Berlin 2016 : Zero days d’Alex Gibney déclare ouverte l’ère des cyberattaques

Posté par MpM, le 17 février 2016, dans Berlin, Festivals, Films.

stuxnet

Second documentaire présenté en compétition au 66e festival de Berlin, Zero days d'Alex Gibney (oscarisé pour Un taxi pour l'enfer en 2008) est une enquête bouillonnante sur le célèbre virus Stuxnet suspecté d'avoir été conçu pour saboter les centrifugeuses iraniennes d'enrichissement d'uranium en 2010.

Thriller anxiogène

Ayant recours aux procédés propres au thriller (montage cut, musique anxiogène, effets spectaculaires), le film piste le logiciel malveillant jusqu'à sa source en interviewant plusieurs experts (dont Eugene Kaspersky créateur de l'anti-virus portant son nom) et différents représentants des gouvernements américain et israélien. Il retrace ainsi le chemin parcouru par Stuxnet, les raisons de sa création et son mode de fonctionnement hors du commun.

Il s'agit en effet d'un fichier très léger (un demi méga-octet) capable de s'exécuter sans intervention humaine, d'agir sans se faire repérer, et de tromper les opérateurs en envoyant des messages assurant que toutes les données sont normales. Il aurait agit sur la vitesse des centrifugeuses iraniennes pour les mettre hors d'usage.

Le nouveau visage de la guerre

Foisonnant récit d'espionnage, Zero days semble parfois pencher du côté de la théorie conspirationniste, voire dans une paranoïa délirante. Pourtant, chaque rebondissement est étayé par le témoignage d'experts (NSA, US cyber command...) qui non seulement reconnaissent (anonymement) la responsabilité des Etats-Unis et d'Israël dans la création de Stuxnet, mais avouent l'existence d'un autre plan plus ambitieux, Nitro Zeus, qui prévoyait de bloquer notamment les systèmes de communication et une partie du réseau électrique de l’Iran si un accord sur le nucléaire n'était pas trouvé.

Alex Gibney offre ainsi un documentaire captivant et très documenté qui joue sur l'aspect extrêmement romanesque de son récit pour lui offrir des accents dignes d'une fiction plus vraie que nature. En parallèle, loin de s'arrêter à la révélation du Who Dunnit and why, il tire habilement les conclusions de toute l'affaire Stuxnet, et notamment le fait qu'elle marque le début des armes virtuelles et légitime leur utilisation. Ce qui redéfinit évidemment la physionomie de la guerre telle qu'on la connaissait jusqu'alors.

Ennemi invisible

Une conclusion qui, si elle peut paraître naïve (la question n'étant depuis plus longtemps de savoir si la cyberguerre aurait lieu, mais plutôt quand elle commencerait), est surtout une manière d'entériner ce dont les récits de science fiction avaient déjà eu l'intuition. Dans un monde en train d'effectuer une mue accélérée (tel qu'il nous est plus que jamais apparu en découvrant les films de la compétition), la guerre elle-aussi semble en train de changer de visage, d'armes et de moyens.

Il n'y a pourtant pas de quoi se réjouir : si les cyberattaques semblent plus "propres" que les attaques à l'arme lourde, elles risquent aussi de toucher plus facilement des infrastructures vitales (circuits électriques et nucléaires, traitement des eaux, communications...) et impacter des ensembles plus importants de population, avec des chances de survie amoindries. Or, face à un ennemi invisible, comment se défendre ?

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