Cannes 2016: le palmarès de la Cinéfondation

Posté par vincy, le 20 mai 2016

Le Jury de la Cinéfondation et des courts métrages - cette année présidé par Naomi Kawase, entouré de Marie-Josée Croze, Jean-Marie Larrieu, Radu Muntean et Santiago Loza - a décerné les prix de la Cinéfondation, lors d’une cérémonie salle Buñuel, suivie de la projection des films primés.

Le Premier Prix récompense le film israélien de Or Sinai (The Sam Spiegel Film & TV School), Anna. Il est doté de 15000€ et reçoit un ticket pour un prochain festival de Cannes dès son premier long métrage.
Le Deuxième Prix est remis au britannique Hamid Ahmadi (The London Film School), In The Hills. Il est doté de 11250€.
Le Troisième Prix est ex aequo entre le film hongrois de Nadja Andrasev (Moholy-Nagy University of Art and Design), A Nyalitas Nesze, et le vénézuélien Michael Labarca (Universidad de Los Andes), La Culpa, probablemente. Ils reçoivent 7500€.

La Cinéfondation accorde aux trois lauréats la même dotation – 15 000 € pour le premier, 11 250 € pour le deuxième et 7 500 € pour les troisièmes – sur présentation d’un traitement de long métrage dans les 2 ans qui suivent ce palmarès.

Poitiers Film Festival 2015 : le tour du monde en 47 films

Posté par MpM, le 11 novembre 2015

poitiers20151412 candidats, 47 sélectionnés. Des chiffres toujours plus vertigineux pour le Poitiers Film Festival dont la 38 édition se tiendra du 27 novembre au 4 décembre, et qui met à l'honneur les films de cinéastes en devenir issus de 34 écoles et 22 pays.

Les festivaliers voyageront donc de Cuba au Japon, de Pologne au Canada, de Thaïlande en Israël pour une compétition mêlant tous les genres et les styles.

Pour accompagner cette belle fenêtre ouverte sur la jeune création cinématographique mondiale, plusieurs temps forts rythmeront les dix jours du festival :

- une ouverture sous le signe du premier long métrage avec Le grand jeu de Nicolas Pariser, déjà précédé d'une belle réputation, un focus sur le cinéma allemand en présence de l'acteur Rüdiger Vogler (acteur fétiche de Wim Wenders) et du réalisateur Christoph Hochhäusler (Les Amitiés invisibles, L’Imposteur...),

- une master class sur la restauration de films en hommage aux 120 ans du cinéma et de la Gaumont, avec Jean-Paul Rappeneau en guest star,

- et une leçon de cinéma proposée par Pierre Schoeller (L’Exercice de l’État, Versailles...), Jean-Pierre Laforce et Philippe Schoeller.

Un rendez-vous à ne pas manquer pour les amoureux du 7e art, les simples amateurs et bien sûr les aspirants étudiants en cinéma ! Car comme le rappelle le festival, quand ces jeunes cinéastes "seront à l’affiche des salles de cinémas avec leurs longs métrages, le public du Poitiers Film Festival pourra dire qu’il les a vus à Poitiers. Et même qu’ils les a rencontrés."

Poitiers Film Festival 2015 : l’Allemagne à l’honneur

Posté par MpM, le 23 août 2015

poitiers2015Pour sa 38e édition, le Poitiers Film Festival (ex "Rencontres Henri Langlois") poursuit son oeuvre de révélateur et de soutien du jeune cinéma, soucieux d'être toujours là où se construit le cinéma, où se confrontent les écritures, où les jeunes réalisateurs peuvent s’affranchir des règles et tout tenter.

Après l'immense succès de l'édition 2014 (qui a attiré près de 19000 spectateurs), la manifestation proposera du 27 novembre au 4 décembre une cinquantaine de films d'école venus de tous les horizons, qui auront préalablement été sélectionnés parmi plus de 1300 candidats. C'est dire la qualité, et le niveau exigence, dont témoignent les heureux compétiteurs.

Par ailleurs, le festival met cette année l'Allemagne à l'honneur à travers les courts métrages de jeunes réalisateurs venus de Berlin, Hambourg, Cologne, Postdam et Ludwigsburg invités à Poitiers et accompagnés de grands noms du cinéma allemand. Ce focus sera accompagné d'un regard sur les films cultes de cinéastes allemands confirmés comme Wim Wenders, Fatih Akin, Andreas Dresen ou encore Christian Petzold...

Comme chaque année, Poitiers se distinguera également par sa leçon de cinéma, ses événements professionnels, ses avant-premières en présence des équipes des films et bien sûr ses fêtes et ses rencontres qui en font un grand rendez-vous du jeune cinéma mondial.

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Poitiers Film Festival
Du 27 novembre au 4 décembre 2015
Plus d'informations sur le site de la manifestation

Rencontres Henri Langlois 2013 : la relève française ?

Posté par MpM, le 7 décembre 2013

TRUCS DE GOSSESParmi les 45 films en compétition lors de la 36e édition des Rencontres Henri Langlois, sept viennent d'écoles françaises, ce qui donne un aperçu instructif de la production des jeunes étudiants de notre pays.

Première constatation, sur les 7 films, 6 sont des œuvres d'animation (au centre du cursus des écoles représentées comme La poudrière ou Supinfo Com). Les techniques les plus fréquemment utilisées sont le dessin et l'animation 3D.

Les sujets, eux, sont généralement légers, voire anecdotiques, comme prétextes à ce qui peut parfois s'apparenter à un exercice de style : la cour de Versailles représentée sous forme de gallinacés (A la française de Julien Hazebroucq, Emmanuelle Leleu, William Lorton, Morrigane Boyer et Ren Hsien Hsu), une escapade de vieilles maisons qui prennent leur indépendance (Home sweet home de Pierre Clenet, Alejandro Diaz, Romain Mazanet et Stéphane Paccolat), TROIS PETITS CHATSune histoire d'amour estivale (Soeur et frère de Marie Vieillevie)...

Le tragique est aussi au rendez-vous avec une famille de félins durement frappée par la maladie (Trois petits chats de Maïwen Leborgne, Albane Hertault, Alexia Provoost et Benoit belaunay).

Les petits chats sont mignons, les poules sont amusantes, les maisons ne manquent pas de souffle... mais pas facile, en à peine quelques minutes, de développer une histoire vraiment originale ou profonde.

Trois œuvres parviennent malgré tout à imposer leur singularité :

PIEDS VERTS- Trucs de gosse d'Emilie Noblet (la Fémis) parce qu'il s'agit d'un film réalisé en prises de vue réelles, situé dans les coulisses d'un multiplexe parisien, qui mélange film générationnel et comédie romantique décalée.

- Pieds verts d'Elsa Duhamel (La poudrière), un documentaire en teintes pastels qui raconte, en 4 minutes et avec une pudeur infinie, la nostalgie immense de Jeanine et Alain, Français d'origine algérienne, envers leur enfance en Algérie, pleine de senteurs, de couleurs et de saveurs.

- Ginette de Marine Laclotte et Benoît Allard (école des métiers du Cinéma d'animation) qui met en scène le témoignage de Ginette sur sa vie agricultrice et de femme, avec un trait naïf et une animation faussement artisanale. GINETTE

On sent, à la vue de ces œuvres, que la qualité française (technique, rigueur, écriture) est toujours au rendez-vous, même si les idées et les moyens restent plus modestes.

Et surtout, on vérifie une tendance passionnante du cinéma actuel : utiliser l'animation sous toutes ses formes non plus comme simple vecteur d'imaginaire, ou à destination d'un jeune public, mais comme support de témoignages ou de documentaires qui y gagnent en force d'évocation mais aussi en poésie et en qualité de narration. Après avoir découvert ces œuvres fragiles, on a hâte de voir ce que nous réservent ces jeunes cinéastes dans les années à venir.

Rencontres Henri Langlois 2013 : la Palestine, le Liban et Israël dans un focus commun

Posté par MpM, le 5 décembre 2013

rencontres henri langlois 2013En organisant un focus autour du cinéma de l'est du bassin méditerranéen, les organisateurs des Rencontres Henri Langlois ont pris le risque de voir politique et diplomatie s'inviter dans leur manifestation, puisque ce sont des écoles de Palestine, du Liban et d'Israël qui ont été invitées à présenter leurs travaux à Poitiers.

Hormis une réaction épidermique (et isolée) du Comité poitevin France-Palestine, qui a appelé au boycott des Rencontres, l'initiative a été extrêmement bien accueillie par les principaux intéressés, à savoir les écoles représentées et les réalisateurs invités comme Raed Andoni (Fix me), Hiam Abass (Héritage) ou encore Danielle Arbid (Dans les champs de bataille).

Pour le grand public, c'est surtout une perspective passionnante sur la manière dont l'Histoire et le contexte géopolitique influent directement sur les préoccupations des jeunes cinéastes de la région. Ainsi, comme le souligne Gassam Koteit, directeur adjoint de l’Académie libanaise des Beaux-arts (ALBA) : "les questionnements sont les mêmes des deux côtés".

L'occupation israélienne est ainsi lebanontape1aux centres des films présentés par l'ALBA : familles séparées, enfants ostracisés parce que leur père a coopéré avec l'armée israélienne, étrangers perçus comme de possibles espions israéliens...

Ce qui n'empêche pas un certain recul, voire une bonne dose d'humour. Ainsi, Lebanon: tape 1 qui raconte les étranges relations entre une journaliste française et son équipe technique libanaise. La jeune femme aligne les clichés sur le pays tandis que les deux hommes la traitent d'abord en touriste sexy, puis en ennemie potentielle. Volontairement décalé, le film caricature gentiment à la fois le regard que portent les autres nations sur le Liban, et les mécanismes de méfiance de ses habitants.

space the alleysLe ton est plus sérieux, voire tragique, dans les films des trois écoles palestiniennes Dar al-Kalima College de Bethlehem, Media Development Center de la Birzeit University et Institute of Modern media de l'Université Al Qods.

Il s'agit principalement de documentaires qui donnent la parole à des réfugiés palestiniens, à des familles qui ont été contraintes de détruire leur propre maison, ou encore à des jeunes qui s'opposent à l'occupation israélienne en pratiquant le "parkour", un sport d'acrobaties urbain. Ce dernier film, intitulé Space the alleys, et réalisé par Mohammed Al Fateh, mêle les vues spectaculaires des acrobaties aériennes des personnages à l'utopie d'un mouvement de résistance non violent susceptible d'attirer l'attention sur le sort réservé à ses pratiquants, souvent arrêtés arbitrairement, et parfois même assignés à résidence.

On est également extrêmement touché par le portrait sensible de Naser, jeune homme handicapé qui se démène pour gagner sa vie dignement. Le regard porté sur lui par le réalisateur Ma'moon Al-Herimi semble comme l'éclairer de l'intérieur, donnant à ce simple destin individuel une portée humaine universelle.

Enfin, impossible de ne pas être captivé women of refaiyapar le programme spécial "Water" proposé par le département film et télévision de l’Université de Tel Aviv. Ce projet, dont les neuf films (documentaires et fictions) seront projetés vendredi 6 décembre à Poitiers, regroupe des réalisateurs israéliens et palestiniens autour de la thématique commune de l'eau.

Il s'inscrit dans un ensemble plus vaste qui permet à des réalisateurs des deux pays de travailler sur des projets communs, au-delà de toute considération purement politique. Ce qui constitue au final la meilleure réponse à ceux qui s'accrochent à une vision volontairement manichéenne de la situation israélo-palestinienne.

Rencontres Henri Langlois 2011 : palmarès et clap de fin

Posté par redaction, le 12 décembre 2011

rihl poitiers 2011Les 34e Rencontres Henri Langlois auront particulièrement bien porté leur nom lors de cette édition 2011 ! Cette année, professionnels et amateurs du 7e art se sont en effet réunis dans un esprit de convivialité et surtout de partage pour générer  échanges et débats autour des courts métrages, des leçons de cinémas, des conférences ou encore lors des soirées où l’humeur était au beau fixe. Comme tous les ans, Poitiers s’est ainsi érigé l’espace d’une semaine en un véritable carrefour international des écoles de cinéma, recevant les réalisateurs en compétition, qu’ils proviennent d’Amérique du sud ou d’Europe de l’Est, et incitant son public à découvrir davantage de films provenant d’horizons culturels complètement différents.

Avec des invités d’honneur comme l’illustre réalisateur mexicain Arturo Ripstein, qui a ponctué de sa présence une majeure partie des festivités, ou encore le réalisateur Michel Hazanavicius et le compositeur Ludovic Bource pour leur récent succès The Artist, ces 34e rencontres ont fait plus que jamais le pont entre talents confirmés et en devenir.

Samedi soir, lors de la clôture du festival, le jury composé de Hélène Zylberait, Dante Desarthe, Justin frozen storiesTaurand, Tanel Toom et Stéphane Touitou a donc récompensé le très émouvant et singulier Frozen Stories du Polonais Grzegorz Jaroszuk, également gratifié du prix du public. Le réalisateur offre avec ce court métrage 27 minutes délicieusement grinçantes teintées d’un humour décadent, retraçant la rencontre forcée de deux employés d’un même supermarché menant un quotidien insipide. Dépité de leur incompétence et de leur paresse, le directeur du magasin les sanctionne d’une manière des plus originales : trouver en 48 heures un sens à leurs vies. Un court moment de cinéma, bouleversant de réalisme, et qui happe le public avec ce désarroi que hante la jeunesse du 21e siècle (à l’instar également des générations précédentes) mais ne l’empêche pas d’espérer vivre le bonheur au moins une fois dans sa vie.

Le reste du palmarès fait la part belle à l’Europe de l’Est (boudant la France au passage) et notamment à l’Allemagne, qui place deux films. La Russie cumule quant à elle trois prix pour le seul Reaching Out To Mama d'Olga Tomenko qui repart avec le prix de mise en scène, celui de la Critique française et du jury étudiant.

Pour le public parisien, une partie du palmarès sera repris à la Cinémathèque française le 14 décembre à 20h30. L’occasion de s’offrir un aperçu du meilleur de la toute jeune création cinématographique contemporaine et de goûter a posteriori la fameuse ambiance des rencontres Henri Langlois.
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Le palmarès

Grand Prix du Jury
Frozen Stories de Grzegorz Jaroszuk (Pologne)

Prix Spécial du Jury

L'Échange de Maria Steinmetz (Allemagne)

Prix de la Mise en Scène
Reaching Out To Mama d'Olga Tomenko (Russie)

Prix du Scénario
Silent River de Anca Miruna Lazarescu (Allemagne)

Prix Wallpaper Post
Broken Pieces de Sae-mi Yang (Corée du sud)

Prix Découverte de la Critique Française
Reaching Out To Mama d'Olga Tomenko (Russie)

Mention spéciale du Jury de la Critique Française
Umbral de Matias López (Chili)

Prix du Public
Frozen Stories de Grzegorz Jaroszuk (Pologne)

Prix du Jury Étudiant
Reaching Out To Mama d'Olga Tomenko (Russie)

Prix Amnesty International France
Abuelas d'Afarin Eghbal (Grande Bretagne)

Yanne Yager

Poitiers : focus sur Brises d’Enrique Ramirez, prix du jury étudiant

Posté par MpM, le 16 décembre 2008

brisesUn homme marche sans s’arrêter dans la rue, traverse la route, s’engage dans un bâtiment imposant. La caméra le suit, le précède, l’accompagne. Un impressionnant plan séquence de 10 minutes qui nous mène au travers de la Maison du Gouvernement chilien, du sud vers le nord. En chemin, on croise des gardes, une femme dans un bassin rempli d’eau, des chiens errants. En surimpression, une voix-off égraine des bribes de souvenirs, de pensées, de sensations. C’est un choc, à la fois esthétique et émotionnel. Même sans identifier tous les symboles, on sent confusément le poids de l’Histoire qui pèse sur Brises. D’où l’absolue nécessité de rencontrer Enrique Ramirez, son réalisateur, étudiant d’origine chilienne en deuxième année à l’école du Fresnoy (Tourcoing).

Où avez-vous tourné Brises ?
Enrique Ramirez : J’ai obtenu l’autorisation de tourner dans la Maison du Gouvernement chilien, qui a été détruite pendant le coup d’état de Pinochet puis reconstruite. Cela m’a pris un an d’avoir cette autorisation… et je l’ai eue seulement la veille du tournage. Cet endroit se visite mais seulement dans un sens : du nord vers le sud, c’est-à-dire de <la Place de la Constitution vers la Place de la Citoyenneté. Moi, je voulais aller dans l’autre sens, commencer par le côté interdit.

Pourquoi ?Enrique Ramirez
E.R. : Je trouve ça incroyable que l’on soit en démocratie, que les portes soient ouvertes au public… mais que malgré tout on ne puisse pas choisir le sens de la visite, ou revenir en arrière dans le bâtiment. C’est symbolique du fait qu’au Chili, on essaye d’oublier l’Histoire. Or c’est important pour construire une nouvelle histoire de ne pas oublier le passé ! D’où l’idée de traverser la Maison du Gouvernement qui est un lieu symbolique pour tous les Chiliens. Elle évoque à la fois la guerre civile, la mort d’Allende et le retour à la Démocratie. La traverser, c’est comme traverser l’Histoire. C’est aussi pour cela que l’eau est un élément important dans le film : l’eau nettoie, mais la seule chose que l’on ne peut pas nettoyer, c’est la mémoire.

Vous ne donnez dans le film ni explications sur la signification du lieu ni rappels historiques…
E.R. : J’ai voulu faire le film pour les Chiliens mais aussi pour ceux qui ne connaissent pas notre histoire, que cela fonctionne pour les deux grâce à un travail sur l’imaginaire et les sensations. Et puis la guerre, l’histoire, la mémoire, les gens qui disparaissent… tous les pays connaissent cela ! J’ai voulu donner cette portée universelle au film, d’où l’absence d’explication. Le texte est plutôt autobiographique, il évoque des images de l’enfance qui peuvent parler à tout le monde. Moi, j’ai grandi avec la dictature et ça me paraissait un peu normal car je n’avais rien connu d’autres ! Ce n’est que des années après que j’ai compris ce qui s’était réellement passé.

Comment s’est concrètement passé le tournage ?
E.R. : Nous avions l’autorisation de tourner une matinée. Je n’étais pas sûr que nous aurions le temps de faire deux prises… mais finalement ça a été possible, et c’est la seconde qui est dans le film. Comme le palais est dans la rue principale de Santiago, il n’était pas possible d’arrêter le trafic. Mais j’aime bien travailler comme ça, avec les passants qui font partie du film. J’aime bien le hasard… le fait de ne pas tout contrôler. C’est pour cela que j’aime les plans-séquences.

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A voir : le palmarès complet des Rencontres internationales Henri Langlois.
A noter : Brises sera diffusé le 27 décembre à 20h dans le cadre de la manifestation Dans la nuit les images au Grand Palais à Paris.

Poitiers : des nouvelles d’Afrique

Posté par MpM, le 12 décembre 2008

Où sont-ilsDepuis quelques années déjà, l’Afrique semble le continent oublié (négligé ?) des grandes compétitions internationales. Alors que l’Asie et l’Amérique latine sont tour à tour les chouchous des comités de sélection, l’Afrique, elle, passe systématiquement son tour. Kini et Adams d'Idrissa Ouedraogo, le dernier film africain à avoir été présenté en compétition à Cannes, remonte déjà à 1997 ! Une des excuses souvent avancée pour justifier cette absence est le fait que le continent tourne peu. Or, rien qu’à Nollywood, l’équivalent nigérian d’Hollywood, il se produit chaque année quelque 1200 films. Et les écoles fleurissent sur le continent, du Maroc à la Tunisie, du Ghana au Burkina Faso, du Bénin à l’Afrique du Sud.

D’où ce focus sur l’Ecole africaine organisé par les Rencontres Henri Langlois, avec preuve par l’image que le cinéma africain existe et mérite d’être montré. En 6 longs métrages et 14 courts, les festivaliers ont ainsi la possibilité de se faire une idée plus précise du dynamisme et de la créativité de ses cinéastes, ainsi que de ce qui les préoccupe. Sur l’échantillon des films d’école présentés à Poitiers, on compte notamment une large part de documentaires et de fictions réalistes, inspirées de faits réels, qui confirment le pouvoir de témoignage, voire de dénonciation, conféré au cinéma par les jeunes générations. Au Maroc, Alaa Eddine Aljem critique les rituels ancestraux liés au mariage. Au Sénégal, Fabacary Assymby Coly et Angèle Diabang Brener interrogent la "douleur de l’exil" en rencontrant deux opposants politiques haïtiens exilés depuis quarante ans. Au Ghana, Afeafa Nfojoh dénonce l’esclavage moderne de la pratique Trokosi qui consiste à donner ses filles au prêtre du village pour expier les pêchés de la famille.

Les jeunes cinéastes compensent le manque de moyens techniques et d’expérience par une vitalité d’esprit et une audace qui forcent le respect. D’accord, les jeunes actrices d’Ezanetor, le court métrage d’Afeafa Nfojoh, ont un jeu outré, mais en dépit de ses innombrables maladresses, le film sensibilise le public au problème du Trokosi et n’hésite pas à dénoncer la complicité passive de la société. Entre les mains de tels cinéastes, le cinéma redevient mode d’expression, vecteur de prise de conscience et moteur d’action collective.

Son pouvoir de divertissement n’en est d’ailleurs pas pour autant nié, comme le prouve le très réussi Où sont-ils de Kossa Lelly Anité, ou la quête impossible de Lelly, jeune cinéaste du Burkina Faso, désireuse de rencontrer le "Belge typique". A la fois réflexion sur l’identité (construite, innée, revendiquée, héritée, acquise…) et déambulation pleine d’humour dans le Bruxelles contemporain, ce documentaire réconcilie un cinéma africain qui serait irrémédiablement lié aux traumatismes du passé avec un cinéma occidental forcément détenteur de la modernité et du savoir-faire. Logique, puisque le film est le résultat d’une collaboration entre Belgique et Burkina Faso, donnant un aperçu très prometteur de ce que pourrait être une telle collaboration à grande échelle.