Avec 10,807 milliards de dollars de box office nord-américain (chiffre arrêté au 31 décembre 2012), l’année 2012 fait mieux que le dernier record établit en 2009 avec 10,595 milliards de dollars.
Si le nombre de films distribués (655 en 2012 contre 521 en 2009), le prix du billet (7,94$ en 2012 contre 7,50$ en 2009) ainsi que l’avènement de la 3D en salles pondèrent indiscutablement ce nouveau record, ils n’enlèvent rien quant à l’attractivité des films attendus pour la plupart déclinés sous la forme de suites, de reboots ou de nouvelles franchises en devenir.
Un podium surprise…
Sans forcément les comparer – surtout qualitativement –, notons que The Avengers aura servi de locomotive au B.O dans son ensemble à l’instar d’Avatar en 2009. Avec 623M$, le film demeure l’indiscutable carton de l’année, 3ème plus gros succès US hors inflation derrière Avatar et Titanic. Prenant à rebours tous les pronostics qui le plaçaient derrière le Batman de Nolan et le Hobbit de Jackson, le film de Joss Whedon est devenu un phénomène du box-office. Etonnant si l’on se réfère au genre ancré, certes, dans la culture pop américaine, mais disposant d’une base « public » a priori restreinte.
Après avoir effectué le meilleur démarrage de tous les temps (207M$ lors de son premier week-end d’exploitation), The Avengers a su se maintenir au fil des semaines, porté par de très bonnes critiques et un excellent bouche-à-oreille. Une nouvelle ère du box-office, amorcée depuis The Dark Knight (553M$ en 2008), semble se profiler. Cette tendance sera scrutée dès 2013 et la sortie très attendue du Superman (Man of Steel) de Zack Sydner (300, Watchmen…), produit par Christopher Nolan.
The Dark Knight Rises termine donc deuxième pour un total de 448M$. Soit 85M$ de moins que The Dark Knight sortit en 2008. Sans doute pénalisé par un méchant (Bane) beaucoup moins charismatique que le Joker (incarné à la perfection par le regretté Heath Ledger), le film de Nolan s’en sort plutôt bien, puisqu’il devient, hors inflation, le 7ème plus gros succès US de tous les temps. Pas mal pour un film en forme de requiem.
Nous retrouvons, sur la troisième marche du podium, Hunger Games, l’adaptation éponyme d’un roman d’anticipation en forme de dystopie sortit en 2008. Le buzz autour du film à quelques jours de la sortie officielle n’a laissé planer aucun doute quant au phénomène en marche. Premier week-end à 152M$ - 5ème meilleur démarrage de tous les temps – et prise des rennes du box-office jusqu’à l’arrivée de The Avengers. Avec 408M$ de recettes, le film relègue les succès des opus de Twilight à plusieurs encablures. Une saga est née. Encore une…
007 au top, une comédie qui trash, des vampires saignants et un Hobbit plutôt convaincant…
Mais la plus grande surprise de l’année 2012 ne vient pas de Pixar (Rebelle) ni du dernier opus de Twilight, du reboot de Spiderman, ou du Hobbit de Jackson, mais bien du dernier James Bond. Skyfall affole les compteurs et devrait terminer sa carrière au-delà de la marque ahurissante des 300 millions de dollars. Soit le meilleur score pour la franchise derrière les intouchables Goldfinger (1964) et Opération Tonnerre (1965), si l'on prend en compte l'inflation. Il aura fallu trois films à Daniel Craig pour que celui-ci s’impose définitivement comme le meilleur Bond au côté de Sean Connery. Il aurait d’ores et déjà signé pour deux autres épisodes…
Un peu comme Very Bad Trip en 2009, Ted, comédie décalée et irrévérencieuse, produite pour 50 millions de dollars, est venue se mêler à la lutte des gros bras du box-office. Un démarrage à 54M$ pour un final à 218M$. En plus de finir à la 9ème place de l’année, le film de Seth MacFarlane s’avère être l’un des plus rentables (501M$ dans le monde).
Le dernier opus de Twilight – Twilight : Révélation partie 2 – , a fait du Twilight. C'est-à-dire qu’il a réalisé un démarrage conséquent (141M$) représentant à lui seul la moitié des recettes finales. Les fans ont répondu présent avec une constance de métronome depuis le deuxième opus (New Moon). Il n’y aura pas eu, contrairement à l’épilogue de Harry Potter, une poussée hors fans dans les salles obscures. Le film achèvera sa carrière en dessous des 300 millions de dollars. Presque une déception.
Le Hobbit : un voyage inattendu, premier film de la nouvelle trilogie de Peter Jackson, ne rééditera pas les scores du premier triptyque, Le Seigneur des anneaux. Mais le film s’en sort bien puisqu’il cumule déjà à 238M$ en seulement trois semaines d’exploitation. Les 280-300 seront atteints et, pourquoi pas, une 4ème place derrière Hunger Games. Son score à l’international, déjà conséquent (464M$), fera le reste. La trilogie est, pour ainsi dire, lancée.
L’animation 2012 reprend des couleurs…
Après une année 2011 moribonde ou pas un seul des 5 films attendus n’avait pu franchir la barre des 200 millions de dollars, Rebelle (237M$), Madagascar 3 (216M$) et Le Lorax (214M$) ont remis les pendules à l’heure. Ce qui n’est pas le cas pour L’Age de glace : la dérive des continents et le Disney de Noël, Les mondes de Ralph, dont les scores à domicile sont décevants (161M$ et 175M$).
Mais ce n’est rien comparé au Dreamworks des fêtes, Les Cinq légendes, qui aura bien du mal à franchir la barre des 100 millions de dollars malgré la période de Noël. Pour un film d’un tel studio – entendez par là une firme qui enchaîne les hits – au budget conséquent (145M$) ça sent le bide. À force de tirer sur la corde elle finit toujours par se rompre…
Signalons, également, la bonne performance d’Hôtel Transylvania, la « moyenne production » Sony aux résultats rafraîchissants (85M$ de budget, 143M$ de recettes).
Amazing Spiderman, MI3, Jason Bourne et Expandables 2 au rayon des semi-déceptions…
« Rebooter » Spiderman cinq ans après le troisième épisode de la trilogie de Sam Raimi était un sacré pari (motivé, il est vrai, par l’obligation de réaliser un film pour que le personnage ne retombe pas dans l’escarcelle Marvel). Que les producteurs ont à moitié réussi. Car si le film n’est pas un naufrage au box-office USA (262M$), son utilité comme sa qualité cinématographique posent quelques problèmes. Une chose est sûre. L’attraction du personnage reste intacte. D’où la mise en chantier d’une suite prévue pour 2014.
Le retour des hommes en noir, les Men In Black pose la question, quinze ans après la sortie du premier film, de la pertinence d’un long-métrage (qui n’est pourtant pas si mauvais) incapable de proposer autre chose que les anciennes recettes. Au B.O pas vraiment de surprise avec 179M$ dans le tiroir-caisse. Pour Will Smith c’est juste correct mais tout de même un peu faible face aux mastodontes du billet vert.
Avec Jason Bourne : L'héritage, exit Matt Damon, bonjour Jérémie Renner. Exit aussi Paul Greengrass. Tony Gilroy (Michael Clayton, Duplicity) reprend les rennes d’une franchise sacrément bien foutue. Le résultat, honnête d’un point de vue pellicule, n’aura pas su intriguer les spectateurs potentiels. 113M$ face aux 227M$ de The Bourne Ultimatum sortit en 2007, ça fait mal. D’autant que le film de Gilroy se comprend comme une histoire parallèle directement impactée par les événements déclenchés par Bourne. Les résultats à l’international sauvent le film de l’échec mais n’augure rien de bon quant à une suite probable.
Sinon, la bande à Stallone était de retour. Et ils voulaient tout casser. Côté pyrotechnie Expendables 2 est une réussite. Côté tiroir-caisse un peu moins. Alors que le premier opus avait terminé sa carrière au-delà des 100 millions de dollars, le 2 ne fait pas mieux que 85M$. Pour ce type de production c’est plutôt pas mal. Même très bien. Mais nous sommes déçus surtout que son petit concurrent, Taken 2, lui a chipé la première place avec 139M$. C’est Besson qui doit être content…
Les outsiders attendus...
Les résultats sont, comme souvent, en dents de scie. Si l’adaptation héroïque de Blanche-neige et le chasseur se montre assez vigoureuse (155M$), la vraie-fausse préquelle d’Alien, Prometheus, déçoit. 126M$ pour un démarrage à 51M$, c’est le signe d’un mauvais bouche-à-oreille. L’effroi revendiqué et quasi affiché dans les différentes bandes-annonces n’a pas été au rendez-vous. D’une beauté plastique indéniable, le film de Ridley Scott est chiant, pompeux, passant à côté d’un sujet ambitieux même si casse-gueule.
L’adaptation ciné de la série 21 Jump Street a cartonné. Tout simplement. 138M$ pour 42M$ de budget. Qui dit mieux ? Personne en 2012 pour ce type de sortie.
Le retour de Zemeckis dans un film live était attendu. Flight, avec Denzel Washington, ne démérite pas et termine paisiblement sa carrière au-delà des 90M$. Peu importe si le film n’atteint pas les 100 millions pour Washington. Pour preuve son Sécurité rapproché, sortie en début d’année, a totalisé 126M$ sur le sol américain. Pas mal pour un acteur de 58 ans.
La suite improbable de l’improbable Voyage au centre de la terre, L’Ile mystérieuse, a séduit en début d’année un public familial. Cette aventure gentillette portée par The Rock a, elle aussi, dépassé les 100M$.
Si Moi, Député, comédie politique satirique réussit avec Will Ferrel, déçoit quelque peu (86M$), la Colère des Titans, suite calamiteuse du Choc des Titans de Leterrier, se prend les pieds dans le tapis (83M$ pour un budget de 150M$).
L’extraordinaire spectacle du dernier Ang Lee, l’Odyssée de Pi est une merveille narrative à l’imagerie fabuleuse. Son score, pas déshonorant pour autant, ne reflète pas le potentiel d’un film grand public aussi réjouissant. Les fêtes de fin d’année dynamisent ses entrées et vont lui permettre de se rapprocher des 100M$. Est-ce pour autant satisfaisant ?
Cette marque, symbolique, sera une nouvelle fois dominée par Tarantino. Django Unchained, le western du cinéaste avec sa brochette de stars (DiCaprio, Jamie Foxx, Samuel L. Jackson et Christoph Waltz) totalise 78M$ en huit jours. Les 120M$ de Inglourious Basterds sont accessibles et plus encore si le bouche-à-oreille s’en mêle.
Le Jack Reacher de Tom Cruise ne réalisera sans doute pas 100M$. Un semi-échec pour notre Ethan Hunt préféré. Mais attendons la fin de carrière d’un film bien ficelé sans trop de concurrence jusqu’au 5ème opus de Piège de Cristal prévu pour le 14 février 2013.
Reste Les Misérables. La comédie musicale de Tom Hooper (le Discours d’un roi) tirée de l’œuvre de Victor Hugo dure 2h37. Ses 80 millions de dollars en une semaine sont remarquables. D’autant que le film attend beaucoup de l’international. Son coût de production (61M$) fera du film une œuvre rentable. Peut-être pas un méga hit – même si les 100M$ seront franchis sans coup férir – mais à coup sûr un succès.
Les échecs patents…
Commençons, si vous le voulez bien, par the Dark Shadows de Tim Burton. Le retour du réalisateur d’Edward aux mains d’argent à ses premières amours en a ravi plus d’un. Mais pas le public en demande d’autre chose, hélas. Ainsi, ses 79M$ de recettes finales sonnent comme une injustice. Le temps pour ce genre d’histoire serait-il révolu ? Frankenweenie, le petit bijou d’animation du même Burton, n’a pas, lui non plus, remporté le succès escompté. 34 petits millions de dollars. C’est moins bien que les Noces funèbres (2005) et l’Etrange Noël de Monsieur Jack (1996). La déception est, là aussi, de taille. Pourvu que Burton continue sur cette lancée et ne retombe dans ses travers synonyme d’Alice au pays des merveilles ou Charlie et la chocolaterie.
Impossible, ici, de ne pas mentionner John Carter. La superproduction Disney est devenue le bide US de l’année. Budgété à 250M$, il totalise en fin de carrière un tout petit 73M$. Bel échec pour Disney auteur d’une promotion coupable et d’une stratégie de sortie maladroite. Le Space Opéra méritait mieux et surtout autre chose que Star Wars. Le troisième film des Chroniques de Riddick sort cette année. Chouette !
Total Recall 2012 n’a pas créé la surprise. 58M$ pour un remake à 125M$. Chercher l’erreur. De casting tout d’abord avec un Colin Farrell aux oubliés absents. De réalisation avec Len Wiseman en mauvais yes man. Paul Verhoeven peut se marrer…
L’adaptation du jeu Touché-Coulé, Battleship, n’a jamais existé. Coulé, l’insubmersible blockbuster. Et pas qu’un peu. 65 à 209. Universal s’est pris pour la Paramount avec son Transformers. Faut vraiment qu’ils arrêtent de prendre les spectateurs pour des nouilles.
Pour finir autour des échecs, citons Mirror Mirror, le dernier et inutile American Pie, Ghost Rider des réalisateurs fous Mark Neveldine et Brian Taylor, Red Tails du producteur George Lucas, Rocks of Ages (avec un certain Tom Cruise), la bouse numérique Abraham Lincoln : chasseur de vampires et The Watch avec Ben Stiller et Vince Vaughn. Hollywood aime les recettes, mais elles ne font pas toujours recettes.
Les belles et très belles surprises…
La plus belle est l’œuvre de Spielberg. Son Lincoln fait sensation. Il ne cesse de se maintenir sur un nombre d’écrans tout à fait raisonnable garant d’une moyenne par copie remarquable. Les critiques sont dithyrambiques, le bouche-à-oreille également. Le film, après 8 semaines d'exploitation, vient de franchir les 135M$. Avec l’annonce des films nommés aux Oscars (avancée au 10 janvier 2013), le film à toutes les chances, sauf s’il est snobé, de dépasser les 150 voire les 170M$. Après les relatives déceptions qu’ont été Tintin et le Cheval de guerre, Spielberg revient plus fort que jamais.
Dans des registres différents suivent Magic Mike et Argo. 113M$ pour le premier. 109M$ pour le deuxième, toujours en exploitation. Magic Mike de Soderbergh n’a rien coûté. 7M$. Dérisoire. L’effet Channing Tatum (grand vainqueur de l’acteur le plus rentable de l’année avec Magic Mike, 21 Jump Street et the Vow) a joué à fond pour ce « petit » film sexy et divertissant. Argo confirme le talent de Ben Affleck à la réalisation. Pour son troisième long il frappe fort, ne tombe jamais dans le piège de la caricature, assure le spectacle de bout en bout.
Looper, film d’anticipation ambitieux n’a pas loupé sa sortie. Si ses 66M$ ne sont pas mirobolants, son budget (30M$) compense ce score a priori médiocre. Idem pour The Chronicle, premier film remplit d’énergie communicative. 12M$ de budget, 64M$ de recettes. Quand l’originalité, la rigueur de l’écriture et l’inventivité de la mise en scène payent, ça fait plaisir.
Geoffroy