L’instant Court : Léo, réalisé par Estelle Dumas

Posté par kristofy, le 22 octobre 2013

LeoComme à Ecran Noir on aime vous faire partager nos découvertes, alors après l’actrice Léa Seydoux devant les caméras de Jean-Paul Goude, Wes Anderson et Roman Coppola, voici l’instant Court n° 118.

Parmi les nombreux nouveaux films sortis sur les écrans la semaine du 16 octobre, le monde de l'enfance et les relations parents/enfants sont particulièrement imagés, notamment avec  L'Extravagant voyage du jeune et prodigieux T.S. Spivet et Au bonheur des ogres... Mais ailleurs, tout n'est pas si rose.

Tout commence par une scène du quotidien, banale. Mais quelque chose ne tourne pas rond…

Voici donc le court-métrage Léo, avec Françoise Cadol et Roméo Périsson, réalisé par Estelle Dumas :

Estelle DumasEcran Noir : Une particularité de Léo, c’est son extrême concision. Comment est arrivée cette idée ?
Estelle Dumas : C’est une longue histoire, que je vais essayer de faire courte. J’étais dans un cours d’écriture de scénario, et à la troisième session la prof nous a parlé du conflit interne et du conflit externe chez des personnages. Elle nous a demandé de s’isoler avec un papier et un crayon pour écrire une séquence avec au moins deux personnages sinon plus en conflit externe dont un avec un conflit interne qui devient le héros. L’histoire qui est devenue ensuite ce court Léo est arrivée de manière très naturelle en partant d’un souvenir de ma maman, pas pauvre comme celle du film, qui voulait que je mange. Donc un conflit entre une mère et son enfant, et pour le conflit interne j’ai travaillé sur la mère. C’est venu très vite, en une trentaine de minutes. C’est devenu mon premier scénario que j’ai toujours gardé dans le cœur et dans le ventre pendant environ deux ans. Alors je me suis dit : "il faut que je le réalise".

EN : C’est ton premier court-métrage, tu t’es préparée avec un storyboard ?
ED : Il y a eu un storyboard, mais pas dessiné : j’ai fait un storyboard filmé en vidéo. Comme c’était mon premier film, j’avais des complexes comme ne pas être à la hauteur de mes techniciens. J’ai fait venir mon chef-opérateur et mon premier assistant et les comédiens sur le lieu du tournage, et avec un petit caméscope tout simple j’ai tourné le court-métrage de la manière dont je voulais le tourner, comme un modèle de ce que ça devrait être. Plutôt que des dessins, le storyboard était ce qui avait été filmé avec ce petit caméscope, pour dire je veux ça cadré comme ça avec les comédiens qui bougent comme ça. Mon scénario faisait quatre pages, et chaque ligne était hyper-visuelle dans ma tête. Je savais ce que je voulais, mais je n’avais pas tous les termes techniques pour l’expliquer à mes techniciens qui sont de haut niveau : mon premier assistant Frédéric Louf est réalisateur de longs métrages (J'aime regarder les filles) et mon chef-opérateur Georgi Lazarevski a eu une palme d’or (pour Entre les murs de Laurent Cantet), donc il ne fallait pas que je me plante. Ce storyboard vidéo a été ma façon de m’exprimer non pas par la parole mais par l’image.

EN : Qu’est-ce qui a été le plus facile ou le plus difficile durant le tournage ?
ED : Je suis une débutante, mais tout a été plutôt facile. J’ai monté mon équipe de 25 personnes en dix jours, je passais un coup de téléphone puis un autre et on ne m’a jamais dit non, ça a été rapide. Je me suis autoproduit, je savais combien je voulais mettre dans le film et le budget n’a pas été dépassé. Je m’attendais à ce que le plus difficile soit de diriger les comédiens, mais je m’y attendais donc ce n’était pas une surprise non plus. J’ai vu plusieurs personnes pour le petit garçon et pour sa maman, c’est un peu une question irrationnelle, le choix ,mais j’ai eu la chance d’avoir deux comédiens exigeants. La direction d’acteur a été peut-être la chose la moins évidente.

EN : Qu’est ce que tu ferais différemment ?
ED : Rien. Il y a plein de gens quand ils revoient leurs films qui se disent qu’ils feraient telle ou telle chose autrement, mais pas moi. Je ne dis pas que c’est un chef d’œuvre, j’y trouve des défauts mais je les aime aussi, et surtout j’aime mon film. J’entends des gens qui disent qu’ils ne comprennent pas bien ou que ce n’est pas assez long dans les critiques négatives mais moi je ne veux rien changer. J’ai voulu que ce film soit très court, j’avais plein de choses à dire mais je voulais être concise dans l’écriture et la réalisation, alors que dans la vie je suis une grande bavarde.

EN : Et depuis Léo ?
ED : Le film tourne encore dans les festivals, il a eu un prix d’interprétation pour la comédienne l’année dernière au festival de Pontault-Combault. Il a été sélectionné au festival de Clermont-Ferrand et dans plein d’autres festivals comme Vaulx-en-Velin, Grenoble, Vannes… Pendant ce temps, j’écris un long-métrage qui s’appelle pour l’instant Séance Spéciale, qui est l’histoire d’une jeune femme qui part faire de l’humanitaire en ex-Yougoslavie pendant la guerre. Le projet est déjà bien avancé, mais il y aura peut-être un court métrage entre-temps.