Animation: Prima Linea liquidée

Posté par vincy, le 1 mars 2020

Un choc avant le lancement du Cartoon Movie cette semaine à Bordeaux. Le studio Prima Linea, l'un des plus réputés dans l'animation, vient de fermer, selon les informations du Film Français. C'est d'autant plus un choc que le studio de production est nommé parmi les producteurs de l'année au Cartoon Movie pour La Fameuse invasion des ours en Sicile de Lorenzo Mattotti. Le film était en lice pour le César du meilleur long métrage d'animation et avait été présenté à Un certain regard au dernier festival de Cannes.

La société a été liquidée par le Tribunal de commerce de Paris le 7 février, 25 ans après sa création par Valérie Schermann et Christophe Jankovic. Le studio était à l'origine de films tels Loulou et autres loups, U, Zarafa, Loulou l'incroyable secret...

La fameuse invasion des Ours en Sicile aura eu raison des ambitions de Prima Linea. Le film a coûté 11 millions d'euros et n'a attiré qu'un peu plus de 400000 entrées dans le monde.

L'animation hors-Hollywood en crise

Cette faillite illustre une fois de plus le problème de l'animation. Secteur a priori porteur, les films qui ne répondent pas à des standards esthétiques (3D) ou marketing (public familial) souffrent : le public semble limité. Malgré ses prix, et même une nomination aux Oscars et un grand prix de la semaine de la critique à Cannes, J'ai perdu mon corps n'a pas dépassé les 160000 entrées en France. Les hirondelles de Kaboul a atteint les 320000 spectateurs. Pas assez pour être rentables.

Comme pour le cinéma de genre, les distributeurs ne parviennent pas à séduire le public pour des productions françaises, et les exploitants n'arrivent pas à positionner ces films.

Le film d'Hazanavicus pas menacé

Cet état des lieux assez sombre pour les producteurs indépendants de films d'animation, alors que les plateformes de streaming investissent de plus en plus dans le format et que les productions hollywoodiennes s'octroient plus que 80% de parts de marché (quand il y a un Astérix ou un Ghibli, sinon davantage), devra faire réagir les financeurs et l'ensemble de l'industrie. Nul ne doute que la faillite de Prima Linea envoie un message au Cartoon Movie et devra être débattu à Annecy en juin.

Lire aussi la tribune de Francis Gavelle: Vers un label "Animation"

Valérie Schermann et Christophe Jankovic poursuivent malgré tout l'activité de 3.0 Studio, studio prestataire à qui l'on doit La Tortue rouge, en collaboration avec le studio Ghibli, et qui prépare l'adaptation par Michel Hazanavicius du roman de Jean-Claude Grumberg, IBa plus précieuse des marchandises. Ils ont aussi fabriqué la séquence en animation 2D du film de Wes Anderson, The French Dispatch.

Le Cartoon Forum 2019 fait le plein de projets pour son 30e anniversaire

Posté par MpM, le 15 septembre 2019

Pour son 30e anniversaire, le Cartoon Forum, unique plateforme de coproduction dédiée aux séries d’animation européennes, accueille 1000 professionnels venus à Toulouse pour découvrir 85 projets en provenance de 24 pays, dont la France (24 pitchs, et 31 en comptant les coproductions), la Belgique (9) et l'Allemagne (7) mais aussi l'Ukraine, la Macédoine, l'Estonie ou encore la Hongrie. Outre les producteurs, investisseurs, distributeurs et acheteurs traditionnels seront présentes cette année plusieurs plateformes SvoD/VoD telles que Netflix, WarnerMedia, Playkids or Hopster TV.

Une part écrasante des projets s'adresse au jeune public : 50% aux 6-11 ans et 29% aux 2-6 ans. Moins de 10% s'adressent à un public d'adultes ou jeunes adultes. Dans la grande majorité, il s'agit également de séries de courtes durées (moins de 11 minutes pour plus de la moitié des séries et seulement 5 "unitaires" de 26 minutes). Côté budget, il y en a globalement pour tous les porte-monnaie, avec 15 projets à moins d'un million d'euros, 44 entre 1 et 5 millions, 31 entre 5 et 9 millions, et 1 projet à plus de 10 millions.

Parmi l'offre foisonnante de projets présentés durant les trois jours du forum, on a d'ores et déjà repéré plusieurs adaptations d'univers connus : une nouvelle série 3D basée sur l’univers du Marsupilami, avec le réalisateur Philippe Vidal (Garfield & Cie, Boule & Bill…) aux manettes ; 26 épisodes de 26 minutes inspirés de l'incroyablement attendu long métrage Calamity, une enfance de Martha Jane Cannary de Rémi Chayé ; un projet de 50 minutes tiré des bandes-dessinées Hôtel étrange de Katherine & Florian Ferrier ou encore Lip, des Héros Ordinaires (d'après la bande dessinée de Laurent Galandon), première épisode d'une série intitulée "Luttes"

Depuis sa création, le Cartoon Forum a aidé 782 séries d’animation à obtenir des financements pour atteindre plus de 2,7 milliards d’euros. En parallèle, l’animation européenne est devenue leader sur son propre territoire, avec la France et son dynamisme exceptionnel, que cela soit sur le plan de la création comme de la formation, en incontournable figure de proue.
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Cartoon Forum 2019
Du 16 au 19 septembre

Cartoon Forum 2018 : nos projets d’unitaires télé préférés

Posté par MpM, le 19 septembre 2018

Parmi les nombreux projets découverts pendant les trois jours du Cartoon Forum 2018, certains ont plus particulièrement retenus notre attention, en toute subjectivité. Il n'y a plus qu'à espérer, maintenant, qu'ils verront le jour ! Petit tour d'horizon des "unitaires" (c'est-à-dire des courts métrages indépendants, qui ont toutes les chances de bénéficier d'une sortie en salles en plus de leur diffusion télé) que l'on attend avec impatience !

*** Opération Père Noël (Folimage et Lunamine) ***


Réalisateur : Marc Robinet / Auteur : Alain Gagnol

Pour qui ? : un public familial
De quoi ça parle ? : Un petit garçon trop gâté réclame pour Noël... le Père Noël lui-même. Lorsqu'il se rend compte de son erreur, il fait tout pour la réparer et sauver la magie de Noël.

Pourquoi on aime : Après L'enfant au grelot en 2004 et Neige et les arbres magiques en 2015, Folimage est de retour avec un nouveau court métrage de Noël, qui devrait comme les précédents bénéficier d'une sortie en salles. Avec Alain Gagnol au scénario et Samuel Ribeyron au graphisme, le projet part sous les meilleurs auspices, malgré une intrigue plutôt classique. Le travail sur les ambiances (notamment de neige et de brouillard) et l’utilisation de techniques mixtes (dessins et papiers découpés) laissent espérer une oeuvre poétique et délicate, formellement aboutie.

*** Tufo (Les contes modernes et Showlab) ***


Réalisatrice : Victoria Musci (qui avait réalisé Giggino 'o Bello lors de son cursus à la Poudrière)

Pour qui ? : public familial

De quoi ça parle ? : Il s'agit de l'histoire vraie de Ignazio Cutro, un entrepreneur sicilien qui s'est opposé à la Mafia pendant des années et a réussi à leur tenir tête malgré les menaces contre sa famille.

Pourquoi on aime : Tufo est un projet ambitieux qui se démarque largement des projets généralement plus légers présentés lors du Cartoon. En mettant en scène le combat héroïque d'Ignazio Cutro, aujourd'hui encore sous protection permanente, la jeune réalisatrice Victoria Musci aborde en effet un sujet d'actualité brûlant, avec l'espoir de montrer que les choses peuvent changer. Ses choix formels (notamment l'idée d'utiliser des images en prise de vues réelles comme arrière-plan) laissent présager un film complexe et puissant.

*** Maman pleut des cordes (Laïdak Films et Dandeloo) ***


Réalisateur : Hugo de Faucompret (qui avait réalisé Automne dans le cadre de la collection "En sortant de l'école" consacrée à Apollinaire)

Pour qui ? : Les 6-11 ans

De quoi ça parle ? : Jeanne passe les vacances chez sa grand-mère pendant que sa maman, qui est dépressive, se soigne. La petite fille se plaît dans son nouvel environnement et se fait de nouveaux amis, mais lorsqu'elle comprend qu'elle peut aider sa mère à aller mieux, elle décide de partir la chercher.

Pourquoi on aime : Sur le papier, Maman pleut des cordes est à la fois touchant et drôle, mais surtout assez mystérieux avec ses personnages étranges et son graphisme singulier. Le mélange des genres (le drame intime, l'insouciance de l'enfance, le climat fantastique) est une prise de risque qu'il faut saluer, surtout dans le cadre d'une fiction à destination du jeune public.

*** A bear named Wojtek (The illuminated Film Company et Filmograf) ***


Réalisateur : Iain Gardner

Pour qui ? : un public familial

De quoi ça parle ? : Il s'agit d'une histoire vraie, celle de Wojtek, un ours syrien adopté par des soldats polonais pendant la deuxième guerre mondiale, qui combattit avec eux sur le front, et termina sa vie au Zoo d’Édimbourg.

Pourquoi on aime : Plus qu'une histoire de guerre, le projet s'attache à raconter l'amitié qui lia Wojtek avec Peter Prendys, l'un des soldats de son bataillon, et de proposer un message d'espoir et de fraternité en une période troublée de repli sur soi et de rejet de l'autre. Pour la société polonaise Filmograf qui est à l'origine du projet, Wojtek, qui fait partie de l'Histoire nationale polonaise, peut aujourd'hui plus que jamais être le symbole d'une forme d'ouverture et d'appel au vivre ensemble. Visuellement, le court métrage s'annonce somptueux, avec un important travail réalisé sur les couleurs (vives) et les textures duveteuses et foisonnantes obtenues à l'aide de craies et peintures traditionnelles sur papier.

*** Noah's tree (FilmFabriq) ***


Réalisateur : Peter Vacz (dont on avait adoré le court métrage Le lapin et le cerf, sorti en programme dans Les animaux farfelus en 2015)

Pour qui ? : un public familial

De quoi ça parle ? : Noah (10 ans) vit très mal les disputes permanentes de ses parents, et souffre d'anxiété chronique qui se manifeste par de violentes douleurs dans la poitrine. Après une crise de panique, il se retrouve dans une forêt magique où les arbres sont capables de parler...

Pourquoi on aime : Le nouveau projet de Peter Vacz est extrêmement personnel puisqu’il s’inspire de sa propre famille à travers une intrigue qui mêle éléments dramatiques, motifs de comédie et contexte fantastique. Réalisé avec des marionnettes, dans une animation qui se veut à la fois réaliste et stylisée, il abordera notamment les risques du repli sur soi et la nécessité d’exprimer ses émotions. Forcément intrigant.

Cartoon Forum 2018 : nos projets de séries animées préférés

Posté par MpM, le 18 septembre 2018

Parmi les nombreux projets découverts pendant les trois jours du Cartoon Forum 2018, certains ont plus particulièrement retenus notre attention, en toute subjectivité. Il n'y a plus qu'à espérer, maintenant, qu'ils verront le jour ! Petit tour d'horizon des séries animées que l'on attend avec impatience.

*** GloboZone (Umanimation) ***


Format : 52 épisodes de 2 minutes

Pour qui ? : public adulte ou jeune adulte

De quoi ça parle ? : GloboZone se passe dans un bâtiment connecté et entièrement automatisé dont les employés ne sortent jamais. Il est un personnage à part entière, lieu aseptisé mais parfait qui pourvoie aux besoins de chacun. Les deux principaux protagonistes sont le chef de la sécurité et un chef de service qui créent de la dissidence par la musique.

Pourquoi on aime : L'épisode pilote montre les deux héros aux prises avec la machine à café qui tombe en panne. Leurs stratagèmes pour la séduire sont particulièrement drôles, et donnent le ton de la série qui se veut une satire de notre société ultra-connectée. L'absence de dialogue, la fantaisie absolue permise par l'automatisation à outrance, l'importance accordée à la musique et le format très court laissent à penser que la série peut devenir un rendez-vous décalé entre deux programmes.

*** Les qui quoi (Silex Films et Doncvoilà Productions) ***


Format : 52 épisodes de 7 minutes

Pour qui ? : les 4-5 ans

De quoi ça parle ? : Il s'agit de l'adaptation d'une série de livres pour enfants signés Laurent Rivelaygue et Olivier Tallec chez Actes sud junior. Six amis (qui mêlent indifféremment animaux et enfants) se propulsent dans leur imaginaire grâce au crayon magique de l'un d'eux.

Pourquoi on aime : L'adaptation proposée par Joris Clerté (réalisateur de La nuit américaine d'Angélique) et Pierre-Emmanuel Lyet (Pierre et le loup) reprend l'esthétique épurée des livres pour se concentrer sur l'histoire et les personnages. Son ambition est d'aborder l'animation jeunesse autrement, en suivant les petits héros dans leur univers fantaisistes. Chaque épisode abordera ainsi une problématique bien concrète (un déménagement, le désir d'avoir un animal de compagnie...), explorée à travers un jeu d'aventures.

*** Notfunny (Nichtlustig) ***


Format : 25 épisodes de 15 minutes

Pour qui ? : public adulte ou jeune adulte

De quoi ça parle ? : En 2000, Joscha Sauer a publié un dessin humoristique par jour sur son site internet. Des livres, du merchandising et un court métrage ont suivi. Il souhaite désormais adapter son univers corrosif et satirique dans un format pour la télévision, dans lequel cinq personnages principaux se croiseraient à chaque épisode, réunis par un élément de l'intrigue.

Pourquoi on aime : Joscha Sauer définit lui-même son projet comme un mélange de Pulp fiction et des Monty Python, ce qui est immédiatement prometteur, d'autant que ses comic strip ironiques et parfois cruels, bourrés d'humour plus ou moins noir, correspondent on ne peut mieux à la description. Parmi les personnages que met en scène la série (dont deux épisodes sont déjà produits), on retrouve notamment une famille de lemmings qui veut tout le temps se suicider, une fratrie de yétis, ou encore la Mort, qui est en couple gay avec un mouton rose. Irrésistible.

*** Rabbit from a tin hat (Origin Tales) ***


Format : 12 épisodes de 11 minutes

Pour qui ? : public adulte ou jeune adulte

De quoi ça parle ? : Il s'agit d'un documentaire animé sur les moments forts de l'Histoire, guerre ou crises internationales, durant lesquels l’ésotérisme et la parapsychologie ont été utilisés.

Pourquoi on aime : Ce projet serbe est probablement l'un des plus singuliers présentés lors de cette édition du Forum. Loin d'être un mockumentary, il se veut une plongée documentée dans les tentatives "institutionnelles" de recourir au paranormal. Les différents épisodes, qui suivront chacun un personnage et un fait en particulier, aborderont par exemple le projet "Stargate", la recherche de mines avec des bâtons de sourcier au Vietnam, ou encore les "travaux" de l'astrologue officiel du IIIe Reich. Visuellement, la série se démarque avec le choix du noir et blanc et d'un mélange de techniques de photo-collage et de peinture.

*** Woolly Woolly (Normaal et Groupe PVP) ***


Format : 78 épisodes de 7 minutes

Pour qui ? : les 4-5 ans

De quoi ça parle ? : Connaissez-vous MochiMochi Land ? Sur ce site acidulé, l'Américaine Anna Hrachovec partage ses créations réalisées en tricot : animaux, décors... et des petits personnages qui ressemblent à des gnomes. Ce sont eux qui, sur une idée un peu folle de la société de production Normaal, seront les héros de la série.

Pourquoi on aime : Une série entièrement animée en laine, ce n'est pas courant ! L'univers joyeux et coloré d'Anna Hrachovec se prête particulièrement bien au ton loufoque et bourré de fantaisie de Woolly Woolly. Ainsi, les personnages sont tous identiques (hommes et femmes portent une barbe) à l'exception de leurs bonnets, qui leur permettent justement de changer de genre à volonté. Leurs aventures, forcément mignonnes et décalées, se dérouleront sur une journée unique, et les amèneront à relever le défi lancé (en voix-off) par des enfants-narrateurs. Une comédie visuelle poétique et légère parfaitement adaptée aux plus petits, mais qui pourrait aussi séduire leurs parents, charmés par tant de mignonnerie.

*** Selfish (Kazak Productions) ***


Format : 30 épisodes de 2 minutes 30

Pour qui ? : public adulte ou jeune adulte

De quoi ça parle ? : Selfish suit le quotidien de quatre poissons hyper connectés vivant à Clamville, accros à des applications comme Tuba ou SaShiMe.

Pourquoi on aime : Forcément satirique, la série est pensée comme une succession de courtes capsules qui dressent un portrait au vitriol de ces drôles de créatures étranges, esclaves de leurs smartphones et autres applications, que nous sommes en train de devenir. L'univers marin est parfaitement exploité, de la murène qui fait la police aux innombrables jeux de mots qui émaillent le récit (shellphone, squidora, crabot...), et les premières images donnent envie de devenir rapidement accro à la série.

*** Dans ta face (Doncvoilà Productions et Bridges) ***


Format : 30 épisodes de 1 minute

Pour qui ? : public adulte ou jeune adulte

De quoi ça parle ? : Chaque épisode présente un contexte d'agression ou de harcèlement, et la répartie verbale qui permet à l'agressé de retourner la situation.

Pourquoi on aime : En partant du principe que l'on est toujours le "trop" de quelqu'un, Virginie Giachino a imaginé une série intelligente et drôle qui parle du harcèlement en général, qu'il touche l'apparence, la couleur de peau, l’orientation sexuelle, l'âge ou les tenues vestimentaires. En fonction des épisodes, les lieux et les motifs d'agression varient, mais le principe reste le même : ridiculiser l'agresseur et permettre à l'agressé de partir la tête haute, mais aussi combattre les préjugés et mettre en exergue leur bêtise, le tout avec une grosse dose d'humour. Un projet qui devrait être reconnu d'utilité publique.

*** Zouk, la petite sorcière avec une grande personnalité (Bayard jeunesse animation et Normaal) ***


Format : 52 épisodes de 11 minute

Pour qui ? : les 4-5 ans

De quoi ça parle ? : Cette adaptation d'une série d'albums de Serge Bloch et Nicolas Hubrecht pour Bayard jeunesse met en scène la petite sorcière Zouk, son copain Nono, un chat de gouttière et une citrouille qui parle, qui vivent ensemble de grandes aventures magiques.

Pourquoi on aime : Dans un univers ludique et joyeux, la petite sorcière et ses copains sèment la pagaille et doivent trouver des solutions plus ou moins orthodoxes pour tout réparer. Avec ses personnages hauts en couleurs (un ogre, des lutins, un drachon, mélange de dragon et de cochon...), son vieux manoir biscornu au milieu des gratte-ciels ultra modernes de la "très grande ville" où se déroule l'histoire, et ses thématiques quotidiennes et ludiques, Zouk a tout pour plonger les enfants dans un imaginaire plein de fantaisie et d'imagination.

Cartoon Forum 2018 : l’animation TV entre dynamisme et incertitude

Posté par MpM, le 14 septembre 2018

Rendez-vous professionnel incontournable de la rentrée, le Cartoon Forum est le lieu idéal pour découvrir le ton et les tendances des programmes d'animation des années à venir. Pendant trois jours se succèdent en effet les présentations des projets de séries ou "unitaires" (ces programmes uniques qui ont un format court métrage) qui pourraient venir agrémenter les grilles des chaînes françaises et internationales en 2019 ou 2020. Ces présentations, qui rivalisent souvent d'humour et d'imagination, avec parfois décors, chorégraphies et même déguisements, sont destinées aux producteurs, diffuseurs et investisseurs susceptibles d'investir, et par là-même de faire aboutir les projets. Ce qui, sur ses 10 dernières années, a été le cas pour 44% d'entre eux.

Cette année, le Cartoon Forum s'est ouvert dans une ambiance pleine d'incertitude, suite à la décision du gouvernement (en juin dernier) de fermer la chaîne de télévision France 4, destinée à la jeunesse, et de ce fait toujours en demande de nouveaux programmes animés. Cette disparition annoncée d'une source importante de financement de l'animation intervient par ailleurs au moment où la chaîne Canal +, qui finance elle aussi largement le cinéma et la télévision, se porte mal, et alors que la prise de pouvoir de Netflix sur un nombre de croissant de programmes alimente inquiétudes et fantasmes.

Bien sûr, l'arrivée d'un nouveau financeur du secteur est une bonne nouvelle. Mais le statut particulier de Netflix, qui n'est pas contraint d'investir dans l'audiovisuel français, contrairement aux chaînes de télévision, fait grincer un nombre exponentiel de mâchoires. D'autant que l'on peut s'interroger sur le type de projets que la plate-forme de streaming consentira à financer : programmes formatés ou projets audacieux.

Cette tension générale, palpable dans les propos tenus par les professionnels, intervient justement à un moment où l'animation française semble ne s'être jamais portée aussi bien. Les studios recrutent pratiquement à flux tendus, et les élèves sortant de la centaine d'écoles (ou cursus) en animation sur tout le territoire viennent harmonieusement combler des besoins exponentiels. Probable corolaire de ce dynamisme, les budgets des productions semblent eux-aussi en hausse, peut-être notamment pour revoir à la hausse les salaires d'animateurs qui ont désormais le choix entre les projets, et n'acceptent plus de travailler dans n'importe quelles conditions.

Une situation florissante pour l'animation européenne en général que vient confirmer Marc Vandeweyer. "On croit dans les talents européens, dans la possibilité qu'ils ont de monter leurs propres projets, au lieu de seulement travailler pour ceux des autres." Mais lui aussi exprime son incertitude sur l'avenir. "J'espère que France Télévisions continuera de jouer son rôle de premier coproducteur européen, car une équipe de foot joue forcément moins bien sans son meilleur joueur." Quant à Netflix, dont la délégation était cette année plus forte que les années précédentes, "il faut attendre de voir ce qu'ils financent" déclare-t-il philosophiquement.

Quoi qu'il en soit, cette 2e édition a été l'occasion de constater l'arrivée d'une nouvelle génération de réalisateurs, souvent identifiés dans le monde du court métrage, comme Hugo de Faucompret (issu des Gobelins, et réalisateur d'Automne pour la collection En sortant de l'école consacrée à Apollinaire) ou Peter Vacz (réalisateur du fameux Le lapin et le cerf sorti en salles en 2015 dans le programme Les animaux farfelus), ainsi que de projets destinés à un public d'adultes ou de jeunes adultes (Selfish écrit et réalisé par Nicolas Trotignon & Mathieu Vernerie, qui se moque de nos addictions numériques ; Tufo de Victoria Musci, l'histoire vraie d'un Sicilien s'étant opposé à la mafia, ou encore Dans ta face de Ève Ceccarelli, qui lutte avec humour contre toutes les formes de harcèlement).

Reste bien sûr à savoir si les diffuseurs vont suivre cette tendance de séries animées pas forcément destinées aux enfants. Quoi qu'il en soit, on a très envie de découvrir rapidement certaines d'entre elles sur nos petits écrans, comme on vous l'expliquera prochainement dans un article sur nos différents coups de coeur.

Cartoon Forum 2018 : 83 projets d’animation à suivre

Posté par MpM, le 11 septembre 2018


Pour sa 29e édition qui débute ce mardi 11 septembre, le Cartoon Forum, unique plateforme de coproduction dédiée aux séries d’animation européennes, accueillera 950 participants venus du monde entier pour découvrir des projets en provenance d'une vingtaine de pays, dont la France (27 pitchs), l'Angleterre (9) et l'Allemagne (8) mais aussi l'Islande (1) et l'Ukraine (2).

Les 83 projets présentés, qui représentent un budget total de 341,3 millions d'euros, s'adressent majoritairement aux enfants (44% à la tranche d'âge 6-11 ans et 28% aux 2-6 ans), et encore très (trop ?) peu à un public adulte (7% ) ou adolescent (1%). Pour ce qui est des techniques d'animation, la 2D domine (40 projets) devant la 3D (28), le mélange des deux (10) et le stop-motion (5).

Le grand bonheur du Cartoon Forum, c'est bien sûr celui de la découverte et des coups de cœur, mais on a déjà repéré quelques projets séduisants sur le papier. Ainsi, on suivra de près Selfish écrit et réalisé par Nicolas Trotignon & Mathieu Vernerie (produit par Kazak productions), Looking for Santa écrit par Alain Gagnol et réalisé par Marc Robinet (Folimage), Mobilis, l'adaptation de 20 000 lieues sous les mers de Jules Verne par Raphael Granier de Cassagnac et Thomas Guerigen (Le regard sonore), le projet en stop motion Noah's tree de Peter Vacz (Filmfabriq) ou encore la nouvelle adaptation des aventures du super héros SamSam de Serge Bloch par Jean Regnaud et Tanguy De Kermel (Folivari).

Pour cette édition 2018, le pays à l'honneur est la Finlande, qui présentera notamment trois projets. Enfin, les traditionnels Cartoon Tributes seront décernés durant les trois jours du Forum. Il s'agit de prix récompensant les diffuseurs, investisseurs/distributeurs et producteurs "ayant eu une influence dynamique et positive sur l’industrie européenne de l’animation durant l'année". La France, la Finlande, l’Italie, l'Irlande et le Royaume Uni sont en tête des nommés dont voici la liste intégrale :

Diffuseur de l'année
Deakids | Italie
Finnish broadcasting company (YLE) | Finlande
Hopster | Royaume-Uni
Netflix | Etats-Unis
TF1 Unité Jeunesse | France

Investisseur/Distributeur de l'année
9 Story Distribution International | Irlande
Connectoon | Italie
Gaumont Distribution TV | France
Miam ! Animation | France

Producteur de l'année
Akkord Film Produktion | Allemagne
Ánima Kitchent Media | Espagne
Folimage | France
Ink and Light | Finlande / Irlande
The Illuminated Film Company | Royaume-Uni

Cartoon Movie 2018 : retour sur nos projets préférés

Posté par MpM, le 26 mars 2018

Les 8 et 9 mars dernier se tenait la 20e édition du Cartoon Movie, grand rendez-vous européen des professionnels du film d'animation.  Sur la grosse cinquantaine de projets en cours (sous forme de concept, en développement ou en production) présentés à cette occasion, nous en avons retenus douze dont nous espérons qu'ils atteindront un jour nos grands écrans.

Petit tour d'horizon des longs métrages d'après-demain.

* Allah n'est pas obligé de Zaven Najjar (Special Touch Studio, Paul Thiltges Distributions)


Pour son premier long métrage, le réalisateur, animateur et illustrateur Zaven Najjar adapte Allah n'est pas obligé d'Ahmadou Kourouma, prix Renaudot et Goncourt des Lycéens 2000. Dans un ton très libre, un enfant-soldat du Libéria de la fin des années 90 raconte son quotidien au cœur de la guerre civile. Pensé comme un road movie tragi-comique, le film mettra en scène le garçon et son ami, "féticheur en chef", deux pieds-nickelés pris dans les aléas de l'Histoire.

Le réalisateur a conservé le ton très spécifique du roman, à la fois drôle, émouvant et corrosif, qui permet de filtrer la dureté du contexte, au même titre que le travail réalisé sur l'animation, assez épurée, et constituée notamment de grands aplats de couleurs pastels avec des touches de couleurs vives.

Pourquoi on attend le film
On est assez curieux de découvrir comment le film relèvera le défi de transcrire à l’écran le ton si particulier du roman d'Ahmadou Kourouma, tout en lui apportant une forme de réalité forcément plus frontale du fait de la représentation concrète du contexte de guerre. Avec, à la clef, l'idée d'utiliser l'animation (encore trop souvent considérée comme une forme d'expression à destination du jeune public) pour aborder des événements tragiques et universels.

* Bunuel dans le labyrinthe des tortues de Salvador Simo (The glow animation studio, Submarine)


Le film de Salvador Simo est déjà très avancé, et on a pu en découvrir une dizaine de minutes à Bordeaux. Adapté du livre éponyme de Fermin Solis, il raconte un épisode particulier de la vie du cinéaste Luis Bunuel, le tournage du film Terre sans pain financé avec l’argent gagné à la loterie par son ami Ramon Acin.

Dans une forme assez classique, Bunuel dans le labyrinthe des tortues se concentre sur l’amitié indéfectible entre les deux hommes, et mêle la reconstitution du tournage aux véritables images tournées à l’époque par Bunuel. Ces archives offrent un contre champ frappant au récit et viennent en support à la démonstration de la prise de position de Bunuel contre la société. L’un des défis esthétiques du film est de reconstituer au plus près les lieux de l’époque, et d’incarner les rêves fantastiques de Bunuel dans des séquences que ne renierait pas le surréalisme.

Pourquoi on attend le film
C’est un aspect méconnu de l’œuvre éclectique de Bunuel qu’explore le film. Ce faisant, il revisite sa confrontation avec les réalités sociales les plus cruelles de son pays, et révèle un tournant capital dans l’œuvre du cinéaste.

* La Fameuse invasion des ours en Sicile de Lorenzo Mattotti (Prima Linea Productions)


Cette adaptation par l'illustrateur et auteur de BD Lorenzo Mattotti du seul roman jeunesse de Dino Buzatti est elle aussi à un stade assez avancé, et on a pu voir à Bordeaux de nombreuses images alléchantes du film qui s'annonce assez spectaculaire, avec pas loin de mille décors différents. Le rendu est assez lissé, avec des personnages relativement minimalistes, mais des paysages grandioses conçus dans de grands aplats de couleurs. Le réalisateur s'est inspiré des illustrations de Buzatti lui-même, et a ajouté au récit deux personnages féminins (les femmes étaient absentes du roman original).

C'est Thomas Bidegain et Jean-Luc Fromental qui se sont chargés de l'adaptation. Le film raconte comment, suite à l'enlèvement de son fils Tonio par des chasseurs, le roi des Ours décide d'envahir la Sicile. Mais Humains et Ours ne sont pas fait pour cohabiter.

Pourquoi on attend le film
En plus d'être une grande fresque pleine de couleurs et de rebondissements, La fameuse invasion des ours en Sicile parle de choses dures et réelles (la guerre, l'intolérance, le vivre ensemble) par le biais du merveilleux, et fait ainsi écho à sa manière à la situation mondiale.

* Le Noël des animaux d'Olesya Shchukina, Camille Alméras, Caroline Attia, Ceylan Beyoglu et Haruna Kishi (Les Valseurs)


Il s’agit d’un programme de cinq courts métrages conçus avec une identité visuelle commune, dans des techniques d’animation artisanales (2D, papiers découpés) et un rendu un peu rétro. Les films auront en commun les thématiques de Noël, des animaux et de l’hiver, dans une tonalité tendre et gaie.

La société Les Valseurs qui est à l’initiative du projet a fait appel à 5 réalisatrices ayant une expérience sur ce genre de techniques et d’univers : Olesya Shchukina, Camille Alméras, Caroline Attia, Ceylan Beyoglu et Haruna Kishi. Le programme est prévu pour Noël 2019.

Pourquoi on attend le film
C’est une jolie proposition de cinéma simple et tendre, mais pas mièvre, à destination des plus petits.

* Raven girl and the mother of the sea de Konrad Nuka Godtfresden (Angel Films)


Au stade du concept seulement, Raven girl and the mother of the sea mêle la mythologie du Groenland à la question fondamentale du changement climatique. L’héroïne est une petite fille qui a le pouvoir de se transformer en animal, et dont la mission est de sauver son village. Celui-ci est en effet menacé par la « mère de l’océan », exaspérée par la surpêche dans ses eaux. Le récit initiatique est ainsi très ancré dans une réalité contemporaine, où les enjeux environnementaux n'épargnent personne.

Pourquoi on attend le film
L’héroïne prise entre le monde moderne et celui des mythes ancestraux est a priori un personnage fort, susceptible d’initier intelligemment le spectateur au monde magique des anciennes légendes.

* The sea Wolf d'Emmanuel Gorinstein (Elda productions, Je suis bien content, Melusine Productions)


Autre adaptation ambitieuse, The sea Wolf s’attaque à un roman moins connu de Jack London (Le loup des mers) qui raconte comment un jeune journaliste enrôlé de force sur un bateau se retrouve en lutte avec son capitaine. À travers leur antagonisme, ce sont deux visions du monde qui s’opposent : d’un côté le respect de la justice et la protection des faibles, de l’autre la tyrannie et la loi du plus fort.

Le long métrage s’annonce comme un récit d’aventures mâtiné de quête initiatique, qui recherche la profondeur et la réflexion en plus du divertissement. Les quelques images présentées trahissent des choix esthétiques forts, entre modélisation 3D minutieuse du bateau et importance donnée aux visages des protagonistes, cadrés de près, comme pour souligner le duel qui s’annonce.

Pourquoi on attend le film
L’univers ultra romanesque de Jack London et le style graphique proposé forment un cocktail intrigant et prometteur.

* Slocum de Jean-François Laguionie (JPL Films)


Ce nouveau projet de Jean-François Laguionie (en parallèle de la suite au Château des singes, Le voyage du prince) s’annonce comme un film intimiste dans lequel les souvenirs de jeunesse du réalisateur serviront de cadre à la dramaturgie. Sur les bords de Marne, après guerre, un homme décide de construire un bateau dans son jardin. Son fils, avec lequel il a une relation complexe, pleine de pudeur et de non-dits, l’accompagne avec enthousiasme dans le projet, tout en découvrant le journal intime de Slocum (premier navigateur à avoir réalisé un tour du monde en solitaire sur un voilier).

Le scénario et l’animatique (maquette visuelle qui synchronise les images du story-board avec la bande-dialogues) se sont construits en même temps que la musique, et l’on a déjà pu découvrir de nombreuses belles images du projet conçu en gouache sur papier, de manière à laisser voir le grain. Jean-François Laguionie lui-même a avoué être de plus en plus attiré par « une image vraie », précisant :« C’est une question d’état d’esprit plus que de technique ».

Pourquoi on attend le film
L’histoire, ténue et intimiste comme c’était déjà le cas dans Louise en hiver, avec lequel Slocum formera d’ailleurs une sorte de diptyque, semble à priori d’une extrême sensibilité, portée par les magnifiques images-tableaux de Laguionie. La poésie sera indubitablement au rendez-vous.

* Unicorn Wars d'Alberto Vazquez (Autour de minuit, Uniko, Schmuby Productions, Abano Productions)


Attention, projet incontournable dans le monde de l’animation pour adultes et jeunes adultes ! Alberto Vazquez, le réalisateur multi-primé de Psiconautas et de Decorado, adapte son court métrage Sangre de Unicorno en un film de 85 minutes réalisé en animation traditionnelle.

Au cœur de la forêt magique, les gentils nounours et les jolies licornes s’entretuent dans une guerre terrible. Deux frères ennemis (des ours), se perdent après avoir échappé à l’embuscade qui a décimé toute leur patrouille. Commence pour eux un voyage réel et intérieur qui va mettre au jour leurs plus lourds secrets.

Pour nous donner une idée de l’ambiance de ce conte plutôt cauchemardesque qui mélange à la fois la religion, la nature et les relations hommes / femmes, Alberto Vazquez a précisé qu’il s’agirait en quelque sorte d’un mélange de Bambi, Apocalypse now et la Bible « trois de [ses] histoires de fiction préférées ».

Pourquoi on attend le film
Déjà parce que l’on a suffisamment aimé les précédents films d’Alberto Vazquez pour être prêt à le suivre sur n’importe quel projet. Mais surtout parce que cette guerre violente entre deux des créatures les plus mignonnes qu’on puisse imaginer est prometteuse en terme de dynamitage de codes, de satire au vitriol et de portrait désespéré de notre époque. Franchement, que demander de plus ?

* Les Voisins de mes voisins sont mes voisins d'Anne-Laure Daffis et Léo Marchand (Lardux Films)


Anne-Laure Daffis et Léo Marchand se lancent dans l’aventure du long métrage en « recyclant » certains de leurs anciens courts (La Saint festin, La vie sans truc...), réécrits et repensés pour s’intégrer dans un tout plus général. Comme dans un film choral traditionnel, quoi qu’à destination des enfants, les personnages (un ogre belge, un magicien qui a perdu les jambes de son assistante, un ingénieur en sudoku coincé dans l’ascenseur avec son chien qui parle...) se croisent et se répondent.

Les réalisateurs sont plus à la recherche de la cohérence que de la beauté, et citent notamment Le père Noël est une ordure en référence. Côté techniques, elles seront toutes mélangées, du collage à la prise de vue continue, en passant par la 3D ou l’animation traditionnelle.

Pourquoi on attend le film
Un long métrage qui devrait être joyeux et foutraque, si l’on en juge par l’existant !

* Le Voyage extraordinaire de Marona d'Anca Damian (Aparte Film, Sacrebleu Productions, Minds meet)


Autre film très attendu, le nouveau long métrage d’Anca Damian (Le voyage de M. Crulic, La montagne magique) s’annonce comme une fresque virtuose et intense portée par l’incroyable inventivité de sa réalisatrice. Le film est raconté à la première personne par son héroïne, une petite chienne qui a connu plusieurs foyers. Il mêlera différentes techniques (2D, 3D, cut-out) et proposera une identité visuelle propre à chacune des trois parties.

On a déjà pu voir quelques extraits du film (attendu pour janvier 2019) qui témoignent de la richesse des univers imaginés par Anca Damian dans une profusion d'inventions visuelles et de propositions formelles. L'une des séquences est notamment un hommage à 2001 Odyssée de l'espace, avec la petite chienne flottant au milieu de la profusion de crêpes fabriquées par son maître.

Pourquoi on attend le film
C'est une oeuvre ambitieuse qui met la barre très haut en terme d'expérimentation formelle, tout en s'adressant à un public familial élargi. Soit la définition de ce que devrait être l'animation jeune public.

* White plastic Sky de Tibor Banoczki et Sarolta Szabo (paprika Films, Salto Film, Artichoke)


Voilà un projet ambitieux et atypique que l’on rêve absolument de voir aboutir : un récit de science fiction sombre et follement romantique qui se déroule dans un univers post-apocalyptique magnifiquement transposé à l’écran dans des décors arides et désolés. En 2220, la terre est devenue infertile, les survivants vivent sous un gigantesque dôme de plastique, et les plantes doivent être cultivées dans des corps humains vivants.

Le couple de personnages principaux s’interroge sur le sens que la vie peut encore avoir dans ces conditions, et se lance dans un road movie en forme de course contre la montre pour sauver la jeune femme, à qui des plantes ont déjà été implantées. Un film qui se veut dans la lignée des grands récits de science fiction sombres et pessimistes sur l’avenir de l’Humanité. Le duo de réalisateurs cherche ainsi à s’inscrire dans la lignée de films tels que Les fils de l’homme pour le contexte, Valse avec Bashir pour l’esthétique (le film utilisera la rotoscopie) et On body and soul pour la formidable histoire d’amour qui unit les personnages principaux.

Pourquoi on attend le film
Les récits de science fiction qui n’hésitent pas à explorer les recoins les plus sombres de l’humanité sont si rares que l’on adhère sans hésiter à ce projet torturé et audacieux.

* Yuku et la fleur de l’Himalaya d'Arnaud Demuynck et Rémi Durin (La boîte,... Productions, Les films du Nord, Nadasdy Films)


Encore au stade du concept, ce projet musical destiné aux plus jeunes est porté par la même équipe artistique que celle qui avait réalisé Le parfum de la carotte. On y suit une famille de souris dont l’héroïne a des pouvoirs musicaux magiques. La partie musicale est déjà conçue, avec des chansons qui devraient faire un carton dans les cours de maternelle, comme le swing de l’écureuil amnésique ou le slam du lièvre bègue.

Pourquoi on attend le film
Avec le très beau duo Arnaud Demuynck (Le vent dans les roseaux, Sous un coin de ciel bleu) / Rémi Durin (De si près, La Licorne...)  à sa tête, le film bénéficie d’emblée d’une longue expérience dans une forme de cinéma jeune public intelligent et audacieux. On est forcément curieux de voir comment leur univers peut s’épanouir sur un format long.

Cartoon Movie 2018 : les films attendus prochainement sur grand écran

Posté par MpM, le 13 mars 2018

Parmi les soixante projets présentés lors de cette 20e édition du Cartoon Movie, sept sont terminés et n'attendent plus que de rencontrer leur public, au cinéma ou dans de grands festivals internationaux.

Trois d'entre eux ont même déjà une date de sortie en France : Croc-Blanc d'Alexandre Espigares (28 mars), Léo et les Extra-terrestres de Christoph Lauenstein et Wolfgang Lauenstein (9 mai) et Parvana (The Breadwinner) de Nora Twomey (27 juin).

Par ailleurs, Captain Morten and the spider queen de Kaspar Jancis est attendu en Estonie pour le 30 août tandis que Hodja and the magic carpet de Karsten Kiilerich est sorti dans son pays d'origine, le Danemark, le 8 février dernier.

Restent deux films, non encore datés, qui pourraient tout à fait avoir les honneurs d'un Festival comme Cannes ou Venise : Another day of life de Raúl de la Fuente et Damian Nenow et Chris the Swiss de Anja Kofmel. Ce sont ceux-là qui ont plus particulièrement attiré notre attention, et dont nous avons eu envie de vous parler plus précisément.

Another day of life de Raúl de la Fuente et Damian Nenow

Présenté pour la première fois au Cartoon Movie en 2012, Another day of Life est l’un des longs métrages d’animation les plus attendus par les connaisseurs. Il s’agit de l’adaptation dans une forme hybride (animation, images d’archives, témoignages) du livre de Ryszard Kapuscinski, reporter de guerre pris dans la guerre civile en Angola.

Cette année, à Bordeaux, on a pu découvrir 4 séquences du film terminé. La première contextualise le récit : alors que l’Angola recouvre son indépendance, deux factions se font face (MPLA et UNITA). Kapuscinski implore les autorités de le laisser rejoindre la ligne de front. C’est l’occasion de dépeindre l’effervescence de la capitale, pleine de bruits et d’animation, au milieu des voitures, des piétons apeurés et des rumeurs les plus folles.

Le deuxième extrait nous place au cœur de la guerre dans une séquence impressionnante de combat sanglant. Le reporter et son acolyte sont pris au milieu du feu nourri des deux camps, et font la connaissance de Carlota, égérie du MPLA, le mouvement populaire de libération de l'Angola.

Il est encore question de Carlota dans l’extrait suivant, situé dans un camp du MPLA. Cette guerrière acharnée force l’admiration des deux hommes qui l’observent. Le film embraye alors sur des images d’archives de la véritable Carlota, ainsi que sur un témoignage actuel, face caméra. Le film mêle ainsi les souvenirs subjectifs du personnage principal, la réalité captée à l’époque, et un regard plus « explicatif » sur les événements de l’époque.

Dans le dernier extrait montré au Cartoon Movie, Ryszard Kapuscinski brave tous les dangers pour rallier le camp d'un responsable de la guérilla. Sur la route, il se laisse aller à une rêverie qui donne lieu à une séquence extrêmement onirique, dans des tons bleutés, qui trahit les angoisses du personnage. C'est un moment à la fois suspendu, et de grande tension, car la voiture est violemment attaquée.

A la vue de ces quelques images, on a évidemment très envie de découvrir le film. Peut-être à Cannes, où il ne déparerait pas, soit dans une section toujours engagée en faveur d'un cinéma singulier comme la Semaine de la critique, soit carrément en compétition officielle, où le cinéma d'animation politique, ou évoquant des faits réels, connut autrefois de beaux jours.

Chris the Swiss de Anja Kofmel

Tourné dans un somptueux noir et blanc ultra-contrasté, Chris the Swiss mêle film documentaire et images d'archives pour raconter l'histoire vraie de Chris, un reporter de guerre suisse retrouvé mort en Croatie en janvier 1992, après avoir rejoint une milice internationale d'extrême droite impliquée à la fois dans la guerre en Yougoslavie et dans des trafics de toutes sortes.

Anja Kofmel est la cousine de Chris. Elle propose à travers le film une véritable enquête sur ce qui est arrivé au jeune homme, pris dans un conflit terrible qui l'a peu à peu englouti. A-t-il délibérément rejoint le "First International Platoon of Volunteers" (PIV) ou l'a-t-il infiltré dans le but d'en dénoncer les pratiques ? Et surtout, qui est responsable de sa mort ?

Le film est une plongée brutale dans le contexte de cette guerre sanglante en même temps qu'une enquête intime et personnelle pour comprendre ce qui est, réellement, arrivé à Chris. Anja Kofmel se met en scène, ainsi que certains membres de sa famille qui dressent un portrait de Chris. En parallèle, on suit le jeune homme en Yougoslavie, au contact de ceux qui l'entraîneront dans le PIV.

L'animation joue sur les nuances de gris et les ombres, rendant palpable la confusion et l'ambivalence qui règnent alors dans le pays. L'une des séquences montrée lors du Cartoon movie met également en valeur le travail réalisé par la réalisatrice sur les figures géométriques, notamment dans une scène se déroulant en forêt, inquiétante et anxiogène.

C'est un projet extrêmement ambitieux que propose Anja Kofmel, et on hâte de pouvoir le découvrir dans sa continuité. Lui aussi pourrait avoir les honneurs de la croisette, en raison à la fois de son sujet extrêmement fort et de son esthétique singulière. Un pari de la part de la réalisatrice comme des producteurs, que l'on aimerait voir récompensé en retour par un peu d'audace de la part des sélectionneurs...

Le Cartoon Movie de Bordeaux met le long métrage d’animation à l’honneur

Posté par MpM, le 8 mars 2018

Cartoon Movie, le rendez-vous européen des professionnels du film d'animation créé en 1999 avec le soutien de Creative Europe - MEDIA, est de retour à Bordeaux pour sa 20e édition. Entre le jeudi 8 et le vendredi 9 mars, ce sont 60 projets en provenance de 22 pays, dont 20 films produits ou coproduits par la France, qui seront présentés devant environ 900 professionnels de l'animation : producteurs, investisseurs, distributeurs, agents de vente, sociétés de jeux vidéos ou encore new media players dans le but d'établir coopérations et coproductions.

Les comédies familiales et films d'aventures pour enfants ont toujours la cote, puisqu'ils représentent 46 des 60 films présents, ce qui laisse malgré tout presque un quart des projets destinés à un public adulte ou adolescent. Vingt et un films sont encore à l’état de concept, six sont en cours de production, 26 sont en cours de développement et sept sont terminés, parmi lesquels Croc-blanc d'Alexandre Espigares qui sortira en salles le 28 mars prochain. Tous cherchent à accélérer le montage financier du projet, nouer des coproductions et coopérations transfrontalières ou simplement intéresser des distributeurs européens et internationaux.

Sont notamment attendus les nouveaux projets d'Alberto Vazquez (Psiconautas, Decorado), Jean-François Laguionie (Louise en hiver, Le Tableau) et Anca Damian (La montagne magique, Crulic), mais aussi l'adaptation par Lorenzo Mattotti du roman jeunesse de Dino Buzzati La fameuse invasion de la Sicile par les Ours, celle d'Allah n'est pas obligé d'Ahmadou Kourouma par Zaven Najjar ou encore celle de Dans la forêt sombre et mystérieuse de Winshluss alias Vincent Paronnaud par l'auteur lui-même et son complice Alexis Ducord.

Sur le papier, on est impatient et curieux de découvrir les longs métrages d'animation qui nous feront rêver dans les années à venir. En pratique, certains ne verront peut-être jamais le jour, ou seront de retour au Cartoon Movie l'année prochaine dans l'attente de passer une nouvelle étape de production. De quoi nous rappeler que l'animation est parfois un travail de très longue haleine (l'un des films  en développement présenté cette année, Kara de Sinem Sakaoglu, avait déjà fait l'objet d'un pitch au Cartoon Movie de 2013, et Croc-Blanc d'Alexandre Espigares y avait vu le jour en... 2006) et surtout un parcours du combattant rendu plus ardu par la potentielle frilosité des décideurs et l'incertitude de l'accueil en salles.

Il faudrait, pour continuer demain à découvrir au cinéma des longs métrages d'animation singuliers et audacieux, commencer par aller voir ceux qui sortent aujourd'hui, et montrer l'adhésion d'une part non négligeable du public à des oeuvres non formatées, voire exigeantes, qui s'adressent à des spectateurs adultes, ou font assez confiance aux enfants pour leur proposer des projets intelligents et éclectiques. C'est un début, mais il a le mérite d'être à la portée de tous.

Cartoon Forum 2017 : une 28e édition qui a tenu ses promesses

Posté par MpM, le 17 septembre 2017

Beau succès pour la 28e édition du Cartoon Forum, rencontres professionnelles consacrées aux projets de séries animées pour la télévision, qui se tenait du 11 au 14 septembre à Toulouse. Marc Vandeweyer l'a confirmé lors de la conférence de presse de clôture, si le nombre de participants était stable par rapport à l'année précédente (environ 950 producteurs, investisseurs, diffuseurs, acheteurs et plateformes SVoD/VoD), les salles où étaient présentés les projets étaient elles plus remplies que d'habitude.

En tout, 82 projets provenant de 23 pays ont été présentés aux participants venant de 40 pays. D'après un communiqué officiel, les diffuseurs et investisseurs ont évalué le cartoon Forum 2017 comme "la meilleure édition en termes de qualité de projets avec une grande diversité de genres, contenus, graphismes et de publics". Et c'est vrai qu'on a vu tous les styles : animation adulte trash avec Chicken of the dead et La survie de l'espèce (adaptation de la bande dessinée chez Futuropolis), projets artistiques ambitieux avec Romantismes et Mr Passenger, séries classiques pour pré-ados avec Les quatre de Baker street (par Folivari, d'après la bande dessinée éditée par Vents d'Ouest) et Sol & Liv (un projet polonais inspiré de mythes et légendes slaves et scandinaves), mignonneries charmantes avec Botos Family (un projet sud-coréen d'animation de marionnettes de petits chats, ) et Zibilla (un spécial de 26 minutes autour d'une petite zébrelle ostracisée, par la réalisatrice Isabelle Favez)...

Au petit jeu des statistiques, on constate que c'est le projet Stinky dogs proposé par Dandeloo, Folivari et PANIQUE! qui a eu, de loin, le plus de succès auprès des professionnels. Il s'agit d'une adaptation des livres jeunesses de Colas Gutman et Marc Boutavant à l'Ecole des loisirs portée par les réalisateurs Vincent Patar et Stéphane Aubier. Il est suivi de près par L'odyssée de Shooom (dont nous vous parlions mercredi) de Picolo Pictures et Les culottées d'Agat Films & cie, l'adaptation par Sarah Saidan des livres de Pénélope Bagieu chez Gallimard (voir notre article).

Parmi les grandes tendances de cette 28e édition, on peut ainsi noter la prépondérance des projets d'adaptation (à ceux déjà cités, il faut notamment ajouter Akissi, d'après l'ouvrage de Marguerite Abouet et Mathieu Sapin chez Gallimard ainsi que Mister paper et Tatsu Nagata's weird and wonderful world dont nous vous parlions ici) et la maigre représentation des projets à destination d'un public adulte (seulement 6 projets cette année). Enfin, on a pu constater que très peu de séries jouaient la carte de récits feuilletonnants, les épisodes autonomes et indépendants étant majoritairement privilégiés, de même que les formats plutôt courts (autour de 10 minutes).

La grande question est désormais de savoir combien de ces projets verront effectivement le jour. En 27 éditions, 711 ont été financés pour un montant total de 2,5 milliards d’euros. Ce qui correspond à 37% des projets présentés, et 42% si l'on se focalise seulement sur les dix dernières années. Autant dire qu'on risque d'être déçus, et frustrés, de ne jamais découvrir sur petit écran certains de ces concepts, de ces personnages et de ces univers qui nous avaient charmés.