La Beauté des choses de Bo Widerberg en version restaurée au cinéma

Posté par MpM, le 4 février 2020

Ce sera l’un des grands plaisir de cette année 2020 : (re)découvrir au cinéma l’oeuvre passionnante du cinéaste suédois Bo Widerberg, grâce au travail de la société Malavida qui va ressortir tout au long de l'année une partie de ses films en version restaurée. Avant la sortie de Tom Foot le 29 avril, et la rétrospective Bo Widerberg, cinéaste rebelle le 24 juin (comportant Le péché suédois, Le Quartier du corbeau, Amour 65, Elvira Madigan, Adalen 31 et Joe Hill), on peut redécouvrir depuis le 29 janvier La Beauté des choses, le dernier long métrage du cinéaste, inédit en France, qu'il avait tourné en 1995, presque dix ans après son précédent film Le chemin du serpent.

C’est un film d’une grande vitalité, profondément liée au passé de Widerberg, tourné dans sa ville natale avec son propre fils. L’Histoire en est en apparence ambiguë : un jeune adolescent tombe sous le charme de Viola, sa professeure plus âgée, et devient son amant. Mais, peu à peu, il se lie avec le mari de la jeune femme, avec lequel il développe une véritable complicité. Le récit se mue alors en une comédie joyeuse et décomplexée, qui oscille entre l’histoire d’amour atypique et le trio peu conventionnel.

En parallèle, on découvre l’atmosphère de Malmö, petite ville de province suédoise à la fois d’une immuable tranquillité, et secouée malgré tout régulièrement par les échos de la deuxième guerre mondiale qui bat son plein. Bo Widerberg réussit un portrait espiègle de l’adolescence (au travers notamment des interrogations très concrètes de Stig et de ses camarades, émoustillés par les mystères de la sexualité) et presque un feel good movie dans lequel la chair, le coeur et l’esprit sont libres. Pendant les trois quart du film, l’humour le dispute à la fantaisie et à une certaine forme d’audace scénaristique, surprenant le spectateur par la manière dont le réalisateur déjoue et bouleverse les codes du film d’adultère.

C’est le cas par exemple lors de la première rencontre entre Stig et Franck, le mari de Viola, qui le prend pour un étudiant prenant de cours particuliers. La relation qui se noue entre eux est ensuite une succession de moments cocasses, dont le clou est l’utilisation (ingénieuse) que fait Franck du coucou de sa cuisine, transformé en distributeur de gin. Le mari trompé, passablement alcoolique, fait d’ailleurs une apologie simple mais incontestable de son alcool préféré, qui est trop bon pour qu’il lui résiste.

On l’aura compris, Bo Widerberg se soucie assez peu du politiquement correct et des ligues de vertu, donnant une vision à la fois décalée et ironique de la “beauté des choses” vantée par le titre. D’autant que tout se gâte dans la dernière partie du récit, lorsque Stig fait peu à peu l’amère expérience de la réalité sournoise du monde adulte. Viola, ne pouvant accepter qu’il la néglige (d'autant que c'est pour lui une manière de prendre clairement parti pour son mari), lui donne à voir un autre visage lors d’une scène assez brutale où elle abuse de son autorité sur lui. On pense, alors, à la notion d’emprise si souvent évoquée dans le cadre d’une relation amoureuse ou sexuelle entre adultes et adolescents. De la même manière, Franck, l’ami-confident, n’est d’aucun secours, trop inféodé à sa femme pour aller contre sa volonté, et d'une lâcheté veule quand il s'agit de défendre le jeune homme.

Stig se retrouve ainsi seul, violemment renvoyé à sa place d'élève soumis au bon vouloir de ses professeurs. L’injustice est criante, insupportable, humiliante. Elle renvoie des adultes et de leurs jeux une image tout sauf flatteuse, dénuée de loyauté et d'honneur, et même d'intérêt.

De tous les personnages adultes, Bo Widerberg ne sauve d'ailleurs guère que le projectionniste, celui par qui la magie du cinéma opère, et qui en plus vient en aide à Stig, et la mère du jeune homme, avec laquelle il entretient une complicité heureuse et spontanée. Les autres donnent de l’avenir une vision terriblement pessimiste qui est comme le modèle de ce qu’il ne faut pas devenir. Le dernier plan rassure le spectateur, Stig a bien compris la leçon, et suivra son propre chemin dans le monde en homme libre et indompté.

Décès de David Kessler, directeur d’Orange Content

Posté par vincy, le 4 février 2020

David Kessler est mort soudainement à l'âge de 60 ans dans la nuit de lundi et mardi.

Il a dédié toute sa carrière à la culture, et notamment l'audiovisuel. Curieux, passionné, engagé, il a été conseiller culture du Premier ministre Lionel Jospin (1997-2001). "C'est quelqu'un qui ne voulait pas faire carrière mais il avait tellement de talents qu'on pensait à lui", a-t-il commenté dans L'instant M sur France Inter.

Il aussi été conseiller chargé de la culture  du maire de Paris Bertrand Delanoë (2009-2011), qui lui a rendu hommage sur Twitter en évoquant un homme "intelligent, cultivé, rayonnant, libre". Il fut aussi conseiller culture et communication du président de la République François Hollande (2012-2014), qui a également réagit sur Twitter: "David Kessler a consacré sa vie à la culture sous toutes ses formes et à la création dans toutes ses dimensions. C’est ainsi qu’il pensait servir son pays, au sein de l’Etat ou à la tête de grands organismes publics ou privés."

Médias et cinéma

David Kessler a fait l'essentiel de son parcours dans les médias: directeur général du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) de 1996 à 1997, directeur du Centre national du cinéma (CNC) de 2001 à 2004, directeur de France Culture (2005-2008), directeur général délégué de Radio France chargé de la stratégie et des contenus et président du Forum des Images (2008-2009), à la tête du magazine Les Inrockuptibles (2011 -2012), directeur de la publication de la version française du site d'informations Huffington Post.

Depuis 2014, ce normalien très respecté et ouvert d'esprit, dirigeait Orange Content, la division "contenus" de l'opérateur de télécoms, qui regroupe notamment la filiale de production Orange studio et OCS, qui cumule 38 nominations aux prochains César avec des films comme La belle époque, Hors Norme, J'accuse et Grâce à Dieu ...

Dans les cartons du studio, on attend les prochains films de Kheiron, Martin Provost, Alain Guiraudie, Sylvie Verheyde et Frédéric Carpentier.

OCS a réalisé 45 préachats pour 32M€ en 2019. C'est, en valeur, la 4e chaîne française derrière Canal +, France 2 et TF1. 25 des films préachetés en 2019 étaient des premiers et deuxièmes films.