Le Songe de la lumière : reprise en salle et sortie DVD du film de Victor Erice

Posté par Claire Fayau, le 21 septembre 2010

L'histoire : Automne 1990, à Madrid. Le peintre Antonio López commence un nouveau tableau dans le jardin de sa maison. Il choisit un thème qu’il a maintes fois traité par le passé, la maturation de l’arbre fruitier, et s’intéresse à un cognassier qu’il a lui-même planté. Néanmoins, le peintre pousse sa réflexion et tente, pour la première fois, de représenter également la lumière du soleil. Au fil des jours, le tableau prend forme, mais la pluie automnale redouble de vigueur et le cognassier commence à flétrir irrémédiablement…

Si la vie est un songe pour Calderon, ce songe est lumière pour Antonio López et le réalisateur Víctor Erice, juré du dernier festival de Cannes (voir son bref portrait), cinéaste rare et exigeant.
Prix du Jury au Festival de Cannes 1992, Le Songe de la lumière (El sol del membrillo) est un film lumineux, contemplatif, poétique, qui laisse la place au temps qui passe et au silence.
Certains trouveront le temps long (134 minutes) mais lorsque l'on sait que le peintre a passé des mois et des mois à tenter de capter la beauté de "son" arbre et de sa lumière, on décide de se laisser porter par les -belles- images de cet objet filmé non identifié.

Il y a déjà eu des films sur la peinture (Frida , Van Gogh, Séraphine...) mais aucun ne s'était attardé à ce point sur le processus créatif et la patience nécessaire à cette création.

On ne tombe pas non plus dans le genre "la peinture pour les nuls", ou "chef -d'œuvre mode d'emploi" ; Antonio est filmé dans sa vie quotidienne : manger, se lever, discuter avec la famille et ses amis, se faire couper les cheveux... et enchaîner avec une réflexion sur Michel Ange. Oeuvre philosophique, elle démontre que l'image a un sens. Et donne un sens.

Pour Antonio, le résultat importe peu (parabole de la création qui frustrerait les perfectionnistes, miroir tendu à son réalisateur) mais plutôt le cheminement, faire et refaire  essayer d'atteindre un absolu, la beauté de l'instant présent.

Quitte à laisser tomber : "J'ai commencé par un tableau et fini par un dessin (...) Il faut bien renoncer à quelque chose." L'humilité et la lucidité l'emportent sur l'ambition et la reconnaissance.

En ces temps où l'on exige rapidité d'exécution et rentabilité constante, ce songe est une respiration pleine d'oxygène.

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Sortie en salles le 22 septembre. En DVD chez Carlotta.