Le maire d’Argenteuil censure « La Sociologue et l’Ourson » et « 3000 nuits »

Posté par vincy, le 3 mai 2016

On croyait en avoir finit mais non. Un maire, celui d’Argenteuil (près de Paris), Georges Mothron (Les Républicains), 68 ans, a déprogrammé deux films qui devaient être projetés au cinéma municipal Le Figuier blanc fin mai: La sociologue et l'ourson, documentaire sur le combat pour le mariage pour tous, sorti le 6 avril, et 3000 nuits, inédit en France mais diffusé dans le cadre du festival Ciné-Palestine, qui retrace l'histoire d'une Palestinienne qui accouche dans une prison israélienne. Ce film sera d'ailleurs projeté à l'Institut du Monde Arabe le 23 mai.

Le maire, en découvrant la programmation du cinéma (qui appartient à la mairie depuis janvier), a envoyé, par l'intermédiaire de son cabinet, un courriel demandant le retrait des deux films. Dans Le Parisien, il s'explique: "en ces temps troublés, des sujets tels que ceux-là peuvent rapidement mettre le feu aux poudres dans une ville comme Argenteuil. Dans un souci d’apaisement (...) la ville a préféré jouer la sécurité en ne diffusant pas ces films, évitant ainsi des réactions éventuellement véhémentes de certains." Explication fumeuse quand il s'agit du mariage pour tous, puisque la loi, passée il y a deux ans, n'a entraîné aucune réaction violente hormis une parole homophobe libérée par l'agrégat "La Manif pour tous". Le délégué à la culture de la ville, Frank Debaud, est d'ailleurs un fervent partisan de cette "Manif pour Tous" excluante, et le maire n'a jamais caché son opposition au mariage entre personnes du même sexe.

Le ministère n'a toujours pas réagit. Mais, dans un communiqué, l’Association pour la défense du cinéma indépendant, des films d’auteur et des salles d’art et essai (ADCI), qui organisait la projection de la Sociologue et l'Ourson, a dénoncé une "censure dans les cinémas d’Argenteuil". "Cet acte de censure inédit bafoue la liberté d’expression et met en cause le travail accompli par les associations depuis parfois des dizaines d’années (…) Depuis quand existe-t-il un comité de censure pour la programmation des cinémas à Argenteuil ? De qui est composé ce comité de censure ? (…) Tout cela risque de donner une image sectaire et bloquée. Argenteuil, mérite mieux" explique le communiqué de l'ADCI. De son côté, l’Association des familles homoparentales (ADFH) a saisi le préfet du Val d’Oise.

La mairie, de son côté, ne répond plus, ni aux médias, ni aux associations. La liberté d'expression a ses limites. Cette reprise en main sur la programmation d'un cinéma municipal est d'autant plus inquiétante que le maire a, dans le même temps, décidé de mettre à mort une salle culturelle de la ville, la salle polyvalente Jean-Vilar, pour y installer des commerces, des restaurants et... un multiplexe de cinéma. De quoi étouffer financièrement les salles du Figuier blanc.

Georges Mothron a un déjà un passé de polémiste. On lui doit les arrêtés municipaux antimendicité en 2007 et la censure d'une exposition sur l’immigration en octobre 2015. A force de vouloir éteindre le feu qui couverait à Argenteuil, le maire finalement devient un créateur de polémique et piège les habitants de sa ville dans une vision dogmatique aussi rétrograde que frileuse. Bref d'un autre temps.

La fin du Grand Ecran Italie

Posté par vincy, le 9 avril 2016

Depuis la fermeture du Grand Ecran Italie il y a dix ans, la guerre était ouverte entre une association (Sauvons le Grand Ecran) qui défendait l'idée d'une grande salle de cinéma dans le centre commercial du sud de la capitale, et la mairie, qui avait d'autres projets pour occuper les lieux. Un temps, cet espace a failli devenir une sorte de megastore de fringues, un musée, un club de gym et même un multiplexe.

Le Grand Ecran c'était le plus grand des écrans parisiens. Inauguré en 1992, il est alors un survivant d'une époque dont il ne reste plus que le Max Linder sur les Grands boulevards: une salle panoramique dédiée aux films spectaculaires. Finalement, il va passer sous la coupe de Juste pour rire, la société québécoise chargée de produire des festivals, des spectacles, des émissions télévisées et des programmes pour les compagnies aériennes. A deux pas du Chinatown de Paris, le groupe va installer son QG européen.

Juste pour rire va devoir gérer une salle de 900 places et une plus petite de 150 places. La métamorphose du lieu a été confiée à l'architecte Daniel Vaniche (Bercy, Pleyel). On se doute que les spectacles (musique, cabaret, humour, danse, cirque...) y seront en vedette. Mais c'en est terminé du cinéma, hormis des projections ou événements exceptionnels.

On peut se réjouir que le lieu ne devienne pas un énième magasin de fripes ou une grande enseigne de bricolage, et conserve ainsi sa vocation "culturelle". Mais on peut aussi constater que c'est un cinéma qui meurt définitivement. Ce qui ne fera pas pleurer MK2 (Bibliothèque), Pathé (Les fauvettes, Ivry), UGC (Gobelins) et les indépendants du coin (La Clef, L'Escurial, L'Epée de bois). Le quartier dispose de pas mal de salles.

La Place d'Italie et son quartier vont être complètement réhabilités à l'occasion d'une grande opération urbaine. A l'horizon 2017, le Grand Ecran se transformera en Grand Eclat de rire (ou pas). Juste pour rire a, parmi ses artistes, Franck Dubosc, Stéphane Rousseau, Arturo Brachetti, André Sauvé et Alex Vizorek. La société a été créée en 1983 par Gilbert Rozon.

Le Gaumont Convention est de nouveau ouvert

Posté par vincy, le 26 mars 2016

Après avoir été totalement reconstruit, le Gaumont Convention rouvre au public ce samedi 26 mars. Deux ans de travaux ont été nécessaires pour faire renaître ce multiplexe de la Rive Gauche, en plein XVe arrondissement. Il a été démoli et complètement refait aux normes, avec les innovations technologiques désormais en vogue (du 2K à la 3D). Au programme Room, La vache, Au nom de ma fille, Remember, The Revenant, Rosalie Blum, Batman v Superman, Médecin de campagne, Saint Amour et Les Innocentes.

Sur la place, c'est désormais une façade de verre toute en transparence qui illumine (la nuit, car le jour, c'est un peu "mat") le carrefour des rues de Vaugirard et de la Convention. Trois salles supplémentaires ont vu le jour. Le multiplexe possède désormais 9 salles et 1253 fauteuils (soit 153 sièges de plus). Un espace cocktail et une terrasse sont également disponibles au premier étage.

Le Gaumont Convention, jusque là plutôt un cinéma de quartier, va devoir voir plus large pour remplir sa jauge et ses objectifs (+ 30 à +50% de fréquentation). Face à lui, il a toujours le Gaumont Aqualboulevard, mais aussi tous les cinémas de Montparnasse et surtout le récent Pathé Beaugrenelle, sans oublier à quelques pas le Ciné-Théâtre Chaplin (ancien saint-Lambert).

Le Gaumont Convention, un temps menacé, a pu profiter de la fermeture de l'UGC Convention il y a 11 ans pour se maintenir au dessus des 400 000 entrées annuelles, jusqu'à sa fermeture le 25 mars 2014. La salle a été créée en 1919 avant d'être divisée en quatre salles dans les années 1970 puis en six salles.

L’historique Pathé Cordeliers de Lyon a fermé

Posté par vincy, le 10 mars 2016

Le Pathé Cordeliers s'apprête à fermer après 136 ans d'existence. À la place, un nouveau projet immobilier verra le jour à la demande du propriétaires des lieux qui n'a pas souhaité reconduire le bail. Le cinéma était situé au coeur de Lyon, à proximité d'un autre Pathé, celui de Bellecour.

Né en 1880, le café-théâtre Scala Bouffes s'est transformé en 1906 en cinéma. Le cinéma deviendra sa seule activité en 1938, sous le nom raccourci de La Scala. En 1974, UGC a agrandit le complexe cinématographique lyonnais, devenant, un temps le plus grand multiplexes de la ville avec sept salles. Il y a dix ans, Pathé le rachète et lui donne le nom de Pathé Cordeliers.

Pathé reste très bien implanté à Lyon

C'était le plus ancien cinéma de la ville. Il a fermé le 28 février dernier. Avec ses 1050 sièges, rénové il y a moins de dix ans, il accueillait plus de 200 000 spectateurs par an. Pour Pathé, assurément, un complexe de "quartier" qui n'avait pas la taille nécessaire pour subsister dans son réseau. La chaîne possède à Lyon le Pathé Carré de Soie à Vaulx-en-Velin (1,2 million de spectateurs, 15 salles, 14e cinéma de France), le Pathé Vaise (850 000 spectateurs, 14 salles) et le Pathé Bellecour (700 000 spectateurs, 10 salles). Avec ses trois sites, le groupe s'arroge 45% de parts de marché dans l'agglomération lyonnaise.

Mais Pathé plaide aussi que le complexe devait être remis à niveau, n'étant plus aux normes d’accueil, notamment pour l’accès aux handicapés. N'étant pas propriétaire, le groupe ne pouvait pas investir de telles sommes pour un cinéma "local".

Etoile Cinémas et la SRF s’installent dans le futur cinéma du quartier Voltaire

Posté par vincy, le 3 février 2016

Ce n'était plus vraiment une surprise depuis que Le Canard Enchainé avait révélé la semaine dernière qu'Etoile Cinémas et la SRF (Société des réalisateurs de films) avaient été choisis pour exploiter le futur cinéma du 11e arrondissement, avenue Parmentier. On ne reviendra pas sur le "faux scandale" qu'avait cru déceler l'hebdomadaire satirique (le projet porté par la société de Julie Gayet retoqué). Il y avait 47 projets initialement puis 4 finalistes, dont un dossier porté par Haut et Court Cinémas et un autre qui associait Christophe Lambert et Dominique Besnéhard.

Ce mercredi matin, la marie de Paris Anne Hidalgo, dans le cadre de l'opération "Réinventer Paris" a dévoilé les 23 lauréats qui auront la charge de réhabiliter des zones ou des bâtiments inutilisés. Parmi eux, le cinéma de l'avenue Parmentier, dans un quartier peuplé, branché, et qui souffre de l'absence de salles. Etoile Voltaire  fédère plusieurs acteurs: le groupement Etoile Cinémas (qui exploite déjà l'Etoile Saint-Germain-des-Prés, le Balzac sur les Champs Elysées, et l'Etoile Lilas sur le périphérique, et qui a récemment perdu l'exploitation de La Pagode), la Société des Réalisateurs de films, Gérard Miller, Cédric Klapisch, La Bellevilloise (qui va ouvrir prochainement un restaurant à Pantin), Be My App et Cuisine mode d'emploi (Thierry Marx).

Ce cinéma de quartier sera "ouvert sur le quartier" et devrait comporter un restaurant, cinq salles pour un total de 507 sièges et un espace pour les concerts et les spectacles vivants. Dans son communiqué, la SRF a indiqué qu'elle y installerait ses bureaux, ainsi que ceux de la Quinzaine des Réalisateurs et du Festival du Moyen-métrage de Brive. Des associations comme le FIPA ou l'ACID pourront aussi y prendre place.

Le bâtiment sera entre les mains d'Olivier Palatre Architectes et de l'Atelier Roberta en tant que paysagiste.

Le cinéma Utopia de Toulouse menacé

Posté par vincy, le 19 janvier 2016

Ce n'est ni la première fois, ni la dernière hélas, que nous annonçons la menace d'une fermeture de salle de cinéma art-et-essai. Mais celle-ci est emblématique. L'Utopia, un réseau de salles indépendantes art-et-essai, voit ses fondations vaciller à force de devoir s'adapter à son époque (normes de sécurité, d'accessibilité, loyers en hausse dans les centre-ville, concurrence des multiplexes...).

43 ans que ce réseau existe avec 7 millions de spectateurs cumulés. Avignon, base historique, Toulouse, Montpellier, Paris (l'ancien Quartier latin), Saint-Ouen, Bordeaux...

Mais voilà, celui de Toulouse est menacé, 22 ans après son ouverture. C'était l'un des cinémas les plus rentables de France, localisé dans une superbe salle appartenant à la paroisse Saint-Jérôme. Car, selon La Dépêche du midi, la paroisse souhaiterait augmenter le loyer. Comme pour le Star à Cannes. On passe d'une somme correcte pour un équipement culturel en centre-ville à une somme astronomique que seule un groupe international de vente de fringues, ou une marque de cosmétique, ou même un opérateur de téléphonie mobile peut se payer: 150 000 euros! Trois fois le loyer actuel.

Mais pire que ça, la paroisse déjà pas très charitable, demande au cinéma de respecter des critères moraux dans sa programmation. On imagine que des films comme La vie d'Adèle ou Bang Gang ou Carol ne sont pas forcément du goût des propriétaires...

Un déménagement comme solution idéale?

L'Utopia va se défendre avec un avocat, mais l'exemple récent de La Pagode à Paris incite à la prudence. Le réseau a cherché à acheter une ancienne salle de la ville rose, en vain. Mais quel intérêt de fragiliser un réseau qui soutient des films parfois difficiles et qui parvient à séduire 500000 spectateurs (si on inclut celui de Tournefeuille dans la banlieue ouest de la métropole)?

Dans La dépêche du midi, Anne-Marie Faucon, cofondatrice du réseau, explique sa vision des choses et semble se résigner: "Nous avons une grosse équipe, lourde à gérer, et nous sommes confrontés à la nécessité de nous mettre aux normes handicapés dans des locaux qui sont déjà inadaptés. Des travaux que l'on estime entre 400 000 et 500 000 euros". Aussi créer un nouveau lieu plus confortable et aux normes pourrait libérer le réseau de cette tutelle chrétienne encombrante: "On se demande si ce ne serait pas mieux ainsi, confirme-t-elle. Si on gardait le même système d'exploitation, on perdrait une soixantaine de places avec les nouvelles normes, ça fait beaucoup, même si nous nous en tirons bien en termes de spectateurs. Il faudrait en outre condamner l'entrée de gauche pour un ascenseur. Est-ce qu'il ne faut pas dans ces conditions envisager un nouvel outil ?" s'interroge-t-elle.

Si la voie de l'indépendance est celle qui sera choisie, il faudra se décider avant la fin de l'année 2016.

L'Utopia Toulouse comporte trois salles (avec une jauge de 441 places) et a reçu le Trophée de la salle art-et-essai du Film Français en 2001.

Le Star de Cannes éteint les lumières

Posté par vincy, le 12 janvier 2016

Selon Le Film Français, le cinéma cannois de la rue d'Antibes (4 salles, 700 sièges, 148 000 spectateurs) a du fermer. Une nouvelle fois, une décision de justice a favorisé le propriétaire du bâtiment au détriment de l'exploitant (Ciné-Movida). Le propriétaire demandait une hausse du loyer, quasiment multipliée par quatre. Actuellement de 4800€, l'exploitant aurait du verser 19000€ chaque mois.

Le Star est connu des festivaliers de Cannes parce qu'il accueille un nombre important des projections du marché du film. C'est aussi là que certaines projections événementielles, off-Festival, se font (ce fut le cas pour une projection presse d'un dessin animé de DreamWorks par exemple).

On ne sait pas si le lieu restera un cinéma. L'agglomération de Cannes est actuellement sous-équipée en cinémas. Un multiplexe (2426 fauteuils) doit voir le jour en 2018 à La Bocca, porté par le propriétaire des cinémas Les Arcades et L'Olympia, tous deux situés en centre-ville.

Le Star a été ouvert en 1913. Les sept salariés ont été licenciés.

La Pagode restera un cinéma mais…

Posté par vincy, le 11 novembre 2015

La Pagode, cinéma du 7ème arrondissement de Paris, est fermée depuis hier, mardi 10 novembre (lire notre actualité du 5 novembre).

Rappel des faits et de la condamnation

La Cour d'appel de Paris a débouté la société Europalaces Etoiles (Etoile Cinémas) de l'intégralité de ses demandes, après trois ans de bataille judiciaire. La propriétaire, la société civile immobilière Foch Dauphine, a décidé de répliquer à la campagne lancée pour sauver l'unique cinéma du 7e arrondissement.

"La société Cinéma La Pagode avait été parfaitement informée depuis l'origine de sa gérance de l'étendue de ses droits et obligations et qu'elle n'avait aucun droit ni titre à se maintenir dans les lieux après en avoir reçu valablement congé. Durant ces trois années [de bataille judiciaire] la société Cinéma La Pagode s'est maintenue abusivement dans les lieux tout en cessant tout règlement de ses obligations et ce en dépit d'une injonction du Tribunal. Son attitude inexcusable la rend de surcroit responsable de la dégradation de ces lieux prestigieux dans lesquels les travaux déclarés urgents par la préfecture de police ont été d'autant retardés."

La Cour d'appel a donc condamné la société Cinéma La Pagode, à une expulsion "assortie d'une astreinte de 2 000€ par jour passé un délai de deux mois à compter de la signification de l'arrêt", et à payer à la société locataire Europalaces Etoile qui l'avait nommée en gérance les sommes dont elle était redevable et les dépens.

Propriétaire depuis 1986, d'abord au titre de la Compagnie Rembrandt Investissement en 1986 puis à partir de 1991, sous l'égide de la SCI Foch Dauphine, Elisabeth Dauchy touchait contractuellement un montant hors taxes et charges de 67 839,80€ par an, pour la location gérance du bâtiment. Le contrat a expiré en 2012 et la société Europalaces Etoile avait six mois pour libérer les lieux. Depuis ce moment, "l'indemnité due à SCI Foch Dauphine n'est plus acquittée" selon la propriétaire..

La Pagode, protégée, restera un cinéma

Classée Monument historique depuis 1990, La Pagode est protégée. L'inquiétude vient plutôt de son devenir maintenant que les deux salles sont fermées.

Elisabeth Dauchy "tient à ce que La Pagode reste le cinéma mythique qu'il a toujours été avant même qu'elle l'acquière en 1986". "Je souhaite qu'elle soit rénovée avec soin par un architecte et des techniciens de talent. Ses portes fermeront le temps de réaliser les travaux nécessaires mais La Pagode restera un haut lieu culturel à sa réouverture." Nous voilà rassurés mais tout cela n'explique pas ce qu'elle veut faire de La Pagode et pourquoi ses liens avec Europalaces Cinémas, société respectée pour avoir lancé ou relancée de très belles salles à Paris, se sont à ce point dégradées.

Quels travaux? Quelles divergences?

Car on s'étonne malgré tout de l'aspect revanchard du communiqué que nous avons reçu hier. Il y a derrière cette affaire un malentendu persistant. Quand on lit le point de vue de la propriétaire - "« Le locataire-gérant entretiendra les locaux d'exploitation en parfait état de réparations locatives et d'entretien ». La société en gérance, Cinéma La Pagode, n'a pas pris soin du lieu et n'a donc pas souscrit à ses obligations d'occupant en n'entretenant pas ce lieu emblématique" - on reste surpris puisque Europalaces Etoile souhaitait également après quinze ans d'exploitation, rénover le cinéma.

Certes la SCI Foch Dauphine "n'a pas pu entrer dans son bien depuis trois ans et ne sait donc pas jusqu'où s'étendent les travaux à réaliser." Mais factuellement, cela remonte bien plus loin. La SCI Foch Dauphine avoue quand même avoir "déposé une demande de permis de construire le 10 octobre 2002", alors que la Pagode avait fermé de 1997 à 2000 pour être complétement remise aux normes. Aucune des deux parties n'explique l'objet ou les raisons de leurs divergences sur ces travaux imaginés deux ans après la réouverture du cinéma. Questions de normes (sécurité, accès pour les handicapés)? de matériel technique? de réhabilitation? d'agrandissement? Personne ne l'évoque.

La rentière mécène versus l'exploitant art et essai

Dans son CV, Elisabeth Dauchy, 69 ans, gérante de quatre sociétés spécialisées dans l'immobilier (avec leur siège dans le triangle d'or parisien), se revendique mécène de projets culturels depuis plusieurs décennies: "En aidant, en 1995, à produire Molom, conte de Mongolie de Marie-Jaoul de Poncheville sous la direction artistique de Abderrahmane Sissako, en offrant en 1992 le mobilier spécialement créé par Richard Peduzzi pour la Bibliothèque-Musée à l'Opéra Garnier après sa rénovation et en participant ensuite à l'ameublement du bureau de la direction de l'Opéra Bastille, Elisabeth Dauchy montre sa volonté constante au fils des ans de promouvoir les arts et de les rendre accessibles au grand public." Dont acte. Mais il reste des questions en suspens sur cet imbroglio juridique et sur l'avenir même du cinéma La Pagode. Et on peut aussi objecter que l'exploitant a plutôt bien fait son travail depuis 2000, avec plus de 100000 fidèles spectateurs par an grâce à une programmation pointue et des festivals.

Aujourd'hui, les perdants ce ce divorce pas amiable ce sont les cinéphiles parisiens. Et c'est assurément pathétique de laver son linge sale en public sans être totalement transparent vis-à-vis d'eux.

Toy Story, Wong Kar-wai, Retour vers le futur au programme du nouveau cinéma Les Fauvettes

Posté par vincy, le 6 novembre 2015

Les Fauvettes a eu quelques mois de retard. Mais cette fois-ci c'est la bonne. Le cinéma parisien exploité par Gaumont Pathé ouvre aujourd'hui, vendredi 6 novembre.

Avec 5 salles (641 fauteuils) entièrement dédiées aux films restaurés et un bar dans un patio végétal, le complexe remplace l'ancien Gaumont Gobelins (XIIIe arrondissement) à quelques pas de la nouvelle Fondation Pathé. Deux façades numériques animées, sur lesquelles défileront des images de films pixellisées, marquent sa présence sur l'avenue parisienne.

Les Fauvettes n'a rien à voir avec une cinémathèque et ne projettera pas uniquement des films du catalogue Pathé. C'est un lieu de rendez-vous "amoureux" entre les cinéphiles et le cinéma classique ou populaire, en version originale, restauré numériquement. Le concept est unique au monde selon Jérôme Seydoux, co-président de Pathé.
Les copies restaurées attirent de plus en plus de spectateurs dans les salles mais aussi dans les Festivals (certains y consacrent même des sections). C'est une manière d'accompagner une sortie DVD/Blu-Ray lorsqu'un classique a bénéficié du lifting numérique. Là il s'agira d'aller voir ou revoir un film dans des conditions optimales.

Et le programme s'annonce éclectique: la trilogie Retour vers le futur, Top Gun en 3D, Casino, Blade Runner (final cut), Le conformiste, un cycle Toy Story pour amorcer une rétrospective intégrale de Pixar, Le Corniaud, avec Danièle Thompson en invitée spéciale, Jusqu'au bout du monde, avec son réalisateur Wim Wenders ou The Blues Brothers en présence de John Landis. On pourra aussi voir les premiers films de Wong Kar Wai en version restaurée (Chungking Express, Les anges déchus, Happy Together, Nos années sauvages) et même Skyfall!

A l'origine, en 1900, La Fauvette est une salle de bal puis un café-concert où l'on diffuse des films, comme Le Voyage dans la Lune de Méliès. Il faut attendre 1937 pour que le lieu devienne un cinéma de 1000 laces, avec balcon. En 1972, La Fauvette et le Ciné-Théâtre des Gobelins fusionnent. Dans les années 80, on ajoute deux salles, puis on divise la grande salle en 3. Et finalement ce cinéma de 5 salles change de nom en 1992. Le Gaumont Gobelins est né. Jusqu'à aujourd'hui, où Les Fauvettes va retrouver son enseigne et se met au pluriel.

Du cinéma au (nouveau) Musée de l’Homme

Posté par vincy, le 20 octobre 2015

Le Musée de l'Homme a rouvert samedi 17 octobre, Place du Trocadéro à Paris. De nos origines à notre futur, l'évolution s'expose au fil des crânes et squelettes, des objets préhistoriques ou plus modernes (y compris des figurines de héros Marvel pour illustrer l'homme futur), de vidéos interactives et de cartels pédagogiques qui démontrent que l'Homme est unique et divers. Ici, point de dinos reconstitués par l'ADN ou d'anachroniques voyages dans le temps: tout est basé sur des connaissances scientifiques actuelles, prêtes à être revues et corrigées au fil des découvertes.

C'est splendide et on est très loin de l'ancien Musée que l'on peut voir dans la séquence d'ouverture de L'Homme de Rio : un vieux musée un peu sombre, poussiéreux, où un conservateur orchestre le vol d'une statuette maltèque c'est-à-dire amérindienne (et au passage un de ses sbires tue un gardien).

De cinéma il en sera aussi question du 6 novembre au 6 décembre avec le 34e Festival International Jean Rouch. L'entrée est libre et gratuite. Un Festival de cinéma ethnographique qui se déroulera dans l'Auditorium Jean Rouch, flambant neuf. Ce lieu emblématique du premier Musée de l'Homme (1938) a été entièrement rénové dans son emplacement d'origine. Il dispose de 152 places.

Le Festival est un véritable festival, avec ses jurys et ses prix, mais aussi sa master classe - Gueorgui Balabanov, cinéaste franco-bulgare, qui présentera son dernier film Le dossier Petrov sur les crimes commis par d'anciens communistes dans la Bulgarie des années 90 - et sa compétition internationale, projetée du 7 au 13 novembre.

La variété des sujets des films permettra d'avoir une vision large de l'humain. Peuples autochtones, ouvriers d'une manufacture de coton africaine, agriculteurs chinois, adolescents du Lesotho, jeunes Rwandais post-génocide, musiciens crétois, habitants de bidovilles franciliens, jeune vietnamien se sentant femme, rescapés du conflit péruvien, pécheurs indiens, habitants divisés par une frontière, premier afro-américain des Etats-Unis, insulaire de Lampedusa, grand mère colombienne, ... ce sont 24 films documentaires qui sont présentés.

La remise des prix sera parrainée par Jean-Claude Carrière.

Par ailleurs, avec l'Inalco, un cycle spécial sera consacré à Taïwan. Et les 5 et 6 décembre, un cycle de séances spéciales seront consacrées à la naissance et la (re)connaissance du cinéma ethnographique, où l'on pourra voir quelques raretés signées Sergueï Eisenstein, Luis Bunuel, Yannick Bellon et bien entendu Jean Rouch.

Parallèlement au Festival de cinéma ethnographique, le Musée accueillera une séance spéciale, "Images du changement climatique et du changement global" le 28 novembre.

Le Festival international Jean Rouch a existé de 1982 à 2009, date de fermeture de l'ancien musée. Avec cette 34e édition, il célèbre les 60 ans du Comité du film ethnographique Jean Rouch.