Sara Forestier
Sara Forestier. Elle trouve que son nom est passe-partout, alors elle emprunte celui de Bahia BenMahmoud pour Le nom des gens. Rencontre avec une actrice nature et généreuse.



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De « C’est arrivé près de chez vous » aux « Portes de la Gloire », Benoit Poelvoorde a su imposer en quelques années son charisme, sa verve comique irrésistible. Dans son deuxième film avec Philippe Harel, il incarne « Ghislain Lambert », cycliste belge qui n’a pas les jambes que son coeur mérite. Rencontre avec un acteur surdoué, touchant et drôle à la fois.
Ecran Noir: Pourquoi avoir accepté de tourner dans «Le vélo de Ghislain Lambert » ?





Benoit Poelvoorde : « L’idée était à la base formidable. Ca ne m’avait jamais traversé l’esprit de m’imaginer sur un vélo. Je m’en souviendrai toute ma vie : j’étais en train de travailler lorsque Philippe Harel m’a appelé en me disant: « j’ai eu une idée de film, mais je ne le tournerai que si tu veux bien le faire ». J’étais intrigué: quel pouvait donc bien être ce personnage ? Certainement pas un laborantin É(rires). Je me demande encore comment personne n’avait déjà eu l’idée de faire un film sur le vélo. Il faut reconnaître que c’est un projet plein d’embûches ! »

EN: Comment jugez-vous votre personnage ?

BP: « Ghislain Lambert demeure un de plus beaux personnages que j’ai interprété depuis le début de ma carrière. Je l’aime énormément. Pour moi, Ghislain est un ange, un orgueilleux qui ne demande rien à personne. Il a une partie de moi que je n’arrive pas à extérioriser. On pourrait d’ ailleurs faire un parallèle avec « Les convoyeurs attendent » et le personnage de Roger. Les deux hommes partagent un désir de bien faire les choses. Ghislain a gardé son âme d’enfant, son amour du vélo, son admiration des champions. Le film ne se conclu d’ailleurs sur aucune aigreur, même si parfois il triche. »

EN: Comment vous êtes-vous préparé pour le rôle ?

BP: « Ce fut un rôle très physique. Philippe Harel (le réalisateur NDLR) nous a imposé un régime très sec pendant plus de huit mois. Nous avons commencé la diète après le réveillon de l’an 2000. En général sur un tournage, les comédiens grossissent (beaucoup de fêtes !). Dans le cas présent, ce fut plutôt l’inverse. Seul José Garcia n’avait aucune contrainte particulière au niveau de l’alimentation: il ne s’en est d’ailleurs pas privé en nous provoquant. Il n’était pas là dans les scènes de courses. Heureusement qu’il n’était pas présent tout le temps, sinon je n’aurai pas tenu !»

EN: « Le vélo de Ghislain Lambert » est votre deuxième film avec Philippe Harel. Vous donnez l’impression d’être très complices.

BP: « Effectivement nous formons un tandem. Sans lui je ne saurais sans doute pas autant investi dans le film. Il demeure difficile et intimidant de répondre à ce genre de questions, car nous parlons très peu entre nous de notre complicité. Nous étions assez d’accord dès le départ sur les raisons de faire ce film, le ton à adopter. « Le vélo de Ghislain Lambert » est un film que nous avons réalisé ensemble. Si on voulait dresser un parallèle Philippe est l’architecte et moins un corps de métier. Nous avons beaucoup joué sur l’improvisation, on enregistrait les scènes avec des magnétophones afin de les tester. J’adorais ça. J’ai ainsi joué à peu près tous les personnages : Ricardo »

EN: Ghislain Lambert demeure un prénom peu courant en France.

BP: « Ghislain (prononcez « guilain ») est un prénom typiquement belge. D’ailleurs tous les belges ont comme deuxième ou troisième prénom « Ghislain ». Ce qui est mon casÉregardez ma carte d’identité ! (Benoit sort son portefeuille pour montrer sa carte d’identité d’un air satisfait). Ghislain est un prénom qui vous protège contre la mort du nourrisson. Ca fait parti des superstitions. La belgique est un pays très croyant, comme la Bretagne »

EN: « Le vélo ... » est un film profondément ancré dans les années 70. Avez-vous eu un réel de désir de coller à la réalité ? BP: « Nous avons fait appel à Olivier Dazar. Très vite il est devenu notre ami. On aimait sa façon de parler des coureurs. Il s’en moque tout en les admirant. Au départ il devait simplement écrire la voix du narrateur, puis après la soumission du scénario, il a eu des réactions sur le script. Grâce à lui on pu aller plus loin. Il nous a permis de scénariser les courses, de rajouter des éléments. La qualité du scénario est devenue par la même occasion meilleure. »

EN: Vous avez également suivi le Tour de France pour vous immiscer dans le milieu cycliste ...

BP: «A ce propos j’ai une une anecdote amusante à raconter: nous étions assis à côté de la table de l’équipe Compaq. Plusieurs personnes complotaient autour de la table. Le beau gosse Chippolini était assis à coté d’une ravissante jeune femme. Le portable de cette dernière a sonné, elle est partie. Vraisemblablement il n’allait pas jouer à la ramette ... Le lendemain nous étions dans une voiture officielle lorsque nous avons entendu à la radio: « Chippolini abandonne la course because gastro ... ». Sauf que la gastro était blonde à forte poitrine ... (rires) »

EN: Justement, n’avez-vous pas le sentiment que les coureurs cyclistes n’ont plus la même aura qu’auparavant ?

BP: « Le vélo se démystifie du fait de l’absence de grands champions français. Par exemple le football garde ses lettres de noblesse car la France est championne du monde. Les gens qui aiment le vélo aimeront toujours le vélo. C’est le journaliste qui démystifie le vélo parce qu’il ne retrouve plus les héros du passé. Mais la passion des spectateurs demeure intacte: en 1999 nous étions allés sur le tour de France. J’ai été époustouflé par l’affection des gens pour les coureurs, de n’importe qu’elle nationalité qu’ils soient. C’est vraiment émouvant. Depuis le film je conseille à tout le monde de suivre le tour, c’est mieux que d’être au parc des Princes ! J’aime l’idée qu’un champion se surpasse et le vélo est sans doute la chose la plus basique pour exprimer le dépassement de soi-même. Les coureurs sont proches des gens, vous pouvez les toucher, être vraiment proche d’eux. Je vous mets au défi de toucher un champion du monde de football... La dernière que des plaisantins ont essayé, 35 ont été mis en garde à vue ... »

EN: N’êtes-vous pas tenté par un contre-emploi, à l’instar de Coluche dans « Tchao Pantin » ?

BP: « D’une certain manière je l’ai déjà fait avec des gens avec qui je suis en confiance, comme Benoit Mariage (réalisateur des « Convoyeurs attendent » NDLR) et Philippe Harel. Philippe m’a demandé de tourner dans « Le vélo » des scènes que je ne jouerais sans doute pas avec d’autres. Je donne toujours l’exemple de la scène du coup de foudre. Exprimer en une image que vous tombez amoureux de la jeune fille, même si ça doit rester drôle, çà demeure très intime. J’ai une certaine pudeur. Si je ne m’agite pas, si je ne fais pas le clown, je n’ai pas l’impression d’être intéressant. »

Propos recueillis par Hervé oct 2001 Montres homme pas cher


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