Annecy 2019: J’ai perdu mon corps triomphe

Posté par redaction, le 15 juin 2019

Un mois après son grand prix à la Semaine de Critique, le film d'animation J'ai perdu mon corps de Jérémy Clapin triomphe au Festival International du film d'Annecy. Le film, qui sortira en salles en novembre chez Rezo films (et sur Netflix dans une grande partie du reste du monde), confirme la bonne année du cinéma d'animation français, puisque le Cristal du court métrage (Mémorable, également prix du public dans sa catégorie) et le Cristal de la meilleure œuvre en réalité virtuelle sont aussi décernés à un film français. J'ai perdu mon corps a gagné aussi bien le Cristal du long métrage, la Palme d'or de l'animation, que le prix du public.

Longs métrages
Cristal du long métrage : J'ai perdu mon corps de Jérémy Clapin (France)
Mention du jury : Buñuel après l'âge d'or de Salvador Simo (Espagne / Pays-Bas)
Prix contrechamp : Away de Gints Zilbalodis (Lettonie)
Prix du public : J'ai perdu mon corps de Jérémy Clapin (France)

Courts métrages
Cristal du court métrage : Mémorable de Bruno Collet (France)
Prix du jury : Tio Tomás - A contabilidade dos dias de Regina Pessoa (Canada / France / Portugal)
Prix "Jean-Luc Xiberras" de la première oeuvre : La Pluie de Piotr Milczarek (Pologne)
Mention du Jury : Pulsión de Pedro Casavecchia (Argentine / France) - My Generation de Ludovic Houplain (France)
Prix du public : Mémorable de Bruno Collet (France)

Courts métrages de fin d'études :
Cristal du film de fin d'études : Daughter de Daria Kashcheeva (République tchèque)
Prix du jury : Rules of play de Merlin Flügel (Allemagne)
Mention du jury : These Things in My Head – Side A de Luke Bourne (Royaume-Uni)

Réalité virtuelle
Cristal de la meilleure oeuvre : Gloomy Eyes de Jorge Tereso et Fernando Maldonado (Argentine / France)

Courts métrages "Off-Limits" :
Prix du film "Off-Limits" : Don't Know What de Thomas Renoldner (Autriche)

Films de télévision et de commande :
Cristal pour une production TV : Panique au village "La Foire agricole" de Vincent Patar et Stéphane Aubier (Belgique)
Prix du jury pour une série TV : Le Parfum d’Irak "Le Cowboy de Fallujah" de Léonard Cohen (France)
Prix du jury pour un spécial TV : La vie de château de Clémence Madeleine-Perdrillat et Nathaniel H'Limi (France)
Cristal pour un film de commande : Ted-Ed "Accents" de Roberto Zambrano (Australie, Etats-Unis)
Prix du jury : #TakeOnHistory "Wimbledon" de Smiths and Foulkes

Prix André Martin :
Pour un long métrage français : Le procès contre Nelson Mandela et les autres de Nicolas Champeaux et Gilles Porte
Pour un court métrage français : Mon juke-box de Florentine Grelier
Mention pour un court métrage français : Flow de Adriaan Lokman

Décès du cinéaste italien Franco Zeffirelli (1923-2019)

Posté par vincy, le 15 juin 2019

Franco Zeffirelli est mort à l’âge de 96 ans ce samedi 15 juin, à Rome. Le cinéaste italien, né d’une union illégitime entre un marchand de textile et une dessinatrice de mode, a été placé par sa mère dans un orphelinat.

Descendant de Leonard de Vinci, nommé Zeffiretti en hommage à Mozart, il sera placé chez une britannique exilé en Toscane, qui l’initiera à Shakespeare. S’il est destiné à l’architecture, c’est le théâtre qui va le happer. Jeune et blond, il joue Les parents terribles de Jean Cocteau, mis en scène par Luchino Visconti, qui succombe à son charme. Il en fait son assistant pour La Terre tremble en 1948, Bellissima en 1951, Senso en 1954, ainsi que son décorateur sur deux pièces.

La Callas, de Maria à Fanny

Amant et collaborateur du maître Visconti, on imagine que les relations ont été mouvementées. Au moins, il apprend le métier. Jusqu’en 1956, où les ambitions de Zeffirelli l’emportent sur les passions de Visconti. Ils se fâchent sur Verdi et la Callas, jusque là mise en scène par Luchino et que Franco lui « volera » les années suivantes en filmant les opéras La Traviata, Tosca et Norma. En attendant le tour de Pasolini pour glorifier la diva…

Le cinéma, il n’y vient qu’en 1967. Réputé pour la scène, il entre dans la cour des grands dès son premier long métrage, La Mégère apprivoisée, avec Elizabeth Taylor et Richard Burton. Deux nominations aux Oscars, trois Donatello. Il enchaîne avec Roméo et Juliette, triomphe malgré la polémique (les deux acteurs y apparaissent nus, alors qu'ils n'étaient pas majeurs), couronné par deux Oscars en plus de deux nominations pour Zeffirelli (film et réalisateur). Les Donatello le sacre meilleur cinéaste de l’année. Shakespeare est toujours son influence majeure (Othello en opéra avec Placido Domingo en 1986, et en compétition à Cannes, et Hamlet avec Mel Gibson en 1990).

Zeffirelli va chercher dans la littérature et les arts étrangers son inspiration : que ce soit les opéras Pagliacci ou La Traviata (et en bonus une nouvelle nomination aux Oscars pour la direction artistique) avec Placido Domingo, Jane Eyre avec Charlotte Gainsbourg en 1996 ou l’audacieux et séduisant Callas Forever avec Fanny Ardant en 2002.

Homo anti mouvement gay, catho anti IVG

Pourtant c’est ailleurs que ses œuvres les plus personnelles surgissent. Dans une vision un peu réactionnaire à l’époque, à ses origines, à sa propre vie. De droite, ce qui n’est pas forcément un atout pour se faire aimer par les milieux culturels italiens, et fervent croyant, Franco Zeffirelli écrit aussi des films empreints de religiosité. En 1972, il signe François et le Chemin du soleil, hymne à Saint François d’Assise, qui lui vaut son deuxième Donatello du meilleur réalisateur. Cinq ans plus tard, il réalise une minisérie luxueuse et hollywoodienne sur Jésus de Nazareth. Il aime le spectacle, le baroque, les dorures pour mieux respecter les récits. A la manière d’un peintre de la Renaissance.

Adoubé par le Vatican, le cinéaste était ouvertement contre l’avortement. Il fut sénateur sous l’étiquette du parti de Silvio Berlusconi. Réélu en 1996, il se décide à faire son coming out, tout en restant discret sur sa vie privée et en critiquant le « mouvement gay » puisque selon lui "l'homosexuel n'est pas quelqu'un qui tremble et se maquille. C'est la Grèce, c'est Rome. C'est une virilité créatrice."

Sans doute pensait-il à l’image du père boxeur dans son film Le Champion (avec Jon Voight et Faye Dunaway). Sans doute avait-il mal vécu ses premières passions à l’instar de celle d’Un amour infini (avec Brooke Shields). On retrouve cette conflictualité intérieure dans Mémoire d’un sourire en 1993. Une jeune fille prête à entrer au couvent tombe amoureuse d’un jeune homme. Partagée entre son amour pour Dieu et celui pour l’étudiant, qui décide finalement de se marier avec une autre. Comme on comprend son âme florentine, son orgueil et son amour de la musique à travers Toscanini, où un jeune musicien est divisé entre deux mondes, celui de la compassion et celui des honneurs.

Mais c’est Un thé avec Mussolini qui est le plus personnel. Il assume la partie autobiographique de cette histoire où un groupe de femmes anglaises distinguées et "shakespearophiles" – Cher, Maggie Smith, Judi Dench, Joan Plowright, Lily Tomlin… - voient l’Italie sombrer dans le fascisme.

Finalement, c’est l'esthète Zeffirelli qui s’éclipse au moment où l’Italie n’est plus aussi raffinée que lui.