L’histoire : Les États-Unis sont une terre d'espoir pour des milliers d'émigrés de toutes origines. Mais l'espoir a un prix. Certains obtiendront un droit de séjour et se feront naturaliser au terme d'un long processus bureaucratique ; d'autres attendront vainement d'être régularisés dans ce pays où tout est à vendre. La prostitution, la violence et la trahison deviendront leur monnaie d'échange, leur ultime recours. Autant de cas difficiles, de combats incertains, qui reflètent les challenges de l'Amérique. Autant de conflits, mais aussi autant d'espoirs et de rêves différents à réaliser et à partager…
Notre avis : Après l’exercice de style très réussi avec le polar Lady chance et après le film d’action pétaradant La peur au ventre, Wayne Kramer aspire peut-être à une reconnaissance de cinéaste en prise avec son temps. Le réalisateur se lance dans l’exercice du film académique avec un thème de société abordé de manière très classique. La vague d’histoires post-Irak est passée, il a choisi de s’intéresser à l’immigration et aux parcours pour devenir citoyen américain. Wayne Kramer est particulièrement concerné puisqu’il est originaire d’Afrique du Sud avant d’avoir été naturalisé américain, il montre ici des émigrés d’origines diverses et en même temps différents fonctionnaires de l’administration qui font appliquer les lois. Il a pour ambition de représenter cette diversité à travers une grande variété de profils d’immigrants , entre espoirs et déchirements, mais hélas on n’échappe pas à l’effet catalogue.
La clandestine mexicaine dans un atelier textile ou la famille coréenne dans un pressing ou une épicerie, les familles de confession musulmane en provenance d’Iran ou du Bangladesh ou une fillette africaine et deux artistes qui veulent percer... Selon que l’on est plus moins proche de Los Angeles et de la frontière mexicaine on risque un contrôle et l’expulsion. Un enfant né aux USA bénéficie des droits américains mais le reste de sa famille est toujours susceptible d’être expulsée.
Droit de passage est un montage de séquences avec de nombreux personnages où la situation de certains va se heurter aux problèmes des autres. Une sorte de Crash (Collision). Harrison Ford (qu'on n'avait pas vu aussi bon depuis longtemps), Ray Liotta et Cliff Curtis se partagent les rôles les plus intéressants de ceux qui font respecter la loi. Le fameux sésame que représente la carte verte suscite autant d’incompréhensions que de trahisons et de compromissions.
Le réalisateur expose différentes situations sans prendre parti (sauf pointer du doigt les Iraniens, ce qui n'est pas très subtil). Wayne Kramer se risque malgré tout sur le terrain politique : faire semblant de comprendre l’hébreu comme un juif peut permettre de rester travailler sur le sol américain, tandis qu’une foi trop fervente en l’islam peut aller jusqu’à une dénonciation au FBI et au renvoi du pays.
Le film s’attache surtout aux personnages et à ce qu’ils traversent, mais au détour de quelques dialogues («On n’est que des bridés ici»), quelques allusions racistes et paranoïa terroriste, le scénario évite tout ce qui pourrait faire polémique. Une petite intrigue policière autour d’un meurtre est même prétexte à démontrer que si le système est critiquable il est efficace : les mauvaises personnes sont écartées, et les autres qui obtiennent la nationalité seront de bons citoyens... Droit de passage est finalement un film choral inégal dotés de personnages forts. Même s'il échoue à nous faire vibrer ou nous révolter, il prouve qu'une certaine Amérique n'est pas forcément belle à regarder.