Cannes 2020 : un programme d’accompagnement Hors Les Murs pour la Semaine de la Critique

Posté par MpM, le 4 juin 2020

L'impossibilité de tenir une édition physique du Festival de Cannes n'a pas empêché la Semaine de la Critique de poursuivre son travail d'accompagnement des jeunes cinéastes à travers un "programme d’accompagnement Hors Les Murs" consistant en une sélection réduite de cinq longs et dix courts métrages.

Les longs métrages qui ont reçu le label « Semaine de la Critique 2020 » seront ainsi accompagnés lors de leur présentation en avant-première et de leur sortie dans les salles françaises. Les films francophones (4 sur les 5) seront présentés dans le cadre d’une carte blanche Semaine de la Critique au Festival du Film Francophone d’Angoulême qui se tiendra du 28 août au 2 septembre prochain.

Les courts bénéficieront d’avant-premières à la Cinémathèque française ainsi que de projections à la Cinémathèque tchèque et à New York, et seront également diffusés en ligne du 19 au 25 octobre 2020 sur la plateforme Festival Scope. Les réalisatrices et réalisateurs sélectionné.e.s auront par ailleurs la possibilité de participer au programme "Next Step" qui a pour but de les accompagner dans leur passage au long métrage.

Parmi les films sélectionnés, que l'on a hâte de découvrir dans les mois à venir, on retrouve le premier long métrage d'une réalisatrice dont on suit le parcours depuis longtemps : Chloé Mazlo, César du meilleur court métrage d'animation en 2015 avec Les Petits cailloux, et dont on avait notamment beaucoup aimé le film Diamenteurs. Son film Sous le ciel d'Alice, écrit une nouvelle fois en duo avec Yacine Badday, réunit Alba Rohrwacher et Wajdi Mouawad et mêle prise de vues continues et animation.

On retrouve également dans ce "programme d’accompagnement" Nuée, le premier long métrage de Just Philippot, dont le court Acide avait beaucoup impressionné en 2018 ; le deuxième long métrage de Naël Marandin (La Marcheuse), La Terre des hommes, avec notamment Olivier Gourmet et Jalil Lespert ; et De l'or pour les chiens, le premier long d'Anna Cazenave Cambet qui avait été révélée à Cannes en 2016 avec son court Gabber lover.

Le cinquième et dernier film "labellisé" est britannique : After love de Aleem Khan, dont le court métrage Three Brothers avait été nommé aux BAFTA en 2014.

Côté courts métrages, beaucoup de promesses, et quelques noms déjà repérés ailleurs comme Aya Kawazoe (The elephant died, We don't go home), Jan Roosens & Raf Roosens (Copain sélectionné à Cannes en 2015), Teymur Hajiyev (The Wound, Shanghai, Baku, Salt, pepper to taste ) et Ismaël Joffroy Chandoutis (Ondes noires, Swatted).

Longs métrages labellisés

After love de Aleem Khan
De l'or pour les chiens d'Anna Cazenave Cambet
La Nuée de Just Philippot
Sous le ciel d'Alice de Chloé Mazlo
La Terre des hommes de Naël Marandin

Courts métrages labellisés

August 22, This Year de Graham Foy
Towards Evening de Teymur Hajiyev
Dustin de Naïla Guiguet
Forastera de Lucía Aleñar Iglesias
Good Thanks, You? de Molly Manning Walker
Humongous! de Aya Kawazoe
Maalbeek de Ismaël Joffroy Chandoutis
Marlon Brando de Vincent Tilanus
Menarca de Lillah Halla
White Goldfish de Jan Roosens et Raf Roosens

Epinal 2018 : le festival Regards sur courts rayonne

Posté par kristofy, le 20 septembre 2018

Regards sur courts Epinal 2018Le Festival international de l'image de Épinal est l’un des plus anciens rendez-vous consacré au diaporama ou “court-métrage photographique” : de sa création en 1961, avec des récits constitués de diapositives passées en fondu-enchaîné sur une bande sonore sur bobine, aux années 2000, avec des montages tout numérique, ce type bien particulier de court a toujours été en évolution.

Cette forme audiovisuelle à base d’images fixes (et parfois de vidéo et d'animation) multiplie les styles (fiction, documentaire, reportage, essai...) et ouvre une fenêtre vers bien des audaces : propos engagés, témoignages intimes, fictions humoristiques... tous les thèmes sont permis !

La manifestation a d'ailleurs récemment été rebaptisée Festival Regards sur courts pour proposer une plus grande variétés de découvertes, avec désormais un volet de courts métrages de cinéma.

A Epinal, le court se décline ainsi désormais en image fixe comme en prise de vues réelles ou en animation. Peu importe le format, pourvu qu'on ait le frisson esthétique ou émotionnel !

L'édition 2018, qui commence ce jeudi 20 septembre dans la belle cité vosgienne, propose ainsi une compétition de courts photo qui réunit 48 oeuvres en lice pour la Coupe de l'Europe et une autre compétition internationale de 17 courts cinéma venus d’Australie, du Canada, du Brésil, de Turquie, du Portugal ou encore d'Israël, dont certains ayant été remarqués à Cannes, Berlin, Toronto ou Annecy.

On relève notamment la présence de deux films en sélection pour les César : Etreintes de Justine Vuylsteker (que l'on avait rencontrée à l'occasion de notre série animée d'été) et Vilaine fille de Ayce Kartal, ainsi que de deux réalisatrices qui figuraient également dans les rencontres animées de l'été : Vergine Keaton pour Le tigre de Tasmanie et Nara Normande pour Guaxuma.

Il y aura aussi un focus sur la thématique «Ecrire l’intime », et surtout une carte blanche à la réalisatrice Chloé Mazlo, César du meilleur court-métrage d’animation en 2015 pour Les petits cailloux, qui sera présente pour montrer certains de ses films, parler de son travail et rencontrer le public.

Si l'on n'est pas en train d'assister à la naissance d'un festival de cinéma à Epinal, cela y ressemble fort !

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Regards sur Courts
Du 20 au 23 septembre 2018
Infos et programme sur le site de la manifestation
A suivre sur la page Facebook

Retour sur le 10e Paris international animation Film Festival

Posté par MpM, le 4 octobre 2017

La 10e édition du Paris international animation Film Festival (PIAFF) s'est achevée mardi 26 septembre avec la proclamation du Palmarès. C'est Impossible figures and other stories II de Marta Pajek qui a remporté le grand Prix décerné par le jury. Il s'agit d'un film au graphisme très épuré (trait noir, rares touches de couleur) qui suit une jeune femme dans son appartement aux dimensions labyrinthiques.

On ne sait si elle s'y perd, ou choisir d'y déambuler au hasard, se laissant surprendre par les rencontres et les découvertes. Un film étrange et saisissant qui tend au spectateur un miroir pour qu'il puisse sonder à son tour les méandres de son labyrinthe intime. Un très beau choix de la part du jury qui va avec ce film vers un cinéma peu narratif et très elliptique.

Le palmarès

Figurent également au palmarès Vilaine Fille d'Ayce Kartal (Prix du jury), délicat récit à la première personne d'une petite fille ayant subi une agression ; Locus d'Anita Kwiatkowska-Naqvi, curieux Prix du scénario pour une œuvre à la beauté indéniable, réalisée avec des figurines translucides presque déchirantes, mais qui demeure assez absconse ; Min Borda de Niki Lindroth von Bahr (Prix de la mise en scène), comédie musicale existentielle dans laquelle des animaux chantent la solitude, l'absurdité du monde et le fardeau qui pèse sur leurs épaules (découvertà la Quinzaine des réalisateurs et couronné à Annecy) et Morning cowboy de Fernando Pomares (Prix d'interprétation ex-æquo avec Alphonse s'égare de Catherine Buffat et Jean-Luc Greco) qui raconte la révolte d'un homme qui décide de renouer avec ses rêves d'enfance.

On y retrouve aussi Orogenesis de Boris Labbe (Prix du meilleur son), indescriptible succession de plans en noir et blanc qui simulent la formation des montagnes sur la croûte terrestre, en une reconstitution presque aride d'un passé qui nous bouleverse par la seule force de ses images et enfin (Fool time) job de Gilles Cuvelier, fable clinique et désespérée sur un homme contraint d'accepter un travail terrifiant pour nourrir sa famille, mise en scène avec une précision et un sens de l'ellipse aussi admirables que glaçants.

Les temps forts

Cette 10e édition proposait en plus de la compétition professionnelle et films d'étudiants de nombreux temps forts permettant au public d'avoir un large aperçu de la production actuelle (films de commande, films du monde, films envisagés mais non retenus compétition, rencontres avec des auteurs comme Claude Barras ou Arthur de Pins, carte blanche au studio Train Train...).

Une très belle séance consacrée au cinéma de patrimoine, conçue par Jean-Baptiste Garnero du CNC, a également permis de découvrir l'œuvre primordiale et atypique de Peter Foldès, cet animateur d'origine tchèque installé en France, à qui l'on doit notamment le saisissant La faim mais aussi des œuvres plus légères comme des publicités pour Bahlsen et la Samaritaine, et même le générique de Stade 2. Un animateur qui fait date dans l'histoire de l'animation française comme mondiale notamment parce qu'il a décloisonné tous les genres et essaimé dans l'inconscient collectif. Ce fut également un pionnier de l'informatique, qui a très vite détecté ce que les nouvelles technologies pouvaient apporter à l'animation.

La compétition professionnelle


Moment phare du Festival, la compétition professionnelle a littéralement estomaqué par sa qualité et son audace. C'est vraiment le meilleur de l'animation mondiale qui a été rassemblé par le sélectionneur Alexis Hunot à travers 25 films qui mêlaient les genres et les techniques avec un sens très aigu du dosage. L'animation y était entendue ici au sens le plus noble du terme, sans concessions à son image tarte à la crème de genre léger, voire enfantin, qui privilégie la forme au fond. On a donc vu des films engagés, existentiels, profondément ancrés dans leur époque, parfois intimes, qui livrent du monde une vision en demi-teinte, entre désespoir et ironie, dénonciation et prise de conscience.

On a déjà cité le très fort (Fool time) job de Gilles Cuvelier, sur les extrémités auxquelles sont amenées certaines personnes pour survivre, ainsi que Min Börda de Niki kindroth von Bahr, sur l'extrême moderne solitude, mais on pourrait également parler de Airport de Michaela Müller qui montre comment les aéroports sont devenus des lieux anxiogènes de contrôle et de sécurité, où tout semble pouvoir déraper à tout moment ; Le curry de poisson d'Abhishek Verma sur un coming out tout en retenue entre un père et son fils ou encore Buddy Joe de Julien David qui donne la parole à son beau-père atteint de la maladie de Parkinson en chassant toute velléité de dramatisation lacrymale.

Un cinéma plus expérimental, plus formaliste aussi, était également présent. On pense notamment à l'hypnotique Orogenesis de Boris Labbé, ou au déconcertant Miller Fisher de Falyaz Jafri qui joue lui-aussi sur un cinéma purement sensoriel avec des plans répétés dont on ne peut détacher le regard. L'explication du film (il s'agit de l'expérience visuelle, physique et existentielle distordue de la maladie auto-immune du même nom, dont souffre le réalisateur)) importe au fond moins que l'impression saisissante que ces images opèrent sur celui qui les regarde. Casino de Steven Woloshen propose également un travail très visuel où des formes presque abstraites (qui évoquent la passion du jeu du père du réalisateur) bougent en adéquation avec une musique de jazz entraînante.

Nos chouchous


Enfin, parmi ces 25 films, trois nous ont plus particulièrement marqués. Il y a tout d'abord Diamenteurs de Chloé Mazlo (Oscar du meilleur court métrage en 2015 avec Les petits cailloux), une oeuvre hybride captivante qui utilise un matériau intime pour raconter un conte apparemment anodin aux accents pourtant universels. La réalisatrice travaille l'intime depuis ses premiers courts métrages et c'est, chez elle, une constante quasiment aussi forte que son travail d'animation mêlant stop Motion et prise de vue réelle.

Sa famille est donc presque naturellement la matière principale du film, que ce soit à travers des images d'archives familiales, via la voix de son père, qui est le narrateur, ou avec ses propres apparitions (et celles de ses frère et sœur) à l'écran. Mais elle le fait paradoxalement au service d'une narration qui n'a plus rien à voir avec l'histoire de sa famille puisqu'il s'agit de raconter le processus qui transforme un diamant brut en une pierre calibrée et polie prête à être montée en bijou. C'est petit à petit, dans le décalage entre les images et la voix-off, qu'apparaît le vrai sujet du film : le formatage tout aussi brutal que l'on fait subir à l'être humain dès la naissance.

Dans un style très différent, Toutes les poupées ne pleurent pas de Frédérick Tremblay (Prix du jury de la critique) laisse le spectateur dans un état de sidération difficilement descriptible. On est à la fois ébahi par l'expressivité des marionnettes qui sont au cœur du récit, frappé par l'intelligence de la mise en abîme (le film montre dans une grande épure, en prise de son direct, et sans musique, le tournage d'un film en stop-motion par un couple - également de marionnettes - qui ne se croise jamais) et émerveillé par la précision de la mise en scène à la fois au niveau du film dans le film (choix des plans, mouvements minuscules pour animer les marionnettes, magie de la succession de plans fixes qui recrée une histoire) et dans le récit lui-même qui effectue le même travail avec une force dramatique décuplée.

On est face à du grand art de l'animation, mais aussi devant une oeuvre solide, qui suggère et propose plusieurs niveaux de lecture sans jamais rien asséner, et fait naître de ses êtres pourtant inanimés des fulgurances existentielles déchirantes.

Enfin, Alphonse s'égare de Catherine Buffat et Jean-Luc Greco (prix d'interprétation ex-aequo) est un récit en apparence plus classique d'une initiation adolescente dans laquelle tout déraille. Le film crée un décalage systématique (avec  notamment la voix volontairement très nasillarde du personnage, mais aussi les situations et les dialogues) qui rend tout à la fois drôle et un peu tragique. On est dans ce moment symbolique de la fin de l'adolescence et du passage à l'âge adulte où tout s'emballe, parce que tout semble tout à coup possible et à portée de mains, mais sans pathos, sans psychologie de comptoir. Et c'est vrai que le film se moque allègrement de lui-même et de ses congénères teen-movies,  tout en rendant son (anti) héros terriblement attachant.

Pour son anniversaire, le PIAFF s'est ainsi offert une édition exemplaire et enthousiasmante, qui fera vraisemblablement date dans son histoire. De quoi galvaniser l'équipe organisatrice qui devra justement faire face, dès l'année prochaine, à de nouveaux défis, et notamment au départ de son directeur artistique.

Les petits cailloux de Chloé Mazlo : découvrez le César 2015 du meilleur court-métrage d’animation sur France 2

Posté par MpM, le 10 mai 2015

les petits cailloux

Dernier volet de la trilogie autobiographique de Chloé Mazlo, Les petits cailloux est un petit bijou d'humour et de poésie sur une jeune femme souffrant d'un mal de ventre insoutenable et tenace. Animé en stop motion, le film présente des personnages humains fortement typés (la fée, l'indien) ou carrément hybrides, corps humain et tête animale qui portent à la main, sous la forme d'une valise plus ou moins encombrante, ses préoccupations ou ses soucis principaux. Dans cet univers de conte, l'ironie, la douleur et même la violence ne sont pas absents, et la malheureuse héroïne devra passer par plusieurs étapes sensibles avant de comprendre ce qui la frappe.

Touchant, pudique et plein d'une fantaisie faussement naïve, Les petits cailloux a été récompensé par le César du meilleur court-métrage d’animation en février dernier, face à des concurrents de poids comme La bûche de Noël de Vincent Patar et Stéphane Aubier (les réalisateurs de Panique au village) ou La petite casserole d'Anatole d'Eric Montchaud (prix du public au Festival d'Annecy 2014).

Une récompense qui couronne le travail passionnant de Chloé Mazlo dont le nouveau film, Conte De Fées À L’usage Des Moyennes Personnes (également produit par Les films sauvages) poursuit dans la même veine ludique et profonde à la fois son observation de l'absurdité un peu dérisoire du monde. Cette adaptation du conte éponyme de Boris Vian utilise en effet la technique d'animation singulière typique de l'oeuvre de la créatrice pour mettre en scène les aventures loufoques d'un jeune homme souffrant d'un gros chagrin d'amour, en quête d'un peu de sucre pour "adoucir l'amertume de la vie"...

Pour découvrir l'univers de la jeune réalisatrice, rendez-vous sans faute le dimanche 24 mai dans l'émission "Histoires courtes" de France 2 où sera diffusé en exclusivité Les petits cailloux. Par ailleurs, suivez toute l'actualité de Chloé Mazlo sur son site internet. Et, en bonus, découvrez dès maintenant le premier volet de sa trilogie, L'amour m'anime :