Séances inégales au 5e festival européen du film fantastique de Strasbourg.
Avec son esthétique à l'ancienne (à la manière de The Box de Richard Kelly, en moins réussi), Elfie Hopkins, de Ryan Andrews, se la joue volontairement Sherlock Holmes dans une Angleterre dont on ne verra finalement pas grand chose.
Déjà vu des centaines de fois depuis qu'Hitchcock a popularisé l'idée du voyeurisme au cinéma, le long-métrage est une énième enquête extrêmement lisse où une adolescente qui observe par ci et là, voire derrière sa fenêtre, ce qui se déroule chez ses voisins étranges. Les personnages sont extrêmement fade d'un bout à l'autre, tout juste peut-on relever le sex-appeal du méchant dont la famille ressemble aux Volturi de Twilight(à peine moins grotesque). Le travail sonore sur les voix donne un résultat très surfait, de même pour les notes de piano, déplacées mais qui arrivent par moments à créer un contraste intéressant.
Le long-métrage est désenchanté, désincarné, et ne mériterait pas ni une telle durée (89 minutes pourtant) ni ce ton si sérieux hors de propos. Pauvre, il ne parvient à intéresser un minimum que par sa virée dans le drame.
La surprise du jour viendra plutôt de Die Wand (Le mur invisible). Une mise en scène superbe, un long-métrage posé qui évite les effets et artifices encombrants : tout est là et parvient à composer une œuvre plutôt réussie qui sait entretenir le mystère.
Martina Gedeck (La vie des autres) porte le film sur ses épaules, errant dans une solitude qui ne peut s'estomper que par la présence d'animaux, emprisonnée derrière ce mur qui l'a bloque hors de la civilisation urbaine. En compagnie de son chien, second grand acteur du film, elle reste figée dans cet espace, un isolement qui la pousse bien évidemment à l'autonomie afin de subsister dans cette nature trop vaste.
De ce mode de vie rudimentaire, la dame s'attire la faveur des bêtes et délivre son récit d'une voix morne qui fait office de voix off. On est souvent proche du pensum fatiguant avec ce verbiage incessamment débité du début à la fin et qui vient rompre avec le silence apparent de l'environnement. Évoluant dans ce milieu restreint et pourtant si vaste, la jeune femme apprend à redécouvrir le monde sous un nouveau regard, celui en communion avec la nature.
Le réalisateur, Julian Pölsler, tire tout le parti d'une réalisation efficace par sa sobriété tout en sachant tirer la magnificence des paysages aux alentours de ce drame intimiste. Un long-métrage qui fait du bien et permet de respirer et de s'évader pendant près de deux heures dans des contrées verdoyantes. Le propos final, classique et prévisible, fait retomber le soufflet avec un hymne à la vie, en plus de nous asséner une morale qui souhaiterait nous faire comprendre que les hommes se sont trompés de route ; dommage.
La soirée se conclut tardivement avec Excision de Richard Bâtes Jr., sorte d'erzatz raté d'un Gregg Araki. AnnaLyne McCord, méconnaissable, y campe une adolescente complètement incommodante qui s'imagine chirurgienne dans un avenir lointain et découvre sa sexualité un poil transgressive. Si on déplore dans un premier temps que le film vacille trop souvent - à défaut d'aller au fond de son idée et de son délire sadien -, il reste le plaisir de retrouver certains acteurs tels Roger Bart (Hostel 2, Desperate Housewives), Malcolm McDowell que l'on ne présente plus, et surtout Ray Wise (Twin Peaks).
Amusant le film est également tordu. Force est de constater que derrière plusieurs scènes dérangeantes et une certaine esthétique dans le traitement des rêves sado-maso-gore, il n'y a franchement pas grand chose.