Cannes 2012 : Qui est Kim Kang-woo ?

Posté par MpM, le 26 mai 2012

Ce trentenaire à la beauté animale et sensuelle a simultanément commencé une carrière à la télévision et au cinéma au début des années 2000, apparaissant dans les séries Breathless et Three Leafed Clover et dans The coast guard de Kim Ki-Duk. Ses rôles pour le petit écran lui valent rapidement le surnom de "Mr Right", parce que ses personnages sont honnêtes et consciencieux.

En 2005, Kim Kang-woo a obtenu son premier rôle d’envergure dans The Aggressives de Jeong Jae-eun ; cela lui vaut, ainsi qu’à son partenaire Chun Jung-myung, le prix du meilleur acteur des "Film Critics Awards" de Pusan. Le film suit un étudiant qui s’ouvre au monde en intégrant une bande de virtuoses du roller, dont le chef, incarné par Kim Kang-woo, semble ne pas avoir de limites. L’année suivante, les talents de comédien du jeune homme sont une nouvelle fois récompensés lors du festival international de Turin. Le jury salue sa prestation dans The Railroad de Park Heung-sik, l’histoire de deux inconnus qui partagent leurs souffrances le temps d’une nuit, tandis que le film lui-même reçoit le prix FIPRESCI décerné par la critique internationale.

La carrière de Kim Kang-woo semble désormais lancée. Lui qui s’était battu pour donner une visibilité à The Railroad lors de sa sortie dans seulement dix salles sud-coréennes connaît un important succès commercial avec son film suivant, Le grand chef de Jeon Yun-su, où il est un cuisinier se battant contre son rival pour l’obtention d’un titre prestigieux. Top chef! Il enchaîne alors les rôles avec une belle régularité, s’essayant à des registres variés : les thrillers Rainbow Eyes de Yang Yun-ho et Marine boy de Yoon Jong-seok, le romantique film à sketchs Five senses of Eros, la comédie Ha Ha Ha de Hong Sang-soo ou encore l’œuvre de science fiction Doomsday book de Kim Ji-woon and Yim Pil-sung.

Ajoutant une nouvelle corde à son arc, il est l’un des personnages principaux du nouveau film d’Im Sang-soo, The Taste of money, que le réalisateur lui-même présente comme une "extension" de son film précédant, The Housemaid. Une œuvre qui explore les rapports ambivalents de l’avidité, du désir, du sexe et de l’ambition dans la bonne société sud-coréenne… Tout un programme qui, on l’espère, rendra autant hommage à la plastique de Kim Kang-woo qu’à ses talents d’acteur.

Cannes 2012 : Match SANG-SOO – IM vs. HONG

Posté par MpM, le 25 mai 2012

Hasard des circonstances, à moins qu’il ne s’agisse d’un élan de facétie plutôt cocasse, Thierry Frémaux et Gilles Jacob ont choisi de compliquer la vie des journalistes et festivaliers cannois en sélectionnant cette année deux cinéastes aux noms phonétiquement proches, surtout pour des oreilles occidentales, les Coréens Im Sang-soo et Hong Sang-soo.

On ne doute pas que cette double présence donnera lieu à quelques quiproquos, voire à des erreurs gênantes, dans les médias les moins aguerris, ou lors des conférences de presse. L’essentiel est qu’au moment du palmarès, si l’un des deux devait figurer, Nanni Moretti ne fasse pas de lapsus cruel… Pire, que personne ne se trompe au moment de rédiger le diplôme, ou de graver la Palme d’or ! Le plus simple serait peut-être de les récompenser tous les deux, ex-aequo, pour limiter les risques de confusion.

Mais on s’égare. Car le plus amusant dans l’histoire, c’est qu’Im Sang-soo et Hong Sang-soo étant coréens, leurs noms ne sont au final pas plus proches l’un de l’autre que ceux de Claude Miller et Claude Lelouch... Sang-soo, en effet, est leur prénom. Une fois qu’on le sait, il n’y a plus qu’à se concentrer sur la première syllabe pour les différencier. D’autant que leur style cinématographique, lui, est absolument impossible à confondre.

Hong Sang-soo est cet auteur d’apparence débonnaire qui semble se livrer année après année à une variation toujours plus subtile autour des mêmes thèmes : les relations amoureuses, la création, la solitude… Son premier film,  Le jour où le cochon est tombé dans le puits (1996), lui vaut des récompenses dans des festivals internationaux comme Rotterdam ou Vancouver. Il y est déjà question de chassés croisés amoureux décomplexés et modernes entre plusieurs personnages malheureux en amour.

En 1998, son deuxième long métrage (Le Pouvoir de la province de Kangwon) est présenté à Cannes, en section Un certain Regard. Le réalisateur continue d’explorer les triangles amoureux, sillon qu’il creuse avec La vierge mise à nu par ses prétendants, puis Turning gate, et globalement tous les films qu’il a réalisés depuis. A chaque fois, les évolutions de l’intrigue, le degré de dérision et les procédés narratifs viennent nuancer cette impression d’un seul et unique film répété à l’infini. Néanmoins, le dispositif cinématographique reste lui aussi sensiblement le même, basé sur le plan fixe et le zoom, et consistant souvent à faire boire les acteurs plus que de raison (à l’image de leurs personnages) avant de commencer à tourner.

Ce cinéma intuitif, à la fois réaliste, romanesque et ironique, séduit la presse et les organisateurs de Festival. La femme est l’avenir de l’homme et Conte de cinéma concourent pour la palme d’or, Les femmes de mes amis est présenté à la Quinzaine des réalisateurs, Ha ha ha remporte le prix Un certain regard, Woman on the beach et Night and day sont projetés à Berlin, Oki’s movie va à Venise…

La série continue puisque voilà Hong Sang-soo de retour en compétition officielle à Cannes (la première fois depuis 2005) avec In another country, un film tourné en Corée avec l’actrice française Isabelle Huppert. Comme en écho à Night and day, tourné à Paris, avec un casting principalement coréen ?

Im Sang-soo, malgré un nombre plus réduit de films à son actif, est lui aussi un habitué des festivals internationaux. The taste of money représente en effet sa deuxième sélection officielle à Cannes, après The housemaid en 2010, et parmi ses films précédents, Une femme coréenne était à Venise et The president’s last bang à la Quinzaine des Réalisateurs.

Le cinéaste a d’abord commencé sa carrière en tant qu’assistant auprès de Im Kwon-taek, grand maître coréen à la filmographique riche et complexe, avant de travailler sur ses propres projets. Son cinéma, sociologique et sans tabou, aime à décortiquer la société coréenne, et notamment les contradictions des classes aisées.

Il s’intéresse ainsi aux derniers jours du président Park Chung-hee parvenu au pouvoir suite à un coup d’état (The president’s last bang), à l’émancipation d’une jeune épouse frustrée socialement comme sexuellement (Une femme coréenne) ou encore à l’hypocrisie feutrée d’une grande famille engoncée dans ses principes (The housemaid). L’argent, le sexe et la violence se mêlent ainsi dans toute son œuvre, souvent mis en scène avec un soin esthétique appuyé et presque ostentatoire.

Une tendance qui semble se poursuivre dans son nouvel opus que le réalisateur présente lui-même comme une "extension" de son film précédant, The housemaid, et qui explore les rapports ambivalents de l’avidité, du désir, du sexe et de l’ambition dans la bonne société sud-coréenne… Tout un programme qui devrait lui permettre de se distinguer définitivement du cinéma plus "rohmerien" de son compatriote Hong !