(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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Guy Mazarguil est l'heureux réalisateur de L'art de séduire. Frétillant comme un gardon, frais comme un goujon, délicieux comme une sole meunière : l'homme nous présente son premier-né, avec toute la fierté d'un jeune père. |
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Ecran Noir : Quel est le déclic, après plusieurs années d'assistant de réalisation, qui vous a amené à diriger votre premier long-métrage ?
Guy Mazarguil : Je voulais réaliser des films depuis l'âge de 16 ans, et c'est pourquoi je suis rentré dans le cinéma. Pour gagner ma croûte, j'ai fait tous les métiers,en commençant comme conducteur de camionnettes. Mon premier court-métrage était tout-à-fait raté, je l'ai enterré dans mon jardin, mais les suivants étaient bien meilleurs : notamment Bloody Mary - qui a été récompensé à Cognac et salué dans d'autres festivals. Cela m'a permis d'enchaîner sur un second court-métrage de dix minutes, La Vérité sur le vif. J'ai ensuite tenté d'enchaîner avec un long-métrage, mais sans succès. Cela a débouché sur Façade, un moyen métrage de 43 minutes, réalisé à l'arrache dans mon immeuble, par manque de moyens. Façade a également bien marché, il a été diffusé à Clermont-Ferrand, à Brest, sur Arte également. Il m'a permis d'obtenir la carte de « réalisateur potentiel » de télé. Puis je suis passé à la production, j'ai donné des cours de théâtre à Florent... j'ai écrit plusieurs longs-métrages que je n'ai pas réussi à monter, par manque de budget et de comédiens disponibles. Enfin, l'année dernière, j'ai écrit le scénario de L'art de séduire assez rapidement, en me disant « ce ne sera pas un énorme budget ». Et effectivement l'essentiel du film est basé essentiellement sur les comédiens, que j'aime beaucoup.
EN: Était-ce le casting pressenti au début ?
GM : Oui, un peu bizarrement. Nous avons essayé de trouver, à un certain moment, des acteurs plus célèbres auxquels je tenais moyennement, au cas où, mais ils n'ont jamais eu le temps de lire le scénario. C'est donc resté un casting personnel. Mathieu Demy a accepté dès la lecture du scénario, tout comme le reste du casting qui s'est engagé rapidement. Avec la société de production Offshore, dès que TPS et Cinécinéma ont donné leur feu vert, nous avons décidé de ne pas chercher plus d'argent, car ça m'est déjà arrivé, à moi et à d'autres amis réalisateurs, de courir après un plus gros budget mais de perdre la disponibilité des acteurs. Nous avons préparé le film en quatre semaines puis tourné en 5 semaines, à Paris, en mai 2010. Ce qui m'a plu chez Julie, c'est qu'elle n'a pas de problème d'image, elle est très ouverte. Dans mes autres films, les personnages sont tous un peu fous dingues avec un petit grain de folie, mais il n'y a pas de méchanceté vis à vis des personnages. Il y a un toujours un respect des comédiens, qu'ils ressentent d'ailleurs.
EN : Êtes-vous intéressé par le tour narratif de « l'arroseur arrosé » ?
GM : Je tiens d'abord à dire que ce film n'est pas contre les psys ! J'ai moi-même suivi plusieurs thérapies, dont une où lors des premières consultations le praticien m'a dit « Nous en avons pour dix ou quinze ans ». Je me suis levé, et je ne suis jamais revenu ! J'ai côtoyé beaucoup de psys, qui étaient tous un peu spéciaux, sans grande distance sur eux-mêmes, alors que tout le monde pense qu'ils sauront s'appliquer ce qu'il conseille aux autres ! J'ai eu l'idée du film en voyant la tête sans expression d'un de mes psys, et en me demandant : « Que se passerait il si un psy, amoureux d'une patiente, tentait de lui déclarer sa flamme le jour où elle arrête la thérapie ? »
EN : Que signifie tous les poissons qui jalonnent le film ? Quelle métaphore se cache derrière ?
GM : Pour moi ça pourrait se rapprocher d'une symbolique de l'inconscient, mais je n'ai pas vraiment pensé à la métaphore. Quand j'ai écrit le scénario, il s'agissait de scènes très longues, de gros blocs de dialogues entre les personnages, ce qui constituait une réelle volonté de ma part. À un moment je me suis dit que ce serait bien que le personnage principal, Jean-François, fasse des rêves qu'il ne comprenne pas lui-même. Moi-même j'ai été marqué par un rêve ou je rencontrais un poisson dans la rue, de plus je suis très intéressé par les têtes de poissons sur les étals, chez le poissonnier. Cela me fascine, cette tête de carrelet avec les yeux d'un côté, la bouche de l'autre... Avant le film, je faisais déjà moi aussi des photos de poissons ; je lui ai donc transféré cette obsession. Je voulais que ces rêves soient à la fois drôles, étrange et étonnants, un peu perturbants. Le scénario n'a choqué personne, alors que je pensais que ça soulèverait des réactions. De même, il y a une dernière lecture : on ignore si le film entier n'est pas un rêve éveillé.
EN : Qui vous influence, en matière de réalisation ?
GM : Robert Altman, dans la première manière : j'ai été très influencé par les personnages de M*A*S*H, un peu névrosés, avec un humour lié à la folie. Fellini m'a beaucoup marqué aussi. Une scène de L'art de séduire reprend un moment de La Dolce vita où les personnages cernent un poisson mort, et se demandent de quoi il s'agit. C'est pratiquement la même scène dans mon film, avec les mêmes dialogues, et je m'en suis rendu compte après, lorsque je l'ai revisionné. Parallèlement, je suis un grand admirateur de Kusturica, de Paul Thomas Anderson, de Woody Allen...
Le film vient de sortir en salles, quels projets pour la suite ?
J'espère que le film va marcher, malgré le fait qu'il ne soit pas calibré sur un format télévisuel. Si cela marche, cela va me permettre d'acquérir une certaine confiance, et de continuer, certainement dans le registre de la comédie, car c'est un vrai plaisir de distraire le public.
mathilde
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