Dinard 2019 : Rencontre avec Shane Meadows pour sa série « The Virtues »

Posté par kristofy, le 1 octobre 2019

Qui dit nouvelle œuvre de Shane Meadows dit venue à Dinard, son festival préféré. Twentyfour Seven était en compétition en 1998, Once Upon A Time In The Midlands en avant-première en 2002, Dead Man Shoes a gagné le Hitchcock d’Or en 2004, avant de recevoir un hommage en 2007 avec This Is England, Somers Town fut choisi pour la clôture en 2008. Puis vinrent Le Donk & Scor-Zay-Zee en 2009, le début de la saga télé This is England '86 en 2011 et The Stones Roses: made of stone en 2013.

Cette année Shane Meadows présente sa nouvelle série The Virtues, un drame composé de quatre épisodes (4 x 46 minutes, co-écriture avec Jack Thorne et musique par PJ Harvey) : alors que son ex-femme et son fils déménage vers un autre pays, Joseph replonge dans l'alcool puis décide de quitter l'Angleterre pour aller en Irlande, il veut y retrouver sa sœur qu'il n'a pas vu depuis une trentaine d'années. Le passé destructeur va resurgir...

Le premier épisode se déroule en trois actes (et une séquence de beuverie dantesque) avec une fuite en forme de nouveau départ ; le second épisode permet à Joseph de retrouver sa sœur Anna et l'histoire commence à aborder le cœur du drame ; le troisième épisode s'attache en particulier à mieux connaître les liens et les faiblesses de l'ensemble des personnages, et particulièrement ceux de Dinah et Craigy, et le drame s'intensifie ; enfin le quatrième épisode comporte des révélations et des envies de vengeance...

Le Festival Serie-Mania a déjà doublement primé The Virtues (meilleure série, meilleur acteur). Le jury a justifié ainsi cette double récompense au printemps dernier: "dès la première image, The Virtues vous bouleverse par sa profonde humanité. Magistralement réalisée, écrite et interprétée, cette série est un formidable exemple du pouvoir de la télévision à vous transporter et créer l'empathie. Stephen Graham : sa performance est tout simplement éblouissante. Son portrait brut d'un homme en proie avec son passé et ses propres démons est déchirant."

Ecran Noir: Vous alternez des films pour le cinéma et des séries, deux supports. Comment ou jusqu’où peut-on montrer des scènes avec un contenu de violence, de sexe, d’addiction à l’alcool comme dans The Virtues ? Est-ce quelque chose qui est pris en considération ou vous avez la liberté d’aller aussi loin que vous le souhaitez ?

Shane Meadows : De manière générale la télévision britannique, comme Channel 4, est assez ouverte à l’originalité dans les fictions,. C’est moi qui décide du montage et personne ne me dit de changer quelque chose. Au cinéma on s’imagine une sorte de plus grande liberté, mais le problème  est que les gens y vont en payant un ticket pour le film, et souvent il faut chercher à plaire au plus grand nombre, dont certains qui viennent manger du popcorn. A la télévision les spectateurs ne payent pas pour un film en particulier et n’ont pas forcément cette attente d’être expressément divertis. Peut-être que la télévision convient mieux à mon travail actuel, en particulier pour The Virtues. Je ne me suis jamais senti limité en terme de contenu en travaillant pour la télévision. En fait j’ai même plutôt ressenti une libération car les histoires sur lesquelles je travaille ne peuvent pas être racontée au format film d’1h30.

EN: Avez-vous envisagé à un moment que The Virtues puisse devenir votre nouveau film de cinéma plutôt qu'une série ?

Shane Meadows : Je travaille sur plusieurs idées, et certaines sont pour le cinéma et d’autres pour la télévision. Pour ce projet The Virtues, c’était une histoire qui nécessitait justement 3 ou 4 heures. En fait j’aime ce format de la série de télévision en plusieurs épisodes. On a plus de temps pour approfondir des personnages et les faire respirer, on a plus de temps pour que l’histoire se développe. C’est peut-être paradoxal mais j’aime aussi que les spectateurs attendent 7 jours pour voir la suite avec l'épisode suivant, même si maintenant des diffuseurs comme Netflix ou la BBC diffusent en streaming 10 épisodes d’un coup en même temps. On perd cette attente du prochain épisode et l'imagination de ce qui pourrait suivre, ce qui va avec une série.

EN: On retrouve dans The Virtues deux visages en particulier de votre autre série This is England - Stephen Graham, et Helen Behan que vous avez révélés - dans des rôles très différents...

Shane Meadows : Stephen Graham reçoit beaucoup de propositions ces dernières années. Par exemple il a été demandé par Martin Scorsese dans son dernier film The Irishman. En fait avec Stephen, ça s’est fait naturellement. On se connaît bien et on se fait confiance, et il adore les rôles que je lui propose. Stephen sait tout donner en une prise, il n’aime pas quand il faut refaire une cinquantaine de fois cette prise. Il sait que ça n’arrive pas sur mes tournages. Je sais combien c’est difficile d’être un acteur et mes attentes c’est obtenir quelque chose d’unique, presque instinctif, chose qu’on n’obtient pas avec des répétitions. La nature particulière de ce rôle où il s’agit de retenir ou de se laisser aller à des chamboulements  émotionnels demandait une grande performance. Je savais que Stephen Graham était probablement l’une des rares personnes qui puisse jouer ça avec cette vraie sincérité qui bouleverse les spectateurs. Je ne savais pas que le duo Stephen et Helen Benham pouvait fonctionner, avant de les réunir dans une même pièce. Helen est une actrice qui a un don spécial pour jouer. Je lui avais donné un petit rôle un peu angélique dans This is England mais ce que j’ai vu hors caméra en la connaissant mieux en tant que personne m'a convaincu. D’ailleurs elle est quasiment le contraire du personnage que je lui ai confié dans The Virtues. Helen peut jurer énormément et elle est très drôle. C’est une belle performance de sa part de jouer ici un personnage à l’opposé de sa nature. Dans la série, une des premières scènes ensemble entre Helen et Stephen, dans la chambre, a été comme une masterclass d’interprétation extraordinaire. Cette combinaison Stephen + Helen demandait peut-être un peu de foi de ma part mais c’est devenue un alchimie idéale.

EN: The Virtues est projetée pour la première fois en intégrale à Dinard. Avant deux épisodes avaient été découverts en France lors du Festival Série Mania de Lille où vous y aviez gagné le grand prix du jury et un prix d'interprétation pour Stephen Graham. Que pensez-vous de ce type de festival centré sur des séries de télévision ?

Shane Meadows : C’était génial de recevoir ces prix: ça a donné une exposition à The Virtues à travers des articles de presse, des gens qui n’avaient jamais entendu parler de The Virtues s’y sont intéressé. Je crois qu'il y a des discussions en cours pour que la série soit visible dans plusieurs pays. Lille, qui est une plus grosse ville que Dinard, a un peu le même esprit: c’est organisé par une équipe avec un esprit de famille. Je pense qu’à l’avenir plusieurs festivals auront des sélections hybrides entre des films de cinéma et de télévision et des séries parce que plusieurs cinéastes font des œuvres diffusées par des plateformes de streaming. C'est super que The Virtues soit à Dinard et vu en intégralité dans une salle de cinéma sur grand écran.

EN: C’est le 30ème anniversaire de Dinard, que vous connaissez particulièrement pour y avoir montré tous vos films après y avoir gagné le Hitchcock d'or pour Dead Man's shoes. Cette année en plus d'accompagner The Virtues vous avez aussi la mission de présider le jury des courts-métrages. Dans cette sélection d’une dizaine de courts, y avez-vous vu un prochain Shane Meadows ?

Shane Meadows : C’est une sélection très riche et très intéressante de courts-métrages qu'on a vu. J’ai été vraiment très impressionné par tous. En général dans ce genre de programmes, on y remarque certains courts très brillants et d’autres moins, et on doit discuter avec les autres jurés autour de 3 titres pour choisir le gagnant. Mais là ils étaient tous unique à leur façon. Le débat a été passionnant. Personnellement je ne cherche pas à voir un court qui se rapproche de mon univers ou de mon travail sur des thèmes de société. Je suis plus intéressé par découvrir des talents avec une voix originale. La délibération a été une vraie discussion ouverte, et ces courts étaient d’un haut niveau (ndr : la récompense a été pour un court en animation).

EN : Après This is England 86, This is England 88, This is England 90, est-ce c’est vraiment terminé où peut-on espérer une nouvelle saison sur le devenir de vos personnages ?

Shane Meadows : J’ai dans ma tête une autre saison pour continuer cette série. La suite serait à propos de ces personnages environ 10 ans après, donc au début des années 2000. Ces personnages auraient des enfants mais ils sortiraient encore en rave-party. Cette suite tournera surtout autour de Gadget (Andrew Ellis), de Combo (Stephen Graham) et de Milky (Andrew Shim), et des autres. Je réfléchis à cette nouvelle histoire depuis un moment déjà, on verra quand ça se fera.

EN: Une dernière chose. Après votre documentaire The Stone Roses: Made of Stone vous avez réalisé ensuite un clip pour Liam Gallagher (ex Oasis), c’est quelque chose que vous referiez ?

Shane Meadows : Je suis un grand fan des Stones Roses, et en fait Liam Gallagher est aussi est fan de ce groupe, je l’ai déjà vu aller à leurs concerts. La connexion s'est faite. Réaliser ensuite un clip pour une chanson de Liam a été une super expérience. Liam Gallagher vient juste de sortir un nouveau disque, je referais une vidéo avec lui avec plaisir si j’ai de nouveau cette opportunité (sourire)

Dinard 2019 : Official Secrets et Red Joan, quand deux lanceuses d’alerte partagent des secrets d’état

Posté par kristofy, le 27 septembre 2019

Le 30e Dinard Film Festival est lancé, et le public curieux de cinéma britannique est toujours fidèle pour remplir les différentes salles.

Si Dinard est la plus anglaises des plages françaises, l'actualité a fait que Jean-Claude Mahé (le maire) a évoqué l'un des plus célèbres visiteurs : "Jacques Chirac vient de nous quitter, c'est un ami de Dinard qui s'en va". L'ancien Président de la république était venu en effet plusieurs fois à Dinard pour se reposer tout en gardant son légendaire sens du contact avec les gens, souvent lors de ses promenades, salué par quelques mots ou pour des photos.

Cette année c'est donc le 30ème anniversaire. On y éprouve un peu de nostalgie, notamment parce qu'il s'agit aussi de l'édition requiem du directeur artistique historique du festival, Hussam Hindi.

Mais pour autant le plus important est de regarder vers le futur, et y découvrir les prochains nouveaux talents. Les films en compétition sont pour beaucoup des premiers films, dont un seul, The Last Tree a un distributeur en France. Les différents membres de jury ont été officiellement présentés. Pour les courts-métrages le président est le réalisateur Shane Meadows, révélé en 1995 justement par un court-métrage, dont la plupart des films ont été présentés à Dinard : cette année il y accompagne aussi la projection de sa série The Virtues. Pour les longs-métrages, c'est Sandrine Bonnaire qui joue à la présidente, elle avait d'ailleurs tourné deux fois dans la ville de Dinard pour Claude Chabrol (La cérémonie, Au cœur du mensonge).

Elle n'aura pas à "juger" les deux films "d'espionnage" présentés hors-compétition: une investigation et un interrogatoire, autour de deux femmes loyales à leurs pays, mais encore plus fidèles à leurs valeurs, avec une Angleterre assujettie aux Etats-Unis et ennemie des Soviétiques ou des Irakiens. Deux femmes courageuses, l'une mariée à un kurde de Turquie qui n'a toujours pas le droit d'asile, l'autre amoureuse d'un réfugié d'origine russe. Un risky business qui va bouleverser leurs vies, en plus de ternir leur réputation.

Official Secrets, le film d'ouverture représente à lui seul un certain état d'esprit des cinéastes britanniques : remettre en cause l'autorité. Ici particulièrement dénoncer une manipulation américaine et les mensonges du gouvernement du premier ministre Tony Blair, qui, en 2003 s'est soumis aux Etats-Unis pour lancer une guerre en Irak. Official Secrets de Gavin Hood est l'adaptation d'un livre qui retrace les évènements qui ont suivi la diffusion à la presse d'un mémo secret envoyé par la NSA américaine aux services de renseignements anglais : chercher des renseignements à propos de certains membres du conseil de sécurité de l'ONU pour les obliger à voter en faveur de la guerre que souhaite entreprendre les Etats-Unis du gouvernement Bush... Les grandes lignes de cet évènement politique sont connues : il fallait aux américains trouver des preuves d'armes de destruction massive en Irak ou un vote de l'ONU pour être autorisés légalement à déclencher cette guerre, même si elle sera considérée comme illégale. L'histoire moins connue est celle que raconte ce film : Katharine Gun, une employée des services de renseignements britanniques, a donc fait fuiter en 2003 à la presse un document interne à propos de pressions pour que Tony Blair au nom de l'Angleterre soutienne ce projet de guerre...

Official Secrets tient autant du film d'espionnage à suspense, de l'enquête journalistique, que du thriller de conspiration politique tout en rendant hommage à une lanceuse d'alerte qui sera intimidée et poursuivie pour trahison. Cette femme à la fois héroïne et victime est incarnée par Keira Knightley, avec autour d'elle Ralph Fiennes, Matthew Goode, Adam Bakri, Matt Smith, Rhys Ifans... Autant le casting que la mise en scène est au service de cette intrigue qui débute comme une investigation -un peu comme la série State of play, qui déjà abordait cette question de l'Irak... -  pour s'emballer ensuite vers une succession de conséquences imprévisibles. Chaque problématique (divulguer un document secret ? authentifier un document secret ? trouver la source ? menacer la source ? s'opposer au gouvernement ?...) donne l'occasion à Keira Knightley de briller dans cette histoire incroyable mais vraie, où les convictions et la paix ont motivé ses décisions.

Il fallait du cinéma bigger than life pour ouvrir ce 30e Dinard Film Festival. Rien de mieux qu'une histoire vraie, fil conducteur de cette édition. Pour Hussam Hindi, son directeur artistique au long de ces années, "le cinéma britannique est magnifique, il est nécessaire, c'est un cinéma qui regarde le monde".

Et, coïncidence de la programmation, le même jour, était présenté un regard sur le monde à travers une autre lanceuse d'alerte. Un autre film d'espionnage, Red Joan, réalisé par Trevor Nunn, qui porte sur les années 1930-1940. Si Official Secrets trouvait son enjeu juridique dans une loi concoctée sur mesure par Margaret Thatcher, Red Joan se place sous la loi des secrets d'état de 1920. Une brillante scientifique tombe amoureuse d'un jeune communiste juif, d'origine russe, mais avec un passeport allemand, à Cambridge. En travaillant sur la future bombe nucléaire, la jeune Joan a les moyens de transmettre des documents à l'URSS de Staline. C'est la catastrophe d'Hiroshima qui la conduit à partager les connaissances de son laboratoire, afin d'équilibrer la menace nucléaire entre les deux camps, et assurer une paix durable. Plus de 50 ans après, elle est arrêtée pour avoir violé 27 secrets d'Etat.

Toutes deux parfaites, Judi Dench et Sophie Cookson incarnent la véritable Joan Stanley, à deux époques différentes. Outre le récit maîtrisé et la belle image rappelant les films des années 1950, Red Joan séduit aussi par son aspect romanesque et les questions qu'il pose. Mais, avant tout, comme le dit le personnage, juger une époque passée avec un regard contemporain n'a aucun sens, si on sort les événements et les opinions de leurs contextes. Que ce soit 16 ans ou 75 ans plus tard, le cinéma rappelle justement que le passé peut trouver un écho dans le présent et que la trahison suprême c'est celle de mentir aux citoyens ou de les mettre en péril avec de mauvaises décisions.

Traîtresses ou pacifistes? Dès que la propagande des gouvernements, au détriment de la protection de leurs citoyens, est menacée par des comportements individuels, ceux-ci répliquent avec force et cherchent à discréditer ceux qui osent les défier. Dans les deux films, l'Etat se défausse, lâchement, après avoir mis toute sa puissance pour discréditer ces femmes patriotes.

Dinard 2019 : Happy Thirty!

Posté par kristofy, le 25 septembre 2019

Welcome! Bienvenue en Bretagne, sur les plages de la côte d’émeraude, à Dinard : du 25 septembre au 29 septembre octobre se déroule le 30e Dinard Film Festival, anciennement festival du film britannique, qui va présenter une nouvelle fois un large panorama du cinéma d'Outre-Manche.

C'est la 30ème édition, c'est-à-dire 30 ans de passion partagée pour "permettre à des films rares, originaux et indépendants de rencontrer les distributeurs et le public français". Des films, qui, d'ailleurs, ne sortent pas forcément dans les salles hexagonales.

On soufflera ces 30 candles in the wind en poursuivant cette mission de curiosité. Jean-Claude Mahé (maire de Dinard) l'explique ainsi: "Il y a 30 ans, Dinard devenait la vitrine du cinéma britannique. Le Dinard Film Festival a toujours eu à cœur de montrer les productions de l’industrie cinématographique britannique dans toute leur diversité : longs-métrages, courts-métrages, documentaires et séries, mais toujours remplies d’un fort esprit d’auto-dérision et d’humour." So british.

C'est aussi l'occasion de jeter d'un regard en arrière, sur quelques moments forts des éditions passées. Dinard a rendu hommage  à des talents britanniques comme Hugh Hudson, Shane Meadows (de retour cette année comme président du jury des courts-métrages), Peter Mullan, John Hurt, Tom Courtenay, Toby Jones, Kate Dickie, Gary Lewis, Christopher Smith, Jim Broadbent, Bill Nighy...De Roger Moore à Hugh Grant en passant par Christopher Lee et Charlotte Rampling, les stars n'ont jamais manqué. Même si l'on rêve encore et toujours d'y croiser les grandes dames (Mirren, Smith, Dench, Redgrave...) ou quelques étoiles de la jeune génération (Radcliffe, Harrington, Madden, Tovey...). Tout comme on se ferait bien une rétrospective de vieux films anglais.

Cette année Dinard déroulera son tapis rouge au réalisateur Mike Leigh avec la projection de 4 films dont son dernier resté inédit  en France, Peterloo, en compétition à Venise en 2018.

Découvertes

Certains des plus prestigieux films britanniques ont été présentés à Dinard en séance d'ouverture ou de clôture :  Vera Drake de Mike Leigh, Somers Town de Shane Meadows, Neds de Peter Mullan,  Millions de Danny Boyle, The Queen et Confident Royal de Stephen Frears, It's a Free World de Ken Loach, Nowhere Boy de Sam Taylor-Wood, Perfect Sense de David Mackenzie, Sunshine on Leith de Dexter Fletcher, Wallace et Gromit: Le Mystère du lapin-garou de Nick Park...

Les séances spéciales ont permis de découvrir autant de grands succès en avant-première, souvent récompensés quelques mois plus tard par un Bafta ou un Oscar, que de grandes réussites artistiques : The Descent de Neil Marshall, Reviens-moi de Joe Wright, Maintenant c'est ma vie de Kevin Macdonald, Hyena de Gerard Johnson, God Help the Girl de Stuart Murdoch, The Survivalist de Stephen Fingleton, 45 Years de Andrew Haigh, Detour de Christopher Smith, Adult Life Skills de Rachel Tunnard, Their Finest de Lone Scherfig, À l'heure des souvenirs de Ritesh Batra, The Limehouse Golem de Juan Carlos Medina, Scarborough de Barnaby Southcombe...

Dinard a aussi joué ici un rôle précurseur : en 1994, un certain Danny Boyle était primé pour Petits meurtres entre amis, en 1999 le premier film de Christopher Nolan Following était en compétition, en 2001 l'acteur Daniel Craig était membre du jury avant de devenir James Bond, en 2002, Paul Greengrass était consacré avec son Bloody Sunday, deux avant de se lancer dans l'aventure Jason Bourne, on découvrait Andrew Garfield dans Boy A en 2008. Les Hitchcock d'or ont primé autant de comédies que de drames sociaux, de comédie musicale que de films classiques ou des films de genre. Et parfois, avouons-le, on rageait de ne pas pouvoir les défendre pour une sortie française.

Avec les années, le Dinard Film Festival a proposé une sélection de plus en plus pointue en compétition pour le Hitchcock d'or, remis par un jury franco-britannique. Sandrine Bonnaire, dans Le Figaro d'aujourd'hui, présidente durant quatre jours promet de jouer la démocratie au sein de son jury. Dinard lui rappelle le tournage de La Cérémonie de Claude Chabrol. Mais surtout elle aime le cinéma britannique pour son audace, son inventivité, sa dérision et parfois son univers un peu noir.

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30e édition du Dinard Film Festival
Du 25 septembre au 29 septembre à Dinard
Informations et horaires sur le site de la manifestation

Dinard 2019: Mike Leigh à l’honneur pour la 30e édition

Posté par vincy, le 5 septembre 2019

Pour sa 30e édition le Dinard Film Festival s'offre Mike Leigh - Palme d'or à Cannes et Lion d'or à Venise. Outre une rencontre avec le réalisateur, un hommage lui sera rendu et trois anciens films (Be Happy, Another Year, Mr Turner) seront diffusés. Mais c'est surtout la projection de son plus récent long métrage, Peterloo (Venise 2018), jamais distribué en France, qui fera l'événement du vendredi soir.

En ouverture, Dinard projettera Official Secrets de Gavin Hood (X-Men Origins: Wolverine), histoire vraie d'espionnage avec Keira Knightley, Matt Smith, Rhys Ifans et Ralph Fiennes. Hors compétition on pourra aussi voir Brighton de Stephen Cookson, Carmilla d'Emily Harris, Denmark d'Adrian Shergold, Fisherman's Friends de Chris Foggin, For Sama de Waad Al-Khateab & Edward Watts, présenté à Cannes, A Girl from Mogadishu de Mary McGuckian, Hope Gap de William Nicholson, avec Annette Bening et Bill Nighy, In Frabric de Peter Strickland, Postcards from the 48% de Daid Wilkinson, Red Joan de Trevor Nunn, avec Judi Dench et Wait and Sea de Simon Coss et Antoine Tracou. Deux films de la compétition cannoise seront aussi projetés: Sorry We Missed You de Ken Loach et Little Joe de Jessica Hausner. Ainsi que le nouveau film de Ben Wheatley, Happy New Year, Colin Burstead.

Le jury de Sandrine Bonnaire - Sveva Alviti, Sami Bouajila, Michael Caton-Jones, Jane Horrocks, Raphaël Personnaz, Aurélie Saada, Danièle Thompson et Hames Watkins - aura a choisir pour le Hitchcock d'or parmi ces films en compétition:

  • Animals de Sophie Hyde (Sundance 2019)
  • Only You de Harry Wootliff (Festival de Londres 2018)
  • Cordelia d'Adrian Shergold
  • The Keeper de Marcus Rosenmüller (Berlin 2019)
  • The Last Tree de Shola Amoo (Sundance 2019)
  • VS. de Ed Lilly
Shane Meadows, Farah Abushwesha, Phénix Brossard et Diane Garbrysiak seront en charge de choisir parmi les 10 courts métrages de la sélection Short Cuts. Une séance jeune public présentera Zébulon le dragon tandis que la mini-série The Virtues, succès du dernier Série Mania, sera projeté pour la première fois dans son intégralité. Le réalisateur Shane Meadows en profitera pour aller à la rencontre des festivaliers. Trois rencontres, trois masterclasses (dont une sur David Bowie!), et une exposition ("Drôle de cinéma") complèteront le programme de cette édition anniversaire.

Dinard 2013 : Rencontre avec Shane Meadows

Posté par kristofy, le 6 octobre 2013

shane meadowsLe Festival Britannique de Dinard a fait découvrir il y a plus de 10 ans le réalisateur Shane Meadows, dont le film Dead Man Shoes a gagné le Hitchcock d’Or en 2004.

Depuis, il est revenu régulièrement presque chaque année accompagné de son producteur Mark Herbert.

Twentyfour Seven était en compétition en 1998, Once Upon A Time In The Midlands en première en 2002, This Is England et un hommage à son parcours (déjà) en 2007, Somers Town en clôture en 2008, Le Donk & Scor-Zay-Zee en première en 2009...

Cette année, Shane Meadows est venu présenter en avant-première son documentaire The Stones Roses : made of stone :

Ecran Noir : Que représente ce groupe The Stones Roses pour vous ?
Shane Meadows : Il y a eu un grand mouvement musical au début des années 90 qu’on appelle "la scène de Madchester", avec énormément de groupes originaires de Manchester qui étaient composés de jeunes issus de la classe ouvrière sans beaucoup d’éducation. C’étaient une époque où il y avait beaucoup de gens sans travail et sans espoir. Beaucoup de jeunes ont formés leurs groupes en jouant dans des garages puis dans des bars. Ils jouaient avec dévotion pour les gens du coin qui pouvaient se reconnaître en eux. Le groupe The Stone Roses était spécial, un peu plus que d’autres groupes, et quand leur disque est sorti on les a considérés comme le meilleur groupe du monde. A l’époque pour les adolescents comme moi, The Stones Roses ont insufflé une idée comme "même sans éducation, tu peux faire ce que tu veux dans la vie". J’ai été fan de ce groupe étant jeune, quand j’ai reçu ce coup de téléphone pour ce projet j’ai été super heureux, c’était d’ailleurs il y a deux ans justement au moment du festival de Dinard. C’est un documentaire sur la reformation des The Stones Roses et en même temps en quelque sorte ma lettre de fan au groupe.

made of stone EN : Après beaucoup de films très différents les uns des autres, cette fois The Stones Roses : made of stone est un documentaire, et vous avez dit que c’était à la fois votre premier documentaire et probablement le dernier…
ShM : La grande différence est qu'avec un documentaire vous ne contrôlez pas l’histoire qui est racontée. Dans mes films comme par exemple This is England ou Dead Man Shoes, c’est moi qui invente ma version de l’histoire, et quand je tourne des images un jour je sais d’avance quelles images je vais tourner le lendemain. Ici c’est le groupe The Stones Roses qui décide de ce qui se passe, il y a la reformation du groupe et les concerts et tout ce que ça implique autour, et moi je dois capturer ce qui se passe. Ce documentaire c’est filmer la vraie vie, c’est rendre compte ce que représente ce retour de The Stones Roses. C’est assez difficile de savoir sur le moment si ce qui est filmé est bon ou pas, si ça aura sa place dans le montage ou pas. Surtout qu'à un moment le groupe a connu des tensions (ndr : le batteur qui s’en va) et ne voulait plus être filmé ! J’ai réalisé ce film sans savoir ce qu'il allait être vraiment. J’ai accepté de faire ce documentaire surtout parce que The Stone Roses était mon groupe préféré. Une autre difficulté était l’accumulation des séquences filmées, j’avais plus de 300 heures d’images à choisir d’intégrer dans le montage ou à rejeter.

EN : Comment on prépare le dispositif de tournage pour un projet de cette ampleur ?
Shane Meadows : On a commencé avec 2 caméras, puis il y avait 4 caméras pour les répétitions du groupe, puis pour le premier concert 13 caméras, et puis les concerts suivants on avait 36 caméras ! Le tournage a commencé comme un projet personnel et c’est devenu quelque chose de très ambitieux.

EN : Quels films musicaux ont pu vous influencer ?
Shane Meadows : J’avais déjà vu plusieurs documentaires avant ce projet, comme Some Kind of Monster sur Metallica, Anvil qui est génial, Dig est aussi un film formidable. Mais justement je ne voulais pas reprendre une idée de quelqu’un d’autre, j’ai évité de regarder d’autres documentaires sur la musique.

made of stoneEN : A deux moments, il y a une citation à propos du fait qu’un film documentaire doit témoigner et ne pas donner un point de vue alors que vous-même apparaissez à l’image pour livrer différents commentaires sur les évènements. Comment être à la fois le plus neutre possible et en même temps être très impliqué ?
Shane Meadows : C’est quelque chose de très difficile car j’étais en même temps cinéaste et fan. C’était très difficile surtout au moment où le groupe est sur le point de se séparer et que tout risque de s’arrêter. L’existence du groupe était déjà fragile avant leur séparation et ça recommençait de nouveau, j’étais face à une situation où c’était peut-être la fin de tout. Je devais continuer à filmer quelque chose et j’étais triste de cette situation à la fois en tant que fan et que cinéaste. Mon intervention est une réaction honnête à ce qui se passe en étant moi-même au cœur de l’évènement. Je ne suis pas le genre de documentariste journaliste qui doit tout couvrir, j’ai mon point de vue et j’ai choisi à ce moment-là de ne pas filmer ce qui relève de la sphère plutôt privée du groupe. C’est la meilleure chose que j’ai faite, une semaine plus tard ils m’ont invité à revenir en me disant que la raison pour laquelle ils m’avaient choisi pour réaliser ce film étaient qu’ils savaient que je n’allais pas faire ce que n’importe qui d’autre aurait fait comme les coller constamment avec la caméra et chercher du sensationnel à tout prix.

EN : Est-ce que le groupe à voulu contrôler le montage du film ?
Shane Meadows : Ils n’ont jamais interféré avec le film, ce qu’ils auraient pu faire pour certaines scènes que l’on voit. J’ai eu carte blanche pour tout,  le tournage et le final cut pour le montage. Et ça a été quand-même un soulagement pour moi le moment où le groupe a vu le film et qu'ils l'ont vraiment aimé. Ils ont été sur la même longueur d’onde depuis le début du projet : c’était mon film à propos d'eux, The Stone Roses.

made of stoneEN : Pourquoi le premier concert est filmé en noir et blanc et les autres en couleur ?
Shane Meadows : J’aime le noir et blanc, et j’ai d’ailleurs déjà fait quelques films en noir et blanc, comme Sommers Town. Ici, pour ce tout premier concert après tant d’années personne ne savait vraiment ce qui allait se passer. L’idée de passer du monochrome à la couleur pour les concerts était cohérente avec le fait de les découvrir d’abord chez eux dans cette petite salle puis ensuite en tournée ailleurs en Europe comme par exemple Barcelone. Il y a aussi le fait que ce tout premier concert était une surprise (ndr : une annonce à la radio et  internet d’un billet de concert gratuit pour les fans qui viendraient avec un disque ou un tshirt), c’était le début d’une nouvelle histoire et en même temps un moment de légende.

EN : Il y a une scène lors du concert à Lyon où dans les coulisses on voit le groupe avec Eric Cantona qui est cette année le président du jury ici à Dinard…
Shane Meadows : J’ai vu Eric Cantona hier soir et justement je lui ai dit qu’il apparaissait dans mon film. Lui aussi, comme eux, c’est une légende de Manchester, le voir en compagnie de The Stone Roses était un moment magique.

EN : Est-ce que ce film The Stones Roses : made of stone arrivera en France ?
Shane Meadows : Il y a eu une sortie dans les cinémas en Angleterre et le film est maintenant en dvd depuis trois semaines, avec un dvd de bonus. Pour une sortie dans les autres pays, c’est en cours de discussion pour ce qui est d’une sortie cinéma ou plus probablement directement en dvd. Pour la France on parlait justement avec un distributeur hier mais je ne sais pas ce qu’il adviendra.

EN : Vous pouvez parler de votre prochain film ?
Shane Meadows : Il y a déjà les retrouvailles avec Thomas Turgoose et Vicky McClure et les autres pour This is England 90 (ndr : après le film This is England il y a eu la série This is England 86 (4 épisodes) et This is England 88 (3 épisodes) encore inédite en France, la série a gagné le prix Best Mini Series aux BAFTA Television Awards 2012). Il y a aussi un projet de film qui serait un genre de biopic à propos du cycliste anglais Thomas Simpson mort au Mont Ventoux durant Le Tour de France de 1967, le film serait tourné entièrement en France. Je vais devoir finalement apprendre à parler un peu votre langue le français…

Le prochain Festival Britannique de Dinard en 2014 va fêter ses 25 ans. Il se pourrait que Shane Meadows soit une nouvelle fois présent à Dinard avec pour l’occasion une projection de ses 25 courts métrages…

Dinard 2011 : Shane Meadows présente This is England 86

Posté par kristofy, le 6 octobre 2011

Dinard 2011Le 22e Festival du film britannique de Dinard accueille nos voisins d'outre-Manche du 5 au 9 octobre. Cette année, c'est l'actrice Nathalie Baye qui préside le jury. En tout, six films sont en compétition, dont Oranges and Sunshine de Jim Loach (le fils de Ken Loach) et le déjà favori Tyrannosaur de Paddy Considine. Une quinzaine de films sont également à découvrir en avant-première avec notamment un focus sur le cinéma écossais. Enfin, Dinard va rendre hommage au scénariste et écrivain Harold Pinter (en la présence de Lady Antonia Fraser) et à l’acteur John Hurt qui donnera une master-class à l'issue d'une projection.

Parmi les autres temps forts, on peut noter le retour de Shane Meadows à Dinard ! De films en films, il est devenu l'un des plus talentueux réalisateurs anglais à suivre. Il faut d’ailleurs se souvenir que cette reconnaissance en France a quasiment démarrée avec le Festival de Dinard où il a été invité presque un an sur deux :  Twentyfourseven en compétition en 1998,  Once Upon A Time In The Midlands en avant-première en 2002, Dead Man's Shoes en compétition en 2004 (Hitchcock d'or),  hommage, rétrospective de ses films et This Is England en avant-première en 2007, Somers Town en séance spéciale en 2008,  Le Donk & Scorz-Ayz-Ee en avant-première en 2009... Même en 2010 il avait fait le déplacement ! Il était donc logique qu'il revienne cette année avec la suite de This is England.

Flashback : 2008, cérémonie des BAFTA. Le meilleur film britannique de l'année est… This is England de Shane Meadows. Le film, situé en 1983, suit un garçon de 12 ans environ nommé Shaun (le jeune Thomas Turgoose) qui intègre progressivement un groupe de skinheads dont certains allaient dériver vers un mouvement politisé raciste.

Trois ans plus tard, Shane Meadows a écrit la suite qui se déroule en 1986 pendant la coupe du monde de foot au Mexique… C’est devenu une This is England ' 86mini-série de quatre épisodes d’abord diffusée sur Channel 4 : This is England '86. On y retrouve donc les mêmes personnages (joués par les mêmes acteurs) : Shaun devient peu à peu un adulte dans une Angleterre de chômage et de familles éclatées. Cette jeunesse qui était en rébellion contre son présent a grandi et se cherche maintenant un futur…

La série This is England '86 est écrite par Shane Meadows et Jack Thorne, et réalisée par Tom Harper (épisodes 1 et 2) et Shane Meadows (épisodes 3 et 4).

This is England '86, épisode 1 : Shaun sort de l’école sans examen ni travail, à l’hôpital il retrouve son ancienne bande après un mariage raté entre Lol et Woody et une crise cardiaque. L’insouciance commence à laisser place à la gravité, mais l’amitié est ce qui compte le plus.

This is England '86, épisode 2 : Une fête sauvage ramène au sérieux de la vie, Shaun expérimente un boulot et le couple de Lol et Woody se fragilise. Leurs parents essaient de recomposer une famille avec peine.

This is England '86, épisode 3 : Après quelques moments dignes de leur jeunesse c’est la résignation du passage à l’âge adulte. Lol déprime de plus en plus, et pendant un match à la télé, Shaun se réconcilie avec sa mère, tandis que le père de Lol commet l’irréparable.

This is England '86, épisode 4 : C'est le retour de Combo auprès de Shaun, Woody voudrait un nouveau mariage, et Lol va se confronter de manière brutale à son père...

L'actrice Vicky McClure est la révélation de This is England '86. Elle a remporté un prix de meilleure actrice au BAFTA Television Awards (elle avait d'ailleurs été découverte dans Room for Romeo Brass déjà de Shane Meadows). Shane Meadows a déjà prévu une nouvelle suite qui se déroulera deux ans plus tard au moment de noël 1988. This is England '88 est en préparation... à découvrir à Dinard en 2012 ?

Dinard 2009 : des cinéastes en tous genres

Posté par kristofy, le 27 octobre 2009

Le jury du 20ème Festival du film Britannique de Dinard a choisi de récompenser le film White Lightnin’  réalisé par Dominic Murphy où la violence de Jesco White en perdition se confond avec celle d’un coin du sud des USA, et le film Jean Charles de Henrique Goldman où des immigrants brésiliens se retrouvent à Londres, mais pendant la psychose des attentats l’un d’eux va être tué par des policiers… Ce palmarès est une nouvelle illustration que le cinéma britannique semble s’interroger sur le monde et les autres bien plus que le cinéma français. Si les films en compétition étaient très différents les uns des autres ils ont tous su faire partager aux spectateurs des quotidiens des personnes plutôt que de personnages.

Le cinéaste Shane Meadows vient maintenant chaque année à Dinard, son festival préféré, où presque chacun de ses films ont été découvert ici comme Dead Man’s Shoes (grand prix Hitchcock d’or en 2004), This is England, Somers Town en clôture en 2008. Son nouveau film Le Donk & Scor-Zay-Zee est une expérience de vrai-faux documentaire tourné en seulement cinq jours sans scénario. Shane Meadows avec une caméra numérique (plus un autre caméraman et un preneur de son) a choisi comme sujet de film Le Donk (un roadie qui travaille en coulisse des concerts des Artic Monkeys) qui voudrait devenir le manager de Scorz, un copain qui fait du rap en amateur. On découvre donc un looser magnifique qui regrette que son ex-femme enceinte de lui soit heureuse avec un autre et un rappeur qui espère chanter devant des milliers de personnes. Shane Meadows réussit avec habileté à provoquer des improvisations géniales (surtout de Paddy Considine) tout en nous montrant des scènes off, en plus de l’histoire des deux personnages il y a aussi celle du film dans le film (Scorz-Zay-Zee a depuis enregistré son premier album). Le Donk & Scorz-Zay-Zee est autant un exercice de style qu’une fiction en forme de documentaire, ce mockumentaire très drôle est aussi une sorte de manifeste encourageant les apprentis-cinéastes à réaliser eux aussi un film en cinq jours…   

Les amateurs de films de genre fantastique vont attendre Moon, un premier film très maîtrisé de Duncan Jones, déjà un peu connu comme réalisateur de pub et de clip et plus connu comme étant le fils de David Bowie. Dans un futur pas si lointain les ressources d’énergie sur Terre sont épuisées alors on exploite de l’hélium 3 produit sur la Lune. Là-haut, la production est surveillée par un seul employé (Sam Rockwell) qui y travaille avec un contrat de trois ans avant de revenir. Un accident va bousculer les certitudes de cet employé qui va se rendre compte qu’il n’est pas aussi seul qu’il le croyait… Moon est un film de science-fiction du genre introspectif, avec des mouvements de caméra calmes et la musique planante de Clint Mansell, un climat propice pour partager les doutes du personnage. Après avoir été un des évènements du festival de Sundance 2009 (40 après les premiers pas de l’homme sur la Lune), Moon a aussi récolté une moisson de récompenses au festival fantastique de Stiges.

Un des réalisateurs précurseur de la vague ‘Horror made in UK’ (The Descent, Eden Lake, Wilderness, etc…) était de retour à Dinard : Christopher Smith qui nous avait épouvanté avec Creep puis avec le survival déjanté Severance nous a présenté son mystérieux Triangle. Cette fois c’est un pur film d’angoisse qui joue avec les nerfs des spectateurs. Triangle est la fois très malin et très maîtrisé, une belle surprise.

 Une séance spéciale a fait découvrir sur grand écran Lesbian Vampire Killers, une chance car le film qui aurait dû sortir en salles cet été nous arrivera en fait directement en dvd courant février 2010. Deux potes en virée arrivent dans un village maudit où à leurs 18ème anniversaire les jeunes filles deviennent des vampires lesbiennes, et justement quatre bimbos étudiantes sont venues elles aussi… Même si on est loin en dessous de Shaun of the dead, cette comédie parodique est tout de même assez jouissive (les premières quinze minutes où on découvre les personnages sont délirantes) avec son lot de gags graveleux, difficile de lutter contre des suceuses démoniaques.

Une poignée de films ont été quelque peu décevant, il faut bien le dire aussi, mais la grande majorité ont eu de nombreux échos très favorables. Pour les déceptions citons Shifty où le quotidien d’un jeune dealer de crack et ses mésaventures avec ses proches et ses clients ; Boogie Woogie film choral (avec Gillian Anderson, Heather Graham, Alan Cumming, une scène avec Charlotte Rampling…) qui critique le monde des amateurs d’art contemporain et ses clichés éculés ; et le film de clôture From time to time présenté par son réalisateur Julian Fellowes (oscarisé pour son scénario de Gosford Park) où un adolescent de 13 ans retourne au manoir familial au sortir de la guerre, sa grand-mère (Maggie Smith impériale) tente de sauver pour lui la demeure familiale et l’espoir que son père est encore vivant, mais des fantômes vont leur permettre de découvrir les secrets de leurs ancêtres…

Une jolie surprise est venue du réalisateur irlandais Lance Daly qui avec Kisses filme la vie nocturne d’une ville avec le regard de deux enfants qui font une fugue. Une fillette et son petit voisin subissent les disputes de leur famille, lui met un coup à son père pour défendre sa mère et une vitre est cassée à cause d’elle, alors ils s’enfuient ensemble. Le film commence en noir et blanc à l’image de leur quotidien gris puis doucement les couleurs arrivent au fur et à mesure qu’ils découvrent la grande ville. Ils s’amusent d’abord à dépenser de l’argent comme si c’était noël mais bientôt ils se rendent comptent qu’il va leur falloir trouver à manger et où dormir… Kisses réunit tout les ingrédients (et même les clichés) d’un film social comme seuls les britanniques savent en faire avec une situation désespérante d’où survient quand même l’espoir, mais son originalité un peu magique ne peut que remporter l’adhésion. On y entend cette jolie phrase : ‘when you kiss, you give or you take’.

L’autre belle surprise est peut-être le film le plus anglais du festival de Dinard bien qui soit réalisé par la danoise Lone Scherfig : An Education est le genre de film qui fait figure de classique instantané sur lequel on s’imagine parier pour arriver jusqu’aux Oscars (déjà un prix du public à Sundance). Il nous raconte le parcours d’une jeune fille BCBG de bientôt 17 ans qui va s’émanciper du conservatisme ambiant du Londres des années 60 encore marqué par l’après-guerre : un homme qui a dépassé la trentaine va lui faire tourner la tête et lui faire découvrir la vie comme elle la rêvait secrètement. La jeune Carey Milligan était conditionnée pour être sérieuse à l’école pour viser une prestigieuse université, mais elle va être séduite par l’aventurier Peter Sarsgaard qui lui fait découvrir le luxe et l’insouciance. Elle qui idéalise les français de Saint-Germain-des-Prés (Juliette Gréco et l’existentialisme de Sartre…) va découvrir d’un coup l’amour irraisonné (il a le double de son âge) et les conduites irraisonnables (ne pas compter l’argent, aller à l’encontre des bonnes moeurs…). Elle va transgresser beaucoup de conventions par rapport à sa famille (le père Alfred Molina voit d’un mauvais œil les étrangers sauf si ils permettent de s’élever socialement) et à son école (la directrice Emma Thompson ne veut pas entendre parler de relation intime avec un garçon pas plus que de se détourner des livres), mais l’époque du milieu des années 60 est-elle déjà prête pour être bousculée ? Le scénario très habile de Nick Hornby (inspiré d’une histoire vraie) parvient à nous faire partager les questionnements (féministes) et les envies (de belles vies) de son héroïne, ce qui fait que An Education trouve aussi un écho avec notre époque et notre adolescence.

Week-end Romantique à Cabourg

Posté par kristofy, le 15 juin 2009

cabourg_affiche.jpgAprès l’effervescence méditerranéenne de Cannes, c’est presque la fête du cinéma français sur la côte fleurie de Normandie.

Du 10 au 14 juin le tapis rouge de la 23ème édition du Festival du film de Cabourg a été déroulé pour ses Journées Romantiques et ses Journées Européennes. Il s'agit d'une large sélection de films, proposée en plus d’une compétition de longs-métrages (Sam Karmann est président de ce jury) et une autre de courts (Robin Renucci préside cet autre jury), auxquelles s'ajoutent des projections et des concerts sur la plage.

"Ici, peu de paillettes mais beaucoup de sourires, en toute simplicité. Notre Festival est le seul de cette importance où le public peut rencontrer d’aussi près les actrices et les acteurs d’aujourd’hui et de demain. Cette 23ème édition sera également le théâtre de bien des nouveautés : une journée en plus et le vote des spectateurs pour un Prix du Public", selon l'écho de quelques mots des officiels, lors de l'ouverture de la manifestataion. 

Durant cinq jours Cabourg et sa promenade romantique si chère à Marcel Proust s’animent au rythme du passage des personnalités qui sont nombreuses à venir. Le Festival de Cabourg est aussi le premier rendez-vous entre le public et les films français qui vont sortir cet été, en commençant par Les Beaux Gosses et Je Vais Te Manquer, sortis cette semaine. En avant-première il y a eu notamment Fais moi plaisir de Emmanuel Mouret avec Frédérique Bel et Judith Godrèche. Didier Bourdon  est venu avec sa chienne Bambou et avec Anne Consigny. Les actrices étaient à la fête : Je ne dis pas non avec Sylvie Testud, Tricheuse avec Hélène De Fougerolles, Une Semaine Sur Deux avec Mathilde Seigner, Jusqu’à Toi avec Mélanie LaurentJoueuse avec Sandrine Bonnaire ou encore Neuilly Sa Mère avec Rachida Brakni.  

Par ailleurs, les nouveaux romantiques viennent recevoir leur prix : 

Swan d’Or 2009:

- Révélation masculine : Jérémy Kapone pour LOL (remis par Mathilde Seigner et Bernard Campan).

- Révélation féminine : Anaïs Démoustier pour Les Grandes Personnes (remis par Didier Bourdon et Anne Consigny).

- Meilleur réalisateur : Stephen Frears pour Chéri (remis par Cécile Cassel et Malik Zidi).

- Meilleur acteur : Benoît Poelvoorde pour Coco avant Chanel (remis par Sandrine Bonnaire et Caroline Bottaro).

- Meilleure actrice : Emilie Dequenne pour La fille du RER (remis par Emmanuel Mouret et Judith Godrèche). 

Swan d’Or des courts-métrages :

- Meilleur réalisateur : Runar Runarsson pour Les Moineaux.

- Meilleure actrice : Camille Claris pour En douce

- Meilleur acteur : Nazmi Kirik pour Phone Story.

Swan d’Or des longs-métrages en compétition :

- Prix du Public : Tengri, le bleu du ciel réalisé par Marie Jaoul de Poncheville

- Prix de la Jeunesse : Somers Town réalisé par Shane Meadows

- Grand Prix : Somers Town réalisé par Shane Meadows ex-aequo avec Sometime in august réalisé par Sebastian Schipper. Le réalisateur Shane Meadows était déjà le chouchou du Festival Britannique de Dinard, le voici également multi-primé à Cabourg pour Somers Town. Après son succès le plus important This Is England, il avait accepté comme une récréation une proposition d’un film de commande pour une compagnie ferroviaire. Mais Shane Meadows a alors filmé beaucoup plus que prévu et ce projet s’est transformé en un tout autre film qui est devenu ce long-métrage. Deux jeunes garçons de deux quartiers différents se rencontrent et deviennent ami pour égayer leur vie qui manquait de couleurs…