Piratage : propagande ou réelle peur?

Posté par vincy, le 7 août 2008

Ah ces médias officiels et officiellement libéraux (comprendre la presse quotidienne économique) : ils se sont régalés dès ce matin à brandir la menace du piratage. L'Association de lutte contre la piraterie audiovisuelle a publié la première étude mesurant "précisément" les statistiques de piratage de films. Cette Alpa qui veut alpaguer les corsaires du clic est une vieille association de 23 ans, créée par le Ministère de la Culture et celui de la Justice, financée par les professionnels du cinéma  et présidée par le P-DG de Gaumont. Il y a plus neutre. Sise dans les très chics quartiers du VIIIe arrondissement de Paris, cette Alpa a un site internet qui ne contient que ses contacts et son logo. On fait mieux en guise de transparence.

Alors, certes, l’Alpa a déclenché le signal d’alarme, voudrait que le train s’arrête, parlant de « péril ». L’étude porte sur la période novembre 2007 / juin 2008. Les chiffres son évidemment balancés aux médias pour faire paniquer les professionnels et pointer du doigt les méchants internautes.

De façon grossière, on nous dit « autant de films piratés que d’entrées payées ». Pourtant si l’on sait calculer les chiffres reçus on note 14,1 millions de téléchargements en juin + 62 millions de téléchargements de janvier à mai, soit 76 millions d’actes de piratages. Contre près de 100 millions de vendus. Bien sûr, ça ne retire en rien l’effarante donnée de 450 000 téléchargements illicites par jour en France.

Mais il faut relativiser certaines données et s’inquiéter pour d’autres. Car finalement cela impacte davantage sur le marché du DVD, en chute libre, que sur les entrées, plutôt dynamiques malgré la crise économique. D’abord les films américains s’octroient une part de marché bien plus importante chez les pirates (66%) que chez les spectateurs. Les blockbusters sont made in USA, avec en tête des daubes comme Transformers et Next, mais aussi American gangster, Bee Movie et No country for Old men, tous au dessus de 2 millions de clics. C’est d’autant plus inquiétant que le film des Coen est très loin d’avoir obtenu ce nombre de spectateurs en salles. De même, la part de marché des films européens est de 12% chez les pirates, ce qui n’a rien à voir avec la moyenne de 4% annuelle dans les salles.

Autant de clics pour Bienvenue chez les Ch'tis que pour Persépolis
Mais bizarrement les films français sen tirent bien. Seulement 19% de part de marché sur les ordinateurs contre 40% en moyenne sur les grands écrans. Le plus gros « hit » est évidemment Bienvenue chez les Ch’tis avec 682 000 téléchargements, soit 3,5 % des entrées du film ! De même les 206 000 clics de Disco ou 287 000 clics de La Môme sont très loin des 2,5 millions de clics pour le film oscarisé des Coen mais aussi de leurs scores au box office. A la rigueur le producteur de Survivre avec les loups a raison d’avoir la rage : 149 000 téléchargements pour 650 000 entrées… Pire, Persépolis accumule 675 000 curieux en ligne pour à peine deux fois plus de fidèles des salles obscures.

Mais attention, rien ne dit que ces pirates n’achètent pas le DVD ou ne vont pas aussi voir le film en salles. Il faudra surtout croiser les chiffres de la VOD avec la prochaine étude pour voir si la tendance est à la hausse ou à la baisse.
Enfin, plutôt que de se focaliser sur les Top 10 des œuvres les plus téléchargées, peut-on s’interroger sur les motifs des « pirates » et de se demander comment faire pour les attirer à voir un film brésilien ou japonais sur un ordinateur plutôt que d’aller le voir en salles ?

Survivre sans les loups

Posté par MpM, le 29 février 2008

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Parfois, la réalité rattrape la fiction... et parfois non. Plus de soixante ans après les faits, on vient d'apprendre que le très romanesque récit autobiographique de Misha Defonseca ayant servi de base au film de Vera Belmont Survivre avec les loups est une pure invention. L'héroïne y racontait comment, âgée d'à peine huit ans, elle avait traversé l'Europe à pied pour retrouver ses parents arrêtés par la gestapo. Elle prétendait notamment avoir trouvé refuge au sein d'une meute de loups qui l'avait nourrie et protégée au cours de ce périple de plus de 3000 kilomètres.

Ainsi donc, cette belle amitié n'a eu lieu que dans l'imagination de Misha, alias Monique, dont les parents ont véritablement été arrêtés en 1941. L'écrivain explique s'être raconté une autre vie pour survivre à une telle épreuve. A vrai dire, il n'y a pas de quoi être si étonné, tant cette histoire avait de quoi laisser perplexe. On se demandait justement comment une si jeune enfant avait pu survivre à un tel périple et surtout traverser tant de frontières sans jamais être attrapée...

Malgré tout, on s'interroge un peu sur l'émotion provoquée par cette révélation. L'histoire est-elle réellement moins belle et émouvante parce qu'elle est fausse ? Doit-on se sentir lésé ou trahi parce que l'on a cru à quelque chose qui n'existait pas ? Mais c'est justement le propre du cinéma (comme de la littérature) que de nous faire adhérer à des intrigues imaginaires et aimer des personnages d'encre ou de pellicule ! Cela n'empêche ni de rêver, ni de réfléchir. Ni de hurler avec les loups, apparemment...