Venise 2019 : Gloria Mundi, de Robert Guédiguian, avec sa troupe

Posté par kristofy, le 5 septembre 2019

Avec un discours marqué à gauche, constatant que les nobles idéaux se plient de plus en plus à une fatalité économique, Robert Guédiguian est devenu un réalisateur emblématique d'un certain cinéma français La plupart de ses films ont pour décor Marseille, ce qui permet d'en faire une œuvre presque ethnographique et même "éthologique" : la cité phocéenne devenant peut-être de plus en plus excluante. Pour son 21e film, il est toujours entouré de sa fidèle troupe d’amis - acteurs. Une fidélité qui nous rend attachant et familier les histoires pourtant bien différentes (Guédiguian navigue de l'historique au romanesque, de la comédie sociale au polar). Le temps des films porteurs d’espoir semble terminé chez lui. Il a d’ailleurs déjà fait le bilan avec son précédent La Villa où le capitalisme et l’individualisme, valeurs régnantes du présent, gagnent sur l’idéal de fraternité et de solidarité du passé. Robert Guédiguian continue cette réflexion avec Gloria Mundi.

Le pitch: Daniel sort de prison où il était incarcéré depuis de longues années et retourne à Marseille. Sylvie, son ex-femme, l’a prévenu qu’il était grand-père : leur fille Mathilda vient de donner naissance à une petite Gloria. Le temps a passé, chacun a fait ou refait sa vie… En venant à la rencontre du bébé, Daniel découvre une famille recomposée qui lutte par tous les moyens pour rester debout. Quand un coup du sort fait voler en éclat ce fragile équilibre, Daniel, qui n’a plus rien à perdre, va tout tenter pour les aider.

Le film s’ouvre avec la naissance d’un bébé, comme une nouvelle venue au monde à découvrir. Si l’espoir va quitter ses personnages, il en reste encore un peu chez Robert Guédiguian. Ce nouveau film évoque une jeune génération qui renonce à tout ce que celle d’avant voulait éviter. Le constat est difficile mais terriblement contemporain. Jean-Pierre Darroussin est chauffeur de bus de la ville (au service de la communauté) et son épouse Ariane Ascaride est femme de ménage surtout la nuit (exploitée par le grand capital). Le couple représente en apparence les idéalistes habituels du cinéma de Guédiguian : pourtant, ils ont baissé les bras, il faut laisser faire et laisser dire sans s’engager ni protester, jusqu'à refuser de faire grève. Chez leurs enfants, on voit deux couples antagonistes : Anaïs  Demoustier et Robinson Stévenin sont des travailleurs précaires en difficulté financière (chauffeur Uber avec un crédit et trop d’heures à faire, vendeuse à l’essai dans une boutique) ; Lola Naymark et Grégoire Leprince-Ringuet sont gérant d’un magasin qui s’enrichit de la misère des gens (rachat d’objets d’occasion à bas prix pour les revendre beaucoup plus chers). Les catastrophes vont s’enchainer pour le couple Demoustier-Stévenin (comme dans le dernier Ken Loach, Sorry We Missed You) au point de se perdre dans leurs galères.

Avec Gloria Mundi, Robert Guédiguian se fait encore et toujours observateur des travers de notre société. Ici, la violence du monde du travail (précarité, pénibilité…) induit une certaine violence des rapports humains (agression, prostitution…). La titre du film plus complet dans son générique est ‘sic transit gloria mundi’, soit ‘ainsi passe la gloire du monde’ en latin pour prévenir de se garder de tout orgueil ou vanité. Le film résonne comme une fable sombre avec une tendance à la disparition des valeurs solidarité-égalité-fraternité. Le cinéaste tend un miroir de notre présent... Et en conférence de presse, la troupe semble aussi désespérée...

Robert Guédiguian : On vit une époque de grande régression. Il s’agit non pas de condamner ces personnages mais de condamner la société qui les produit. Je n’oppose pas tant que ça les jeunes aux plus anciens. Il faut décrire le monde comme il est, et comme il pourrait être. Je pense que les choses peuvent changer.

Jean-Pierre Darroussin : On est la génération qui était jeune dans les années 70, avec un désir de changer le monde comme pour celle d’aujourd’hui. Nous, ça nous paraissait possible que les choses puissent changer.

Gérard Meylan : C’est un constat d’échec, la société a fait faillite. Dans une famille chacun tire la couverture à soi.

darroussin meylan

Ariane Ascaride : On interprète des personnages qui ne croient plus en la politique. Aujourd’hui beaucoup de gens se disent que droite ou gauche c’est pareil. La classe populaire ou ouvrière n’est plus dans la vie mais dans la survie, car il faut tenir et la vie est difficile. On revient à des attitudes primaires, à ‘moi d’abord’.

Grégoire Leprince-Ringuet : Le film encourage la jeune génération à comprendre qu’on est ensemble, et pas tout seul.

Le film sera sur les écrans français le 27 novembre.

Dinard 2019: Mike Leigh à l’honneur pour la 30e édition

Posté par vincy, le 5 septembre 2019

Pour sa 30e édition le Dinard Film Festival s'offre Mike Leigh - Palme d'or à Cannes et Lion d'or à Venise. Outre une rencontre avec le réalisateur, un hommage lui sera rendu et trois anciens films (Be Happy, Another Year, Mr Turner) seront diffusés. Mais c'est surtout la projection de son plus récent long métrage, Peterloo (Venise 2018), jamais distribué en France, qui fera l'événement du vendredi soir.

En ouverture, Dinard projettera Official Secrets de Gavin Hood (X-Men Origins: Wolverine), histoire vraie d'espionnage avec Keira Knightley, Matt Smith, Rhys Ifans et Ralph Fiennes. Hors compétition on pourra aussi voir Brighton de Stephen Cookson, Carmilla d'Emily Harris, Denmark d'Adrian Shergold, Fisherman's Friends de Chris Foggin, For Sama de Waad Al-Khateab & Edward Watts, présenté à Cannes, A Girl from Mogadishu de Mary McGuckian, Hope Gap de William Nicholson, avec Annette Bening et Bill Nighy, In Frabric de Peter Strickland, Postcards from the 48% de Daid Wilkinson, Red Joan de Trevor Nunn, avec Judi Dench et Wait and Sea de Simon Coss et Antoine Tracou. Deux films de la compétition cannoise seront aussi projetés: Sorry We Missed You de Ken Loach et Little Joe de Jessica Hausner. Ainsi que le nouveau film de Ben Wheatley, Happy New Year, Colin Burstead.

Le jury de Sandrine Bonnaire - Sveva Alviti, Sami Bouajila, Michael Caton-Jones, Jane Horrocks, Raphaël Personnaz, Aurélie Saada, Danièle Thompson et Hames Watkins - aura a choisir pour le Hitchcock d'or parmi ces films en compétition:

  • Animals de Sophie Hyde (Sundance 2019)
  • Only You de Harry Wootliff (Festival de Londres 2018)
  • Cordelia d'Adrian Shergold
  • The Keeper de Marcus Rosenmüller (Berlin 2019)
  • The Last Tree de Shola Amoo (Sundance 2019)
  • VS. de Ed Lilly
Shane Meadows, Farah Abushwesha, Phénix Brossard et Diane Garbrysiak seront en charge de choisir parmi les 10 courts métrages de la sélection Short Cuts. Une séance jeune public présentera Zébulon le dragon tandis que la mini-série The Virtues, succès du dernier Série Mania, sera projeté pour la première fois dans son intégralité. Le réalisateur Shane Meadows en profitera pour aller à la rencontre des festivaliers. Trois rencontres, trois masterclasses (dont une sur David Bowie!), et une exposition ("Drôle de cinéma") complèteront le programme de cette édition anniversaire.