Cette semaine, un Ours est dans les salles. Un Ours d'or qui rappelle que le documentaire peut à la fois réveiller les consciences, sensibiliser les spectateurs et contrecarrer l'information au quotidien. Fuocommare, par delà Lampedusa place notre regard sur île-frontière, entre Europe et Afrique, là où des milliers de migrants s'échouent (quand ils sont encore vivants), une île abandonnée par les pouvoirs italiens et européens. Un Ours engagé donc.
Il y a aussi une Palme. Pas une Palme d'or, mais une Palme de cœur. Aquarius. Un portrait de femme éblouissant. Un récit qui croise les inégalités sociales (et raciales), les fossés entre générations, le combat contre le capitalisme et la corruption, l'hymne à la liberté et une certaine idée du "carpe diem". Une fresque féministe qui embrasse et entrelace tous ces thèmes avec délicatesse et finesse, et qui vous emporte comme un grand roman. Le roman d'une vie, et en arrière plan, le tableau de tous les maux du Brésil. Mais le jury cannois n'a pas voulu offrir un seul prix à ce film "politique" alors que le Brésil était en pleine crise institutionnelle, que l'équipe d'Aquarius se révoltait sur les marches contre un "coup d'Etat" qui ne disait pas son nom. Une Palme manquante mais assurément un film marquant.
Il y a également des chevaux. Le remake des Sept mercenaires renoue avec la grande tradition du Western. Hollywood revisite le classique avec un casting black-indien-asiatique-latino-Wasp-cryptogay. Du fun avant tout. Mais surtout l'idée là encore que le capitalisme, ennemi son amie la démocratie (dixit le salaud du film), est parfois bien plus hors-la-loi que les hors-la-loi officiel. Ici encore, le mal à combattre n'est pas un simple psychopathe mais ce qu'il symbolise: la tyrannie de l'argent. Allégorie prolétaire inattendue où les citoyens préfèrent être protégés par des "criminels".
Sale semaine pour les "boss". Les incorruptibles et les victimes prennent leur revanche. Pendant ce temps là, le cinéma français nous offre Radin! avec Dany Boon. Un film qui n'a rien d'engagé et qui essaie de faire rire avec l'avarice. Du Molière adapté. Cherchez l'erreur quand les autres cinémas offrent une vision résistante et généreuse de l'être humain. Bien sûr, la radinerie du "héros" est moquée. Pourtant, de ces quatre sorties, on retiendra que le film français est un peu à côté de la plaque sur notre époque. Le personnage incarné par Boon révèle surtout que nous avons peur de l'avenir. Quand les autres se battent au présent pour assurer un futur meilleur, ou en tout cas agréable.