Sara Forestier
Sara Forestier. Elle trouve que son nom est passe-partout, alors elle emprunte celui de Bahia BenMahmoud pour Le nom des gens. Rencontre avec une actrice nature et généreuse.



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 (c) Ecran Noir 96 - 24



BLOW OUT

"Un film que l’on entend mal est un film qui se voit mal." Pierre Lenoir, ingénieur du son, huit fois nommé et deux fois primé aux César, serait le dernier à renier cette phrase de François Truffaut. Pour évoquer le parcours de cet artiste nommé Chevalier dans l’Ordre des Arts et des Lettres en 2008, un décor à son image s’imposait. Un bar de grand hôtel parisien, discret, raffiné, non ostentatoire. Pendant la conversation, des portraits d’acteurs se sont calqués sur les filmographies de grands cinéastes : Catherine Deneuve, Satyajit Ray, Jean Rochefort, Alain Resnais… Parfois, à l’évocation de Romy Schneider, Claude Sautet et de Trésor, le dernier tournage de Claude Berri, la voix de mon invité s’est étranglée, ses mains se sont animées avant que sa pudeur ne reprenne ses droits. Mais chut, ouvrez grand vos oreilles. Pierre Lenoir va parler…

Ecran Noir : Est-ce que Pierre Lenoir, petit garçon, rêve de devenir ingénieur du son ?





Pierre Lenoir : Le petit garçon, il rêve d’abord de cinéma. De dix ans jusqu’à l’adolescence, je vois beaucoup de films. Ce qui me fascine en premier lieu, ce sont les comédiens. Quant aux bandes-son de l’époque, leur qualité était franchement médiocre. Elles ne cessaient de crachouiller et ne retenaient pas vraiment mon attention. Les films en version originale n’étaient pas légion. Donc, mes souvenirs me rattachent principalement aux productions françaises de l’époque.

EN : Quelles sont alors les stars qui vous font rêver ?

PL : Incontestablement, Catherine Deneuve. En 1969, j’ai eu la chance de tourner un documentaire de Jean Baronnet pendant un séjour hollywoodien de Catherine. Elle tournait Folies d’Avril de Stuart Rosenberg. Nous avions l’interdiction de pénétrer sur le plateau. Nous l’avons donc filmée, déambulant dans les rues de Los Angeles. Elle venait de perdre sa soeur Françoise Dorléac, et semblait quelque peu désorientée. J’ai retrouvé Catherine beaucoup plus tard sur Le héros de la famille de Thierry Klifa. Elle m’a reparlé du documentaire et de Jean Baronnet avec beaucoup de précision. C’est à mes yeux une très belle rencontre.

EN : Chanceux ! (rires) Revenons à un sujet un peu moins glamour : vos études…

PL : Après mon bac en poche, je me dirige pour faire plaisir à mon papa vers la préparation aux Grandes Ecoles dans le but de devenir ingénieur. Je suis passionné par l’optique et l’électricité. Dès l’âge de 13 ans, je réalise mes premiers films amateurs avec des camarades de classe. J’achète un objectif cinémascope que j’adapte sur ma petite caméra Paillard. Je tourne donc en 8 millimètres… Scope. Un exploit !

EN : Et comment passez-vous de l’image au son ?

PL : Au bout de la troisième année, les études de prépa ont raison de moi. Je vais alors voir du côté de l’Ecole Louis-Lumière. Trois sections s’offrent à moi : le cinéma, la photographie et le son. Bien sûr, mon attirance me tourne vers le cinéma, mais le niveau requis pour intégrer cette partie est bac + 1. Ai-je fait tout ça pour en arriver là ?... Non ! Je préfère opter pour le son, plus adapté à ma qualification.

EN : Et vous rejoignez une corporation des plus brillantes…

PL : Entre 1964 et 66, on peut croiser dans les couloirs de l’Ecole Louis-Lumière :
- au son, Pierre Gamet (4 Césars pour Clair de femme de Costa Gavras, Tous les matins du monde de Alain Corneau, Cyrano de Bergerac et Le Hussard sur le toit de Jean-Paul Rappeneau) ;
- à la lumière, Philippe Rousselot (1 Oscar pour Et au milieu coule une rivière de Robert Redford ; 3 Césars pour Diva de Jean-Jacques Beineix, Thérèse de Alain Cavalier et La Reine Margot de Patrice Chéreau) ;
- au montage, Noëlle Boisson (4 Césars pour Qu'est-ce qui fait courir David ? de Alain Chouraqui, L'Ours et Deux Frères de Jean-Jacques Annaud).

EN : Quel palmarès !

PL : N’est-ce pas ?... Sans compter les chefs opérateur Edouardo Serra et Jean- François Robin ainsi que les ingénieurs du son Alain Lachassagne et Bernard Bats… Nous rêvions tous de cinéma et nous en avons tous fait. Après l’apprentissage de la technique à l’Ecole Louis-Lumière, je suis entré à l’IDHEC, aujourd’hui rebaptisé La Femis.
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