25 février 2011. 11 nominations et 3 récompenses à l'issue des 36e César : Des hommes et des dieux repart avec le titre de meilleur film, en plus de deux trophées pour Michael Lonsdale et la chef opérateur Caroline Champetier. L'année 2010 avait été celle des films porteur de foi (Un poison violent, Qui a envie d'être aimé?). le sacré séduisait en ces temps de crise (économique) et de doute (sur le pouvoir). Les Français avaient sans doute besoin d'une histoire de solidarité et de don de soi. Xavier Beauvois réalise un film dans l'air du temps, permettant la communion des 3,2 millions de spectateurs qui ont suivi les critiques souvent très favorables au film. Juste avant les César, le film est sorti, avec succès, en DVD, conjointement à la publication d'un livre sur le massacre de Thibérine.
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L’instant Court : Pixels, réalisé par Patrick Jean
Comme à Ecran Noir on aime vous faire partager nos découvertes, alors après le court-métrage Good morning Good afternoon Good night, réalisé par Pedro Becker, voici l’instant Court n° 51.
Il arrive, une ou deux fois dans l’année, que certains cinémas proposent en plus de la multitude des sorties hebdomadaires une affiche pas comme les autres : un programme de courts-métrages. C’est court mais bon, et les spectateurs peuvent à cette occasion découvrir des courts sur grand écran. Le dernier programme en date Logorama and co proposait 6 films dont le dénominateur commun était d'utiliser différentes techniques d'animation. Il y avait le célèbre Logorama (festival de Cannes 2009) qui a remporté l’Oscar 2010 du meilleur court-métrage et aussi le César (en 2011), L'Homme à la Gordini (produit en 2009 et également nommé aux Césars 2011) , Fard, La Vénus de Rabo, Rubika, et enfin Pixels. Si cette reconnaissance est un peu tardive (trois de ces courts ont été produits en 2009 !), mieux vaut tard que jamais.
Voila donc Pixels réalisé par Patrick Jean, une véritable pépite qui a fait le tour du monde. Ce court métrage produit en 2010 a récolté des récompenses presque partout où il est passé : du grand prix au festival d'Annecy 2011 à de nombreux prix du public ou du jury comme aux festivals de Trouville, Brest, Bordeaux, Madrid, New-York… Pour Patrick Jean « le fait est qu'avant internet, les voies de diffusion des courts étaient encore plus étroites. Maintenant, on a en gros internet pour le "grand public" et les festivals pour les professionnels et les passionnés. Je pense que les deux sont complémentaires. »
A cette occasion le réalisateur Patrick Jean nous commente l’expérience de Pixels où des créatures envahissent New-York :
Ecran Noir : Comment est arrivée l’idée de la destruction d’une ville réduite en pixels ?
Patrick Jean : Je voulais mettre en scène une perte d'informations progressive qui aboutirait à l'information la plus simple qui puisse exister : un bit (0 ou 1), représenté dans le film par le cube final. C'est issu d'une réflexion sur le numérique et l'effet qu'il a sur notre quotidien. En effet, ce qui fait la valeur d'une information, c'est sa rareté. En démultipliant l'information à l'infini, le numérique tue la rareté et donc aboutit à cette perte de valeur de l'information qui est représentée sous la forme d'une allégorie dans le court-métrage.
EN : Dans quelle mesure est-ce difficile de produire ce genre de court métrage, avec un univers de jeu vidéo qui pourrait peut-être limiter son public ?
PJ : Pixels a été produit par OneMoreProd, qui m'a trouvé le matériel et payé le billet d'avion pour New-York City. La suggestion de tourner à NYC, je la dois à Benjamin Darras, producteur du film. Le film était prévu pour être une bande-démo de réalisateur en fait. Et aussi pour le fun. Sinon, je pensais effectivement qu'il ne toucherait qu'un public limité, mais je me suis trompé ; étrangement, beaucoup de gens se sont reconnus là-dedans. Le fait est que tout le monde de nos jours est en rapport avec l'informatique à un moment ou un autre. C'est devenu impossible d'y échapper.
EN : Dans Pixels on voit en quelque sorte une révolution numérique devenir une invasion numérique, quel regard avez-vous sur d’autres films où l’informatique arrive au premier plan ?
PJ : Je suis un grand fan de Tron, l'original, c'est rare de voir un film aussi créatif graphiquement et narrativement parlant. J'ai aussi apprécié The last Starfighter en son temps. Toutefois, mon ambition avec ce court était de faire quelque chose qui se rapproche plus de Qui veut la peau de Roger Rabbit?, mais avec des pixels. C'est un film incroyable, avec 15 idées à la minute, et où aucun plan n'est de trop.
EN : Qu’en est-il d’une possible extrapolation du concept de Pixels dans le domaine du long-métrage cinéma ou du spot publicitaire ?
PJ : Il y a un petit peu de cette idée dans le clip de Madonna 4 minutes. Pour ce qui est du long-métrage, l'idée est de faire une sorte de Ghostbusters, où une équipe de nerds sauve le monde en combattant des personnages de jeu-vidéo qui l'envahissent.
EN : Le CNC va organiser une nouvelle opération ‘Le jour le plus Court’ le 21 décembre pour promouvoir le format court, avec une journée spéciale le 21 décembre, qu’en pensez-vous ?
- PJ : Le CNC, c'est génial d'avoir ça, mais trop d'auteurs en France se reposent dessus. Personnellement, je conseillerais plutôt aux jeunes auteurs de ne pas attendre d'hypothétiques subventions et de se mettre au boulot tout de suite. Mais j'ai conscience que tout le monde n'est pas autodidacte, donc c'est probablement un peu plus compliqué que ça...
Crédit photo : image modifiée, d’après un extrait du film Pixels.
Cannes 2011 : Qui est Anaïs Demoustier ?
Deux nominations aux César (meilleur espoir féminin en 2009 et 2011, battue respectivement par Déborah François et Leila Bekhti), le prix Romy Schneider il y a quelques semaines et maintenant un film en sélection à Cannes : ça y est, Anaïs Demoustier a pris son envol.
A même pas 24 ans, la jeune fille a pourtant déjà plus de dix ans de carrière derrière elle. Un premier film face à Michel Serrault en 2000 (Le monde de Marty), un rôle marquant face à Isabelle Huppert dans Le temps du loup (2003), des personnages secondaires dans plusieurs comédies (Le prix à payer, Hellphone), des apparitions à la télévision (P.J., Reporters...), elle tourne presque sans interruption pendant toute la décennie 2000.
Mais c'est dans Les grandes personnes d'Anna Novion (2008) qu'on la remarque vraiment. Mutine et rebelle, elle campe la fille adolescente d'un Jean-Pierre Darroussin surprotecteur et fait preuve d'un sens inné de la comédie. Instantanément, on retient son nom, son visage couvert de taches de rousseur, sa spontanéité naturelle.
Suit Sois sage de Juliette Garcias où elle incarne une jeune femme à la recherche de son amour perdu. Elle est aussi du casting en forme de portrait d'une génération de La belle personne de Christophe Honoré, aux côtés notamment de Grégoire Leprince-Ringuet et Léa Seydoux.
En 2010, elle retrouve cette dernière dans Belle Epine de Rebecca Zlotowski, mais c'est surtout dans D'amour et d'eau fraîche d’Isabelle Czajka qu'elle crève l'écran. Elle est Julie Bataille, une jeune fille surdiplômée qui est obligée d'accepter des petits boulots ingrats pour survivre. Une fois encore, elle brille par son naturel et sa vivacité, à la fois extrêmement mature et incroyablement fragile. Le César lui échappe une seconde fois (un peu injustement) mais cette fois c'est sûr, ce n'est que partie remise.
D'autant qu'Anaïs Demoustier semble n'avoir aucune envie de s'enfermer dans un style, ou un art. Depuis le début de l'année, elle est au théâtre dans Le problème de François Bégaudeau, mis en scène par Arnaud Meunier. Et à Cannes, donc, dans Les neiges du Kilimandjaro. L'occasion pour elle d'intégrer la "famille" Guédiguian et de revenir (par le grand escalier) dans ce festival qui l'a propulsée sur le devant de la scène. Tout ce qu'on peut lui souhaiter, c'est d'en repartir avec un prix d'interprétation sous le bras, enfin.
Après Le nom des gens, Michel Leclerc lance Télé-gaucho avec Sara Forestier et Eric Elmosnino
Un succès à la Semaine de la critique l'an dernier à Cannes, 800 000 spectateurs dans les salles, deux César (meilleure actrice et meilleur scénario original) : Le nom des gens aura marqué les esprits, et pas seulement à cause de la présence de l'ancien premier ministre Lionel Jospin au générique. Autant dire que dorénavant le scénariste et réalisateur Michel Leclerc a le vent en poupe.
Il n'a eu aucun mal à réunir les deux césarisés de l'année : son actrice fétiche, Sara Forestier, et le Gainsbourg de Joann Sfar, Eric Elmosnino pour Télé-gaucho, co-écrit avec Thomas Lilti (réalisateur de Les yeux bandés). Le casting se compose aussi d'Emmanuelle Béart, qui revient à la comédie, Maïwenn et l'une des révélations de LOL, Félix Moati.
Le film a été écrit avant le scénario du Nom des gens. Le tournage débutera fin juillet.
Retour sur les Independent Spirit awards
Pris entre les feux croisés des Césars (le vendredi) et des Oscars (le dimanche), les Independent Spirit awards qui se déroulaient le week-end dernier sont légèrement passés inaperçus. Pourtant, ces prix du cinéma américain indépendant permettent d'imaginer une version alternative du paysage cinématographique 2010, en cantonnant notamment Le discours d'un roi (qui a trusté les Oscars les plus prestigieux) à l'unique catégorie du meilleur film étranger (prix qu'il a bien sûr remporté haut la main).
Privé de de cet imbattable concurrent, c'est ainsi Black swan qui a tiré son épingle du jeu. Quand seule Natalie Portman avait trouvé grâce aux yeux de la vénérable académie, le thriller classieux de Darren Aronofsky a été couronné quatre fois : meilleur film, meilleure image, meilleur réalisateur et meilleure actrice (pour Natalie Portman encore).
James Franco a lui été sacré meilleur acteur pour sa performance époustouflante dans 127 heures de Danny Boyle tandis que deux acteurs de Winter's bone (Dale Dickey et John Hawkes) remportent les prix d'interprétation dans un second rôle. Une petite consolation pour le très réussi film de Debra Granick, totalement boudé aux Oscars.
Finalement, même si les résultats diffèrent, nombreux étaient les films à être indifféremment nommés lors des deux cérémonies, à commencer par les films déjà cités, mais aussi Faites le mur de Bansky (meilleur documentaire) et Tout va bien! The kids are all right de Lisa Cholodenko (meilleur scénario). On peut y voir la preuve que le cinéma indépendant brille au firmament, mais aussi constater que même dans les milieux cinéphiles, l'attention se cristallise désormais autour d'un nombre de plus en plus réduit de films.
Cesar 2011 : audience historique, cérémonie académique
Après une édition 2010 assez catastrophique, les Cesar 2011 ont réalisé vendredi soir leur deuxième meilleure audience historique sur Canal+ en rassemblant 2,944 millions de téléspectateurs, soit une part d'audience de 14,5% sur la France contre 1,7 million de téléspectateurs et 9,1% de part d'audience l'an dernier. Le record date de 2005 avec 3,3 millions de téléspectateurs.
Et pourtant, cette soirée n'a pas brillé par son inventivité ou son rythme, s'essoufflant au bout de deux heures et souffrant de nombreux temps morts. Comme d'habitude, est-on tenté d'écrire, même si la cérémonie a semblé cette année tenter d'aller droit à l'essentiel. Antoine de Caunes a alterné vrais bons mots et piques faciles, Jodie Foster a été impeccable en maîtresse de cérémonie classe, Quentin Tarantino s'est un peu facilement réfugié derrière une émotion qui le laissait "sans mots"... Chez les remettants comme chez les lauréats, pas vraiment de coups d'éclat. On retiendra la pirouette inattendue de Sara Forestier qui a prétendu avoir interprété une "pute politique" dans Le nom des gens alors qu'à l'époque elle était vierge et n'y connaissait rien en politique (!), l'arrivée sur scène d'une Leïla Bekhti bouleversée (et empêtrée dans une incroyable robe, trop longue et trop décolletée), la bonhommie de Michael Lonsdale recevant son premier Cesar... C'est un peu comme si vrais jolis moments avaient alterné avec flottements et ennui.
Côté palmarès, on assiste pour une fois à une belle répartition des prix entre favoris et outsiders, chacun étant récompensé pour ses points forts, et non de manière systématique. Ainsi ne peut-on que se réjouir du César du meilleur espoir pour Edgar Ramirez qui crève l'écran dans Carlos, du meilleur acteur pour Eric Elmosnino qui campe un Gainsbourg plus vrai que nature, du meilleur scénario original pour Le nom des gens qui a fait l'effet d'une petite bouffée d'air frais dans le paysage cinématographique... Par ailleurs, Des hommes et des Dieux était en effet le film de l'année, et Roman Polanski a prouvé une nouvelle fois qu'il est un incroyable réalisateur, même "en taule".
Après on a le droit d'avoir des regrets : où est Tournée, qui était l'autre film-surprise de 2010 ? Tout le monde a salué la métamorphose de Laetitia Casta en Bardot mais elle est absente du palmarès. Catherine Deneuve était formidable en Potiche, et on peut trouver injuste de lui avoir préféré Sara Forestier... et ainsi de suite. Dans tout cela, il y a des éléments objectifs et une grosse part de subjectivité. Subjectivité partagée avec les votants, qui ont dû faire des choix.
Bien sûr le palmarès 2011 ne reflète-t-il pas toute la diversité du cinéma français, puisque de nombreux bons films en étaient exclus dès le départ, mais au moins tente-t-il de représenter, parmi les nommés, des courants variés et tous passionnants. Et en cela, il est déjà meilleur que certains autres.
Le 4e Prix Toscan du Plantier est décerné aux Films du Poisson
Le 4e Prix Toscan du Plantier a été décerné à Yaël Fogiel et Laetitia Gonzalez des Films du Poisson, les heureuses productrices de deux très jolis films français de 2010, L'arbre, de Julie Bertuccelli, et Tournée, de Mathieu Amalric.
Ce prix est décerné par un jury composé des artistes et techniciens nommés aux César ces trois dernières années, ainsi que des 45 membres de l'Assemblée Générale de l'Académie. Il peut être décerné à tout producteur (ice) ayant produit au moins deux films dont un sorti en 2010 et pouvant concourir au César du Meilleur Film, soit 158 personnes éligibles cette année.
Un signe d'encouragement à quelques jours des Césars, puisque l'Arbre et Tournée sont chacun nommé trois fois, dont meilleure actrice (Charlotte Gainsbourg), meilleur film (Tournée), meilleur réalisateur (Mathieu Amalric) et meilleure adaptation (Julie Bertuccelli).