Fin de partition pour Michel Legrand (1932-2019)

Posté par vincy, le 26 janvier 2019

C'était un géant dans son domaine. Et pour nous son nom signifie beaucoup puisqu'il a composé la chanson de Claude Nougaro en 1962, Cinéma, plus connue par son refrain, "Sur l’écran noir de mes nuits blanches"...

Le compositeur de musique Michel Legrand, né le 24 février 1932, est décédé cette nuit à Paris à l'âge de 86 ans, a annoncé son épouse Macha Méril. Michel Legrand a récemment recréé des musiques supplémentaires pour la version scénique de "Peau d'âne" au théâtre Marigny. Il devait aussi donner des concerts à Paris au printemps. Il avait écrit plus de 150 musiques de films.

C'est le cinéma qui lui a donné une reconnaissance mondiale. Mais c'est le jazz qui l'a fait connaître et c'est le easy listening qui lui a ouvert les portes des radios. Dès 1954, il enregistre un album (I Love Paris, 8 millions d’exemplaires aux USA), puis il sort, entre autres, en 1958, Legrand Jazz, avec Miles Davis, Bill Evans, Paul Chambers et John Coltrane, en 1971, Communications '72, avec Stan Getz, et récemment, en 2017, Between Yesterday and Tomorrow, avec Natalie Dessay. Au total une dizaine d'albums. Mais Michel Legrand c'est aussi le jingle le plus connu de la radio (RTL) et le générique de la série animée culte Il était une fois... l'Espace.

Car, sous leurs airs de variété élégante, le pianiste maîtrisait les cassures et les envolées virevoltantes du jazz, les mélodies mélancoliques et les refrains entêtants de la chanson, les élans symphoniques et le swing qui faisait danser nos têtes. Ce que les réalisateurs de la Nouvelle Vague n'ont pas manqué de repérer.

Cela lui vaut d'abord trois Oscars - chanson en 1969, musique de film en 1972 et adaptation musicale en 1984. Il reçoit aussi un Golden Globe et un BAFTA Award. Il a en plus reçu 6 nominations aux Oscars (quatre pour une chanson, une musique de film, une adaptation musicale), 12 nominations aux Golden Globes, 2 aux BAFTA, 3 aux Grammy Awards et 3 aux César.

En plus de cela, il a travaillé avec Ray Charles, Jean Cocteau, Frank Sinatra, Charles Trenet et Édith Piaf. Au cinéma, il débute dès les années 1950 avec des musiques de films tels Les Amants du Tage d'Henri Verneuil, Charmants Garçons d'Henri Decoin et Le Triporteur de Jacques Pinoteau.

En 1960, il compose la musique de Lola de Jacques Demy, amorce de leur fidèle et longue collaboration, et d'une amitié et une complicité fraternelle et fusionnelle, qui sera rapidement et mondialement reconnue grâce aux Parapluies de Cherbourg. Une harmonie parfaite. Une synchronisation de l'image et du son.

Mais Michel Legrand écrit aussi les partitions de films très différents: Le cave se rebiffe de Gilles Grangier, Une femme est une femme, Vivre sa vie et Bande à part de Jean-Luc Godard, Cléo de 5 à 7 d'Agnès Varda où il fait aussi l'acteur, Eva de Joseph Losey, Une ravissante idiote d'Édouard Molinaro, Tendre Voyou de Jean Becker... Il trouve en Jacques Deray ou Jean-Paul Rappeneau (La vie de château, Les mariés de l'an II, Le sauvage) un cinéma qui se calque bien à ses créations musicales, léger ou tragique.

Les triomphes des films musicaux de Demy lui assurent une notoriété mondiale. A partir de 1968, c'est Hollywood qui l'appelle. Michel Legrand travaille parallèlement pour Sydney Pollack, Richard Lester, John Frankenheimer, Orson Welles, Irvin Kershner (pour le dernier 007 avec Sean Connery), Blake Edwards ou encore Robert Altman. C'est surtout avec Claude Lelouch qu'il va ltravailler à partir des années 1980, aux côtés de Francis Lai, lui aussi disparu il y a quelques mois. Depuis Les Uns et les Autres en 1981, ils ont collaboré ensemble quatre fois. Dans les années 197, l continue d'écrire les musiques des films de Losey et Deray, puis s'aventure dans divers genres, chez Louis Malle (Atlantic City), Xavier Beauvois (ses deux derniers films) ou Danièle Thompson (La bûche).

Michel Legrand en 9 morceaux.

Les Parapluies de Cherbourg de Jacques Demy (1964). Troisième collaboration avec Demy qui se lance dans le pari fou d'un drame musicale entièrement chanté. Un véritable défi: écrire une musique qui ne s'arrête finalement que rarement et où les dialogues doivent être mélodieux et naturels. Palme d'or à Cannes, le film devient une référence cinéphile mondiale. Et sa musique, souvent déchirante, l'une des plus connues du 7e art.

Les demoiselles de Rochefort de Jacques Demy (1967). Trois ans plus tard, Demy signe un show à la Broadway, pop et coloré, romantique et glam. La musique est plus jazzy, les refrains se croisent, West Side Story et Un Américain à Paris sont convoqués. Outre le tube atemporel, "La chanson des jumelles", qui immortalise les sœurs Deneuve/Dorléac, la musique ne manque pas de pépites.

L'Affaire Thomas Crown de Norman Jewison (1968). Ce sublime thriller avec Steve McQueen et Faye Dunaway sera sa porte d'entrée à Hollywood grâce à une chanson, l'une des plus chantées encore aujourd'hui dans le monde: The Windmills of Your Mind (traduit en français sous le titre Les Moulins de mon cœur). Oscar pour Legrand mais surtout entrée dans l'éternité: ces Moulins ontt partie des 100 chansons du cinéma américain selon l'American Film Institute. Claude François Petula Clark, Barbra Streisand, Sting, Tina Arena, les Swing Out Sister, Céline Dion, Patricia Kaas, Sylvie Vartan l'ont tous interprétée. Y compris Eva Mendes ou Alain Delon.

La Piscine de Jacques Deray (1969). Puisqu'on parle de Delon, et de thriller, Legrand, est appelé pour écrire la musique de ce film noir, où son génie du jazz prend toute sa dimension, prouvant une fois de plus qu'il est capable de traduire les sentiments ou d'illustrer les émotions avec des accords et quelques instruments.

Peau d'âne de Jacques Demy (1970). Conte surréaliste musical, influencé par Cocteau, et toujours avec Deneuve, c'est aussi l'une des plus belles réussites atemporelles, composée de succès qu'on chantonne encore et toujours, de Legrand. Faire un tube avec une recette de cuisine a quelque chose du tour de force. La symbiose entre le réalisateur et le musicien est encore une fois parfaite, dans les excès comme dans la simplicité.

Un été 42 de Robert Mulligan (1971). Après un Oscar pour une chanson, avec ce film Legrand rentre dans le club des compositeurs français recevant un Oscar pour la musique de film. C'est sans aucun doute l'une des plus belles compositions pour le cinéma, à la fois sensible et lyrique, dans la plus grande tradition des Maurice Jarre et George Delerue.

Breezy de Clint Eastwood (1973). Quand un cinéaste fan de jazz rencontre un génie du genre, forcément, cela fait des étincelles. On retrouve dans la chanson les accents des Moulins du coeur. En reprenant les codes de la bluette américaine, Legrand adapte son style et son talent de mélodiste à une tonalité plus américaine, presque blues. Ce film, le troisième du réalisateur, annonce le mélodrame Sur la route de Madison, deux décennies plus tard.

Yentl de Barbra Streisand (1983). Quand la plus belle voix américaine rencontre un chef d'orchestre désormais adulé par le cinéma, cela donne Yentl, succès à l'époque et troisième Oscar pour Legrand. La star actrice et chanteuse ose avec son premier film, un drame musical où le genre et la religion sont au cœur du récit. Avec Legrand, elle ancre son histoire dans un registre classique et le disque. L'album sera disque de platine (1 million d'exemplaires) aux Etats-Unis et la chanson The Way He Makes Me Feel finira première  des charts américains.

Trois places pour le 26 de Jacques Demy (1988). Ultime travail en commun avec le cinéaste, injustement boudé à l'époque, c'est surtout le plaisir de voir Yves Montand chanter sur  du Legrand qui procure un grand plaisir. C'est aussi la fin d'une époque qui, quelque part, se profile. Demy et Montand disparaîtront. Legrand préfèrera d'autres formes de créations musicales et des tournées mondiales qui sacralisent ses musiques, en symphonique ou avec des voix lyriques.

Le 11e Festival du Film Francophone d’Angoulême dévoile son jury et ses films

Posté par vincy, le 2 juillet 2018

Karin Viard présidera le 11e Festival du film francophone d'Angoulême qui se déroulera du 21 au 26 août, lançant ainsi le second semestre du cinéma français. Elle sera entourée de l'acteur québécois Michel Côté, des actrices françaises Eye Haïdara, Ludivine Sagnier et Camélia Jordana (César du meilleur espoir), du cinéaste Thomas Lilti, de l'acteur Raphaël Personnaz (Molière du meilleur comédien) et du directeur des acquisitions du cinéma français et étranger de Canal+, Laurent Hassid.

Une section Ciné & concerts sera parmi les nouveautés, avec trois films de musique qui seront suivis d'un concert: Guy d'Alex Lutz, La Bolduc de François Bouvier et Au bout des doigts de Ludovic Bernard. Le cinéma haïtien sera mis à l'honneur avec un hommage et sept films: Haitian Corner et L'homme sur les quais de Raoul Peck, Royal Bonbon de Charles Najman, Les amours d'un zombi et Chronique d'une catastrophe annoncée de Arnold Antonin, Port-au-Prince-Dimanche 4 janvier de François Marthouret, et Ayiti mon amour de Guetty Felin.

Le Focus à un réalisateur est dédié à Jacques Doillon, avec cinq de ses films liés à l’enfance : Un sac de billesLa drôlesseLe petit criminelPonette, et Raja. Et le cinéaste Jacques Deray aura droit à un hommage accompagné du documentaire Jacques Deray : j'ai connu une belle époque d’Agnès Vincent, en plus des projections de Symphonie pour un massacre (1963), Borsalino (1970) et On ne meurt que deux fois (1985).

Le film En liberté! de Pierre Salvadori qui a enthousiasmé le public de la Quinzaine des réalisateurs sera présenté dans la section Les Flamboyants tandis que les deux patrons du Festival - Dominique Besnéhard et Marie-France Brière - ont choisi chacun un coup de cœur: De chaque instant de Nicolas Philibert et Les beaux esprits de Vianney Lebasque.

Enfin, la section Bijoux de famille rend hommage cette année à UGC comme distributeur avec Le fabuleux destin d’Amélie Poulain de Jean-Pierre Jeunet, Embrassez-qui vous voudrez de Michel Blanc, De battre mon cœur s’est arrêté de Jacques Audiard, Un secret de Claude Miller et Adieu Berthe, l’enterrement de mémé de Bruno Podalydès.

Compétition
L'amour flou de Romane Bohringer et Philippe Rebbot (France)
Tout ce qui me reste de la révolution de Judith Davis (France)
Charlotte a du fun de Sophie Lorin (Québec)
Photo de famille de Cécilia Rouaud (France)
Sauvage de Camille Vidal-Naquet (France
Shéhérazade de Jean-Bernard Merlin (France)
Sofia de Meryl Benm'Barek (Maroc)
Troisième noce de David Lambert (Belgique)
Le vent tourne de Bettina Oberli (Suisse)
Les rois Mongols de Luc Picard (Québec)

Avant-premières
Bonhomme de Marion Vernoux
Les chatouilles D'Andrea Bescond et Eric Métayer
Dilili à Paris de Michel Ocelot
Edmond d'Alexis Michalik
I feel good de Gustave Kervern et Benoît Délepine
Le grand bain de Gilles Lellouche
Les invisibles de Louis-Julien Petit
Lola et ses frères de Jean-Paul Rouve (Ouverture)
Première année de Thomas Lilti
Le poulain de Mathieu Sapin
Voyez comme on danse de Michel Blanc
Pupille de Jeanne Herry (clôture)
Les bonnes intentions de Gilles Legrand

Revoir Borsalino : le film sort enfin en dvd

Posté par MpM, le 20 novembre 2009

Borsalino, Delon et BelmondoPresque quarante ans après sa sortie, Borsalino est enfin disponible en dvd ! Le film de Jacques Deray, qui n'avait jamais été commercialisé sur support VHS pour des raisons de droits, est célèbre pour réunir à l'écran les deux méga-stars de l'époque, Alain Delon et Jean-Paul Belmondo.

Les deux acteurs y sont Siffredi et Capella, deux petites frappes qui font leur chemin dans le milieu Marseillais des années 30. Malgré une rivalité bien réelle (le contrat stipulait qu'ils auraient chacun un rôle strictement équivalent, avec un nombre de scènes identique), leur duo fonctionne à merveille : d'un côté Delon, costume impeccable, raie au milieu, air plus félin que jamais, l'élégance et la froideur incarnées ; de l'autre Belmondo et sa gouaille inimitable, insouciant et léger, comme un enfant à qui l'on offre le monde.

Il faut revoir le film rien que pour eux, et aussi parce qu'il semble n'avoir pas pris une ride.Borsalino dvd

En plus, pour marquer le coup, la Paramount a réalisé une édition collector proposant aussi bien des images d'archives (reportage sur le tournage en 1969, interviews des acteurs à la sortie du film...) que des bonus tournés spécialement pour l'occasion.

Jean-Claude Carrière (co-scénariste) et Eugène Saccomano (auteur du roman Bandits à Marseille dont est tiré le scénario) y racontent la genèse de Borsalino ; Michel Bouquet, Nicole Calfan ou encore Catherine Rouvel se souviennent du tournage ; Claude Bolling (compositeur) parle du thème musical qui a fait le tour du monde ; Michel Drucker (qui avait assisté au tournage) et Agnès Vincent-Deray (compagne du réalisateur) rendent hommage à Jacques Deray et enfin Alain Delon livre ses souvenirs sur l'aventure du film, qu'il produisit.

Soit deux heures de documents inédits pour prolonger le plaisir, et la nostalgie qui va avec...