Les 5 premiers films nommés aux European Film Awards

Posté par vincy, le 15 octobre 2013

L'Académie du cinéma européen a choisi les 5 films qui seront en course pour le prix Fipresci - European Discovery qui récompense un nouveau talent pour son premier long métrage.

La sélection a été faite par un comité réunissant 5 membres de l'European Film Academy et deux de la Fipresci. Signalons que deux films suédois sont en lice : ils s'étaient d'ailleurs partagés les nominations (et les récompenses des Guldbagge (les César locaux).

- Âta Sova Dô (Eat Sleep Die) de Gabriela Pichler (Suède) qui représente la Suède pour l'Oscar du meilleur film en langue étrangère. Le film a reçu le prix du public à la Semaine de la critique du Festival de Venise en 2012. 4 Guldbagge : meilleur film, réalisateur, scénario et actrice.

- Call Girl de Mikael Marcimain (Suède). Le film a reçu le prix Fipresci de la découverte et le prix du meilleur réalisateur d'un premier film au Festival de Toronto en 2012. 3 Guldbagge : meilleure image, meilleurs costumes, meilleur son.

- Miele de Valeria Golino (Italie). Sélectionné à Un certain regard au dernier festival de Cannes (mention spéciale du jury oecuménique) , prix du public au Festival de Bruxelles, meilleur premier film et meilleure actrice aux Golden Globes italiens, meilleur nouveau réalisateur, meilleure actrice et meilleur son pour le Syndicat national italien des journalistes de cinéma.

- Oh Boy de Jan Ole Gerster (Allemagne). Le film a 6 German Film Awards (meilleur film, réalisateur, acteur, scénario, second rôle masculin, musique).

- La Plaga de Neus Ballus (Espagne), présenté au dernier festival de Berlin.

Le gagnant sera révélé le 7 décembre lors de la cérémonie des European Film Awards, à Berlin.

Crawl, une très belle plongée en eaux troubles

Posté par kristofy, le 30 janvier 2013

L’histoire : En Cornouaille, dans une Bretagne bordée par l'océan, Martin enchaîne les petits boulots et les maigres larcins. Il sort depuis peu avec Gwen, une fille mystérieuse qui habite seule dans un mobile home et qui va nager chaque jour en haute mer, par tous les temps. Le jour où Gwen annonce à Martin qu'elle est enceinte de lui et qu'elle veut garder l'enfant, il prend peur, et s'empresse de disparaître. Corinne, la soeur de Martin, est elle aussi enceinte et a du mal à faire passer l'arrivée d'un troisième enfant à Jean, son mari, déjà en prise avec des problèmes dans son travail. Alors que Martin puis Jean partent à la dérive, Gwen et Corinne se débattent seules et essayent de redresser la barre. Jusqu'au jour où Martin est accusé de meurtre...

Ce qu'il faut savoir : Le destin de Crawl est d’abord une belle aventure humaine : ce premier long-métrage du réalisateur Hervé Lasgouttes est non seulement l'un des meilleurs films français de ce début d’année mais aussi peut-être une des plus belle découverte de ces derniers mois.

Le hasard fait que sa sortie en salles arrive entre les réflexions sur les budgets mal maîtrisés de films pas rentables et les nominations pour les Césars qui oublient de manière injuste plusieurs films en marge des productions grand public… Dans ce contexte Crawl apparaît comme un film exemplaire à tous points de vue. L’intégralité du tournage - mais aussi toute la post-production - s’est déroulée en région Bretagne, le scénario s’appuie sur un mélodrame familial tout en évoquant un contexte social, et les acteurs tous remarquables élèvent cette histoire vers le haut.

Crawl avait eu les honneurs d’une sélection parallèle au dernier Festival de Venise où il a remporté le "Label Europa Cinemas" du meilleur film européen, prix que le jury avait décerné avec ces mots : « Crawl est un premier film impressionnant, Hervé Lasgouttes a un sens très fort de la narration et son film évoque de façon puissante l'atmosphère de la vie professionnelle en Bretagne, dans des conditions économiques difficiles . Les deux jeunes acteurs sont exceptionnels. » Il s’agit de surtout de Swann Arlaud (révélation sublime, et désormais autre grand espoir du cinéma français avec Pierre Niney) et de Nina Meurisse, mais aussi de Anne Marivin (dans un registre plus grave que ses comédies), Gilles Cohen, Jean-Marie Frin…qui sont tous au diapason.

Le réalisateur Hervé Lasgouttes avait confié une savoureuse anecdote à Venise : « On devait tourner avec un acteur qui s’est blessé en moto juste avant le début du tournage, il s’est retrouvé à l’hôpital. Soit le film s’arrêtait bien que tout soit prêt, soit on prenait quelqu’un d’autre. Je suis allé à Paris pour un casting de 7 jeunes comédiens entre 11h et 17h, et c’est donc Swann Arlaud qui a eu le rôle principal, il a pris le TGV dans la foulée pour un mois de tournage en Bretagne. Le lendemain à 9h du matin le tournage commençait, et c’était la scène où Swann Arlaud est jeté dans l’eau froide de la mer. »

Crawl nage dans les eaux de films comme Angèle et Tony de Alix Delaporte (aussi remarqué à Venise avant 3 nominations aux César l’année suivante) ou Welcome de Philippe Lioret. Ambitieux, ce film écrit finement, a beau être sombre, comme une plongée en eaux troubles par temps de nuit, il mélange habilement un cadre social réaliste et un drame familial sensible. La mise en scène valorise la poésie, sans doute grâce à une certaine pudeur. Les ellipses réussies, le rejet d'un certain naturalisme compensent même quelques facilités comme cette histoire de meurtre ou cette métaphore clichée de la nage comme outil émancipant. Hautement recommandable donc.

4 des 8 films en lice pour le prix Louis-Delluc étaient à Cannes

Posté par vincy, le 26 octobre 2012

En attendant la liste des nominés pour le prix du premier film, le prix Louis-Delluc a sélectionné ses 8 finalistes pour le prix du meilleur film. La remise des prix aura lieu le 14 décembre pour ce "Goncourt" du cinéma. Qui succèdera au finlandais Aki Kaurismäki? Un autrichien, doublement palmé?

On note que quatre des huit films étaient sélectionnés au Festival de Cannes, dont trois en compétition. Parmi les finalistes, Noémie Lvovsky et Lucas Belvaux avaient reçu ce prix, la même année en tant qu'ex-aequo, avec, respectivement, Les sentiments et la trilogie Un couple épatant / Cavale / Après la vie. C'était en 2003. Léos Carax a déjà été sacré par le Delluc en 1986 avec Mauvais sang. Jacques Audiard avait été récompensé pour Un prophète en 2009. Reste qu'Haneke, Assayas, Jacquot et Faucon ne l'ont jamais obtenu. Le premier avait cependant figuré dans la sélection de 2005 avec Caché. Le deuxième avait été retenu pour L'heure d'été et Clean. Le troisième figurait dans la liste en 2001 avec Tosca.

La sélection (par ordre de préférence de la rédaction)

Amour de Michael Haneke
La désintégration de Philippe Faucon
Holly Motors de Leos Carax
Après mai d'Olivier Assayas
De rouille et d'os de Jacques Audiard
38 témoins de Lucas Belvaux
Camille redouble de Noémie Lvovsky
Les Adieux à la reine de Benoît Jacquot

Koji Wakamatsu (1936-2012) : sa vie était un roman

Posté par vincy, le 18 octobre 2012

Il y a un an, Angelopoulos était mort après avoir été renversé par un motard (voir actualité du 25 janvier 2012). Le réalisateur japonais Koji Wakamatsu est décédé mercredi soir, renversé par un taxi. A 76 ans, le producteur de l'Empire des sens venait de remporter le prix du Réalisateur asiatique de l'année. au 17e Festival international du film de Busan (BIFF), en Corée du sud.

En mai dernier, il avait présenté Le jour où Mishima a choisi son destin à Cannes (Un certain regard), "biopic" peu consensuel sur l'écrivain et ses aspirations nationalistes qui l'ont conduit à une fin tragique. En septembre, Venise avait projeté son dernier film, The Millennial Rapture, adaptation du roman de Kenji Nakagami, Mille ans de plaisir.

Wakamatsu a vécu un destin peu commun : emprisonné durant sa jeunesse bagarreuse, il rejoint les Yakuza. Pour leur compte, il surveille les plateaux de tournage de cinéma. Tendance extrême-gauche (autant dire révolutionnaire au Japon, le réalisateur était engagé dans une vision du monde plutôt opposée à la ligne officielle de son pays. Il commence sa carrière avec des films érotiques. Prince du pinku eiga, il se tournera ensuite vers des films plus sociaux et politiques.

Produisant à bas-coût tous ses films, là encore en marge du système japonais, il conservera une grande liberté tout au long de sa carrière. Artiste rebelle, il n'en a pas moins été reconnu et consacré, primé à Berlin et à Tokyo pour United Ted Army. Il a également aidé de nombreux cinéastes à leurs débuts, comme Banmei Takahashi, Genji Nakamura et Kan Mukai.

________
voir aussi notre portrait publié lors du Festival de Cannes 2012

Venise 2012 : Marco Bellocchio et Matteo Garrone, deux divorces à l’italienne

Posté par kristofy, le 12 septembre 2012

Le président du jury Michael Mann et ses huit jurés parmi lesquels il y avait le réalisateur italien Matteo Garrone (tout juste auréolé d’un grand prix à Cannes par son compatriote italien Nanni Moretti pour son film Reality) ont rendu leur verdict, et celui-ci fait grincer quelques dents en Italie.

Matteo Garrone ne veut plus être juré dans un festival italien


Pourtant ce palmarès récompense effectivement les films qui étaient les meilleurs de l’avis général : The Master de Paul Thomas Anderson, Pieta de Kim Ki-duk, Paradise : Faith de Ulrich Seidl, ainsi que Après mai de Olivier Assayas et Fill the Void de Rama Burshtein : tous ces films étaient pressentis dans nos pronostics, mais avec un ordre différent pour les récompenses.

Cependant les réactions, grogne en partie chauvine, n’ont pas tarder à faire grincer des dents chez nos voisins italiens : ils reprochent à Michael Mann et à son jury de ne pas avoir mieux récompensé le cinéma italien. Le dernier film "local" à avoir eu le Lion d’or remonte à 1998 (Mon frère de Gianni Amelio). La pression des médias nationaux est telle que Matteo Garrone, membre du jury, a du faire une déclaration pour prendre ses distances, en avouant que c’était un cauchemar : il ne veut plus jamais être juré dans un festival italien.

Marco Bellocchio ne présentera plus de films à Venise

Le problème s'appelle Marco Bellocchio. Celui-ci a exprimé publiquement sa colère à propos de son film La Bella addormentata. Complètement ignoré du palmarès, il confesse, dépité ;  « je ne présenterai plus jamais un film à Venise ! » Son film aborde un épisode politique en Italie : le cas de d'Eluana Englaro euthanasiée par sa famille après 17 ans de coma, luttant ainsi contre la pression de plusieurs manifestations de fidèles catholiques (le Pape est quasiment le chef d'état d'un des pays les plus conservateurs d'Europe) et des hommes politiques qui préparaient une loi interdisant cet acte.

Pour lui « L'Italie s'est affrontée sur le destin de cette pauvre jeune femme, il y a eu une grande tension médiatique, un affrontement entre catholiques et laïcs. Je ne voulais pas comparer les différentes positions sur l'euthanasie, ni condamner ceux qui ont la foi. » Son film fait se mélanger quatre histoires inégales, un politicien qui voudrait voter contre les consignes de son parti, une mère (Isabelle Huppert, mal dirigée) qui veut qu’on prie pour sa fille dans le coma, un médecin qui  soigne une toxicomane, et un coup de foudre. Malheureusement La Bella addormentata semble passer à côté de son sujet. Sorti le 6 septembre en Italie, il ne cumule que 400 00 euros de recettes, et n'est que 6e au box office. Le film n'a pas encore de distributeur en France. L'exportation risque d'être difficile. Même si à Toronto le marché peut se réveiller grâce aux prestigieux noms à son affiche, La Bella addormentata ressemble plus à un téléfilm sans grande envergure…

Mauvais joueur?

Marco Bellocchio est très mauvais joueur. Ce n'est pas la première fois qu'il s’offusque ainsi quand un de ses films n'est pas récompensé. Déjà en 2003 son film Buongiorno Notte avait été ignoré du jury (pourtant composé d'italiens comme Stefano Accorsi et Mario Monicelli qui était le président) ; il avait déjà fait le reproche de récompenser des films étrangers plutôt que le cinéma italien.

Cette année, la sélection officielle (toutes sections confondues) comptait 14 cinéastes italiens contre 11 cinéastes américains.

Le jury de Michael Mann à tout de même fait une concession en accordant un prix de la meilleure contribution technique à Daniele Ciprì pour È stato il figlio (prix plus diplomatique que mérité), et même un prix révélation meilleur jeune interprète à Fabrizio Falco (pour ce même film et aussi  pour La Bella addormentata).

On ajoute aussi que l’une des meilleures surprises de cette 69ème édition du Festival de Venise est Low Tide (certes tourné aux Etats-Unis avec des acteurs américains) de Roberto Minervini, un réalisateur italien !

Venise 2012 : Kim Ki-duk, Lion d’or pour une prière contre un monde devenu fou

Posté par kristofy, le 10 septembre 2012

L'histoire : Un homme solitaire exécute sa tâche sans aucune compassion pour autrui, son activité est de récolter le remboursement de prêts d’argent. Qu’importe si les débiteurs qui ont emprunté sont de simples ouvriers qui n’ont pas les moyens de rembourser, qu’importe si le taux d’intérêt prohibitif a multiplié par dix le montant de la somme, son métier est de forcer le remboursement de cet argent. Aucun problème de conscience pour brutaliser les pauvres malheureux qui ne peuvent pas rembourser, la violence extrême est même une solution puisque l’argent peut être récupéré auprès d’une assurance s'ils deviennent handicapés… Un jour une femme se présente à lui en affirmant être sa mère, celle-là même qui l’avait abandonné. Dans un premier temps, il la rejette, avant de l’accepter enfin dans sa vie. Une vengeance se prépare… Et la violence n'est pas absente : "Je veux me concentrer sur les implications de la violence" explique le réalisateur."Je me rends compte que le public peut la ressentir de façon plus forte à travers son imagination au lieu de la voir."

Pieta, Lion d'or de foi et d'argent

Le nouveau film de Kim Ki-duk Pieta est une histoire de vengeance comme les coréens savent si bien les écrire. Une vengeance qui suit un plan machiavélique particulièrement alambiqué comme on peut en voir dans No Mercy de Kim Hyoung-jun. Cependant Pieta est loin de ces thrillers à sensations fortes, il s’agit bien d’une oeuvre s'inscrivant dans la filmographie du cinéaste. Les personnages se décryptent par leurs nuances et leurs motifs. Par exemple, cet homme qui est prêt à se sacrifier une main pour un prêt qui lui permettrait d’offrir un cadeau à son enfant, et surtout jusqu’où peut aller l’amour d’une mère pour son fils. Et puis il y a l'inspiration religieuse de celui qui se rêvait prédicateur et fut pensionnaire dans un monastère étant jeune. Le film se termine  avec le chant religieux "Kyrie Eleison", l'affiche reprend la célèbre sculpture de Michel-Ange où la Vierge contemple son défunt fils. Moralisatrice, cette histoire oscille entre compassion, pénitence et sacrifices et ne manque pas de cruauté. Amen.

La foi versus l'ultralibéralisme. Car c'est bien son regard sur la folie du monde qui lui donne l'envie de se transcender. Kim Ki-duk évoque sa démarche ainsi : "Je crois que le public qui verra le film se posera des questions sur la société capitaliste. Les gens doivent changer et peu à peu se créera un mouvement de transformation" a-t-il déclaré. « Je veux parler du capitalisme extrême, et de ses conséquences sur les dynamiques des rapports humains qui s’en trouvent modifiés. On vit aujourd’hui une situation de crise profonde du capitalisme. Mes films sont mes yeux à travers lesquels je regarde la réalité. L’argent n’est pas important, c’est son usage qui est important. L’argent peut avoir un versant positif comme le don et la charité, et aussi un versant négatif comme la spéculation. C’est à cause de l’argent que les deux personnages de Pieta se rencontrent. Ce ne sont pas une victime et un bourreau : dans chaque être humain il y a en même temps un versant victime et un versant bourreau. Je le pense, et c’est ce que j’ai voulu montrer dans ce film. » L'argent comme ultime pêché.

Son prochain film explorera de nouveau ce thème : "comment les gens se dévorent les uns les autres à cause de l'argent".

Cinéaste sanctifié, par défaut

Le générique de début de Pieta affiche qu’il s’agit du 18ème film de Kim Ki-duk, qui affirme que cette coquetterie est une idée des producteurs. Cette mention a pour effet de se rappeler, si besoin était, que Pieta est peut-être plus que n’importe quel film coréen du moment, le nouveau film d’un maître du cinéma coréen… Kim Ki-duk qui réalisait un nouveau film presque chaque année s’était mis en retrait du monde du cinéma pour divers motifs personnels. Son retour a eu lieu en 2011 avec Arirang au Festival de Cannes (prix Un Certain Regard) puis avec Amen au Festival de San Sebastian.

Ses films ont presque tous été sélectionnés soit à Cannes (Souffle, L'arc) soit à Berlin (Ours d’argent du meilleur réalisateur pour Samaritan Girl, après y avoir présenté Bad Guy, Birdcage Inn) ; depuis son 4ème film, L’île, le nom de Kim Ki-duk commence à faire le tour du monde (2000) avant de nous éblouir en 2003 avec Printemps, été, automne, hiver…et printemps. L’île a été sa première sélection au Festival de Venise, il y sera ensuite pour Adress Unknown et Locataires qui lui avait valu le Lion d’argent du meilleur réalisateur. Après avoir été plusieurs fois sur la deuxième marche du podium, Kim Ki-duk vient donc de décrocher le Lion d’or de Venise. La messe est dite. Kim Ki-duk rentre dans l'Olympe des cinéastes. Par défaut. The Hollywood Reporter indique en effet que le règlement du festival empêchait de donner la récompense suprême à The Master de Paul Thomas Anderson et les prix d'interprétation aux deux comédiens. Deuxième choix, Pieta était, cependant, parmi les 18 films de la compétition, l'un des quatre favoris pour le Lion d'or.

Le distributeur italien du film Pieta avait déjà prévu de sortir le film dans la foulée du festival de Venise, le Lion d’or 2012 sera donc en salles dès ce 14 septembre en Italie. Fin septembre, le réalisateur recevra au Festival d'Hamburg Film Festival le prix Douglas Sirk pour l'ensemble de sa carrière. Le film s'est d'ailleurs vendu à plusieurs distributeurs internationaux avant d'obtenir le Lion d'or. Il sortira en Allemagne, en Russie, en Norvège, en Turquie, en Grèce, à Hong Kong...

Mais pour découvrir ce film en France il faudra attendre… Le film sera présenté au Festival de Toronto cette année. De quoi boucler ses ventes.

Venise 2012 : Kim Ki-duk Lion d’or et trois prix pour The Master

Posté par vincy, le 8 septembre 2012

Dans un désordre assez agaçant pour un Festival de cette trempe, le jury a décerné le palmarès (alléchant) du 69e Festival de Venise. Bien sûr, la soirée fut confuse : Philip Seymour Hoffman qui est venu chercher le prix du meilleur acteur pour son partenaire, absent, Joaquin Phoenix, alors que lui-même (mais personne ne l'avait mentionné) était primé ; les deux Lions d'argent qui ont été inversé : Seidl recevant celui de la mise en scène et Anderson le grand prix. Ils sont venus faire l'échange sur scène. Paul Thomas Anderson reçoit ainsi trois prix avec The Master : mise en scène, interprétation masculine ex-aequo pour ses deux comédiens.

Mais le grand vainqueur est bien entendu le sud-coréen Kim Ki-duk avec Pieta. Le réalisateur en a même chanté une chanson en coréen sur la scène. Pour ce film, il s'est inspiré du chef-d'oeuvre de Michel-Ange, sculpture que l'on peut voir dans la Basilique Saint-Pierre du Vatican, pour célébrer le lien éternel d'une mère avec son fils, et de la souffrance qu'il engendre.

8 ans après son Lion d'argent de la mise en scène pour pour Locataires (il avait obtenu la même année l'Ours d'argent de la Meilleure réalisation au Festival de Berlin pour Samaria), il reçoit ainsi sa plus haute distinction. En 2011, après une longue absence, son documentaire autobiographique et bouleversant Arirang avait reçu le prix Un certain regard à Cannes (le film est toujours inédit en salles en France).

C'est surtout la première fois qu'un cinéaste sud-coréen reçoit l'un des quatre grands prix de la planète (Ours d'or, Palme d'or, Lion d'or, Oscar). Il était temps que cette cinématographie aussi riche que variée, populaire qu'audacieuse soit récompensée. C'est fait grâce au jury de Michael Mann.

Compétition

Lion d'or : Pieta de Kim Ki-duk

Lions d'argent :
- Grand Prix du jury : Ulrich Seidl (Paradis : Foi)
- Prix spécial pour la mise en scène : Paul Thomas Anderson (The Master)

Coupes Volpi :
- meilleure interprétation masculine ex-aequo : Philip Seymour Hoffman et Joaquin Phoenix (The Master)
- meilleure interprétation féminine : Hadas Yaron (Fill The Void)

Prix Marcello Mastroianni :
- meilleure révélation : Fabrizio Falco (È stato il figlio et La belle endormie)

Prix Osella
- Scénario : Après mai, d'Olivier Assayas
- Meilleure contribution technique : Daniele Cipri (È stato il figlio)

Orrizzonti

Prix Orizzonti : Three Sisters, de Wang Bing

Prix spécial du jury : Tango Libre, de Frédéric Fonteyne

Premier film (toutes sélections confondues)

Meilleur film : Mold, d'Ali Aydin (Semaine de la critique)

Tous les autres prix remis à Venise

Venise 2012 : The Master, To The Wonder, Pieta reçoivent déjà quelques prix

Posté par vincy, le 8 septembre 2012

Quelques favoris de la compétition ont été remarqués par d'autres jurys. Comme à Berlin et à Cannes, du Lion d'or Queer aux prix de la critique, les honneurs se démultiplient. On note que Paul Thomas Anderson, Terrence Malick, Kim Ki-duk ont frappé les esprits.
Mais il y a un film qui bat tous les records : L’intervallo, de Leonardo Di Costanzo a reçu un total de 7 prix, dont celui de la critique internationale pour un film qui n'était pas en compétition.
Présenté dans la section Orizzonti, ce film italie, tourné à Naples en dialecte napolitain (et sous-titré en italien), raconte la journée de deux adolescents sous la coupe de la mafia. Entre néo-réalisme, humour et même érotisme, la relation entre les deux ados va souligner en creux l’emprise de la mafia sur le petit peuple italien.

Prix FIPRESCI de la critique internationale
Meilleur film de la compétition : The Master, de Paul Thomas Anderson
Meilleur film des sélections parallèles : L’intervallo, de Leonardo Di Costanzo

SIGNIS Award : To The Wonder, de Terrence Malick
Mention spéciale pour Fill The Void, de Rama Burshtein

Prix du public “RaroVideo” – Semaine de la critique. : Äta Sova Dö (Eat Sleep Die), de Gabriela Pichler

Prix Label Europa Cinemas : Crawl, d'Hervé Lasgouttes

Prix Lionceau d'or Agiscuola : Pieta, de Kim Ki-duk

Cinema pour l'UNICEF : mention à È stato il figlio, de Daniele Ciprì

Prix Francesco Pasinetti (SNGCI) :
Meilleur film : L’intervallo , de Leonardo Di Costanzo
Meilleur documentaire : La nave dolce (The Human Cargo), de Daniele Vicari
Meilleur acteur: Valerio Mastandrea (Gli Equilibristi)
Prix spécial : Clarisse, de Liliana Cavani

Prix Brian : Bella Addormentata, de Marco Bellocchio

Queer Lion Award (Associazione Cinemarte) : The Weight, de Jeon Kyu-Hwan

Prix Arca CinemaGiovani Award:
Meilleur film de la compétition : La Cinquième saison, de Peter Brosens et Jessica Woodworth
Meilleur film italien : La città ideale, de Luigi Lo Cascio

Biografilm Lancia Award : La nave dolce (The Human Cargo), de Daniele Vicari et Bad25 de Spike Lee

Prix CICT - UNESCO “Enrico Fulchignoni” : L’intervallo, de Leonardo Di Costanzo

Prix CICAE - Cinéma d’Art et d’Essai : Wadjda, de Haifaa Al Mansour

Prix CinemAvvenire
Meilleur film de la compétition : Paradies: Glaube, de Ulrich Seidl
Meilleur film : Wadjda, de Haifaa Al Mansour

Prix FEDIC : L’intervallo, de Leonardo Di Costanzo
Mention spéciale : Bellas Mariposas, de Salvatore Mereu

Prix de la Fondazione Mimmo Rotella : Après Mai, d'Olivier Assayas

Prix Future Film Festival Digital : Bad25, de Spike Lee
Mention spéciale : Spring Breakers, de Harmony Korine

Prix P. Nazareno Taddei : Pieta de Kim Ki-duk
Mention spéciale : Sinapupunan (Thy Womb), de Brillante Mendoza

Prix Lanterna Magica (CGS) : L’intervallo, de Leonardo Di Costanzo

Prix Open : The Company You Keep, de Robert Redford

Prix La Navicella – Venezia Cinema : Sinapupunan (Thy Womb), de Brillante Mendoza

Prix Lina Mangiacapre Award: La Reine de Montreuil, de Sòlveig Anspach

Prix AIF - FORFILMFEST : L’intervallo, de Leonardo Di Costanzo

Prix Souris d'or : Pieta, de Kim Ki-duk
Souris d'argent : Anton tut ryadom (Anton's Right Here), de Lyubov Arkus

UK- Italy Creative Industries Award – Best Innovative Budget Award : L’intervallo, de Leonardo Di Costanzo

Prix Gillo Pontecorvo - Arcobaleno Latino: Laura Delli Colli

Prix Christopher D. Smithers Foundation : Low Tide, de Roberto Minervini

Prix Interfilm pour la promotion du dialogue interreligieux : Wadjda, de Haifaa Al Mansour

Prix Giovani Giurati del Vittorio Veneto Film Festival : The Company You Keep, de Robert Redford
Mention spéciale à Toni Servillo

Prix Premio Cinematografico “Civitas Vitae prossima” : Terramatta, de Costanza Quatriglio

Prix Green Drop : La cinquième saison, de Peter Brosens et Jessica Woodworth

Venise 2012 : Pronostics (hasardeux) à quelques heures du Palmarès

Posté par kristofy, le 8 septembre 2012

Pour cette 69ème édition du Festival de Venise les films en compétition étaient au nombre de 18, lequel recevra le prestigieux Lion d’or ?

Si plusieurs films ont les préférences de la majorité (The Master, Pieta, Après mai…), les prix d’interprétation restent très ouverts.

Au jeu des pronostics, The Master qui domine le classement ; le film de Paul Thomas Anderson était d’ailleurs donné gagnant avant que le festival ne commence, et Joaquin Phoenix est aussi le favori pour le prix du meilleur acteur. Mais la règle veut qu’il n’y ait pas cumul de prix, le Lion d’or étant une récompense pour toute l’équipe du film (ainsi Mickey Rourke n’avait pas été meilleur acteur puisque The Wrestler avait reçu le Lion d’or).

Le président du jury Michael Mann est entouré des réalisateurs Peter Ho-Sun Chan, Ari Folman, Matteo Garrone, Pablo Trapero, de la réalisatrice Ursula Meier, des actrices Samantha Morton, Laetitia Casta, et de Marina Abramovic. On devine que ces 9 personnalités vont sans doute aller vers un compromis qui réservera des surprises, en déjouant le buzz des festivaliers. Il est possible que le jury choisisse de récompenser Joaquin Phoenix et Paul Thomas Anderson, auquel cas le Lion d'or serait attribué à un autre film, moins attendu. Dans le cas contraire, PTA alignerait le 4e Lion d'or américain des années 2000, après Le secret de Brokeback Mountain, The Wrestler et Somewhere.

Et sinon? A qui la plus haute récompense irait ? Un film capable de faire consensus à la fois pour son audace formelle et pour l'émotion que dégagerait son histoire. Le jury mettrait en avant comme justifications l'humanité des sentiments et une ouverture sur le monde...

Selon les critiques interrogés à Venise et répertoriés dans un classement quotidien, cinq films sont en haut de la liste : Après mai Olivier Assayas (ce qui serait le premier Lion d'or pour la France depuis Au revoir les enfants en 1989), The Master donc, le controversé film sur l'euthanasie, La belle endormie de Marco Bellocchio (l'Italie n'a reçu aucun Lion d'or depuis 1998), Pieta de Kim Ki-duk (ce serait son plus grand prix, 8 ans après son Lion d'argent du Meilleur réalisateur à la Mostra pour Locataires et le premier Lion d'or sud-coréen), et Thy Womb de Brillante Mendoza.

Globalement, Venise a tenu ses promesses avec une compétition resserrée mais de bonne qualité. Les films américains présentés sur le Lido étaient bien supérieurs à ceux qui ont envahit la Croisette. Les rares films asiatiques ont séduit les cinéphiles. Et des cinéastes européens comme Assayas, Bellocchio ou Sarmiento ont su alimenter le débat et plaire aux festivaliers.

Osons donc un pronostic, qui n'engage que son auteur :

- Lion d'or du meilleur film : Thy Womb, de Brillante Mendoza
- Lion d'argent du meilleur réalisateur : Paul Thomas Anderson, pour The Master
- Prix Spécial du Jury ex-aequo : Pieta, de Kim Ki-duk & Après mai d'Olivier Assayas
- Coupe Volpi pour la meilleure interprétation masculine : Joaquin Phoenix, dans The Master
- Coupe Volpi pour la meilleure interprétation féminine : Franziska Petri, dans Izmena (Betrayal)
- Prix Osella pour le meilleur scénario : Fill the void, de Rama Burshtein
- Prix Marcello Mastroianni de la révélation meilleur(e) jeune interprète : Giulia Valentini, dans Un giorno speciale
- Prix Osella pour la meilleure contribution technique : Benoît Debie, pour Spring breakers

Venise 2012 : Passion, quand Brian De Palma s’approprie Alain Corneau

Posté par kristofy, le 7 septembre 2012

Le nouveau film de Brian De Palma arrive comme le dernier évènement des films en compétition de ce 69ème Festival de Venise. Passion raconte une histoire déjà connue pour les francophone puisqu’il s’agit en fait du remake de Crime d’amour, dernier film d'Alain Corneau, qui avaita ttiré près de 500 000 spectateurs dans les salles françaises en 2009. Les grandes lignes du scénario sont semblables, mais Brian De Palma y ajoute quelques variations typiques de son univers.

Le décor est délocalisé en Allemagne (pour des raisons de coproduction on s'en doute), on y entend d’ailleurs quelques dialogues en allemand tandis que tous parlent en anglais. Les prénoms des deux héroïnes ont été conservés : Rachel McAdams devient Christine (Kristin Scott Thomas) et Noomi Rapace se mue en Isabelle (Ludivine Sagnier).

La différence d’âge et de stature qui mettait en avant un rapport hiérarchique entre elles se transforme ici en un contraste plus classique entre une blonde et une brune. Les rapport de domination-soumission sur le lieu de travail du film originel est toujours présent mais atténué dans cette nouvelle version. Brian De Palma privilégie beaucoup plus la séduction et la perversion, thèmes majeurs de sa filmographie.

Passion montre assez vite avec une charge érotique entre ces deux femmes avant de partir en direction du thriller. Brian De Palma y joue le marionnettiste en faisant évoluer ses personnages vers un meurtre que l'on attend ; il joue avec les faux-semblants pour enfin conclure avec un final un peu différent de Crime d’amour.

La ‘patte’ de Brian De Palma est omniprésente, il n'hésite pas à s'autociter, quitte à se répéter. On y trouve une séquence en split-screen (comme dans Carrie),  un plan d'une femme sous la douche avant d'être tuée (comme dans Blow out), l'usage d'une perruque (comme dans Pulsions), des images relevant de l’imagination (comme dans Femme fatale).

Le suspens de Passion est accompagné de la musique de Pino Donaggio, son compositeur habituel. Crime d’amour apparaît du coup comme un scénario qui semble avoir été écrit pour le cinéaste qui démontre à travers Passion , une nouvelle fois, toute la sophistication formelle de son cinéma. Ni plus, ni moins.