Les 8 chansons
La musique originale du film est composée par Krishna Lévy, et comme la plupart des BOF européennes, a été interprétée par le Bulgarian Symphony Orchestra de Sofia.
8 chansons ponctuent le film. Chacune est interprétée par l'une des actrices, correspondant à son personnage et à une évolution dramaturgique du scénario. Eclairée différemment, chacune des chansons agit singulièrement du reste du film. Les arrangements sont plus proches des orchestres des années 50 que d'un son actuel.
Sheila, Françoise Hardy, Nicoletta, Marie Laforêt, Dalida, Corynne Charby, Sylvie Vartan, … la variété est omniprésente - des années 60 aux années 80 - dans les choix étranges d'Ozon. A une exception, la dernière chanson.
" Papa t'es plus dans l'coup " - Ludivine Sagnier
Musique de Jil, paroles de Jan et Jacques Plait.
Elle donne le la. La cadette qui aime son père, qui surtout a le plus d'énergie dans cette famille de bourgeoises. Cette modernité est accentuée par ce rock-boogie, à l'origine chantée par Sheila, période couettes (en 63), au début de sa carrière. On doit au duo parolier-musicien de nombreux succès des yé-yés, y compris certains de Johnny Halliday.
" Message personnel " - Isabelle Huppert
Musique de Michel Berger, paroles de Françoise Hardy.
Huppert s'approprie le joyau musical du film (disons la meilleure des 7 chansons de variété). Maintes fois reprise, la chanson a cartonné dans les " charts " avec le style très personnel du compositeur-producteur d'inspiration " eltonjohnienne ". Le piano est évidemment central dans cette composition. Mais cette chanson en deux temps a permis à Françoise Hardy de passer des yé-yés à la variété populaire chic, celle avec des textes. L'album du même nom sort l'année de naissance de Thomas Dutronc, en 73 et lorsque Berger rencontre France Gall, qui reprendra la chanson en 94.
" Mais si tu crois un jour que tu m'aimes
Ne le considère pas comme un problème
Et cours oui cours jusqu'à perdre haleine
Viens me retrouver
Si tu crois un jour que tu m'aimes
N'attends pas un jour pas une semaine
Car tu ne sais pas où la vie t'amène
Viens me retrouver "
" A quoi sert de vivre libre " - Fanny Ardant
originalement : " Can't give you anything " - Hugo Perretti / Luigi Creatore / George David Weiss
Elle illustre le rapport entre la liberté et l'amour, entre l'argent et les hommes. Chanson sensuelle, quasiment blues de night club, on revoit Jessica Rabbit faisant son grand numéro de femme fatale dominée. La chanson jazzy n'a rien d'étonnant puisque Nicoletta, belle voix des années 70, en fut l'une des interprètes en 75. Le titre, très pop US, a été repris par les Modern Talking.
" Mon amour, mon ami " - Virigine Ledoyen
Musique de Edmond Bacri, paroles de André Popp.
Bacri était l'un des auteurs d'Aznavour, Montand, Bourvil… avec Popp, ils écrivent cette chanson pour Marie Laforêt. Ce trio va donner l'apogée de leur œuvre respective, et leurs plus grands succès. A chaque fois, ce sont des petits films en chansons. Nous sommes en 67.
" On ne sait jamais jusqu'où ira l'amour
Et moi qui croyais pouvoir t'aimer toujours
Oui je t'ai quitté et j'ai beau résister
Je chante parfois à d'autres que toi
Un peu moins bien chaque fois
Toi mon amour, mon ami
Quand je rêve c'est de toi
Mon amour, mon ami
Quand je chante c'est pour toi "
" Pour ne pas vivre seule " - Firmine Richard
Musique de G.Kelly, paroles de D. Faure.
Hymne à l'amour sous toutes ses formes, entre garçons, entre femmes, ce slow déprimant est aussi un appel à la tolérance. Ca ne pouvait être qu'une chanson de Dalida, la méga-star du disco, l'idole des gays. La chanson date de 1973, elle n'est qu'une face B, d'un single beaucoup plus célèbre, Paroles Paroles (le duo avec Delon).
" Pour ne pas vivre seul des filles aiment des filles
Et l'on voit des garçons épouser des garçons
Pour ne pas vivre seul
D'autres font des enfants des enfants qui sont seuls
Comme tous les enfants
Pour ne pas vivre seul
On fait des cathédrales où tous ceux qui sont seuls
S'accrochent à une étoile "
" Pile ou face " - Emmanuelle Béart
Musique de Jean-Louis d'Onofrio, paroles de Franck Ivy.
En 87, ce tube du Top 50 avait été chanté par Corynne Charby (comédienne qui jouait dans La Chèvre). Pure pop-song, Béart lui donne un peu de sens. La chanteuse d'origine n'a toujours pas été réhabilitée par les show TV célébrant les eighties. Pourtant elle fait partie de ses chanteuses dont le succès dure une année, intense. On a évité Boule de flipper…
" Pas la peine de se retourner
Sur le tableau décroché
La craie s'efface
Y'a plus de traces
Et moi je vis ma vie
A pile ou face
Tous mes sentiments
A pile ou face "
" Toi jamais " - Catherine Deneuve
Musique et paroles de Michel Mallory
Chanson française dans la plus grande tradition. Il faut dire que Mallory a écrit pour Sardou, , Vartan, Hallyday, … L'ironie est que cette chanson fut chantée par Sylvie Vartan, la plus " glamour " des chanteuses yé-yés. La même Vartan qui aurait du jouer le rôle principal des …. Parapluies de Cherbourg, qui valut à Deneuve la carrière qu'on lui connaît. C'était en effet le premier choix de Demy. On retrouve ce titre sur l'album de 76, " Qu'est ce qui fait pleurer les blondes ? " Ici la chanson est quasiment murmurée, sans trop d'effet.
" Il n'y a pas d'amour heureux " - Danielle Darrieux
Poème de Louis Aragon, mise en musique par George Brassens.
Sans doute en qualité, le must du film, et son final. Le poète, adulé par les communistes, rencontre le guitariste prodige et anarchiste, avec la voix d'une des plus grandes dames du cinéma. Evidemment cela surclasse tout le reste. Pas innocent que cette chanson fut reprise par Nina Simone (en 93). 10 ans avant, en 83, c'est Barbara qui avait chanté Brassens à travers ce poème extrait de " La Diane Française " (1946). Brassens enregistra la chanson en 53 (Les amoureux des bancs publics).
" Rien n'est jamais acquis à l'homme Ni sa force
Ni sa faiblesse ni son coeur Et quand il croit
Ouvrir ses bras son ombre est celle d'une croix
Et quand il croit serrer son bonheur il le broie
Sa vie est un étrange et douloureux divorce
Il n'y a pas d'amour heureux "
Vincy