un festival de rencontres et de croisements des créateurs. L’autre aspect important cette année, c’est la création de l’université populaire de l'écriture de l’image qui regroupe les ateliers, les leçons, les tables rondes et les Babas du scénario. L’idée est de proposer des mini-formations en fonction du niveau des publics présents sur le festival. Il y aura donc trois niveaux : l’initiation, l’exploration et le perfectionnement. A chacun de puiser selon ses besoins.

EN : Pourquoi avoir choisi Gérard Krawczyk comme invité d’honneur ?

Nous avons voulu nous intéresser à un cinéma plus commercial et briser les idées reçues, surtout celles que l’on se fait sur les gens. Bourges est le festival de tous les genres cinématographiques. Nous avons la faculté de proposer une vision et une rencontre différentes de ce que l’on peut attendre. Et puis Gérard Krawczyk n’est pas que le réalisateur de Taxi. C’est quelqu’un qui a eu un parcours vraiment atypique, prouvant qu’il est possible de réaliser à la fois des films de commande et des œuvres plus personnelles. Nous allons justement revenir sur l’époque de L’été en pente douce ou de Je hais les acteurs. Le système cinématographique est extrêmement codifié. On attend des choses convenues qui doivent rentrer dans l’idée que tout le monde s’en fait. Nous avons voulu dire : "Voyez les choses différemment, soyez plus ouverts !" En plus, je sais que Gérard est quelqu’un de sympathique, d’abordable et de généreux. Nous avons besoin d’un invité qui a la capacité de se donner. Je trouvais formidable que les jeunes spectateurs sachent que même faire des films comme Taxi, ce n’est pas si simple que ça. Il faut un sens de la mise en scène, un sens du cadre, et pas seulement de l’argent !

EN : Cette année, Bourges est amputé d’un jour. Le festival est touché comme de nombreux autres en France par les baisses des subventions…

IM : Ce jour en moins ne changera pas grand chose, le programme sera juste plus condensé. Mais c’est vrai, nous faisons partie des festivals qui sont les plus touchés par les baisses de subventions, car on essaye de protéger les gros en dépouillant les petits. Ce problème est en plus doublé cette année par le fait que nous avons changé de lieu, ce qui augmente les dépenses. Toutefois, nous bénéficions d’un soutien de l’état qui, même s’il est moindre qu’avant, reste important car nous sommes les seuls sur le créneau de l’écriture. Nous sommes également très soutenus par les collectivités territoriales : la ville de Bourges nous a aidés pour la nouvelle installation, le conseil général du Cher pour l’Education à l’image et le Conseil régional nous a également apporté des aides financières. C’est une chance qu’ils soient là, mais ils ne pourront pas toujours suppléer au manque national. Car le problème de la culture, finalement, est surtout au niveau national. La politique menée est désastreuse parce que les festivals importants ne peuvent pas survivre si les plus modestes ne sont plus là pour faire le travail de défrichage sur le terrain. Où verront-ils les films, si ce n’est plus dans les festivals ? En plus, organiser ce genre de manifestation relève de la cohésion sociale et culturelle. La plupart fait un immense travail d’éducation à l’écriture de l’image, tout comme nous.

EN : Quel regard portez-vous sur la grève des scénaristes qui a immobilisé les Etats Unis pendant plusieurs mois ? Imaginez-vous la même chose en France ?

IM : Ca ne pourra jamais arriver en France, la situation est totalement différente. C’est même impossible de comparer car nous n’avons pas la même histoire du cinéma ni des scénaristes. C’est une question de tradition, les scénaristes américains ont beaucoup plus de pouvoir que les scénaristes français, ils sont même plus importants que les réalisateurs. Le grand mérite de cette grève est de nous faire prendre conscience que sans le travail de ces "raconteurs d’histoire", tout s’arrête. Nous sommes de plein pied dans la civilisation de la narration ! Ca a quand même été très loin, même certains shows télévisés ont été arrêtés. Cela prouve que l’on a un immense besoin des gens qui organisent et qui narrent. Comme quoi, notre festival a beaucoup d’avenir… Le poids des histoires est colossal. Elles peuvent arrêter les choses. La société a évolué vers plus d’histoires avec le développement des moyens de regarder des films. Il faut nourrir tous ces écrans ! Cela est révélateur du fait qu’un festival comme le nôtre devrait être plus aidé car le scénariste sera de plus en plus important à l’avenir. Ecrire est un métier difficile. On ne peut pas faire n’importe quoi, nous avons besoin de lieux de réflexion sur l’écriture de l’image, nous avons besoin de donner la parole à tout le monde. La place des scénaristes s’est améliorée. Il y a plus de reconnaissance, plus de scénaristes. Passer d’un genre à l’autre est une source de créativité : ça va dans le bon sens.


   MpM