Vesoul 2012 : retour sur le palmarès qui couronne August drizzle

Posté par redaction, le 22 février 2012

Après une semaine de compétition, de rencontres et de découvertes en tous genres, la 18e édition du festival des cinémas d'Asie de Vesoul (FICA) s'est achevée mardi soir avec l'annonce du palmarès et la projection en avant-première du nouveau film de Wang Quan'An, Apart together. Le jury international présidé par Atiq Rahimi, et réunissant Ermerk Chinarbaev, Nestor O. Jardin et Latika Padgaonkar, a choisi de remettre le Cyclo d'or 2012 au Sri-lankais Aruna Jayawardana pour August drizzle, également couronné du prix NETPAC.

Le film se déroule dans la campagne sri-lankaise où le soleil assèche toute chose. On y suit la vie d'une femme dans son activité d'entrepreneur de pompes funèbres, reprise après la mort de son père. Rejetée par la communauté de son village du fait de cette profession habituellement masculine, l'héroïne tente de mener à bien le projet de construction d'un crématorium, utile pour le village mais qui risque de ruiner son concurrent. Sous un aspect physique peu charmeur, la jeune femme rêve malgré tout d'amour, de mariage, d'enfants... même si le destin en a décidé autrement.

August drizzle se caractérise par des images pas du tout racoleuses, et au contraire belles dans leur capacité à nous montrer la dure réalité quotidienne de cette communauté. Et puis il y a cette femme dont on s'écarte, qui abandonne un à un ses rêves de bonheur personnel, mais si forte dans la poursuite de son projet, et qui a su émouvoir et séduire public et jurés.

Le Grand prix du jury international va lui à Dance town de Jeon Kyu-hwan (Corée), qui surprend par son observation du genre d’accueil que peut offrir la Corée du Sud à une réfugiée de Corée du Nord. La jeune femme est observée et guidée de manière assez pressante quand elle n’est pas surveillée de manière oppressante. Le réalisateur Jeon Kyu-hwan propose un film à l’aspect moins cinématographique que son précédent (Animal Town, déjà présenté à Vesoul, qui avait fait une très favorable impression), comme si l’esthétique de l’image était diminuée par la dureté de son contenu. On y voit surtout une grande ville qui n’intègre pas vraiment une personne étrangère, ni même ses habitants quand ils sont très âgés ou handicapés. Ces solitudes qui se croisent parfois ne semblent jamais entrevoir la perspective d'une amélioration de leur sort. A noter que le film a également convaincu le jury INALCO, qui lui décerne son prix coup de cœur.

Le jury international a également choisi de distinguer Le temps dure longtemps de ?zcan Alper et Nino de Loy Arcenas. Si le premier tranchait incontestablement sur le reste de la compétition, par ses qualités cinématographiques et la force de son propos (les génocides kurdes et arméniens), on peut en revanche être plus surpris par le succès du second (qui a également reçu le coup de coeur Guimet), mélo familial formaté à l'esthétique de série télévisée.

Final Whistle de Niki Karimi (photo de droite) récolte quant à lui trois prix mérités (Prix Emile Guimet, Prix INALCO et Prix du jury lycéen). Le film débute avec une réalité qui nous est familière (l'actrice/réalisatrice Niki Karimi qui travaille sur un film) comme pour nous faire croire à la réalité du scénario : une femme est prête à vendre un de ses organes dans l’espoir de réunir assez d’argent pour éviter que sa mère ne soit condamnée à mort.

Dans le film on se déplace beaucoup d’un endroit à un autre et souvent en voiture, la caméra est toujours en mouvement pour suivre les personnages et en même temps pour placer le spectateur en position de témoin. Bien qu’il s’agisse d’une fiction on est alors happé par une impression de réel, et on va découvrir progressivement le drame qui a eu lieu. L'occasion de partager avec le spectateur plusieurs questions sur la justice ou les droits des femmes en Iran.

Return ticket de Teng Yung-Shing (mention spéciale NETPAC), sur des ouvrières chinoises qui aspirent à retourner dans leur ville natale pour le Nouvel An,  et Khalifah de Nurman Hakim (prix du public), qui aborde la question de l'intégrisme religieux en Indonésie, se partagent les autres récompenses de la compétition long métrage tandis que Les origines de la pomme de Catherine Peix (prix du public) et Parvaz, l'envol de Reza d' Ali Badri (prix du jury jeunes) sont distingués dans la compétition documentaire.

Une partie des films primés seront repris comme chaque année à l'auditorium du Musée des Arts Asiatiques Guimet de Paris du 18 au 20 avril 2012. Et pour la prochaine édition du FICA, il faudra attendre la semaine du 5 au 12 février 2013.

______________________

Le palmarès complet

Cyclo d'or
August drizzle de Aruna Jayawardana (Sri Lanka)

Grand Prix du Jury International
Dance town de Jeon Kyu-hwan (Corée)

Mentions spéciales :
- Nino de Loy Arcenas (Philippines)
- Le temps dure longtemps de ?zcan Alper (Turquie)

Prix du Jury NETPAC
August drizzle de Aruna Jayawardana (Sri Lanka)

Mention spéciale NETPAC
Return ticket de Teng Yung-Shing (Taïwan/Chine)

Prix Emile Guimet
Final whistle de Niki Karimi (Iran)

Coup de cœur Guimet
Nino de Loy Arcenas (Philippines)

Prix INALCO
Final whistle de Niki Karimi (Iran)

Coup de cœur INALCO
Dance town de Jeon Kyu-hwan (Corée)

Prix du public long métrage de fiction
Khalifah de Nurman Hakim (Indonésie)

Prix du Jury Lycéens
Final whistle de Niki Karimi (Iran)

Prix du public du film documentaire
Les origines de la pomme de Catherine Peix (Kazakhstan-France).

Prix Jury Jeunes
Parvaz, l'envol de Reza d' Ali Badri (Iran-France)

Crédit photos : Michel Mollaret

Vesoul 2012 : Dance Town, avec Oh Seong-tae, a ouvert la compétition

Posté par kristofy, le 18 février 2012

Le 18ème Festival international des cinémas d'Asie (FICA) de Vesoul, ce sont aussi des films en avant-première en compétition pour le Cyclo d’or. Cette compétition a débuté avec un réalisateur coréen encore inconnu en France mais déjà bien connu des festivaliers de Vesoul : Jeon Kyu-hwan qui avait été récompensé ici en 2010 pour Animal Town. Son dernier film était au festival de Berlin et il tourne déjà en ce moment son prochain film !

Il s’était lancé dans un trilogie explorant le thème de la ville, et c’est le troisième, Dance Town, qui a donc ouvert la compétition 2012. La particularité de ces trois films est que dans chaque histoire on retrouve dans un rôle différent l’acteur Oh Seong-tae. Ce dernier imagine d'ailleurs que Jeon Kyu-hwan voit en lui comme un alter-ego à multiples facettes... Venu spécialement à Vesoul, il s’est prêté aux questions-réponses avec les spectateurs.
Dance Town nous fait suivre l’arrivée en Corée du Sud d’une femme qui a fui la Corée du Nord. Pour éviter arrestation et exécution, pour motif de possession de produits étrangers interdits, son mari a réussi à la faire s’échapper. Elle se retrouve alors seule à Séoul sans nouvelles de son mari bloqué au Nord, elle devient une réfugiée qui doit s’adapter à une nouvelle vie…
Le réalisateur Jeon Kyu-hwan voulait moins parler de la relation entre les deux pays de Corée que de l’arrivée d’un étranger dans une grande ville. Ses trois films (Mozart Town, Animal Town, et maintenant Dance Town) s’attachent à la vie dans une grande ville avec le point de vue d’une personne qui y est étrangère. Pour ce qui est d’une personne nord-coréenne réfugiée, celle-ci est d’abord interrogée et aussi surveillée un moment pour deux raisons, d’abord la crainte d’une intrusion d’un agent espion de Corée du Nord et aussi pour le cas ou le réfugié aurait des difficulté à s’adapter à la vie sud-coréenne.

"Le nombre de réfugiés augmente de plus en plus, et leur arrivée n’est pas toujours la bienvenue parfois à cause de quelques jalousies puisque le gouvernement les aide en leur fournissant un logement", explique Oh Seong-tae. "En majorité, les Coréens espèrent une réunification des deux pays ennemis. Le cinéaste lui ne souhaite pas que Dance Town soit vu comme un film politique, il s’agit d’abord d’un personnage d’une femme de Corée du Nord réfugiée en Corée du Sud à Séoul. Si l’histoire se passait dans une autre ville, ça aurait été un autre genre d’étranger. Son sujet, comme dans ses premiers films, est la ville racontée par des gens en souffrance."

Crédits photos : Kristofy et Michel Mollaret