Une nouvelle grève se profile à Hollywood

Posté par geoffroy, le 9 décembre 2008, dans Business.

screen actor guild campagne.jpgRien ne va plus entre l’AMPTP (Alliance des producteurs du cinéma et de télévision regroupant 397 producteurs dont 8 grands studios) et le SAG (« Screen Actors Guild », principal syndicat d’acteurs regroupant quant à lui 120 000 membres). L’incapacité des deux parties à trouver un compromis sur la renégociation du contrat triennal régissant le travail de dizaines de milliers d’acteurs américains (qui a expiré le 30 juin dernier), entraîne Hollywood dans un mauvais remake dont les coûts pourraient s’avérer désastreux pour l’industrie du film. Rappelez-vous, il y a tout juste un an, les scénaristes et les réalisateurs – soutenus par les acteurs – avaient engagé un véritable bras de fer contre les studios au cours d’une grève mémorable de 101 jours pour une perte nette évaluée à 2,5 milliards de dollars. Si les scénaristes avaient fini par obtenir gain de cause, les répercussions économiques d’un tel conflit social avaient ébranlé les fondations de la maison Hollywood. En ces temps de crise financière mondiale personne ne souhaite rééditer un pareil affrontement. Et pourtant…

Commencées en juillet de cette année, les négociations sur la redéfinition du contrat de travail des acteurs n’ont toujours pas abouti et, plus grave, sont au point mort. L’AMPTP a proposé un nouveau texte garantissant le versement de 250 millions de dollars aux acteurs les plus modestes (moins de 100 000 dollars par an) sur trois ans. Insuffisant pour le SAG qui considère ce texte comme un vulgaire copié-collé des accords minoritaires signés le 9 juillet 2008 par l’AFTRA (American Federation of Television & Radio Artists, syndicat minoritaire regroupant 70 000 membres). Par ailleurs, le SAG rappelle que 44 000 de ses membres sont également affiliés à l’AFTRA, ce qui pose sérieusement la question de la représentativité d’un accord contesté de toute part. Mais plus encore, et c’est sans doute là le nerf de la guerre, ce nouveau contrat ne répond pas spécifiquement à la revendication du SAG portant sur la réévaluation des dividendes perçus par les acteurs sur la vente de DVD et des œuvres exploitées sur internet. En réponse, l’AMPTP considère cette revendication comme irréaliste estimant qu’aujourd’hui on ne peut réévaluer une quelconque somme sur des médias eux-mêmes pas ou peu rentables.

A la suite de ces divergences, un médiateur fédéral (Juan Carlos Gonzalès) a été mandaté pour relancer le processus de négociation entre le patronat et le syndicat. Deux sessions marathon (27 heures de négociations) n’auront pas permis de débloquer la situation afin de mettre sur pied un compromis satisfaisant. Retour à la case départ ; nous sommes le 22 novembre.
"Nous avons déjà fait beaucoup de sacrifices"
La conséquence directe de cet échec ne s’est pas faite attendre et le SAG a décidé de mener une campagne d’information auprès de ses membres pour obtenir l’autorisation de lancer une grève. « Nous avons déjà fait beaucoup de sacrifices et pris des décisions difficiles dans le but de parvenir à un accord. Il est désormais temps pour nos membres de se montrer unis et de se rallier derrière le comité de négociations national pour s’appuyer sur la menace d’un arrêt de travail. Nous souhaitons tout faire pour éviter la grève mais nous ne pouvons laisser nos employeurs jouer avec nos carrières. La Writer Guild of America (syndicat des scénaristes) a appris que les accords auxquels elle était parvenue avec l’AMPTP sur les nouveaux médias n’ont pas été honorés. Nous ne pouvons laisser nos employeurs jouer avec le futur de nos membres et de leurs familles ». La démarche est longue – un mois de consultation- et doit être validée par un vote final devant recueillir 75% d’avis favorables. Pourtant, le risque d’une nouvelle grève est bien réelle et tomberait au plus mauvais moment pour Hollywood, déjà fragilisé par la crise actuelle.

Cet appel à la consultation a fait bondir l’AMPTP qui, depuis la crise mondiale, n’hésite pas à mettre directement en cause la responsabilité du syndicat sur les dégâts humains et financiers en cas de blocage des productions programmées en 2009. Selon eux, le SAG « doit comprendre qu’une grève serait économiquement dévastatrice pour toute l’industrie, y compris pour ses propres membres, ainsi que pour l’économie en général (…) Une grève du SAG en ce moment de marasme financier reviendrait à verser de l’essence sur un incendie, et c’est incroyable que le SAG puisse appeler au vote d’une grève quand le reste du pays est confronté à une crise financière sans précédant ».

Dernier point, sans doute symbolique, mais qui a tout de même son importance. Les consultations au sein du SAG devraient commencer l’année prochaine en janvier ou février, soit au moment des cérémonies des Golden Globes et des Oscars. La défense des droits de nombreux acteurs pour la plupart anonymes et concernés au premier chef passe sans doute par là. A moins qu’un accord de la dernière minute puisse se conclure en cette période de fêtes. L'hypothèse est peu probable et Hollywood peut craindre une double peine : la grève sociale s'ajoutant à la crise économique.

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