L’année cinéma 2015 s’est en fait terminée durant ce mois de février avec la traditionnelle cérémonie des César. On notera d’ailleurs l’absence de certaines des actrices qui ont le plus tourné de films comme Anais Demoustier (Caprice, A trois on y va, Marguerite & Julien), Léa Seydoux (Journal d’une femme de chambre, et à l’international The Lobster et James Bond 007 Spectre) ou comme Virginie Elfira (Caprice, Une famille à louer, Le goût des merveilles).
Le 8 mars est la date de la Journée internationale des droits des femmes, avec des questions encore et toujours d’actualité à propos de la parité en politique ou de l’égalité des salaires en France, ou ailleurs du droit de vote ou de celui de disposer de son corps…
En cette date symbolique, on va évoquer des femmes qui font rayonner les films français. Pas les plus célèbres comme les actrices citées plus haut ou les stars inamovibles mais d’autres qui, elles aussi, n’ont pas reçu de César ni d’autres trophées pour leur travail. Voici une dizaine de femmes dont les noms souvent ne figurent pas sur le haut des affiches. Chacune de leur côté, elles seront celles qui feront que les films à venir en 2016 et en 2017 nous intéresseront grâce à leur participation devant ou derrière la caméra...
Stéfi Celma : En 2013 elle était le premier rôle féminin de Pas très normales activités en 2013 avec Maurice Barthélémy et Norman, comédie passée inaperçue en faisant en flop ; mais bingo en 2014 on la remarque dans le succès Les Profs porté par Kev Adams. 2015 a été l’année où enfin Stéfi Celma s’impose : elle est allumeuse dans la suite Les Profs 2 soit l’un des plus gros succès de l’année, elle est également une flic allumée dans Antigang, mais c'est avec son rôle dans la série télé Dix pour cent qu'elle se révèle brillante et irrésistible.
Lucie Debay : Malgré un premier rôle dans un film belge en 2009, le cinéma tarde à l’appeler et elle est davantage sur scène au théâtre. Ça va changer. Dans Melody elle va ‘louer’ son ventre pour devenir mère porteuse, des émotions à fleur de peau qui la conduise dans les listées pour un César du meilleur espoir 2016, sans être retenue dans la liste finale. Les belges - plus clairvoyants? - ne se sont pas trompé en lui décernant le Magritte du meilleur espoir féminin il y a quelques semaines. Dans Un français, on la découvre très différente en pasionaria raciste et homophobe. Aucun doute qu’on devrait la revoir régulièrement à l’avenir. Elle sera dans I want to be like you de Konstantin Bojanov (Avé à Cannes en 2011), dans Kebab Royal de Peter Brosens et Jessica Woodworth (La cinquième saison à Venise en 2012), et dans le prochain Nicolas Boukhrief, La Confession (avec Romain Duris et Marine Vacth).
Lou Roy-Lecollinet : Avec ses 18 ans et sa bouche en cœur elle a séduit Arnaud Desplechin qui en a fait sa dernière héroïne dans Trois souvenirs de ma jeunesse. Par ricochet l’académie des César lui a décerné une nomination pour le César du meilleur espoir féminin. Sa moue à la Bardot et son insolence devraient l'emmener vers d'autres horizons. Déjà se profile le court-métrage très prometteur La Tortue de Thomas Blumenthal et Roman Dopouridis…
Éponine Momenceau, directrice de la photographie : Elle était sortie de la Fémis diplômée du département Image comme chef-opératrice, mais elle préfère d’abord expérimenter vers l’art contemporain avec différents travaux photos pour des expositions, et quelques courts-métrages et même clips musicaux (réalisés par Mathieu Demy)… Jacques Audiard a fait appel à elle comme directrice de la photographie sur Dheepan : elle a 29 ans, et la Palme d’or du festival de Cannes braque les projecteurs sur elle.
Ovidie, réalisatrice : Celle qui était apparue d'abord comme un corps d’actrice X est devenue réalisatrice (elle écrit aussi des livres et des chroniques) pour défendre une représentation d’une sexualité plus féministe. En 2015 deux de ses films ont rencontré une large audience en étant diffusé à la télévision : Le Baiser a secoué la programmation du samedi soir porno sur Canal+ avec pour la première fois une scène avec deux hommes bisexuels ensemble, et le documentaire À quoi rêvent les jeunes filles ? sur France2 qui interroge sur une banalisation des codes du porno dans la publicité, les magazines féminins, les réseaux sociaux et leur influence sur la génération née en 90… Au passage, elle est craquante dans Saint-Amour, enrôlée par Delépine et Kervern pour un second-rôle qui l'éloigne un peu plus de son image sulfureuse.
Jeanne Rosa : Aussi étonnante que drôle dans le film Les Châteaux de sable de Olivier Jahan que paumée et dure dans Un français de Diastème, Jeanne Rosa s’impose dans des seconds-rôles comme l’actrice multi-facettes qu’elle est : on se demande vraiment comment le cinéma français ne l’a pas détournée plus tôt du théâtre. D’ailleurs Diastème (qui la dirige depuis plusieurs années aussi sur scène) va encore la faire jouer dans son prochain film Pimpette…
Diane Rouxel : Premier long-métrage avec The Smell of Us de Larry Clark: le tournage se passe mal mais elle passe plutôt bien à l’image; elle se retrouve jeune fille troublée dans Fou d'amour de Philippe Ramos (face à Melvil Poupaud) et jeune fille troublante dans La Tête haute de Emmanuelle Bercot en ouverture de Cannes. C’est d’ailleurs La Tête haute qui lui vaudra une nomination pour un César du Meilleur espoir féminin, peut-être un peu prématuré (éclipsant Lucie Debay, Sarah Suco, Sophie Verbeeck…). Mais qu’importe puisque elle est bel et bien un espoir autant qu'un visage marquant. Elle sera au générique de Moka de Frédéric Mermoud (avec Nathalie Baye et Emmanuelle Devos) et des Garçons sauvages de Bertrand Mandico.
Noémie Saglio, co-scénariste et co-réalisatrice : Il paraît que personne ne s’intéresse aux scénaristes (ni à leurs noms et encore moins à leur rémunération…), mais Noémie Saglio est derrière les scénarios de deux films sortis à quelques mois d’intervalles en 2015. En janvier c’était Toute première fois (le pitch : Pio Marmai homo a prévu de se marier avec son amoureux mais avant il va coucher avec une femme…), un peu facile et très hétéro-normé (un comble) et en avril la délirante Connasse, princesse des cœurs, déclinaison ciné des sktechs de la télé (le pitch : Camille Cottin arrive à Londres pour draguer un prince, en caméra cachée). Noémie Saglio a d’ailleurs co-réalisé les deux films, et le dernier a été un gros succès en dépassant la barre du million de spectateur : elle sait capter quelque chose de l’air du temps pour remplir les salles de cinéma, avec en modèle ces adulescents de la génération X et Y.
Sarah Suco : On la remarque dans trois films importants en 2015 : L’enquête (avec Gilles Lellouche), un petit rôle dans La Belle saison (avec Cécile de France), mais surtout épatante dans Discount (avec Corinne Masiero). Avant ça, elle a participé à d’autres films réalisés par Xavier Gianolli, Eric Besnard, Josiane Balasko… Sarah Suco se transforme aussi bien en maman malheureuse dans Discount de Louis-Julien Petit (qui d’ailleurs va la faire jouer dans son prochain film avec Isabelle Adjani) qu’en bonne copine rigolote dans Joséphine s’arrondit, en ce moment dans les salles. C’est l’actrice qui monte. Elle était aussi dans la liste des révélations en lice pour un César du meilleur espoir féminin.
Alice Winocour, réalisatrice et scénariste : Cannes est l’endroit où elle présente ses films : son premier court-métrage Kitchen, son premier long-métrage Augustine (avec Vincent Lindon) et ensuite en 2015 Maryland avec Diane Kruger et Matthias Schoenaerts, présenté à Un certain regard. Comme réalisatrice à chaque fois la reconnaissance critique est là, mais le public moins… Pourtant, c'est aussi à Cannes l'an dernier qu'elle a été la co-vedette d'un autre film qui a fait beaucoup parlé de lui (et qui a rencontré son public): Mustang de Deniz Gamze Ergüven. Elles ont co-écrit le scénario du film-phénomène, nommé pour l'Oscar du meilleur film en langue étrangère et quatre fois césarisé (dont meilleur premier film).