BIFFF 2015 : 6 films qui prouvent que le cinéma espagnol est (toujours) maître du genre

Posté par kristofy, le 19 avril 2015

Au BIFFF, les films espagnols ont toujours eu la côte. Pour ce qui de la compétition internationale le trophée du Corbeau d’Or a d’ailleurs été gagné par Ghost Graduation de Javier Ruiz Caldera en 2013 et par Les Sorcières de Zugarramurdi de Alex de la Iglesia en 2014.

La Isla Minima (Marshland) réalisé par Alberto Rodriguez (El traje, Les 7 vierges, Groupe d’élite)

C’est le film espagnol qui vient de remporter 10 Goya (les César espagnols) contre l’autre film multi-nominé El nino, pourtant meilleur. Le film se déroule à l'époque de la fin de la dictature de Franco. Dans une région où les ouvriers des champs font grève pour obtenir une augmentation, deux sœurs d’environ 16 ans ont disparue. Les pistes d’une fugue ou d’un enlèvement sont envisagées avant que l’affaire ne soit reliée à un autre crime sexuel sur une autre adolescente… Deux policiers suivent les différents indices qu’ils reçoivent au fur et à mesure (y compris des envois anonymes) plutôt que d'enquêter véritablement. Ils vont parler à différents protagonistes… La Isla Minima est un film qui souffre d'être (trop) proche de la série True detective ; avec deux détectives dans le bayou, ici transplantés dans la pampa espagnole. Même la fin ouverte pour une suite fait attendre un nouvel épisode au spectateur. Sortie en salles le 15 juillet.

El nino réalisé par Daniel Monzon (Cellule 211)

C’est l’autre film espagnol multi-nominé (13 catégories) aux Goya. Le film raconte plusieurs histoires en parallèle. Elles vont se croiser, avec la description de l’organisation d’un trafic de drogue entre le Maroc et l’Espagne via Gibraltar. Ceux qui en profitent et ceux qui essaient de le combattre. Il y a l’histoire des policiers qui enquêtent sur les gros bonnets d’un réseau international et qui patrouillent en hélicoptère au dessus de la mer pour intercepter les embarcations chargées de marchandises, le récit de trois jeunes qui après avoir participer au transport pour une bande vont organiser eux-mêmes leur réseau, et la chronique de différents gros trafiquants qui ont des indics dans la police pour organiser des leurres et faire passer des tonnes de marchandises dans des containers… Au casting on retrouve Luis Tosar, Sergi Lopez, et la révélation du jeune Jesús Castro qui est ici la vedette du film (il a aussi un rôle dans La Isla Minima). Le film serait comme une version européenne du Traffic de Steven Soderbergh, avec un aspect plus documentaire et une immersion encore plus réaliste.

La Ignorancia de la Sangre réalisé par Manuel Gomez Pereira (Entre ses jambes , Reinas)

Ici, malheureusement, le film ne parvient pas à convaincre, il commence en Espagne avec des mafieux russes proxénètes et se termine avec des terroristes islamistes au Maroc, avec, comme fil rouge, l’enlèvement du fils de Paz Vega, la compagne du policier Juan Diego Botto . L’histoire est l’adaptation d’un roman de Robert Wilson (le quatrième volume d’une série dans le style Robert Ludlum). Dans le film, seul le charisme du héros parvient à convaincre dans une narration sans réel intérêt…

Automata réalisé par Gabe Ibanez (découvert à La Semaine de la Critique de Cannes 2009 avec Hierro)

Dans un futur peut-être pas si éloigné, les conditions de vie sur Terre se sont bien dégradées avec quelques pluies acides sur la Cité où demeure à peine 1% de la population, cohabitant avec quelques robots. Comme dans la plupart des films sur la robotique, il y a au départ les célèbres principes d’Asimov: ici les robots ont été conçus selon deux protocoles : un robot ne peut pas nuire à une forme de vie humaine et un robot ne peut pas se modifier lui-même. Tout comme le film I Robot avec Will Smith, Eva de l’espagnol Kike Maillo (avec Daniel Brühl  et Marta Etura ) ou la série danoise Real Humans, on se doute que quelque chose d’imprévu va arriver avec les machines… Antonio Banderas est un agent d’assurance qui trouve le cas d’un robot qui se serait réparer tout seul : ‘une auto-réparation implique la notion de conscience’. Ici Antonio Banderas va être emmené dans le désert où des robots ont un projet… Il est question de Biokernel modifié (le système opérationnel des robots) qui va amener plusieurs interrogations métaphysiques. Par deux fois on entendra la phrase clé du roman de Michael Crichton Jurassic Park : ‘la vie finit toujours par trouver son chemin’ à propos des progrès de la science qui ne sont pas forcément un progrès pour l’Homme. Automata est un récit d’anticipation qui évoque la possible fin de l’humanité sur Terre.

L’altra Frontera réalisé par André Cruz Shiraiwa

On découvre des gens qui marchent péniblement sur des routes, c’est semble-t-il la guerre et il n’y a plus ni essence ni eau. Une mère et son petit garçon vont emmener avec eux une fillette. La destination est un refuge où ils espèrent être accueillis; il s’agit en fait d’un immense campement où chaque famille peut vivre dans un genre de mobil-home à condition de suivre les règles de cette nouvelle communauté, comme travailler à des tâches imposées. Dans cette vaste enceinte, tout est filmé et écouté pour un programme de téléréalité, et à l’intérieur on comprend vite les règles. Pour passer du niveau C au niveau A (plus de confort et l’espérance d’un visa pour une vie meilleure), il faudra faire tout ce qu’il faut pour gagner des points de popularité : être le plus fort, être la plus séductrice, protéger son secret, trahir… Le film est une énième critique de la téléréalité qui a des années de retard pour être pertinent, sauf avec un rebondissement surprise à la fin…

Musarañas réalisé par Juanfer Andrés et Esteban Roel (coproduit par Alex de la Iglésia)

Dans l’Espagne des années 50, deux sœurs imprégnées des principes de la religion vivent ensemble confinées dans le même appartement depuis trop longtemps, depuis la mort de leurs parents. L’ainée inquiète de l’avenir est couturière mais souffre d’une agoraphobie qui l’empêche de sortir de l’appartement, l’autre qui vient tout juste d’avoir 18 ans espère s’éloigner de son passé. Un jour un homme blessé tombe devant leur porte. Les deux sœurs vont s’en occuper de manière différente et vont devoir s’affronter… On y retrouve Macarena Gómez, extraordinaire, Nadia de Santiago, Hugo Silva et Luis Tosar et Carolina Bang.
Chaque année ou presque l’Espagne produit un film de genre qui fait date comme L’echine du Diable, Les autres, Le labyrinthe de Pan, L’orphelinat, Rec, Les yeux de Julia, Insensibles…, et cette année le grand film espagnol sera donc Musarañas . Le film, presque un huis-clos, commence par montrer différentes pièces d’un puzzle avant des les réunir dans un ensemble qui va devenir de plus en plus oppressant pour devenir sanglant. Un petit chef d’œuvre, qui a fait le tour des festivals, et dont on va reparler bientôt. Si un distributeur français est trouvé.

Madrid de Cine 2013 : 40 films pour défier la crise du cinéma espagnol

Posté par vincy, le 23 juin 2013

logo madrid de cine 2013La 8e édition de Madrid de Cine, l'équivalent des rendez-vous d'Unifrance pour le cinéma espagnol, avait lieu la semaine dernière, du 17 au 19 juin, dans la capitale des Ibères. L'occasion pour la presse internationale et plus de 400 professionnels de découvrir 40 films locaux prêts à être exportés.

Carmina o revienta de Paco Leon (3 fois nommé aux Goyas), Encierro 3D : Bull Running in Pamplona, documentaire de Olivier van der Zee, Alpha de Joan Cutrina, Esto no es una cita de Guillermo Fernández Groizard, The extraordinary tale of the times table de Jose F. Ortuño, Ali de Paco R. Baños, avec Veronica Forque, Somos Gente Honrada de Alejandro Marzoa et Una pistola en cada mano ont été parmi les films les plus vus durant ces journées d'après l'organisation.

Ainsi la comédie de Cesc Gay, Una pistola en cada mano, sortie fin 2012, portée par un casting alléchant - Ricardo Darín, Luis Tosar, Javier Cámara, Eduardo Noriega, Cayetana Guillén et Candela Pena, qui a remporté un Goya du meilleur second-rôle féminin pour ce film - a trouvé un distributeur en France. On a aussi appris que le duo de Cellule 211, Daniel Monzon et Luis Tosar, tourne un autre polar, El niño ; ou que L'orphelinat, le film phénomène de Juan Antoni Bayona, va faire l'objet d'un remake aux USA.

Pendant 3 jours, acheteurs de 29 pays, producteurs, journalistes (35 médias) se sont croisés dans un lieu unique pour rencontrer réalisateurs et comédiens des films participants.

Box office en chute libre

Ce succès croissant de Madrid de Cine a consolé une industrie cinématographique déprimée. Le box office est en chute libre depuis le début de l'année, après une année 2012 déjà désastreuse. Depuis 2009, le cinéma en Espagne est passé de 110 millions de spectateurs à 94 millions l'an dernier! En cause : la hausse de la TVA sur les billets de cinéma qui rend le ticket hors de prix (voir notre actualité du 4 octobre 2012). Le plus gros succès de l'année, The Croods, a rapporté 18 millions de $ quand l'an dernier déjà deux films avaient dépassé les 20 millions de $. Côté espagnol, le film le plus populaire cette année, à l'exception de Mama, reste le Pedro Almodovar, Les amants passagers, avec 6,5 millions de $ de recettes et une modeste 10e place dans le classement annuel.

Le nombre de tournage s'effondre avec seulement 43 productions lancées entre janvier et début juin, soit 25% de moins qu'en 2012 et 56% de moins qu'en 2011. Les mois à venir risquent de ne pas être plus réconfortants. Les budgets moyens par films sont eux aussi en forte baisse : 3 millions d'euros en 2010, à peine 1,8 million d'euros en ce début d'année.

Un cinéma tiré par ses recettes internationales

Cependant, la part de marché des films espagnols augmente (de 11,5% pour les six premiers mois de 2012 à 17,9% pour le premier semestre 2013). Cela confirme la tendance enregistrée l'année dernière, où le cinéma espagnol avait battu son record de 27 ans avec une part de marché de 19,3%. The Impossible a même été le plus gros succès de l'année avec 5,86 millions d'entrées.

Et l'exportation des films espagnols n'a jamais été aussi dynamique - ce qui renforce la nécessité d'un rendez-vous comme Madrid de Cine. En 2012, les recettes internationales ont rapporté 150 millions d'euros à l'industrie du cinéma espagnol, soit largement plus que les recettes du cinéma espagnol dans le pays (110 millions d'euros); au total, 141 films ont été vendus en 2012 pour des marchés étrangers (soit une trentaine de plus qu'en 2011) alors que le nombre de films produits diminue.