BIFFF 2015 – Dealer: le film qu’on ne verra peut-être pas en France mais qui a séduit les Américains

Posté par kristofy, le 14 avril 2015

Le BIFFF 2015 (Bruxelles International Fantastic Film Festival) n'a pas le choix: la Corée du Sud et l’Espagne, maîtres du genre, sont très bien représentées tandis que la France est malheureusement quasiment absente… Dealer réalisé par Jean-Luc Herbulot, est donc, facilement, LE film français du BIFFF qui était à voir.

Commençons par l'histoire: Dan est un trafiquant de drogue qui à l’habitude des petits deals dans son quartier nord de Paris, il sait les combines, les risques et surtout les galères. Un client qu’il connaît bien se présente à lui avec une commande urgente d’un kilo de cocaïne et la promesse d’une grosse somme. D’habitude, Dan ne touche pas à cette drogue mais il rêve de partir loin pour une autre vie en Australie alors il accepte. Il sait qui aller voir pour se procurer ce kilo mais il n'a que quelques heures pour ramener l'oseille. Il préfère cacher le paquet de drogue chez lui avant la transaction. Las, une mésaventure plus tard et le paquet a été volé. Il n’a plus la drogue pour le client et il n’a pas l’argent pour son fournisseur : il a donc peu de temps pour trouver 40 000 euros…

Micro budget et tournage en 12 jours

Le film montre à toute vitesse ces quelques heures pendant où Dan fait le deal, perd tout, se retrouve ensuite avec une dette encore plus grande de 70 000 euros ! Il va d’un endroit à un autre avec son pote et on découvre toute une galerie de personnage dans un Paris interlope: une pute sans scrupules, un gang de camerounais sans pitié, des manouches sans peur… Dealer est un thriller où tout bouge à toute vitesse, autant les paroles que les images. Une descente aux enfers où, pour le héros, tout va de pire en pire. Le film est emmené par l’acteur Dan Bronchison, qui en est aussi le producteur. Il est presque constamment à l’écran. Lui et le réalisateur Jean-Luc Herbulot ont choisi une mise en image au plus proche d’une réalité crue, comme une immersion dans tout ce qui peut mal tourner dans le quotidien d’un trafiquant de drogue. Le film adopte un récit guidé par la voix-off du personnage principal et des inscriptions qui apparaissent presque comme des chapitres (le deal, le client, grosse chaleur, le braquo…), on est bien dans une fiction sans glorification des truands. Langage et personnages de la rue. Le tout a été tourné en 12 jours pour un petit budget (165 000 euros), et cela donne un vrai film qui fait bouger les lignes du cinéma français.

Prochain film avec Joel Kinnaman et Rosamund Pike

Dan Bronchinson : «On nous parle beaucoup d’une influence de Pusher de Nicolas Winding Refn, en effet mais on pourrait aussi évoquer Transpotting, Cours Lola cours, La 25ème heure… Dans l’histoire il y a des éléments qui sont vraiment du vécu par certaines personnes bien réelles, mais c’est du passé. Pour la scène de torture, ce genre de chose est arrivé à une ancienne connaissance. Le but de cette scène qui est violente mais pas gratuite était de montrer que le méchant qui donne les ordres était vraiment très méchant. L’aspect filmé de façon réaliste renforce l’impact de la scène de torture… »

Jean-Luc Herbulot : « Dealer devrait sortir en Suisse, en Allemagne, en Grèce, en Turquie, mais des discussions sont encore en cours pour une éventuelle sortie en Belgique et même en France où ce n’est pas évident de faire aboutir les choses. En France ce genre de films peut exister avec ce qu’on appelle une ‘sortie technique’ par exemple une poignée de salles pendant deux semaines, mais on voudrait que ça soit plus beaucoup plus large que ça. On voulait faire quelque chose de différent de ce qui se tourne habituellement en France, ce qui n’est pas très difficile… Parallèlement à cette situation, il y a des américains qui ont adoré le film et qui m’ont proposé de réaliser mon prochain film aux Etats-Unis : le tournage se prépare pour cet été et ça s’appelle The Bends avec Joel Kinnaman (il est dans Night Run avec Liam Neeson, dans Kinght of cups de Terrence Malick, dans le prochain Suicide Squad de David Ayer…) et avec Rosamund Pike (nominée à un Oscar pour Gone Girl de David Fincher), Un sacré casting donc. Je veux aussi continuer de développer les suites de Dealer puisque le projet initial était d’en faire une trilogie. Deux autres films étaient prévus, deux suites qui doivent mettre en avant certains des personnages déjà vus mais à un autre moment de leur histoire. »

Bande annonce du film

BIFFF 2015 – Bernard Rose (Candyman) revient aux sources avec Frankenstein

Posté par kristofy, le 14 avril 2015

Le BIFFF (Bruxelles International Fantastic Film Festival) profite de son statut pour présenter quelques films en avant-première mondiale. C'est le cas de Frankenstein en présence de son réalisateur britannique Bernard Rose.

Son Frankenstein est porté par un casting de choix : Xavier Samuel très impressionnant (em>My Best Men, Perfect Mothers, Fury...), Carrie-Ann Moss (la Trinity de Matrix), Danny Houston (qui était dans son Two Jacks) et Tony Todd (Candyman).

Pour le réalisateur, c'est à la fois un retour aux sources du fantastique et un retour devant son premier public: son film Paperhouse avait gagné au BIFFF le prix du Corbeau d’Or en 1989, et présenté le film qui a fait sa renommée, le célèbre Candyman en 1992.

Durant les années 90 Bernard Rose a aussi signé deux films prestigieux Ludwig van B. (avec Gary Oldman et Isabella Rossellini, 1994) et Anna Karénine (avec Sophie Marceau et Sean Bea, 1997n), puis d'autres films comme Mr Nice (avec Rhys Ifans et Chloë Sevigny, 2010) ou Two Jacks (avec Billy Zane et Sienna Miller, 2012). Ses autres réalisations fantastiques ont eu moins de succès, mais elles représentent sa version de genres revenus à la mode comme le 'torture-porn' avec Snuff-movie en 2005 (suite aux Saw et Hostel...) et le 'found-footage' avec Sx Tape en 2013 (suite aux Rec et Paranormal activity...). Son tout nouveau film est en quelque sorte à la croisée de sa filmographie : l'adaptation d'un classique de la littérature et une version moderne du personnage du monstre...

Monstre moderne

Le roman de Mary Shelley se situe dans l'Angleterre de 1818, et Bernard Rose transpose cette histoire de nos jours à Los Angeles. «Je trouve que cette histoire du docteur Frankenstein n’est pas à propos de quelqu’un qui a créée un monstre mais peut-être davantage perçue comme quelqu’un qui donne la vie.» Donc un 'être humain' se découvre dans ce qui ressemble à une salle d’hôpital, il découvre les gens autour de lui qu'il identifie comme des parents mais eux découvrent une erreur de mutation cellulaire qui lui cancérise la peau... Leur créature va leur échapper et se retrouver dans la ville, avec des policiers à ses trousses. Il trouvera refuge auprès d'un SDF, avant que la panique ne grandisse... Si le décor est moderne, Bernard Rose à garder en voix-off et le ton poétique du roman :  «puisque je ne peux inspirer l’amour, que je cause l’effroi.»

© kristofy / ecrannoir.frA l'issue de la projection Bernard Rose a partagé avec le public sa vision du mythe de Frankenstein :

Dupliquer la nature est un fantasme scientifique

«Le roman original a été écrit au début de la révolution industrielle, il y a environ 200 ans, on découvrait peut-être à peine que l’électricité puisse avoir comme pouvoir d’animer un tissus humain. C’est le premier roman de science-fiction, le premier roman d’horreur. Deux siècles après aujourd’hui on arrive à la création de nouveaux tissus humains comme de la peau ou même des organes artificiels avec une imprimante 3D. Si on créer un être humain de toute pièce, qu’en est-il de la conscience ? Le roman était novateur et en quelque sorte prévoyant, l’histoire est toujours passionnante à notre époque. Le fantasme de créer la vie de manière scientifique est peut-être quelque chose qui vient plus d’un homme que d’une femme. Dans le film, il y a un créateur médecin homme mais aussi une femme médecin, d’ailleurs le roman qui évoque les questions de ce danger a été écrit par une femme. En tout cas dupliquer la nature est un fantasme scientifique.
Pour moi le film devait commencer avec l’éveil à la vie du monstre et finir avec sa mort, le film est raconté de son point de vue à lui. Une chose amusante, c’est la scène où un policier tue un chien : beaucoup de gens trouve ce moment violent ou triste. Dans les films on peut voir des dizaines de personnes se faire tuer et ça passe, mais quand c’est un chien, bizarrement, ça touche plus les émotions de certains spectateurs, c’est étrange non ?»

Le défi c'est la distribution des films

«La production de films est en quelque sorte plus facile aujourd’hui par rapport à avant. Le défi c'est surtout la distribution des films. Presque tout se retrouve sur internet quasiment gratuitement, sans que des droits d’auteur soient reversés. Peut-être que des auteurs vont demander de l’argent aux fournisseurs d’accès à internet ? A la télévision on voyait des films gratuitement mais ce sont les chaines de télévision qui payaient des droits pour les diffuser, avec l’argent des publicités. Aujourd’hui les spectateurs vont de la télévision vers Internet pour les films.»

Le film n'a toujours pas de distributeur en France.