Venise 2012 : Pronostics (hasardeux) à quelques heures du Palmarès

Posté par kristofy, le 8 septembre 2012

Pour cette 69ème édition du Festival de Venise les films en compétition étaient au nombre de 18, lequel recevra le prestigieux Lion d’or ?

Si plusieurs films ont les préférences de la majorité (The Master, Pieta, Après mai…), les prix d’interprétation restent très ouverts.

Au jeu des pronostics, The Master qui domine le classement ; le film de Paul Thomas Anderson était d’ailleurs donné gagnant avant que le festival ne commence, et Joaquin Phoenix est aussi le favori pour le prix du meilleur acteur. Mais la règle veut qu’il n’y ait pas cumul de prix, le Lion d’or étant une récompense pour toute l’équipe du film (ainsi Mickey Rourke n’avait pas été meilleur acteur puisque The Wrestler avait reçu le Lion d’or).

Le président du jury Michael Mann est entouré des réalisateurs Peter Ho-Sun Chan, Ari Folman, Matteo Garrone, Pablo Trapero, de la réalisatrice Ursula Meier, des actrices Samantha Morton, Laetitia Casta, et de Marina Abramovic. On devine que ces 9 personnalités vont sans doute aller vers un compromis qui réservera des surprises, en déjouant le buzz des festivaliers. Il est possible que le jury choisisse de récompenser Joaquin Phoenix et Paul Thomas Anderson, auquel cas le Lion d'or serait attribué à un autre film, moins attendu. Dans le cas contraire, PTA alignerait le 4e Lion d'or américain des années 2000, après Le secret de Brokeback Mountain, The Wrestler et Somewhere.

Et sinon? A qui la plus haute récompense irait ? Un film capable de faire consensus à la fois pour son audace formelle et pour l'émotion que dégagerait son histoire. Le jury mettrait en avant comme justifications l'humanité des sentiments et une ouverture sur le monde...

Selon les critiques interrogés à Venise et répertoriés dans un classement quotidien, cinq films sont en haut de la liste : Après mai Olivier Assayas (ce qui serait le premier Lion d'or pour la France depuis Au revoir les enfants en 1989), The Master donc, le controversé film sur l'euthanasie, La belle endormie de Marco Bellocchio (l'Italie n'a reçu aucun Lion d'or depuis 1998), Pieta de Kim Ki-duk (ce serait son plus grand prix, 8 ans après son Lion d'argent du Meilleur réalisateur à la Mostra pour Locataires et le premier Lion d'or sud-coréen), et Thy Womb de Brillante Mendoza.

Globalement, Venise a tenu ses promesses avec une compétition resserrée mais de bonne qualité. Les films américains présentés sur le Lido étaient bien supérieurs à ceux qui ont envahit la Croisette. Les rares films asiatiques ont séduit les cinéphiles. Et des cinéastes européens comme Assayas, Bellocchio ou Sarmiento ont su alimenter le débat et plaire aux festivaliers.

Osons donc un pronostic, qui n'engage que son auteur :

- Lion d'or du meilleur film : Thy Womb, de Brillante Mendoza
- Lion d'argent du meilleur réalisateur : Paul Thomas Anderson, pour The Master
- Prix Spécial du Jury ex-aequo : Pieta, de Kim Ki-duk & Après mai d'Olivier Assayas
- Coupe Volpi pour la meilleure interprétation masculine : Joaquin Phoenix, dans The Master
- Coupe Volpi pour la meilleure interprétation féminine : Franziska Petri, dans Izmena (Betrayal)
- Prix Osella pour le meilleur scénario : Fill the void, de Rama Burshtein
- Prix Marcello Mastroianni de la révélation meilleur(e) jeune interprète : Giulia Valentini, dans Un giorno speciale
- Prix Osella pour la meilleure contribution technique : Benoît Debie, pour Spring breakers

Venise 2012 : Accouchement complexe pour Thy Womb de Brillante Mendoza

Posté par kristofy, le 6 septembre 2012

Le réalisateur philippin Brillante Mendoza enchaîne les films année après année , sélectionnés à Cannes, Locarno ou Berlin comme son précédent Captive avec Isabelle Huppert. Trois ans après Lola, sa dernière œuvre Thy Womb (Sinapupunan) et de nouveau en compétition à Venise. On y retrouve son habile sens de la mise en scène où la caméra semble toujours filmer ce qui se passe de manière naturaliste : le spectateur est ainsi pris à témoin. Thy Womb est une nouvelle preuve de son savoir-faire pour nous faire rencontrer des personnes davatage que des personnages.

Le film s’ouvre sur une séquence d’accouchement, on y voit un bébé naître avec l’assistance d’un couple qui fait office de sage-femme. C’est ce couple que l’on va suivre ensuite, dans différentes actions quotidiennes. Eux ne peuvent pas avoir d’enfant. La femme se met à recherche d’une bonne seconde épouse pour que son compagnon puisse devenir père…

Comme à son habitude Mendoza se laisse aller à nous montrer des séquences sans couper. Ainsi la cérémonie après la mort d’un banc de poisson où une autre où le couple attend quelqu’un paraissent s'étirer. Toutefois il réussit à faire tenir son film dans une durée raisonnable (1h40). On y voit des images marquantes comme la gorge tranchée d’un animal ou un bébé sortir du ventre de sa mère, mais c’est avant tout l’histoire de ce couple qui procure le plus d’émotions. Il flirte avec le débat des mères porteuses, qui offusquent les féministes occidentales : les candidates pour être secondes épouses et future mère (le titre womb signifie utérus) contre paiement d’une dot à leurs familles ne songent jamais à l'amour. Ce sacrifice d'une épouse pour le bien de son mari rappelle Une seconde femme. Mais c'est surtout une tragédie amoureuse où la seconde femme va apprendre à aimer son époux et lui demander de se séparer de la première. Une répudiation qui peut choquer...

Brillante Mendoza s’en explique : « Le film se déroule dans une partie du sud des Philippines, il montre une réalité qui est même ignorée de beaucoup de philippins. Tout ce qui a été tourné est le plus réel possible. Pour la femme qui accouche l’actrice a étudier les gestes d’une sage-femme, je montre la beauté de ce moment extraordinaire qu’est une naissance. Pour l’animal mis à mort ça fait partie de la culture de cette communauté de l’offrir pour des noces. Dans cette communauté il est possible d’avoir deux femmes, c’est autorisé dans la culture musulmane, il faut que le mari arrive à subvenir aux besoins de ces deux femmes. Avoir un enfant est une grâce divine de Allah. Je voulais montrer la beauté de la nature de cet environnement et aussi la beauté de la communauté de ces gens qui vivent là. »