L'acteur Tony Curtis s'est éteint jeudi 30 septembre à l'âge de 85 ans. Lui qui avait été longtemps abonné aux rôles de charmeurs restera ironiquement dans les mémoires pour son rôle de travesti dans le chef d'oeuvre de Billy Wilder, Certains l'aiment chaud (1959), aux côtés de Marilyn Monroe.
Le beau brun au sourire irrésistible avait commencé sa carrière une dizaine d'années plus tôt sous la caméra de Robert Siodmak, dans le film noir Criss Cross (Pour toi j'ai tué). Remarqué par un producteur, il avait alors signé un contrat de 7 ans avec les studios Universal. Et c'est ainsi que ce fils de tailleur qui connut une enfance difficile réalisa son rêve de jeunesse : devenir un acteur célèbre.
Entre 1950 et 1970, il tourne avec Douglas Sirk (No Room For the Groom), Carol Reed (Trapeze), Blake Edwards (L'extravagant monsieur Cory, La grande course autour du monde), Vincente Minnelli (Good Bye Charlie), Stanley Kubrick (Spartacus), Richard Fleisher (Les vikings)... C'est d'ailleurs ce réalisateur qui lui offrit son rôle favori en 1968 avec L'étrangleur de Boston.
L'acteur excelle dans les rôles comiques ou de séduction. A la fin des années 70, il trouve même le personnage synthétisant ces deux facettes : Danny Wilde, dans la série télévisée The persuaders (Amicalement vôtre). Il y forme un duo de choc avec Roger Moore. Le ton est léger, souvent facétieux et Curtis s'y montre plein d'ironie et d'auto-dérision. Malgré le peu d'épisodes tournés, la série devient culte, et revient régulièrement sur les écrans français.
Toutefois, on ne peut pas réduire son talent à ce seul type de rôles. A plusieurs reprises dans sa carrière, il a en effet prouvé sa capacité à se fondre dans des histoires dramatiques ou sombres. Dans Le grand chantage d'Alexander Mackendrick, il incarne ainsi un journaliste véreux pris au milieu des conflits d'intérêt. Mais c'est surtout avec The Defiant Ones (La chaîne) de Stanley Cramer, qu'il se montre sous son jour d'artiste engagé et militant. En effet, le scénario contraignait l'acteur principal à être enchaîné à Sydney Poitier pendant la majorité du film. Or, à cette époque de ségrégation, personne n'avait voulu apparaître ainsi aux côtés d'un acteur noir. Non seulement Tony Curtis accepta le rôle, mais en plus il insista pour que son partenaire soit également proposé pour l'Oscar du meilleur acteur. Bien qu'ils ne furent pas récompensés, le geste resta dans les mémoires. De même que la fameuse scène "gay" avec Laurence Olivier dans Spartacus de Stanley Kubrick. Censurée à l'époque, mais désormais célèbre.
Après tant de "remous", Tony Curtis s'était fait rare au cinéma. Il se consacrait à la peinture, à la photographie, à la télévision... On l'a vu malgré tout dans Le dernier Nabab d'Elia Kazan (1976), Treize femmes pour Casanova de François Legrand (1977), Sextette de Ken Hughes (1978)... ou encore Les adversaires de Ron Shelton (1999).
Pourtant, après plus de 120 films tournés, Tony Curtis ne s'estimait pas comblé. "J'ai l'impression de ne pas avoir eu les films que j'aurais dû avoir. J'avais l'impression que j'aurais mérité mieux", regrettait-il en 2008 lors d'un entretien avec l'AFP