Nandita Das n'est pas une inconnue du Festival de Cannes Il y a treize ans, elle était membre du jury des longs métrages et il y a cinq ans elle était revenue pour être jurée de la Cinéfondation et des courts métrages.Mais cette fois-ci, plus question de juger les autres: c'est son film Manto qui se retrouve sous les projecteurs, à Un Certain Regard.
Manto est basé sur une histoire vraie, celle de l'amitié entre l'auteur et dramaturge Saadat Hasan Manto et de l'acteur vedette de Bollywood Shyam Chadda dans une Inde tout juste indépendante à la fin des années 1940. Pour annoncer la production de son film, Nandita Das avait réalisé un court-métrage, In Defence of Freedom, juste avant le Festival de Cannes de l'an dernier.
Fille du peintre Jatin Das et de l'écrivaine Varsha Das, athée, diplômée en géographie, fondatrice de l'agence de pub "éthique" Leapfrog avec son ex-mari, Nandita Das appartient à l'élite intellectuelle indienne. Elle est impliqué dans différentes actions (droit des enfants, lutte contre le sida, violences faites aux femmes). Elle a tourné dans plus de 40 films comme comédienne dont Aamaar Bhuvan, un Jules & Jim de Mrinal Sen (2002), ou Neer Paravai de Seenu Ramasamy (2012), un mélo autour d'une communauté catholique vivant dans la misère. En début d'année, elle était la vedette de Dhaad, un drame d'action de Paresh Naik.
Actrice et réalisatrice indienne hors-Bollywood, Nandita Das, 48 ans, s'est fait connaître avec des films aux sujets un peu tabous dans son pays. Fire, en 1996, de Deepa Metha, traitait ainsi de l'homosexualité féminine. Le rôle lui permet cependant de devenir célèbre. Toujours avec le cinéaste Deepa Metha, deux ans plus tard, elle est au générique de Earth, film sensible sur l'indépendance et la partition de l'Inde et du Pakistan. En 2000, elle incarne une femme victime d'un viol collectif en quête de justice dans Bawandar de Jag Mundhra. Elle retrouve le cinéaste pour Provoked en 2007, interprétant une femme soutenant une épouse maltraitée qui a tué son mari.
En 2008, Nandita Das décide de réaliser ses propres films, souvent politiques et engagés, offrant un regard critique sur un pays qui se nourrit de la violence entre les castes, entre les religions, entre les ethnies. Son premier film Firaaq évoque ainsi les violences au Gujarat de 2002, quand l'incendie d'un train de pèlerins hindous ayant entrainés 58 morts conduit à des émeutes visant les populations musulmanes de cette région limitrophe du Pakistan tuant de 800 à 2000 personnes. Le point de vue singulier e la réalisatrice permet de "donner de la voix" aux délaissés comme aux puissants. Le film a remporté une dizaine de prix dans le monde.
Dix ans plus tard, elle revient derrière la caméra avec Manto. Et par la grande porte cannoise.