(c) Ecran Noir 96 - 24 |
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EN : On parle beaucoup de la place des femmes dans le cinéma, notamment du manque de réalisatrices. Vous, quand on regarde votre filmographie, vous avez tourné de manière assez équitable avec des hommes et des femmes. C’est le hasard ou un choix conscient de votre part ?
IC : C’est complètement un hasard ! Je ne suis pas allée plus vers des femmes, c’est le sujet qui m’a imposé le désir de le faire ou pas. Si j’y réfléchis bien, c’est vrai que je me sens complètement en complicité avec les femmes, avec les actrices aussi. Je pense que c’est quelque chose de très machiste aussi cette idée qu’il y a une concurrence entre nous, qu’on se crêpe le chignon, qu’on se jalouse… Au contraire, moi, chaque fois que je vois des actrices, on se sent plutôt dans une sororité. On partage une expérience tellement commune, très forte, de partager des personnages si différents, si intenses. On a des choses à se raconter et à partager. J’aime beaucoup ça, ces rencontres. Et jouer avec des actrices !!! J’adore les acteurs, hein. Mais c’est vrai qu’en tant que spectatrice, tout simplement, je me projette toujours plus sur les rôles féminins, et donc sur les comédiennes, et ça me touche plus. Après, je ne vois pas trop de différence entre la direction d’une femme et d’un homme, mais je vois plutôt une différence dans le fait que le réalisateur ou la réalisatrice soit également acteur ou actrice. C’est ça qui change la donne. Par exemple, avec Jalil Lespert qui est également comédien, il y a une familiarité, il y a un langage très rapide, très simple, très commun, entre nous. Je peux aussi parler de Zabou, Mélanie Laurent… Vraiment, quand c’est quelqu’un qui a déjà joué, c’est autre chose.
Mais moi je suis plus optimiste que vous sur la question des femmes. J’ai l’impression qu’il y a de plus en plus de femmes. Je ne sais pas si c’est parce que je suis chanceuse, mais je trouve qu’il y a de plus en plus de beaux personnages féminins, aussi. Par exemple, cette année, j’ai joué 4 ou 5 rôles très denses. Très différents et très passionnants. Je vais citer à nouveau les Larrieu, mais vraiment, quel rôle magnifique ils ont écrit ! Ils disaient que j’étais leur point de vue. D’habitude, c’est Mathieu Amalric. Là, c’était un personnage féminin, et ils disaient eux-mêmes que c’était la première fois qu’ils se mettaient en scènes en femme. C’était chouette de faire ça ! C’était passionnant de voir le regard de deux hommes sur la femme qu’ils seraient. C’était génial.
J’ai l’impression que ça va mieux, il y a de plus en plus de femmes qui réalisent, c’est devenu une réalité du cinéma d’aujourd’hui. Tant mieux ! Moi, cette année, j’ai tourné autant avec des hommes qu’avec des femmes. Mais je suis d’accord avec vous : il était temps ! Quand on sait qu’il y a plus de 60 palmes d’or et qu’une seule a été remportée par une femme. Et encore, ex-aequo ! Je veux bien que pendant des années il y avait moins de femmes, ça peut justifier. Mais ce n’est plus le cas, et c’est quand même assez étonnant.
EN : Et vous, la réalisation, ça vous tente ?
IC : Ah, ah ! J’adorerais ! Mais je suis un peu comme Marie Belhomme, c’est peut-être pour cela qu’elle m’a autant touchée, je sais pas du tout si je m’en sentirais capable. Par contre, mettre en scène au théâtre, ça, oui, je m’en approche. Je m’en approche très concrètement, même. Mais je préfère ne pas en parler car ce n’est pas encore tout à fait sûr. Dans le cinéma, la technique me fait un peu peur, la dimension financière aussi, alors que j’ai l’impression que le théâtre est plus artisanal. Ca me semble plus mon domaine, surtout parce que du coup je n’aurais qu’à me concentrer sur la direction d’acteurs, ce qui me passionne vraiment. Le texte, l’histoire, la scénographie aussi ! Trouver une image suffisamment forte pour qu’elle tienne une heure et demie, deux heures. Faire en sorte que les acteurs puissent se sentir libres là-dedans et être inspirés… Tous les aspects du théâtre, en fait.
MpM
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