Edito: Chaleur humaine

Posté par redaction, le 19 janvier 2017

OMG! Il fait (très) froid. Et on ose nous parler de record de chaleur sur la planète en 2016! En même temps, du grand froid en hiver, c'est assez normal. Toujours est-il que pour se réchauffer, rien ne vaut une bonne salle de cinéma. Un multiplexe en Bosnie à Zenica a proposé des séances gratuites, avec le soutien de quatre distributeurs locaux. Les spectateurs de cette ville qui a subit une coupure d'électricité massive avaient le droit de découvrir des films européens, en plus de boire un thé chaud.  Dans un premier temps, cette opération était réservée à l'une des salles du complexe, du lundi au vendredi, lors des trois séances de matinée et d'après midi. Elle fut ensuite prolongée d'une semaine, avec des films européens à redécouvrir.

Et même si on paye les séances, le cinéma permet de s'évader au soleil, tout en se réchauffant au contact des autres: celui de la Floride dans Live by Night, celui de la campagne française d'Un sac de billes, celui de Marseille dans Corniche Kennedy, celui du Chili dans Neruda, celui du Texas dans Nocturnal Animals... Aucune vitamine D assurée. Mais au moins la température monte de quelques degrés.

En ce début d'année, où les films endeuillés se ramassent à la pelle (Manchester by the Sea, Dalida, Fleur de Tonnerre, Jackie à venir), on attend avec impatience le lumineux, coloré et romantique La La Land. Car, du fabuleux Moonlight à l'aventureux Premier contact, de Lion à 20th Century Women, en passant par les sus nommés Manchester by the Sea, Jackie et La La Land, le cinéma américain indépendant s'avère en pleine forme, et bien plus singulier, intéressant et passionnant que la plupart des productions à Oscars des studios. Le temple du cinéma indépendant c'est Sundance, qui, justement, se lance aujourd'hui,  la veille de l'investiture de Donald Trump. Un Festival qui sera par conséquent, sous le signe de la résistance. Et nul ne doute que le 7e art échauffera les voix et fera monter le désir...

Pas besoin de chauffage ou de soleil, avec tous ces films, l'hiver est réconfortant. La machine à rêves fonctionne à plein régime, sans mettre en péril les ressources énergétiques. Avec de si belles histoires, tragiques ou enchanteresses, aller au cinéma c'est comme s'installer devant une cheminée, avec son plaid et un bon livre, pendant que, dehors, le froid polaire règne.

6 questions à Danis Tanovic (La femme du ferrailleur)

Posté par cynthia, le 14 mars 2014

danis tanovic berlinale 2013

N'ayant pas pu venir dans notre capitale parisienne dû aux conflits que connait en ce moment sa Bosnie natale, Danis Tanovic réalisateur de No man's Land (Oscar du meilleur film en langue étrangère) et de La femme du ferrailleur, actuellement en salles, s'est prêté au jeu du questions/réponses par mail. La femme du ferrailleur, Grand prix du jury à la Berlinale 2013, est le récit d'un homme qui doit trouver une somme considérable pour que son épouse puisse se faire soigner à l'hôpital.

Ecran Noir: Votre film est littéralement un fait réel, comment avez-vous connu cette triste histoire?

Danis Tanovic: J'ai lu un article dans un journal local sur ce qui leur était arrivé, et ça m’a révolté. Je suis donc allé à leur rencontre, sans savoir d’idées précises en tête. Tout ce que je savais, c’est que je voulais faire un film de leur histoire, mais j’ignorais encore quel genre de film. Leur histoire m'a ému parce que, au delà de l'aspect tragique, il y a une immense tendresse et beaucoup d'amour entre-eux, et finalement c'est ce qui reste à la fin, l'amour et l'amitié.

EN: L'équipe du film est novice, cela a-t-il été difficile de diriger des apprentis acteurs?

Danis Tanovic: Il y a des amateurs qui sont très naturels et d'autres non. Je ne saurais pas dire si c'est plus difficile ou si je préfère diriger des amateurs ou des professionnels, c'est juste très différent. Je ne peux pas faire certaines choses avec des amateurs que j'aurais fait avec des professionnels, ça c'est sûr.

EN:  Sur un plan technique, pourquoi avez-vous choisi de filmer votre film avec une Canon 5D Mark? Pourquoi en si peu de temps? Neuf jours de tournage je crois...

Danis Tanovic: Nous n'avions que 17 000 euros de budget, impossible de faire autrement. J'utilise cet appareil pour faire des photos et par chance, mon directeur de la photographie et le directeur de production avaient le même. Entre avoir une caméra beaucoup plus précieuse qui demande plus d'investissement et trois appareils photos déjà disponibles, nous n’avons pas hésité longtemps. Ce dispositif permettait également de les intervertir facilement à cause des conditions de tournage, et notamment le froid. Elles ne sont pas parfaites mais quand vous tournez à moins 13 ou moins 15 degrés, il ne faut pas être trop difficile!

EN : Quel souvenir vous garder de ce tournage ?

C'était un moment très fort pour moi. J'ai aimé ce sentiment d'amitié sur le tournage, avec l'équipe, Nazif et Senada. J'ai dû demander à beaucoup de techniciens de travailler sans être payés et ils ont participé à l'aventure parce qu'ils pensaient que c'était la chose à faire, beaucoup de gens se sont mobilisés autour du film pour nous aider, juste par conviction.

EN: La discrimination qui touche vos personnages est-elle fréquente dans le domaine médical en Bosnie ?

Danis Tanovic: Il y a une semaine, j'ai lu la même histoire, une femme à qui on a refusé des soins et qui a failli mourir. C'est une des raisons pour lesquelles ce film a tellement voyagé, c'est une histoire universelle. Je viens de rentrer des États-Unis (du MoMA où il a présenté son oeuvre) où le film a été aussi très bien accueilli. C'est malheureusement une histoire qui n'est pas cantonnée à la Bosnie, et que l'on peut retrouver partout.

EN:  Quel message voulez-vous véhiculer à travers La femme du ferrailleur ?

Danis Tanovic: Il n'y a pas de message, je ne veux pas imposer ma vision messianique. Je cherche plutôt à poser des questions, je ne donne pas de message, c'est plutôt ça que j'aime faire, poser des questions : à vous de trouver les réponses !