Christophe Honoré adapte La Princesse de Clèves

Posté par MpM, le 28 juin 2008

La belle personne

Tout est parti de l’une de ces sorties populistes dont Nicolas Sarkozy a le secret. Alors président de l’UMP et futur candidat à la présidentielle, il se moque du "sadique ou de l’imbécile" qui a mis La princesse de Clèves au concours d’attaché d’administration, ironisant sur l’intérêt que ce roman poussiéreux et vieillot pourrait bien avoir pour la guichetière de la poste. Comme bien d'autres, Christophe Honoré s’en émeut, et réfléchit aux résonances que ce livre du 17e siècle trouve justement dans notre société. Aussi, lorsque la productrice Florence Dormoy lui parle de son désir de produire pour Arte un film autour de ce célèbre récit de Madame de Lafayette, c’est pour lui l’occasion d’apporter un démenti à cette négation de l’importance et de l’utilité des œuvres culturelles même les plus anciennes. Très vite, le réalisateur et son coscénariste Gilles Taurand décident d’ancrer le récit dans notre époque et de lui donner pour cadre un lycée parisien. "L’adolescence va bien à La princesse de Clèves", souligne le réalisateur.

Le résultat, un long métrage d’1 h 30 intitulé La belle personne, sera diffusé sur Arte le 12 septembre prochain, avant de connaître une exploitation en salles. Il réunit un casting d’envergure (Louis Garrel est le Duc de Nemours, Grégoire Leprince-Ringuet le prince, Léa Seydoux la princesse, et l’on retrouve dans de petits rôles Clotilde Hesme et Chiara Mastroianni) et donne une étonnante actualité à l’intrigue de Madame de Lafayette. Car lorsque l’on mêle adolescence et amour, tout est toujours exacerbé, même les secrets les plus insignifiants et les trahisons les plus minimes. Aussi comprend-on les émotions extrêmes qui bouleversent les personnages et les poussent parfois à des actes irréparables. Seule Junie, que Lea Seydoux interprète avec une apathie affectée, reste malheureusement opaque et distante, princesse si soucieuse de contenir ses sentiments qu’elle n’expose rien aux yeux du spectateur. Mais l’essentiel est là, et le pari du réalisateur semble pleinement rempli. Petit détail chicissime et raison supplémentaire pour attendre avec impatience la diffusion du film : quand on se tue dans cette Belle personne, c'est en fredonnant du Alex Beaupain.